▌ 𝗣𝗟𝗔𝗡𝗤𝗨𝗘 𝗗𝗘𝗦 𝗖𝗛𝗥𝗢𝗠𝗔𝗧𝗜𝗖𝗔, 𝗞𝗔𝗡𝗨𝗞𝗜. 06/12. 21:03.▌

Le fait de réussir à perdre des heures en contemplant le vide n'était pas donné à tous, parce que plupart des gens préféraient ne pas gâcher leur temps en vain. Et pourtant, maints et maints effets salutaires finissaient par apparaitre, au fur et à mesure des secondes s'écoulant. Un plan machiavélique pour détruire la population, ou tout simplement des améliorations à apporter dans une recette de cuisine ; les pensées recelaient d'abondantes facettes délicates à partager avec autrui.

C'était couramment qu'un tel passetemps menait Red à ne pas sortir de sa chambre. Ce comportement était trop fréquent pour son bien, mais personne n'aurait osé lui faire la remarque, de toute façon.

Douze heures étaient passées depuis l'enlèvement. Le criminel n'avait pas pris la peine de visiter la salle de stockage depuis lors, et comme les caméras lui montraient que Cyan s'y faufilait toutes les heures, s'inquiéter devenait moins instinctif. Si elle n'avait pas daigné le faire, il était certain qu'il aurait pris la peine de demander à quelqu'un d'autre de s'en occuper.

Il rêvait de se débarrasser de ce poids, mais pour l'instant, c'était impossible.

La haine qu'il ressentait envers cet enfant n'était pas aussi grande que celle qui faisait bouillonner ses veines dès qu'on mentionnait sa mère. En réalité, ce qui le poussait à vouloir la détruire était imprécis, et indéniablement biaisé. Son but n'avait jamais été aussi flou. Néanmoins, les convictions qui avaient été encrées à l'intérieur de sa tête n'étaient pas prêtes à être brisées ; lui faire ressentir tout l'affolement qui l'avait assailli durant ces années devenait à présent essentiel.

─ Tsukishima ?

Avec un diadème reluisant épinglé à sa chevelure opaline, des paupières tapissées de petites nacres argentées, White paraissait tout aussi irréelle qu'à son habitude. La longue robe immaculée qu'elle portait ne faisait que renforcer cette impression. Chaque tatouage présent sur son visage s'anima lorsque ses fines lèvres rosées s'étirèrent en un sourire, et l'homme ne put, par malheur, retenir l'animosité qui emplit ses sens.

─ J'ai décidé de changer quelques détails dans notre plan, déclara-t-elle en s'avançant jusqu'à lui.

Ses mots firent naitre une grimace sur les traits de son visage. Lorsqu'elle vint prendre place à ses côtés, un sentiment indescriptible rempli de répugnance lui tordit les entrailles. Tout ça – cette haine - était nouveau, et une petite partie de lui regrettait de ne pas avoir remarqué plus tôt à quel point cette femme l'utilisait. Au départ, elle avait tout simplement adhéré à ses envies sans plus de retenue. Par la suite étaient également arrivés les nombreuses relations charnelles, les baisers fiévreux et les promesses d'un monde nouveau.

Il s'était laissé séduire par ses idéaux destructeurs.

─ Quels détails ? De quoi tu parles ?

─ Tu comprendras au moment voulu. (Le silence qui suivit ses paroles fut si long que Red manqua de se lever pour quitter la pièce.) Comment est-ce que le garçon se porte ?

─ Je sais pas, et je m'en fous. J'ai juste fait ce que tu m'as dit de faire. De base, je voulais juste le tuer sans faire d'histoire.

Le vilain l'écrasa du regard sans se soucier de paraitre déplacé.

─ Tu sais bien que ce n'est pas aussi facile.

Il voulut lui dire que c'était elle qui trouvait toujours un moyen de compliquer les choses, avant de se raviser sur-le-champ. Depuis des semaines, la rage montait souvent sans qu'il ne s'en rende compte ; des choses injustifiables avaient été commises, et ce n'était qu'à présent que le poids de ses péchés lui pesait. La vérité avait été cachée durant un moment, puisqu'avouer qu'il avait été manipulé était bien trop délicat pour lui.

─ Et pourquoi tu as utilisé ton putain d'Alter sur moi ? (Red promena un regard haineux sur son alliée.) Ton virus de merde, là. Tu m'avais dit que j'allais être épargné, Saeko. Tu m'as menti !

─ C'est normal de ressentir les différents symptômes si tu as déjà péché. J'ai forcé les autorités locales à contaminer l'eau de la ville, donc toutes les personnes instables seront touchées, d'une manière ou d'une autre. Mais je ne vais pas te contrôler comme les autres, Tsukishima. Je te le jure.

Un soupir franchit la paroi de ses lèvres et vint résonner dans la petite chambre. Red voulait lui faire confiance aveuglément sans savoir pourquoi, et il se doutait que c'était dû aux effets de son Alter. Il voulait lui trancher la gorge, plus que tout au monde. Néanmoins, lui désobéir paraissait impensable, comme si cela lui couterait une partie de son âme. S'il perdait le reste de son humanité, c'était sans doute qu'il finirait par dépérir.

─ C'est la dernière fois que je te fais confiance, Saeko. Je ne sais pas ce qui me force à le faire, mais...

─ Mais quoi, mon petit Red ?

─ Je te jure que si tu m'as menti, je vais te tuer, murmura-t-il alors que son regard fou se plantait dans le sien. Je vais te broyer les membres si fort que tu n'auras plus la force de pleurer.

Un rictus moqueur se peignit sans tarder sur ses lèvres surmaquillées. La froideur au fond de ses iris, elle, transparut bien aisément. Dans l'impossibilité de contenir ses pensées, White répliqua.

─ Oh, tu me menaces ? (Son ton mordant le fit se tendre.) Le petit chaton sort les griffes ?

Sans même savoir ce qui se passait à l'intérieur de sa tête, Red put dire qu'elle ne prenait pas du tout ses paroles au sérieux. Il dut alors s'emparer de toute son énergie pour ne pas se jeter sur elle dans le but de mettre fin à ses jours. Rendu hargneux par la perspective d'être pris pour une bête inapte, le criminel s'agita exagérément sur son lit au moment où elle se leva pour quitter la pièce. L'avertissement lancé au moment où elle disparut le fit néanmoins se tendre.

─ C'est plutôt toi qui devrais avoir peur, vu ce qui va t'arriver.

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▌ 𝗦𝗘𝗡𝗧𝗜𝗘𝗥 𝗗𝗘𝗦 𝗗𝗔𝗠𝗜𝗘𝗥𝗦, 𝗞𝗔𝗡𝗨𝗞𝗜. 06/12. 22:30.▌

Les bottes d'Hina claquèrent sur les dalles fracassées du Sentier des Damiers. Fendant la foule comme si cela ne gênait personne, arpentant chaque recoin des bâtiments qui se trouvaient dans les alentours, la réparatrice agrémentait son chemin de hurlements destinés à son fils. La silhouette désordonnée à la démarche incertaine qui déambulait dans les rues depuis ce matin n'attirait plus aucun regard, à présent. Dès son arrivée dans le centre-ville, quelques passants s'étaient arrêtés pour lui demander ce qui n'allait pas, alertés par ses interminables cris. Mais tous étaient vite parvenus à la même évidence : elle ne retrouverait pas son fils.

Les disparitions étaient fréquentes à Kanuki donc personne ne se posait plus de questions. Il suffisait de ne pas se trouver au mauvais endroit, au mauvais moment, même si c'était plus simple à dire qu'à faire. Les autorités locales avaient l'habitude d'étouffer toute affaire trop curieuse, par manque de temps et d'argent. C'était l'une des raisons pour lesquelles elle avait décidé de ne pas faire appel à la police, d'autant plus que cela lui aurait indubitablement porté préjudice.

Bientôt, elle s'engouffra dans le dédale de ruelles qui lui faisait face, profitant d'un instant de répit pour tenter à nouveau de contacter Hawks. S'il avait daigné ne pas ignorer ses appels, retrouver Yoshiki n'aurait pas été si rude. Une partie d'elle espérait sincèrement qu'il finirait par la recontacter, alerté par les nombreux appels manqués qu'elle lui avait laissés. Mais le contraste entre leurs deux mondes était bien trop creusé. C'était un héros. L'un des plus grands héros, d'ailleurs. Entretenir une relation saine avec quelqu'un comme lui n'était pas imaginable, surtout depuis que sa destinée avait été bouleversée.

La petite bouche d'Hina se tordit en une grimace imprécise au moment où elle se rendit compte qu'elle était seule, terriblement seule. En parler à sa mère lui serait inutile, et la mettrait directement au courant de ses activités nocturnes. Contacter à la police reviendrait à se dénoncer. Et prévenir Daisuke était inenvisageable, puisqu'elle ne pouvait plus le joindre depuis un moment.

À vrai dire, elle n'avait incontestablement plus la force de réfléchir. Tout ce qu'elle désirait, c'était retrouver son fils et le serrer dans ses bras. Lui dire comment elle l'aimait. Lui expliquer à quel point elle était désolée d'être une si mauvaise mère. Lorsque l'entièreté de son corps se mit à trembler, Hina se jura qu'elle méritait tout ce qui lui arrivait. Si ses choix avaient été plus judicieux, rien de tout cela ne serait arrivé.

La drôle de sensation qui prit par la suite possession de ses entrailles la figea sur place. Toutefois, elle fit tout son possible pour enfourcher sa moto, et démarrer sans se soucier des tracas qui menaçaient de la faire exploser. Prise dans un élan de tristesse brusque, la rose accéléra tout d'un coup, faisant crachoter le pot d'échappement de l'appareil.

Sur la route principale menant aux usines encerclant la ville, les klaxons et bruits de moteurs lui parurent assourdis. La jeune femme observa les panneaux de signalisation défiler sans leur porter plus d'attention. Il ne lui aurait fallu que quelques secondes pour provoquer un malheur, quelques secondes pour perdre la vie. Mais elle ne s'en soucia pas plus que ça, parce que plus rien à part sauver son fils n'importait, à présent.

La route bourbeuse défila, alors que le chuintement des pneus sur le bitume résonnait tout autour d'elle. Tandis qu'Hina laissait les bâtiments filer sous ses yeux, enflammée d'une crainte plus affligeante qu'à l'accoutumée, le tintement d'un signal provenant de son poste de contrôle réussit à la tirer de ses pensées.

Quelques mèches s'échappèrent du chignon qu'elle s'était fait à la va-vite lorsqu'elle baissa la tête pour constater l'étendue des dégâts. Plus d'essence, comprit-elle, alors que ses poumons brulaient sous l'assaut qu'elle leur avait fait subir. Quand elle atteignit enfin une pompe à essence, son allure ne fut guère plus rectifiée qu'elle ne l'était auparavant. Les joues rougeoyantes, la peau tachée de mascara, les cheveux ébouriffés dans tous les sens, elle descendit enfin de la moto.

Avançant sans vraiment faire attention à ce qui se trouvait autour d'elle, les yeux bordés de larmes traitres, Hina souligna le moirage produit par les rayons du coucher de soleil. La pompe fut saisie sans perdre de temps, et bientôt, elle fut prête à repartir. D'un soupir, la jeune femme se prépara psychologiquement à démarrer. Mais l'attaque qui la propulsa soudain contre le mur du bâtiment l'empêcha de vaquer à ses occupations.

Cheveux rosâtres rendus tout humides par la blessure qui se forma sur son crâne, envahie par l'ahurissement, la réparatrice laissa vagabonder son regard sur les environs. Il ne lui fallut qu'une infime quantité de secondes pour repérer son assaillant. Encore une fois, rien n'aurait pu décrire l'horreur qu'elle ressentit en discernant l'amas de chair sanguinolente qui se trouvait face à elle. C'était l'un de ces monstres, de toute évidence, et la chair en décomposition tapissant l'entièreté de son corps ne lui fournit aucun doute supplémentaire.

─ Et merde !

Les mains tendues vers elle manquèrent de peu son avant-bras, et la roulade chaotique qui la projeta un peu plus loin lui permit heureusement d'échapper au pire. Effrayée par la perspective d'y passer, la jeune femme n'hésita pas : de petits éclairs chamarrés émergèrent de ses doigts et vinrent frapper de plein fouet l'atrocité. Sous la décharge impromptue qui eut l'effet escompté, la bête recula de quelques pas. Mais revint à l'assaut sans perdre une seule seconde dès qu'Hina se releva.

Prise d'une peur incontrôlable, les yeux écarquillés sous la pression qui menaçait de la faire chavirer, Hina tenta le tout pour le tout. D'un pas chancelant, elle se mit à courir jusqu'à sa moto tout en manquant presque de trébucher. Le tiraillement produit par la plaie s'étendit dans tout son corps, tandis que les palpitations vrillant ses entrailles l'empêchèrent d'effectuer le moindre mouvement brusque.

Ce n'était qu'une question de temps avant qu'elle atteigne ses limites.

Le contact fut rapidement mis. Détaillant durant un instant le cauchemar ambulant qui rampait lentement vers elle, aspirant à provoquer le plus de dégâts possible, Hina débraya sans tarder. Produit par le moteur de la machine, le bruit résonnant dans les alentours alerta quelques oiseaux qui ne tardèrent point à prendre leur envol. Un instant après, la jeune femme tendit la main vers le ciel et fila hors de la zone.

La pompe explosa dans un sinistre brasier au contact de la foudre. Faisant de son mieux pour retenir le guidon, se sentant projetée des mètres plus loin, Hina se hâta de prendre la fuite. Une grosse partie de ses vêtements fut réduite en cendres, alors qu'il semblait que ses oreilles ne parvenaient plus à relever le moindre bruit. Il lui fallut toute la retenue du monde pour ne pas fondre en larmes tant ses membres tremblèrent sous la frayeur. La réalisation de ce qu'il venait d'arriver s'imposa d'un coup, tranchante comme une lame.

Continuer à avancer semblait être la seule issue, désormais.

Avec toutes ses dernières volontés, elle continua sa route. Elle roula si vite qu'elle manqua de peu l'accident. L'odeur ignoble et nauséabonde de l'incendie lui collait à la peau, et c'était comme si l'épiderme éraflé du zombie l'effleurait continuellement.

Pourquoi un monstre trainait-il dans les environs ? Et surtout, pourquoi la population ne s'en inquiétait-elle pas ? Hina cilla, comme frappée par la compréhension. Sur son visage fleurit alors une expression de pure abomination en assimilant la vérité.

Ces zombies n'erraient pas au hasard. D'une manière ou d'une autre, c'était elle qu'ils traquaient depuis le début.

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Je suis ravie de vous proposer ce nouveau chapitre rempli de révélations ! J'ai pris un certain plaisir à l'écrire... car il annonce clairement des changements majeurs ! Nous avons droit à une nouvelle interaction entre Red et notre mystérieuse White, dont on connait maintenant le prénom. Cette dernière ne semble pas si angélique qu'elle le parait, finalement !

Notre pauvre Hina est de nouveau confrontée aux zombies... et comprend maintenant pourquoi elle tombe souvent sur eux. Maintenant, à voir si elle a entièrement raison. :)

J'espère que le chapitre vous aura plu ! A la prochaine ! :D