Chapitre 17 : Dévoilement
Thélia ne le vit pas venir. La masse vociférante l'empoigna avec rudesse, écrasant ses épaules pour lui imprimer des secousses brutales. La panique tendit tout son corps. Puis le visage de son père lui apparut. Son haleine vineuse lui piquait les narines tandis qu'il lui fulminait au nez.
Tout juste sortie de cours, elle ne l'avait pas repéré parmi la circulation de passants et d'étudiants. Une impulsion défensive la parcourut. Sans rien saisir de ce qu'il articulait, elle émit une exclamation protestatrice et lutta contre l'étau de ses mains. Les dents serrées afin de les empêcher de claquer, elle poussa sur ses talons.
— Sale petit connasse ! s'égosillait Jiros. C'était ça que tu voulais ! Tu voulais qu'ils me retirent les aides, hein !
Thélia parvint à s'arracher à sa prise, mais son père effectua un mouvement malhabile pour la retenir et referma les doigts sur une poignée de ses mèches ondulées. D'un geste rageur, il tira sur sa chevelure. Elle poussa une plainte. Déjà, quelques étudiants se précipitaient au secours de la thaumaturge, exhortant son père à la relâcher. La figure congestionnée de fureur, il libéra ses cheveux, mais agrippa son bras.
— Tu vas pas me laisser comme ça, moi j'te le dit ! Tu me le dois, ce fric ! Tu me dois tout !
— Laisse-moi ! s'écria-t-elle.
— Laissez-là monsieur ! On va appeler la police !
Dès que les étudiants parvenaient à le détacher d'elle, il se débattait avec une violence d'ivrogne désensibilisé, les repoussant comme des mouches. Au-delà de tout raisonnement, il poursuivait Thélia, animé par une hargne aveugle. La respiration erratique, le cœur martelant ses côtes, elle grimaça sous les bourrades qu'il lui administra.
— Ingrate pourrie gâtée ! Tu préfères faire la coquette que de soutenir celui qui se saigne pour toi !
Les bras meurtris par les coups, Thélia titubait plus qu'elle ne reculait.
— Mais arrête ! s'époumona-t-elle, incapable de formuler une phrase cohérence, sa voix se brisant sur un hoquet.
Brusquement, un homme et une poignée d'étudiants parvinrent à empoigner Jiros. Ils le mirent à genoux tandis que d'autres attrapaient Thélia.
— Viens, vite, on s'en va ! l'enjoignit une fille.
Hébétée, la peau palpitante des commotions subies, elle se sauva avec eux. Dès que l'attroupement fut hors de vue, ils la firent asseoir sur un banc et la laissèrent reprendre son souffle. Thélia frotta son cuir chevelu, encore endolori.
— Ça va ? Il t'a pas fait mal ?
— Tu le connaissais ? Qu'est-ce qu'il te voulait ?
Elle répondit par la négative, peu désireuse de livrer ce pan de sa vie privée à des étrangers. Son père devait l'avoir guetté à la sortie de l'école, dans l'intention de lui réclamer de l'argent.
Il a mentionné les aides...
Les démarches administratives qu'elle avait effectué suite à son changement de situation professionnelle et financière avait dû se répercuter sur les prestations touchées par son père. Thélia pressa son front dans sa main. Combien de temps encore la poursuivrait-il ? Quels moyens allait-il imaginer ?
Une main sur son épaule la tira de son abattement. Les regards inquiets des jeunes autour d'elle la poussèrent à se remettre sur pied. Elle les remercia pour leur intervention, et dut refuser leurs propositions de l'accompagner pour porter plainte. Ils ne se décidèrent à se disperser que quand ils se furent assurés qu'elle s'était remise de l'incident.
Thélia vérifia l'heure. Elle avait perdu une bonne vingtaine de minutes, mais n'était pas encore en retard pour son rendez-vous avec Kaya et Nori, aussi leur envoya-t-elle une estimation de son heure d'arrivée. Elle hésita un instant à leur rapporter sa rencontre inopinée avec son père, puis se ravisa. La scène l'avait déjà suffisamment ébranlée, elle ne tenait pas à gâter ce moment de détente qu'elle s'octroyait.
La chute des feuilles fanées tapissait d'or les allées du parc. L'eau du lac rougeoyait du reflet des branches effleurant sa surface. Thélia trouva Nori et Kaya occupée à balayer la table à tréteau. La silhouette ailée de Setsuha se profila peu après, la blancheur de son plumage contrastant avec les teintes flamboyantes des alentours. Montée sur des bottes à talon, elle n'était couverte que d'un trench léger, dont les pans ondulaient sur ses cuisses au rythme de ses pas. Dès qu'elle se fut installée avec elles, Nori entreprit de distribuer les boissons encore chaudes.
— Tu crains pas le froid, toi, pas vrai ? devina Kaya en détaillant la tenue de l'hétairie.
Elle-même s'était emmitouflée dans un sweat zippé à capuche et un bomber oversize. Sous la lumière ambrée, sa chevelure luisait comme du bronze.
— Pas du tout, confirma Setsuha.
— Avec ton arété, forcément, constata Thélia.
Ce qu'elle lui confirma d'un acquiescement, avant de porter son gobelet à ses lèvres. La conversation s'établit autour des breuvages fumants. Setsuha questionna Kaya sur son domaine d'étude, et ne fut pas surprise d'apprendre qu'elle se destinait à une carrière de photographe. Lorsque l'esthésive lui retourna la question, la mention de son master de psychocriminologie suscita des mines interpelées et méditatives de la part des trois autres.
— Je comprends mieux comment tu en es arrivée à fréquenter la vedette de l'URIAA, déclara Nori.
— Je n'ai pas vraiment de lien avec l'URIAA, en fait. C'est lui qui est venu à un colloque auquel je participais. Mais je vais sans doute effectuer mon stage dans le milieu.
— Je vois, lâcha Kaya d'un ton qui faillit tirer une grimace à Thélia.
Sa proximité avec les Régulus devait l'inciter à une certaine méfiante envers tout ce qui se rattachait à l'URIAA. Setsuha tourna alors ses yeux d'encre vers la thaumaturge.
— Et toi, ta rentrée se passe bien ? L'institut international de la mode, c'est ça ?
— En bachelor de la mode et du design. Je voudrais m'orienter vers la haute couture, réaliser les tenues de scène, de gala, tout ça.
Impressionnées, Kaya et Setsuha lui décernèrent des encouragements enthousiastes.
— J'adorerais être ta cliente, lui glissa malicieusement l'hétairie.
Touchée, Thélia lui confia :
— Honnêtement, j'aimerais déjà te prendre comme modèle.
— Oh ! On pourrait étoffer mutuellement nos books ! s'exclama Kaya. Tu fais les tenues, Setsuha pose et je prends les photos.
— Il y a même moyen que vous montiez votre entreprise, en partant de là, renchérit Nori avec amusement.
Elles divaguèrent un moment sur un futur idéal dans lequel toutes les trois montaient un partenariat fructueux qui leur valait une renommée internationale, puis Thélia se tourna vers son employeuse :
— J'ai pas parlé du Lucent, mais ça veut pas dire que...
— T'inquiète, ma belle. Je sais que tu es que de passage chez moi.
Intriguée, Setsuha inclina la tête.
— Tu n'exerces vraiment plus comme hygiarche, maintenant ?
Nori dirigea vers elle son regard aux pupilles verticales, la figure impénétrable.
— Officiellement, non. Officieusement, pour une petite sélection de personnes, je peux le considérer. Autrement, tous les souffreteux friqués de Bryvas seraient à ma porte.
Setsuha hocha la tête, l'air d'adhérer à son raisonnement. Puis Nori ajouta, avec un signe de tête en direction des deux autres :
— Bon, vu leur propension à attirer les ennuis, celles-ci ont un pass, évidemment.
— Oh, faut pas, railla Kaya.
L'attention de Setsuha se reporta sur elle :
— Puisqu'on est sur le sujet, je suis désolée pour l'autre fois, à l'opéra.
— Désolée de ?
— J'étais juste à côté de toi et j'ai absolument rien fait quand ils t'ont emmenée. J'ai seulement prévenu Keitan dès que Rigel est parti, mais...
Kaya balaya ses excuses d'un geste de la main.
— Il y avait rien à faire, t'en fais pas pour ça. Merci d'avoir averti Adamer, déjà.
— En parlant d'Adamer, reprit Nori d'un ton indéchiffrable. Une Fukurõ de Becrux et un membre de l'URIAA, ce n'est pas anodin.
Un silence tomba sur la table suite à son inquisition soudain. Pourtant, Setsuha parut loin d'être décontenancée. Elle coula simplement un regard vers Thélia, qui plissa une moue penaude.
— Je leur ai parlé du festival.
Setsuha haussa les épaules.
— Notre relation n'est pas vraiment secrète. On veut simplement éviter de finir surexposés, alors on se montre pas trop en public. Et je suis de Becrux mais ma famille n'a jamais eu ce souci avec l'URIAA, si ça peut répondre à votre question.
Puisqu'elle ne semblait pas fermée au sujet, Kaya saisit l'occasion :
— Vous êtes ensemble depuis longtemps ?
— Quelques mois. C'est drôle, parce qu'on pensait pas que ça durerait jusque-là.
Cet aveu surprit Thélia.
— Ah bon ? Vous avez l'air proches, pourtant.
— Proches, oui. On se comprend très bien et j'ai beaucoup d'affection pour lui, leur exposa l'hétairie après avoir vidé le fond de son gobelet.
— Mais il manque l'étincelle, compléta Nori d'un timbre entendu.
Les bras croisés, Kaya résuma :
— Relation ouverte, alors ?
— On peut dire ça. Et toi ? Tu as quelqu'un ?
Stupéfaite, Thélia réalisa alors ce qu'elle ne faisait que soupçonner jusqu'à présent : Keitan n'avait absolument pas renseigné l'hétairie sur tout ce qui touchait de près ou de loin à Cineád. Un coup d'œil échangé avec Kaya lui confirma qu'elles partageaient les mêmes réflexions.
— Pas vraiment, lâcha celle-ci.
Tandis que Setsuha haussait un sourcil, Nori émit un ricanement :
— Disons qu'il y a une raison pour laquelle la miss est revenue saine et sauve de la prise d'otage.
La confusion se peignit sur le visage de Setsuha.
— Le Charlatan ?
— Cineád, avoua Kaya.
— J'ai pas envie de me montrer intrusive, mais je me pose des questions.
— T'inquiète, je m'en pose aussi.
Setsuha demeura silencieuse, afin de la laisser élaborer. Tout dans son attitude et son langage rendait extrêmement facile de lui parler, remarqua Thélia. Le réconfort paisible qu'elle dégageait invitait à se confier. Kaya n'y fut pas insensible, car elle reprit avec un soupir :
— Pour la faire très courte, je le connais pas comme un criminel de Rigel. Pas seulement.
Sa voix s'érailla à ces mots, comme si elle évacuait un poids en les prononçant. Thélia sentit son cœur se serrer de sympathie à l'entente des sentiments de Kaya, et du fardeau dont ils s'accompagnaient.
— C'est naturel, lui dit doucement Setsuha. « Criminel » est une étiquette qui a tendance à déshumaniser ceux qui la portent. Alors quand on est confronté à l'humain à la place, on peut difficilement l'occulter.
— Comme pour les flics ou les célébrités, fit observer Nori à mi-voix.
L'hétairie acquiesça. La sonnerie de son portable s'échappa de son sac à main. Elle le tira machinalement et s'absorba un instant dans le message qu'elle tapa. Mordillant sa lèvre inférieure avec préoccupation, elle releva les yeux vers elles.
— C'est Keitan, justement. On devait se voir plus tard dans la journée, mais il a eu un changement d'organisation. Ça vous dérange s'il me rejoint ici ?
✧ ✧ ✧
En contrebas, les ramures des arbres semblaient un poudroiement de rouille baigné par une vapeur d'or limpide. Keitan amorça sa descente, pour atterrir dans un tourbillon de feuilles mortes, non loin de la tablée féminine. Les senteurs d'humus et d'écorce ensoleillée lui emplirent aussitôt les narines.
Lorsque, au cours de leur échange, Setsuha avait mentionné qu'elle avait prévu de retrouver Thélia et l'esthésive pour un café, il y avait vu une opportunité qu'il s'était empressé de saisir. La question de la fratrie Terebros demeurait depuis trop longtemps en suspens, il n'allait pas laisser passer l'occasion d'investiguer le sujet. La présence de Thélia et Setsuha constituait la couverture idéale pour approcher l'aînée sans alarmer Cineád.
Tout sourire fringuant et œil badin, il vint déposer un baiser fugace sur les lèvres de Setsuha, puis salua le reste du trio :
— Hey Thélia ! Terebros, enchanté. Et, Madame Saan.
— Nori fera l'affaire, lui dit la femme au visage reptilien encadré de locs.
Il hocha la tête, avant de se laisser tomber sur l'espace libre auprès de Thélia. La chevelure de cette dernière arborait pour l'heure un indigo resplendissant, attestant de sa tranquillité d'esprit. Keitan se réjouit intérieurement de sa mine fraîche et de sa posture sereine. Quoique le bleu de ses mèches pâlit quelque peu, signe qu'elle était moins tranquille depuis son arrivée.
D'un seul regard, il sonda l'atmosphère autour de la table. Face à eux, Terebros s'était tendue, une ombre de défiance assombrissant ses yeux. La dirigeante du Lucent, quant à elle, s'avérait plus hermétique. Pas le moindre tressaillement musculaire, tique de la paupière ou altération de sa respiration. Rien que cette immobilité parfaite de boa aux aguets.
Même Setsuha s'était redressée, iris noirs passant de l'esthésive à lui, le frémissement de ses ailes trahissant son léger inconfort. Interpellé, Keitan devina qu'elle était désormais au fait de la connexion entre Terebros et Cineád.
— Alors, reprit-il pour confronter le silence tombé sur la tablée. Je pense que c'est mieux pour tout le monde si je fais pas semblant d'ignorer le dénominateur commun, ici.
À côté de lui, Thélia masqua son front d'une main, tête baissée, ce qui faillit le faire pouffer. Terebros émit un reniflement rétif, tout en tripotant son gobelet.
— Et pour qu'on soit au clair, répliqua Nori. Le fameux dénominateur commun, ce n'est pas Fukurõ.
Il adressa une mimique d'excuse à l'intention de cette dernière, avant de reprendre d'un air dégagé :
— Malheureusement, je faisais plutôt référence au rattachement à un certain membre de Rigel.
— Ça dépend de ce que tu veux dire par « rattachement », grogna Terebros, de toute évidence peu ouverte à la discussion.
Keitan tourna vers elle un regard sagace.
— Pourquoi ? Tu le définis plutôt comme une coercition ? Ou une affinité ?
Il fut surpris de sentir la main de Thélia tirer l'extrémité de sa veste sous la table, en guise d'avertissement. La figure de l'esthésive se durcit. Les yeux plantés dans les siens, elle riposta :
— Ma relation avec Cineád ne concerne que moi, tant que t'as pas clarifié la tienne, vedette.
Il avait presque l'impression d'entendre le pyrocien. Pire, la façon dont elle prononçait le nom de Cineád était bien plus éloquente que ce qu'elle taisait. Car elle le formulait non pas avec crainte ou antipathie, mais avec une volonté protectrice. Avec familiarité. Comme pour le défendre de lui.
Keitan prit une seconde pour assimiler ce que cela signifiait. Il savait que Cineád avait ses raisons de tenir à l'esthésive. Or, jusqu'à présent, il ignorait que celles-ci étaient réciproques.
Setsuha avait tourné la tête vers lui, le regard interrogateur et pensif. Tel qu'il la connaissait, elle devait déjà relier son implication avec Cineád et son affiliation à l'URIAA. Ce qui faisait désormais d'elle la plus proche de la vérité.
— Ah..., lâcha-t-il, puisque Terebros mettait le doigt en plein sur le plus épineux du problème. Je suppose que vous êtes toutes bien placées pour savoir que la réalité ne se réduit pas au principe dualiste de Constellation et brigade anti-asters.
— Effectivement, concéda Nori.
— Disons que Cineád et moi avons trouvé une entente mutuellement bénéfique. Parfois, il faut pactiser avec le diable, comme on dit, et un Aster de l'URIAA est tout désigné pour en endosser la responsabilité.
Ainsi, il dissimulait son véritable objectif sous une demi-vérité. Sans prétendre être un parjure, ni un infiltré, il leur laissait croire qu'il ne s'agissait que d'un marché officieux entre deux partis, dont il était l'intermédiaire.
— Dans l'intérêt commun, conclut Setsuha.
Keitan la connaissait trop pour ignorer qu'elle l'appuyait délibérément. Une onde de gratitude le traversa.
— C'est ça !
Les trois autres parurent se satisfaire de cette explication, mais il n'en conçut qu'une maigre satisfaction. L'échange lui donnait envie de se frotter le visage de lassitude. Leur bande s'annonçait problématique. Il n'avait aucun moyen d'influer sur les connexions qu'elles établissaient entre elles, et sur l'information qui y circulerait.
✧ ✧ ✧
Le pistolet factice vibrait dans la paume de Basile. Sa croix de visée se déplaçait à l'écran, ciblant les figures qui surgissaient dans des cris. Des bruitages de coups de feu et douilles crachées accompagnaient chaque pression de son index sur la détente. La partie prit abruptement fin quand le temps imparti fut écoulé, et son score apparut dans un encadré clignotant. Il consulta d'un œil désintéressé sa position dans le classement, avant de reposer la manette sur son socle.
Avec un soupir, le garçon s'éloigna de la borne et se fraya un chemin sur l'allée tapissée de damier. Autour de lui, des hordes d'adolescents sortis de cours s'excitaient sur les appareils de la salle d'arcade. Pratiquement collé à la table de hockey à air, coude à coude avec sa coéquipière, Gale s'acharnait à glisser son poussoir sur la surface réfléchissante.
Basile joua des coudes pour s'enfoncer dans l'attroupement bruyant de leurs camarades, les tympans assaillis par les acclamations lancées aux joueurs, jusqu'à parvenir derrière l'épaule de son jumeau.
— On y va, maintenant ? dut-il crier à son oreille pour se faire entendre.
— Attends ! Je finis juste cette partie !
— C'est ce que t'as dit y a quinze minutes !
Trop absorbé dans la course frénétique du palet sur la table, Gale en oublia de lui répondre, si bien qu'il dut insister une nouvelle fois :
— Gatou !
— Mais pourquoi tu veux déjà partir ?
Parce que Gale se faisait accaparer par les autres collégiens. Parce que, manifestement, celui-ci leur suffisait et qu'ils ne se souciaient pas beaucoup de son frère. Parce que, quand bien même on soulignait à tout bout de champ leur ressemblance frappante, Basile ne possédait pas l'aisance de son jumeau en matière de sociabilité.
— Fais ce que tu veux, alors ! rouspéta-t-il. Moi j'vais voir Fahrenheit !
Sans attendre de réponse, il tourna les talons et s'arracha à l'entassement. Il n'avait pas fait trois pas que Gale le rattrapait, essoufflé par sa partie, ses épis moites de transpiration.
— Tu vas vraiment au squat ?
— Oui.
— Je viens aussi !
Basile retint un sourire de triomphe. Ça n'avait pas été son intention initiale, mais à présent, il était bien décidé à s'y rendre. Ils n'avaient plus visité le pyrocien depuis le raid. L'attaque contre Belel et la blessure qu'Isaac y avait écopé les avait un moment dissuadés de l'approcher à nouveau.
Néanmoins, eux n'avaient toujours été que protégés par le squatteur, et Kaya s'était tirée sans une égratignure de la prise d'otage grâce à lui. La tentation de retourner chercher la compagnie de Cineád les avait bien vite démangés de plus belle.
Ils récupérèrent leurs sacs balancés dans un coin, puis sortirent dans le jour déclinant de cette fin d'après-midi. Tous deux coururent à toutes jambes sur le trajet, se coursant à travers les rues, jusqu'à enfiler une ruelle sillonnant entre les palissades des maisons du bloc.
Une ombre s'abattit tout à coup en travers du passage. La forme se redressa, fumeuse et niellé d'or et d'améthyste, le regard réduit à deux fentes d'un violet étincelant. Aussitôt alarmés, ils pilèrent net, hors d'haleine. Basile fit volte-face, agrippant son jumeau par la veste, mais une seconde figure s'avançait dans la ruelle.
Un jeune homme au teint blanc d'os, aux yeux froids, habillé de cachemire gris. D'énormes papillons noirs voletaient autour de lui.
Nouvelle discussion entre les filles (parce qu'ici ça communique, on a dit)... à laquelle Keitan s'incruste !
Qu'est-ce que vous pensez de cette première rencontre Kaya/Keitan ?
Et puis le retour des jumeaux et des problèmes !
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