Dès qu'il ouvrit les yeux, Jungkook sentit l'anxiété le posséder. Réveillé par son voisin qui n'avait toujours pas appris à fermer sa porte sans la claquer comme un sauvage, il s'était extirpé de son lit, laissant son amant dormir pour rejoindre sa cuisine.

Ce matin, il avait rendez-vous avec son thérapeute. Il comptait se rendre à sa séance après avoir déposé Jimin au poste, cependant, il savait qu'il devrait d'abord aborder cette conversation qu'il redoutait tant.

Après une douche rapide afin d'effacer toute trace de sommeil, le tatoué fit couler du café et prépara son petit déjeuner ainsi que celui de son petit ami qui ne tarderait pas à se réveiller. Devant la baie-vitrée, sa tasse à la main, il laissa son regard voyager sur le paysage qui s'étendait devant lui. Le soleil tentait désespérément de passer à travers les épais nuages qui assombrissaient le ciel, créant ainsi de magnifiques puits de lumière qui reflétaient au loin sur l'océan.

Perdu dans ses pensées, Jungkook ne remarqua la présence de son amant que lorsque ce dernier vint l'enlacer tendrement, déposant un baiser contre son omoplate.

— Bonjour, chuchota ce dernier, les yeux encore marqués par le sommeil.

— Bonjour microbe, répondit le commandant, levant son bras droit pour l'inciter à venir face à lui.

Somnolant, Jimin s'exécuta et fondit contre son torse, écoutant les battements de son cœur.

— Tu as bien dormi ? demanda le plus vieux, en déposant un baiser sur le haut de son crâne.

— Pas assez, gloussa le blond. On pourrait feindre une gastro foudroyante et rester au lit pour la journée, qu'en penses-tu ?

Jungkook se mit à rire, faisant légèrement tressauter le visage de son amant qui était collé à sa poitrine.

— Cette proposition est très alléchante beauté, mais j'ai un rendez-vous ce matin. Je te dépose et je m'y rends. J'en aurai pour deux heures à peu près, expliqua le policier.

Curieux, Jimin releva la tête vers lui, les yeux légèrement plissés.

— Un rendez-vous ? J'ai le droit d'en savoir plus ? demanda-t-il, une moue enfantine sur les lèvres.

— Évidemment, répondit le brun avec douceur en caressant sa joue. J'ai rendez-vous avec mon thérapeute.

— Oh, souffla le plus jeune.

Le médium fut surpris par cette révélation. Il connaissait son amant depuis longtemps maintenant et ce dernier n'avait jamais été le genre de personne à se confier, encore moins à un inconnu. Néanmoins, il était heureux qu'il ait trouvé le courage de le faire. Si cela l'aidait à combattre ses démons, alors il le soutiendrait et surtout, il voulait qu'il sache à quel point il était fier de lui.

— Ça fait longtemps que tu y vas ?

— Hm, quelques semaines oui. C'est un confrère de Lilith, c'est elle qui me l'a conseillé. Il m'a beaucoup aidé, expliqua Jungkook.

— Je suis content pour toi, mon cœur et je suis très fier de toi aussi. Je sais à quel point ça n'a pas dû être simple de passer ce cap.

— Disons que j'ai eu un déclic. J'ai compris que si je voulais te récupérer et surtout me sentir bien dans ma peau, je devais me faire aider. Tout seul, je n'y serais pas arrivé, admit le commandant, gêné par le regard intense et doux de son amant.

Jimin sentit son cœur faire un bon dans sa poitrine en entendant ces mots. Il l'avait fait pour lui, pour eux. Ce détail n'était qu'une autre raison pour laquelle le blond ne regrettait pas d'avoir donné une nouvelle chance à son couple.

— Est-ce qu'il s'est passé quelque chose en particulier ?

Cette question crispa quelque peu les muscles du brun qui fut brusquement projeté dans les souvenirs de cette nuit cauchemardesque au Hell's Paradise. Cette soirée durant laquelle il avait failli replonger dans ses vices les plus sombres et destructeurs.

Ayant subitement l'impression de suffoquer, Jungkook se recula et partit vers la cuisine, sentant le regard intense du plus jeune dans son dos.

— Tu n'es pas obligé de m'en parler si tu ne veux pas, reprit Jimin, voyant que l'ambiance entre eux avait changé.

— Non, c'est... c'est juste que je ne suis pas très fier de ce qui s'est passé, expliqua le commandant en pivotant vers son amant qui pénétrait à son tour dans la pièce.

Ce dernier le sondait avec tendresse, transmettant silencieusement tout son amour et son soutien. Prenant une grande inspiration pour se donner du courage, Jungkook remplit une tasse de café qu'il donna à son compagnon et en servit une deuxième pour lui.

— Le soir de ton départ, je suis sorti, commença le plus vieux, les yeux rivés sur son mug. Je suis allé dans un bar que je fréquentais avant d'être flic. Je... j'ai revu des vieilles connaissances et c'est là que ça a dérapé.

Sans comprendre pourquoi, Jimin sentit son estomac se tordre. Que voulait-il dire par vieilles connaissances ? Est-ce qu'il avait revu une ancienne conquête ? Si c'était le cas, il ne saurait comment réagir. Est-ce qu'il supporterait de savoir que l'homme qu'il aimait s'était donné à quelqu'un d'autre durant leur séparation ?

— Ça a dérapé ? Tu... tu as couché avec quelqu'un ? osa demander le médium, la lèvre inférieure tremblante.

— Quoi ? Non ! Je te jure que non. Je n'ai été avec personne d'autre depuis notre première fois, assura Jungkook, en proie à la panique.

D'un mouvement rapide, il posa sa tasse sur le plan de travail et se rapprocha de son petit ami. Son regard semblait si attristé, qu'il sentit son cœur se briser. Voulant à tout prit apaiser cette crainte, il prit sa main dans la sienne et glissa sa dextre libre derrière sa nuque.

— Je te le jure sur ma vie, ce n'est pas arrivé. Tu es le seul que je veuille.

— Je te crois, murmura Jimin, en posant sa paume sur celle qui caressait sa peau.

Se hissant sur la pointe des pieds, le blond déposa un baiser sur les lèvres de son compagnon et l'incita à poursuivre son récit. Jungkook raconta alors sa mésaventure au Hell's Paradise et ce qui l'avait poussé à prendre cette décision. Son amant lui répéta encore et encore à quel point il était fier de lui. Après cela, les deux hommes échangèrent quelques étreintes et baisers, puis ils prirent leur petit déjeuner avant que le commandant ne parte se préparer pour sa journée.

✺✺✺

Enfermé dans la salle de bain, le tatoué sortait de sa douche lorsque son téléphone se mit à vibrer sur le granit entre les deux vasques. Tout en passant une serviette dans ses cheveux, il combla la distance qui le séparait de l'appareil et le saisit. Quand il vit le nom de son interlocuteur, son cœur fit un bon dans sa poitrine et il ne put s'empêcher de jeter un coup d'œil vers la porte, s'assurant que Jimin n'était pas dans les parages.

Les doigts tremblants, il enroula le linge de bain autour de sa taille et répondit à l'appel.

— Allo, fit-il en s'appuyant contre le lavabo.

— Bonjour superflic. J'ai une bonne nouvelle pour toi, Yeosang a parlé.

En entendant cela, Jungkook sentit l'air se bloquer dans ses poumons avant qu'il ne prenne une grande inspiration. Après deux mois, ils avaient enfin une véritable piste qui leur permettrait d'avancer dans leur enquête. La satisfaction qu'il ressentit disparut pour laisser place à une angoisse qui le dévorait depuis le retour de son amant. Il ne pouvait plus repousser, à présent, il était dos au mur et n'avait plus le choix, le temps des aveux était arrivé.

— Ok, commença le tatoué en prenant une grande inspiration, mettant en ordre ses pensées. Est-ce que tu l'as tué ?

— Pas encore. Pourquoi ?

Soulagé, Jungkook expira en fermant les yeux. Maintenant qu'il devait raconter toute l'histoire à Jimin, il voulait au moins lui laisser le choix de voir ou non l'un des hommes qui l'avait kidnappé. Une part de lui espérait qu'il refuse, car il n'avait pas besoin de cela, mais il connaissait son amant, s'il prenait cette décision à sa place, il risquait de s'attirer ses foudres et c'était à éviter.

— Ne le tue pas, du moins pas tout de suite. Je... je dois régler un petit détail et je te rappelle, ok ?

— D'accord, tu as vingt-quatre heures. Passé ce délai, je balance son corps à mes chiens.

— Charmant Hoseok, vraiment, répliqua le commandant avec dégoût.

Pour la première fois, Jungkook entendit le rire de son interlocuteur et se surprit à le trouver mélodieux et doux, ce qui contrastait totalement avec l'image qui lui collait à la peau et sa réputation.

— Na-bi te réclame, annonça ce dernier d'un ton plus sérieux. Tâche de venir la voir. Elle souhaite te raconter sa visite à l'aquarium.

— Dis-lui que je viendrai bientôt lui rendre visite.

— Bien. À plus tard.

Sans attendre une quelconque réponse, le mafieux mit fin à l'appel, laissant le brun accroché à son téléphone, le regard perdu sur le mur face à lui. Dans un soupir, il laissa son bras retomber le long de son corps.

✺✺✺

Dans la cuisine, Jimin était loin de se douter du combat interne qui faisait rage à l'intérieur de son amant. Habillé et prêt à affronter sa journée, le blond s'était installé sur le canapé et échangeait quelques messages avec sa mère et Su-hyun, attendant que son aîné ne vienne le rejoindre.

Alors qu'il caressait distraitement le haut du crâne de Zeus, il sentit un frisson parcourir son échine, annonçant la venue d'une tête verte qu'il n'avait pas vue depuis plusieurs jours.

— Bonjour Yoongi, fit-il en tournant la tête vers son meilleur ami qui venait d'apparaître.

Eh bien, dites donc monsieur Park, vous êtes sur le qui-vive ce matin, gloussa le fantôme en prenant place sur la table basse.

— Tu as vu, je m'améliore, répliqua Jimin avec amusement.

Je te félicite !

Les deux amis se mirent à rire, jusqu'à ce que celui du médium ne se fane pour laisser place à un simple sourire débordant de douceur.

— Où étais-tu passé ? Je ne t'ai pas revu depuis plusieurs jours.

Désolé, mes batteries étaient à plat, l'informa Yoongi, le regard fuyant.

Cette réponse intrigua Jimin, qui chercha à établir un contact visuel. Même s'il était mort, il connaissait son meilleur ami par cœur et à l'heure actuelle, il savait qu'il lui cachait quelque chose.

— Yoon, qu'est-ce qu'il y a ? Il s'est passé quelque chose ?

Hm, pas vraiment. Je... c'est un peu gênant en fait.

— Crache le morceau, imposa le blond, sa curiosité mise à rude épreuve.

Je me suis entraîné.

— Entraîné ? À faire quoi ?

Ça.

L'air se mit soudainement à vibrer, attirant l'attention de Jimin qui se mit à regarder autour de lui alors que Zeus, qui jusqu'à présent n'avait pas bougé, descendit du canapé et se mit à grogner en direction du fantôme. La télévision s'alluma subitement et cette fois, le médium se redressa, ses yeux écarquillés rivés sur le bouton de la multiprise qui était éteinte. Ce furent ensuite les babioles de la bibliothèque qui se mirent à trembler, manquant de tomber au sol.

— C'est toi qui fais ça ?

Un sourire apparut sur les lèvres du mentholé, pourtant il garda le silence. Son visage pâle était dénué de toute émotion, seule la concentration y était lisible et cela n'annonçait rien de bon. Lorsque l'ampoule de la salle à manger explosa, le blond sursauta, déclenchant un aboiement chez le berger allemand qui sentit l'anxiété de son maître.

— Stop ! ordonna Jimin, les muscles crispés avant de poser son regard sur le chien noir qui continuait de grogner. C'est bon Zeus, ce n'est rien, ajouta-t-il d'une voix plus douce.

Yoongi s'exécuta et la tension glaciale qui avait envahi la pièce de vie retomba brusquement, accompagné d'un silence des plus apaisants.

— Microbe, ça va ? lança une voix grave depuis le couloir.

Jimin fut peu surpris que ce boucan ait attiré l'attention de son amant. Les aboiements de Zeus avaient dû être audibles depuis la rue tant ils étaient si profonds et si forts.

— Oui, tout va bien.

Attends, tu n'as pas vu le plus cool ! s'enjoua Yoongi en descendant de la table basse, ignorant totalement l'intervention de Jungkook.

Le mentholé regarda autour de lui, à la recherche de l'objet qui lui servirait de cobaye, puis jeta son dévolu sur le fauteuil qui se trouvait près de la baie-vitrée. Le silence qui les entourait devint plus pesant. Jimin qui observait son meilleur ami sentit une sensation étrange l'envahir, une vague de puissance qui n'était pas la sienne et il comprit, c'était celle de Yoongi. Il avait ressenti la même chose lorsqu'il avait frappé Jungkook le lendemain de son arrivée ici, dans cet appartement.

Les secondes s'écoulaient et pourtant, malgré le regard noir que lui offrit le fantôme, le fauteuil ne bougeait pas d'un pouce.

Allez, s'il te plaît, bouge, bougonna Yoongi.

— Tu es peut-être encore affaibli ? supposa le blond.

Non, je me sens bien. Je pète le feu ! répliqua plus froidement le garçon aux cheveux verts.

— Ok... pas besoin de t'énerver, grommela Jimin en s'enfonçant dans son siège, les bras croisés contre son torse et une moue boudeuse sur les lèvres.

Mais tu vas bouger putain de merde !

Cette fois, la voix du mentholé fut plus forte et contre toute attente, le fauteuil se décala de quelques millimètres avant d'être brutalement poussé au milieu de la pièce. À cet instant, un cri de joie fit vibrer les cordes vocales de Yoongi qui se mit à sauter sur place en criant victoire.

En voyant cela, le médium se leva d'un bond, les yeux écarquillés alors qu'un large sourire s'étira sur ses lèvres. Il y était parvenu. Après toutes ses années, Yoongi avait enfin réussi à déplacer un objet.

— Tu as réussi ! s'enthousiasma le garçon à la chevelure dorée.

Oui ! Bon, j'ai encore besoin d'un peu d'entraînement, je l'avoue, mais j'y arrive enfin !

— Je suis vraiment heureux pour toi Yoon. Je sais à quel point c'était important pour toi. Par contre, interdiction de détruire d'autres lampes ou de faire tomber les décorations ! l'avertit Jimin, son index pointé dans sa direction en signe de menace.

Promis, assura le mentholé. À partir de maintenant, si ces types s'en prennent de nouveau à toi, je pourrai te protéger.

Ces paroles réchauffèrent le cœur du médium. Son meilleur ami s'était épuisé afin d'améliorer sa condition et ainsi être capable de veiller sur lui, alors qu'à ce jour, il n'avait plus rien qui pourrait l'aider à arrêter son assassin. Cette réalisation fit naître un voile de larmes qui brouilla sa vue, attirant l'attention du fantôme.

Hé, qu'est-ce qu'il y a ?

— Je suis désolé, murmura Jimin en détournant le regard. Tu fais tous les efforts du monde pour me protéger de ceux qui t'ont tué alors que j'ai perdu toutes les preuves qu'on avait contre eux.

Yoongi connaissait la vérité. Il savait pertinemment que Jungkook avait conservé une copie du dossier. Comment ? Eh bien, il avait peut-être laissé ses oreilles traîner et avait entendu plusieurs conversations. Il était également au courant que le policier comptait lui en parler, mais ce qu'il craignait était la réaction que Jimin allait avoir. Comprendrait-il les raisons qui avaient poussé le commandant Jeon à lui cacher cela ? Il l'espérait.

— Microbe ? appela une voix grave qui se rapprochait rapidement. Est-ce que tu-... qu'est-ce que le fauteuil fait au milieu du chemin ?

Vêtu d'un pull gris qui mettait en valeur le moindre de ses muscles et d'un treillis militaire noir, Jungkook s'était immobilisé dans l'encadrement de l'arche qui menait au salon. Ses yeux noirs rivés sur l'assise qui n'était plus à sa place, il tentait de comprendre la situation.

— C'est... euh... c'est Yoongi, expliqua Jimin, sans réellement savoir quoi dire.

— Yoo-... Non, laisse tomber, je ne veux rien savoir, je sens que ça va me donner mal à la tête, répondit le plus vieux en marchant vers la cuisine. Qu'est-ce qui s'est passé ici ? Pourquoi il y a du verre partout ?

— Désolé, ça aussi, c'est Yoongi, déclara le médium en se précipitant vers lui pour constater les dégâts.

La lampe du plafonnier qui surplombait la table de sa salle à manger avait explosé, répandant les éclats sur la surface en bas où ils avaient l'habitude de manger, ainsi que sur le carrelage. En voyant que Zeus venait les rejoindre, Jungkook pivota vers son animal et lui somma de retourner sur le canapé, évitant ainsi qu'il ne se blesse.

— Putain de fantôme, marmonna-t-il en se dirigeant vers l'armoire qui se trouvait dans le hall.

Les traits tirés par la contrariété, le commandant sortit l'aspirateur et revint auprès de son amant qui l'observait d'un air désolé.

— Laisse mon cœur, je vais le faire, décida Jimin en comblant la distance qui les séparait.

— C'est bon, je m'en occupe, refusa Jungkook, agacé. Dis plutôt à ton meilleur ami de se tenir tranquille et d'arrêter de faire tout exploser dans l'appartement.

Comprenant qu'il valait mieux le laisser faire, le médium se recula et alla remettre le fauteuil à sa place sous le regard amusé de Yoongi qui se languissait de l'agacement du policier. Même si le brun était grandement monté dans son estime, il ne cessait d'avoir envie de la charrier, et maintenant qu'il pouvait déplacer des objets, le calvaire de ce pauvre Jungkook ne faisait que commencer.

Sa tâche ménagère terminée et le matériel rangé, le tatoué revint dans la pièce de vie et planta son regard dans celui de son petit ami.

— Je dois te parler d'un truc, commença-t-il sans détours.

— Ok, souffla Jimin, perplexe. Je n'aime pas trop ce genre de phrase, mais je t'écoute.

En examinant le langage corporel de son amant, Jimin devinait que ce dernier était nerveux, en revanche, il en ignorait la raison.

— Promets-moi de ne pas t'énerver et de m'écouter jusqu'à la fin.

— D'accord, là, tu piques ma curiosité. Crache le morceau, ordonna le plus jeune avec une pointe d'anxiété.

— Jure-le-moi, exigea Jungkook, son regard ancré dans celui de son compagnon. Je te connais, je sais que ce que je vais te dire va sûrement te mettre en colère et tu vas très certainement m'en vouloir, mais je ne veux pas qu'on se dispute.

— Je te le promets, assura le médium.

Le commandant avala difficilement sa salive, mais au lieu de parler, il partit en direction de la cuisine et se servit sa troisième tasse de café. Il avait peur, c'était véridique. Tout allait si bien entre eux qu'il était effrayé à l'idée de tout gâcher, encore.

Derrière lui, Jimin sentait son estomac se tordre d'angoisse et il détestait cela. Quoi qu'il se soit passé, il voulait le savoir. Faisant fi de la présence de son meilleur ami qui était resté dans le salon, il combla la distance qui le séparait de son petit ami et vint l'enlacer, tentant par ce contact de le rassurer et de l'inciter à parler.

— Jungkook, qu'est-ce qu'il y a ? Tu me fais peur, murmura-t-il en déposant un baiser contre son omoplate.

— Quand tu as été enlevé, j'ai échangé avec l'un de tes ravisseurs, commença-t-il d'une voix basse.

— Oui, Jo. Je n'oublierai jamais son visage, répondit le médium, la gorge nouée alors qu'il était traversé par tout un tas de mauvais souvenirs qu'il aurait préféré oublier. C'est lui qui a tué Yoongi.

— Je sais, souffla le plus vieux. Quand... quand il a imposé ses conditions pour qu'on puisse procéder à l'échange, il a réclamé tout ce qui était en lien avec le meurtre de Yoongi.

— Je m'en souviens, il... il avait appelé Taehyung avec mon téléphone et me filmait pendant que son complice me...

Sa voix mourut dans sa gorge quand il se rappela les mains de cet homme dont il n'avait jamais vu le visage, sur son corps. Ce dernier avait promis qu'il abuserait de lui jusqu'à ce qu'il le supplie de le tuer et pendant un instant, Jimin avait cru que c'était ainsi qu'il allait mourir.

En entendant la peur dans la voix de son cadet et sentant les bras qui l'entouraient trembler, Jungkook pivota dans son étreinte et l'enlaça à son tour, déposant un baiser sur le haut de son crâne.

— C'est terminé maintenant. Il ne pourra plus jamais te faire de mal, murmura-t-il.

Secoué par ses souvenirs, le blond ne releva pas la réponse de son amant et se contenta de humer son doux parfum.

— Évidemment, je lui ai donné tout ce qu'il voulait, reprit le commandant. Tout ce qui touchait de près ou de loin au meurtre de Yoongi avait été rassemblé pour l'échange, mais avant ça je... j'ai créé une copie de toutes nos infos.

Cette fois, Jimin comprit ce qu'il venait de dire, et en réalisant ce que cela impliquait, il releva la tête et planta ses prunelles sombres dans les siennes.

— T-u as fait quoi ? bafouilla le médium, incrédule.

— J'ai demandé à Namjoon de cloner ton ordinateur et de scanner tous les documents papier, pour les transférer sur une clé USB cryptée.

Alors, il n'avait pas rêvé. Depuis le début, Jungkook avait en sa possession une copie du dossier et il ne lui avait rien dit.

— P-pourquoi tu ne me l'as pas dit ? demanda-t-il en s'éloignant. Tu... tu m'as entendu dire que j'avais perdu toutes mes chances d'arrêter les meurtriers. Tu m'as vu au fond du trou et tu n'as rien dit.

Même si sa voix était calme, le tatoué pouvait voir que ce n'était qu'une façade. Adossé contre l'évier de la cuisine, il pouvait sentir la colère et la déception qui gagnait son amant à chaque seconde qui s'écoulait.

— Non, mais j'hallucine, pouffa nerveusement le blond en passant une main dans ses cheveux.

— S'il te plaît, écoute-moi, implora presque le policier en faisant un pas vers lui. Je comptais te le dire, mais j'attendais que tu ailles mieux. Je savais que si je t'en parlais alors que tu étais encore à l'hôpital, tu aurais repris ton enquête et c'était hors de question. Tu venais d'échapper à la mort, je ne voulais pas que tu te mettes encore en danger.

Bien qu'il ait promis de ne pas s'emporter, Jimin sentit la colère le gagner. Les mains tremblantes, il faisait de son mieux pour ne pas exploser. Toutefois, même s'il avait fait de gros progrès sur la gestion de sa colère, il n'était pas infaillible, et il venait de le comprendre.

Ne supportant plus de voir l'expression désolée de son amant, le médium lui tourna le dos et fit face à Yoongi qui venait d'apparaître de l'autre côté de l'îlot.

S'il te plaît, ne t'emporte pas. Il a fait ça pour ton bien, je lui en suis même reconnaissant, fit le mentholé, tentant de calmer l'irritation de son meilleur ami.

Ses mains à plat sur l'îlot en granit noir, le jeune consultant de police ferma les yeux, ignorant la présence du fantôme et prit une grande inspiration pour calmer le feu qui le rongeait. Il ne voulait pas se disputer avec Jungkook, il s'était promis de mûrir et de gérer les disputes sans élever la voix ou sans s'emporter, alors il préférait rester muet, attendant que son cœur reprenne un rythme plus lent.

Min, il l'a fait pour toi. S'il a fait une copie de ce dossier, ce n'est pas pour mes jolis yeux, il l'a fait en pensant à toi, car il savait à quel point tu serais dévasté. Ne sois pas trop dur avec lui.

Expirant et inspirant à un rythme régulier, le médium reprenait peu à peu le contrôle de ses émotions et surtout de sa colère. Derrière lui, Jungkook sentait la panique le gagner petit à petit. Ils venaient à peine de se retrouver. Est-ce que ce secret allait mettre fin à tout ce qu'ils s'étaient promis de construire ?

— Microbe, je suis désolé. S'il te plaît ne-

— C'est bon, le coupa Jimin d'une voix aussi douce que possible tout en pivotant vers lui.

Bien que sa voix ne dégageait plus aucune trace d'amertume ou de rancœur, le commandant était sur la réserve. Lui avait-il réellement pardonné ?

— Je ne voulais pas te mentir. J'ai essayé de t'en parler de nombreuses fois, mais ce n'était jamais le bon moment ou alors, je ne trouvais pas le courage de le faire. Je suis désolé, je n'ai pas envie que ça crée un froid entre nous. Si tu as envie de me crier dessus, fais-le, je... je l'ai mérité.

Jimin observait ce visage qu'il aimait tant et, à mesure que le brun s'expliquait, il sentait la colère en lui disparaître. Yoongi avait raison. Jungkook avait pris le temps de copier ce dossier pour lui, en pensant à ses sentiments et surtout, que se serait-il passé s'il lui en avait parlé dès son réveil ? Il était presque certain qu'il se serait de nouveau jeté dans la gueule du loup.

Ne supportant plus de voir l'anxiété déformer les traits de son bien-aimé, le médium parcourut la distance qui les séparait et l'enlaça timidement, collant sa joue juste au-dessus de son cœur.

— Non, je n'ai pas envie de te crier dessus, souffla Jimin contre lui. Je... je te remercie d'avoir gardé une copie du dossier. Grâce à toi, j'ai encore un espoir de trouver le tueur de mon meilleur ami.

Jungkook resserra sa prise autour de son cadet, inspirant son odeur sucrée. Maintenant qu'il avait avoué le plus dur, il devait lui parler du reste.

— Je dois te parler d'autre chose, commença ce dernier.

— Oh pitié, encore, chouina Jimin en se penchant vers l'arrière, courbant outrageusement son dos.

— Désolé, gloussa le policier en le tirant jusqu'à lui. Je me suis promis d'être totalement transparent avec toi à partir de maintenant, alors je dois tout te dire.

Le médium sentit une douce chaleur caresser chaque fibre de son être. La communication, l'honnêteté et la transparence, c'était ce qui leur avait fait défaut à plusieurs reprises, cependant tout ça était derrière eux à présent.

— Très bien, je t'écoute, l'encouragea-t-il, passant ses mains sous son pull, caressant ainsi le creux de son dos.

— Quand tu as été enlevé, j'ai reconnu le tatouage de l'un de tes ravisseurs.

— Une colombe, se rappela Jimin.

— Oui, une colombe sur le poignet. Je ne savais pas par où commencer les recherches alors, je me suis tourné vers un homme qui pouvait m'aider.

— Qui ça ? questionna le plus jeune.

— Jung Hoseok.

— C'est un ami ?

— Hm, pas vraiment. Enfin... je sais pas. Notre relation est compliquée.

Cette fois, le médium scruta son amant, les sourcils rapprochés de confusion. Si ce n'était pas un ami, alors qu'est-ce qu'il était ?

— C'est un ex ?

— Oh mon Dieu non, ricana Jungkook avec une mine de dégoût. Hoseok est... c'est le fils du chef de la mafia. Il est à la tête de la filière ici à Busan.

— La mafia ? T-tu as dit la mafia ? bafouilla Jimin en clignant plusieurs fois des paupières. Jung... c'est le nom de l'homme dont tu parlais hier avant de partir en intervention.

— Oui.

— Comment toi, le commandant Jeon Jungkook, de la police de Busan, peut être en contact avec le fils du chef de la mafia ?

Perdu et intrigué, voilà comment se sentait le plus jeune. Est-ce que la mafia était liée au meurtre de Yoongi ? Si c'était le cas, alors le danger était encore plus grand que ce qu'il pensait.

— Il avait une dette envers moi.

— Une dette ? Jungkook, comment ça a pu arriver ? Comment la mafia en est venue à avoir une dette envers toi ?

— Bon, je vais tout t'expliquer, mais arrête avec tes questions et laisse-moi parler, répliqua le brun avec un petit rire, amusé par la mine interrogative de son amant.

En réponse, Jimin hocha la tête et mima de sceller ses lèvres avec une fermeture Éclair. Tout en allant s'installer sur l'un des tabourets hauts de l'îlot, Jungkook commença son récit. Il lui raconta tout ce qui s'était passé depuis son enlèvement, puis expliqua comment il avait connu Hoseok après avoir sauvé sa fille. Il lui parla ensuite de sa visite avant son sauvetage et tout ce qui suivit jusqu'à son coup de téléphone quelques minutes plus tôt.

Le médium écoutait attentivement son histoire, assemblant les pièces du puzzle. De son point de vue, cet homme, Jung Hoseok, était son unique espoir de trouver davantage d'informations sur les hommes qui l'avaient enlevé et peut-être le commanditaire de l'assassinat de Yoongi.

— Qu'est-ce qu'il t'a dit au téléphone ? demanda Jimin.

— Que Yeosang avait enfin parlé.

— Il a donné un nom ?

— Je ne sais pas, je n'ai pas demandé, répondit le commandant avant de prendre la main de son amant dans la sienne en signe d'apaisement. Je... je voulais t'en parler avant et te laisser le choix. Je peux y aller seul et Hoseok me dira tout ce qu'il a pu en tirer, ou on peut y aller ensemble.

— Est-ce qu'il l'a tué ?

— Non plus, je lui ai demandé de ne pas le faire, enfin pas pour l'instant. Il va mourir, c'est une certitude, Hoseok ne laissera pas passer sa trahison, mais je lui ai demandé un peu de temps.

— Je veux le voir, exigea le médium.

— Je me doutais que tu dirais ça, mais je ne suis pas sûr que ce soit une bonne idée. Il... il a été torturé et j'ignore dans quel état il est. Tu as déjà vu assez d'hor-

— Jungkook, le coupa son cadet, le regard dur avant de s'adoucir. Je suis un grand garçon, tu te souviens ? Tu dois me laisser faire mes propres choix.

Le brun détourna la tête en soupirant faiblement. Jimin avait raison, c'était à lui de décider, pourtant, il ne pouvait pas taire l'inquiétude qui le gagnait.

— Cet homme hante encore mes nuits. Je revois parfois ses mains sur moi et ça me donne la nausée. J'ai besoin de le confronter, de lui montrer qu'il ne m'a pas détruit. Il n'y a que là que je pourrai passer à autre chose, reprit le plus jeune en posant sa paume sur celle de son petit ami. Tu seras avec moi alors tout ira bien.

Jungkook n'était toujours pas convaincu par les dires de son amant, cependant il acquiesça.

— Très bien, je vais appeler Hoseok, céda ce dernier.

Jimin hocha la tête en mordant sa lèvre inférieure, puis descendit de son tabouret pour venir se placer entre les jambes du plus vieux.

— Merci de m'avoir raconté tout ça, murmura-t-il, ses mains posées à plat sur ses cuisses.

— De rien. Je te demande pardon de ne pas t'en avoir parlé plus tôt, répondit Jungkook sur le même timbre de voix.

— Oublions ça. Tu l'as fait, c'est tout ce qui compte.

Le médium offrit un baiser débordant de tendresse à son vis-à-vis, qui y répondit sans hésiter avant de se reculer et de caresser son menton à l'aide de son pouce.

— Ce n'est pas qu'être ici avec toi me déplaît, commença-t-il tout en entourant son cou de ses avant-bras. Mais je dois aller travailler, et toi, tu dois aller à ta séance.

— Hm, tu as raison, répondit le policier, rapprochant son visage du sien dans l'espoir de récolter un baiser. Si on part maintenant, tu seras à l'heure.

Jimin hocha la tête et lui donna enfin ce qu'il voulait. Après une petite séance de baiser, les deux hommes quittèrent la maison en direction du commissariat.

⊱⋅ ──────────── ⋅⊰

La journée touchait à sa fin, lorsque Jungkook reçut le coup de téléphone qu'il avait attendu toute la journée. Hoseok acceptait de le rencontrer, mais sur son territoire. Il avait entendu Na-bi, en arrière-plan, implorer son père pour qu'il l'invite à manger avec eux et ce dernier avait fini par céder. Le commandant fut donc convié pour le dîner et bien entendu, le brun avait averti son hôte qu'il serait accompagné.

— Microbe, t'es prêt ? s'exclama le brun depuis le salon.

— Oui ! répondit Jimin en s'approchant de lui. Ton ami vit loin ? demanda-t-il en entrant dans la pièce.

— Oui, on en a pour quarante bonnes minutes de route.

Le médium hocha la tête et observa son amant partir en direction du hall d'entrée. Ce dernier semblait tendu, angoissé, et le blond se demandait si c'était ce dîner qui le rendait ainsi.

— Eh grincheux, l'appela ce dernier en allant le rejoindre.

— Hm, souffla Jungkook en enfilant sa veste.

— Est-ce que ça va ? Je te sens un peu anxieux.

Le commandant s'immobilisa, puis expira avant de pivoter pour enfin faire face à ce regard débordant de douceur qui le sondait.

— Hoseok et moi ne sommes pas réellement amis. Je suis toujours un peu angoissé quand je lui rends visite.

— Je ne le connais pas, mais je pense que s'il avait voulu te tuer ou te faire du mal, il l'aurait déjà fait. En plus tu ne seras pas tout seul ce soir. Je serai avec toi, alors tout ira bien, le rassura Jimin en prenant sa main dans la sienne. Voyons ça comme un dîner d'affaires. On sourit, on acquiesce, on mange et on rentre à la maison.

Jungkook hocha simplement la tête tout en rapprochant son visage du sien, espérant recevoir un baiser qui apaiserait toutes ses craintes. Comme toujours, le plus jeune fut incapable de lui refuser cela et l'embrassa avec douceur et tendresse.

— Allons-y, l'encouragea le médium dans un murmure.

Le brun acquiesça de nouveau, puis ils quittèrent leur domicile.

⊱⋅ ──────────── ⋅⊰

La villa de Jung Hoseok était un lieu où le calme régnait – du moins c'était le cas si Na-bi ne leur imposait pas un concert privé du générique de ses dessins animés préférés.

Vêtue d'une jolie robe en tulle rose pâle et d'un collant transparent, la petite brune suivait son père comme son ombre, chantonnant un air qu'elle avait appris à l'école. Hoseok quant à lui, donnait des instructions à ses domestiques, afin que le repas se passe de la meilleure des façons. Il n'avait pas pour coutume d'inviter quiconque pour le dîner. Pour lui, cela se résumait à pénétrer dans sa vie privée, et il mettait un point d'honneur à séparer sa vie d'homme d'affaires du reste.

— Papa, tonton Kook, il arrive quand ? demanda Na-bi d'une voix fluette.

Le brun avisa sa montre et remarqua que l'heure du rendez-vous était imminente.

— Eh bien, s'il est à l'heure, il ne devrait plus tarder, répondit-il.

— Cool ! J'ai hâte de lui raconter la journée à l'aquarium !

Hoseok lui sourit tendrement, puis se rappela un détail qu'il ne lui avait pas dit. Il se stoppa donc dans sa marche et s'accroupit afin de lui faire face.

— Ma chérie, j'ai oublié de te le dire, mais Jungkook ne sera pas seul ce soir, annonça ce dernier avec douceur.

— Oh ? Il ramène le monsieur de la dernière fois ? Celui avec les cheveux bouclés ? questionna-t-elle, les sourcils légèrement joints, montrant ainsi sa confusion.

— Non, celui-là, c'était son grand frère. Ce soir, il va venir avec un ami à lui.

— D'accord, sourit la petite fille. J'espère qu'il aura le temps pour moi quand même.

— Évidemment, Jungkook a toujours du temps pour toi, assura Hoseok en caressant tendrement sa joue.

À cet instant, la sonnette retentit et les yeux de la fillette s'illuminèrent alors qu'elle se mit à sautiller sur place, visiblement impatiente de revoir son oncle préféré.

— C'est tonton Kook ! trépigna-t-elle en serrant les poings d'excitation. Je peux aller ouvrir, s'il te plaît ?

— Oui, vas-y, lui autorisa son père, le regard débordant d'affection.

Sans se faire prier, la brunette courut jusqu'à la porte et se jeta presque sur la poignée. De l'autre côté du battant, Jungkook et son amant patientaient. Jimin tentait, par ses caresses sur sa peau, d'apaiser l'anxiété qui n'avait pas quitté son petit ami. Lui aussi se sentait angoissé, ce soir, il allait enfin avoir des réponses, peut-être même le nom de l'homme qu'il recherchait depuis plusieurs mois maintenant. Toutefois, au-delà de cette nervosité, il était impatient de faire la connaissance de Jung Hoseok. Son petit-ami semblait l'admirer, mais le craindre également, et ça, c'était nouveau. Jusqu'à ce jour, le médium pensait que son aîné ne redoutait personne et pourtant, cet individu qu'il ne connaissait pas lui prouver le contraire, piquant ainsi sa curiosité.

Lorsque la porte s'ouvrit, Jimin fronça les sourcils quand il ne vit personne, puis il baissa légèrement la tête pour enfin voir le visage de celle qui vint les accueillir. C'était une ravissante petite fille à la chevelure d'ébène coiffée de deux tresses.

— Tonton Kook ! s'exclama-t-elle et se ruant sur le concerné.

Ce dernier se baissa, lâchant la main de son amant, et la réceptionna sans mal pour la prendre dans ses bras. Le médium assistait à la scène en silence, reculant de quelques pas afin de leur laisser l'espace nécessaire pour ces retrouvailles. Il trouvait l'affection que son compagnon portait à cette enfant attendrissante. La joie de se revoir se voyait au sourire qui dévorait leur visage.

— Bonsoir petit papillon, répondit Jungkook en déposant un baiser sur sa joue.

— Je t'attendais. Pourquoi tu as mis si longtemps ? demanda Na-bi, ses petits doigts triturant le col de la chemise de son aîné.

— Excuse-moi, je suis sorti du travail un peu plus tard, expliqua le brun.

— Tu as attrapé des méchants aujourd'hui ?

Cette question était assez drôle lorsqu'on savait que son propre père était à la tête d'une des plus grosses branches de la mafia. Na-bi était-elle au courant de la vie cachée de son père ? Ou croyait-elle qu'il n'était qu'un homme lambda ? Jimin penchait plutôt pour la deuxième solution.

Avant que Jungkook n'ait le temps de répondre à la fillette, une silhouette apparut dans leurs champs de vision, attirant l'attention des deux hommes, mais surtout, celle du plus jeune. Ce dernier dévisagea l'individu qu'il supposait être le maître des lieux et fut subjugué par sa beauté et son allégeance. Ce n'était pas réellement l'image qu'il se faisait d'un mafieux.

— Ma chérie, les invités vont prendre froid si tu les laisses dehors, fit-il d'une voix étonnement douce.

Avec un petit rire, la concernée descendit des bras de son oncle et prit sa main pour le tirer à l'intérieur. Durant tout ce laps de temps, la brunette n'avait pas accordé une pointe de son attention à l'autre homme, mais ce dernier n'en fut nullement offusqué. Il voyait bien à quel point cette enfant tenait à Jungkook, lui, n'était qu'un invité lambda.

— Bonsoir Hoseok, commença le commandant.

— Bonsoir Jungkook, répondit-il avant de porter son attention sur le jeune homme à la chevelure dorée. Tu dois être Jimin ?

— Oui, enchanté monsieur, le salua le médium en s'inclinant poliment avant de serrer la main qu'il lui tendait. Je vous remercie de me recevoir.

— Papa dit que tu es un ami à tonton Kook, intervint Na-bi.

— En fait petit papillon, Jimin est mon petit ami, rectifia Jungkook, surprenant ainsi son compagnon qui ne s'attendait pas à cela.

— Petit ami ? répéta la fillette. C'est quoi ?

— Eh bien, c'est mon chéri si tu préfères.

Les yeux de la brunette s'écarquillèrent lorsqu'elle comprit et ses joues se teintèrent d'un joli rose.

— Mais c'est un garçon, murmura-t-elle, pensant que le principal concerné par cet échange n'entendrait pas.

Hoseok ne put retenir un petit rire en voyant la confusion sur le visage de sa fille. Il aurait pu intervenir, après tout, c'était le rôle qui lui incombait en tant que père, cependant il ne fit rien, bien trop amusé de voir son convive bégayer en tentant de formuler une explication.

— Je euh... eh bien-

— Les garçons peuvent aimer d'autres garçons, tu sais, intervint Jimin en s'accroupissant pour être à la hauteur de la petite fille. Quand tu seras grande, toi aussi, tu pourras aimer qui tu veux, le plus important, c'est que tu sois heureuse et que cette personne soit gentille avec toi.

Na-bi resta silencieuse de longues minutes, observant le visage de ce garçon qu'elle rencontrait. Depuis qu'elle connaissait Jungkook, c'était la première fois qu'elle devait partager son attention avec quelqu'un et pourtant, malgré ce qu'elle craignait, elle se surprit à aimer la voix de Jimin. Elle était douce et rassurante, et le parfum qui se dégageait de lui était apaisant.

— Quand je serai grande, je veux un chéri aussi beau et gentil que tonton Kook, annonça-t-elle. Il est gentil avec toi aussi ?

— Oui, très, assura Jimin.

Un nouveau silence s'installa dans le hall de la maison et Jungkook craignait que le courant ne passe pas entre son amant et la brunette. Cependant, ses appréhensions furent balayées quand cette dernière prit de nouveau la parole.

— Je m'appelle Na-bi, ça veut dire papillon.

— C'est un très joli prénom, pour une très jolie petite fille, répondit le médium avec douceur. Moi, c'est Jimin.

— C'est joli Jimin. Papa m'a acheté des poissons rouges, tu veux voir ? proposa-t-elle en tendant sa main libre vers lui.

— Avec plaisir, j'adore les poissons.

Na-bi afficha un large sourire et s'apprêtait à partir lorsqu'elle s'immobilisa et leva la tête vers le policier.

— Tu viens tonton ?

— Dans une seconde ma puce. Va avec Jimin, je dois parler à Jungkook, intervint Hoseok.

La brunette afficha une moue attristée, mais ne contesta pas les ordres de son père. Sa petite main dans celle du médium, elle le guida jusqu'au salon, l'informant déjà des prénoms qu'elle avait donnés à ses petits animaux marins.

— Des poissons rouges ? gloussa le commandant. Je croyais qu'elle adorait les chevaux.

— Si ça ne tenait qu'à elle, ma maison serait un remake de l'arche de Noé, répliqua Hoseok avec amusement, mais une pointe de tendresse.

Les deux hommes se mirent à rire avant que le mafieux ne reprenne son sérieux. Ce dernier lui fit signe de le suivre et ils partirent en direction de l'espace bar attenant à la salle à manger.

— Alors c'est pour lui que j'ai retourné tout le pays et torturé un homme ?

Jungkook hocha simplement la tête, avant de refuser le verre de whisky que son hôte lui proposait. À la place, il prit la petite bouteille qu'il lui tendit et l'ouvrit pour en boire une grande partie.

— Est-ce qu'il sait tout ce que tu as fait ?

— Oui, je lui ai raconté.

— Eh donc ?

— Il veut voir Yeosang, déclara le tatoué.

— Hm, si tu veux mon avis, ce n'est pas une très bonne idée. Il est... disons qu'il n'est pas présentable pour recevoir des visites.

— Je lui ai dit tout ça, mais il veut quand même le voir. C'est son choix, je n'ai pas à interférer.

Hoseok se mit à rire, créant la confusion chez son vis-à-vis.

— Qu'est-ce qui te fait rire ?

— Au premier abord, il a l'air tout doux et mignon, mais vu ce que tu me dis, c'est un vrai lionceau.

— Et encore, tu n'as rien vu, gloussa Jungkook. Plus buté que lui, tu meurs. Quand il a quelque chose en tête, c'est pratiquement impossible de le dissuader, mais c'est un grand garçon. J'ai appris à mes dépens que je devais arrêter de le couver.

Le mafieux observait son cadet et ne put s'empêcher de garder son sourire.

— Ça fait quatre ans qu'on se connaît et je ne t'ai jamais vu autant sourire. Qu'est-ce qui t'arrive ? lança Jungkook, embarrassé.

— Rien, ça m'amuse de te voir si enamouré.

— Oui, je suis amoureux. Tu sais ce que c'est, tu l'as forcément été un jour. Donc, tu sais que je suis prêt à tout pour lui et pour l'aider à avoir ce qu'il veut.

— Je le sais, mais après ce soir, tu devras te débrouiller tout seul.

Le policier acquiesça, puis ils furent interrompus par une des domestiques qui leur annonça le début du repas. Jimin et Na-bi vinrent enfin les rejoindre, puis ils passèrent à table.

Le repas se déroula dans la bonne humeur. La fillette raconta avec enthousiasme à leur deux convives la journée qu'elle avait passée avec son père à l'aquarium avant de se mettre à parler de son amour pour les chevaux et l'équitation. Désireuse de revoir le compagnon de son oncle, elle lui fit promettre de venir la voir et de monter ensemble à cheval.

Ayant école le lendemain, Na-bi fut obligée de faire ses adieux à leur invité après le dessert. Une moue peinée, elle alla rapidement enlacer Jimin, puis traîna des pieds jusqu'à Jungkook qui la prit dans ses bras.

— Tu reviendras bientôt me voir ? demanda-t-elle d'une petite voix.

— Oui, je te le promets.

— Tu dis toujours ça, soupira la brunette.

— Je sais petit papillon, mais avec mon travail, je n'ai pas beaucoup de temps libre, répondit le commandant en caressant tendrement sa pommette. Je vais essayer de venir plus souvent.

— D'accord, murmura-t-elle, peu convaincue.

— Allez, file au lit.

Avec douceur, le tatoué déposa un baiser sur sa joue et Na-bi fit de même avant de passer ses bras autour de son cou pour le garder près d'elle. Voyant que sa fille semblait peinée à l'idée d'être séparée si tôt de Jungkook, Hoseok prit la parole avec une autre idée derrière la tête. Il voulait également s'entretenir seul avec Jimin, c'était là l'occasion parfaite.

— Et si Jungkook montait te lire une histoire ? proposa-t-il.

— Oh oui ! Tu veux bien tonton ? s'enthousiasma la fillette.

— Avec plaisir.

— Parfait, alors monte avec madame Im et Jungkook ira te rejoindre quand tu seras au lit.

Il n'en fallut pas plus pour que la fillette ne saute des bras du commandant et parte en courant, criant le nom de la gouvernante qui s'occupait d'elle. Quand celle-ci passa près de son patron, ce dernier l'interpella.

— Donnez-lui un bon bain chaud, ça va l'aider à trouver le sommeil. Quand elle sera au lit, faites-moi signe, ordonna-t-il.

— Très bien monsieur.

La domestique s'inclina profondément, puis quitta la pièce en direction des escaliers qui menaient à l'étage.

— Votre fille est adorable, parla Jimin en prenant une gorgée de son verre de vin.

— Oui, elle l'est, sourit Hoseok. Mais je ne pense pas être très objectif. N'est-ce pas ce que chaque père dit de son enfant ?

— Aucune idée, gloussa le médium. Le mien n'est pas un modèle de parentalité.

— Le mien non plus, je vous rassure, répondit le mafieux sans quitter son convive des yeux. Cependant, je pense que lorsqu'on devient parents, on évite de reproduire les erreurs des nôtres.

Cette fois, Jimin haussa simplement les épaules. Il ne savait pas quoi répondre, car il n'envisageait pas d'avoir des enfants, comment le pourrait-il dans un pays ou même le mariage gay était encore interdit.

— Qu'en est-il de vous, reprit Hoseok en regardant ses deux invités à tour de rôle. Vous envisagez d'avoir des enfants un jour ?

Jungkook leva enfin les yeux de son verre pour les poser sur son aîné qui était à l'autre bout de la table. Son sourire n'était pas doux, ni même bienveillant, en réalité, il ne savait même pas quoi penser de l'expression qu'il arborait à cet instant. Pourquoi posait-il ce genre de question ? N'avait-il aucune connaissance des mœurs et des lois de leur pays ?

— Sans vouloir te manquer de respect, je pense que cela ne regarde personne d'autre que nous, répliqua le tatoué, la mine dure.

— Oh, n'y vois là aucune offense, c'était une simple question.

— Nous n'avons pas réellement réfléchi à la question, intervint Jimin en sentant la tension monter entre les deux hommes.

Jungkook et Hoseok se fusillaient du regard. Si le policier s'était senti attaqué à l'entente de cette question, son aîné, lui, se délectait de sa réaction. Il n'y avait qu'un homme peu sûr de ses désirs qui réagissait ainsi.

Les minutes qui suivirent furent sans doute les plus longues pour le commandant. Si son amant semblait jouer le jeu de l'invité ravi à la perfection, lui n'attendait qu'une chose, rentrer chez lui et respirer enfin.

Fort heureusement, le destin entendit son appel de détresse. Comme prévu, madame Im ne tarda pas à venir l'appeler et sans aucune hésitation, il se leva et la suivit jusqu'à la chambre de Na-bi.

— Alors petit papillon, qu'est-ce que tu veux comme histoire ? demanda-t-il en prenant place sur le rebord de son lit.

— Hm, cendrillon, choisit la fillette en désignant l'immense bibliothèque qui se trouvait à l'opposé de son lit à baldaquin.

— Ok, répondit Jungkook en se levant pour aller chercher le conte en question.

C'était la première fois qu'il allait faire ça. De sa vie, il n'avait jamais lu d'histoire à un enfant, ni même bordé, cependant, il voyait cela comme un entraînement pour ses neveux qui allaient bientôt pointer le bout de leur nez.

Le bouquin en main, il traversa cette chambre digne de celle d'une princesse de Disney, et reprit sa place avant que Na-bi ne se pousse pour qu'il puisse s'installer à ses côtés. Comprenant sa demande silencieuse, le brun acquiesça et s'adossa contre la tête

— Papa m'a dit que c'était l'histoire préférée de ma maman, annonça-t-elle d'une voix tremblante.

— C'est une très jolie histoire.

— Hm, tu peux commencer à lire ? demanda la brunette et posant sa tête contre le bras de son aîné.

— Vos désirs sont des ordres, princesse.

La concernée se mit à rire, avant de glisser son pouce entre ses lèvres. Attendri et heureux de voir enfin cette mine plus attristée disparaître, Jungkook commença son récit.

✺✺✺

Au rez-de-chaussé, l'ambiance était tout autre. Même s'il ne laissait rien paraître, Jimin n'était pas réellement à l'aise maintenant qu'il était seul avec le chef de la mafia. Hoseok était intimidant, la prestance qui se dégageait de lui était écrasante, pourtant, il refusait de lui donner cette satisfaction.

— Jungkook m'a dit tout ce que vous avez fait. Je vous remercie d'avoir accepté de l'aider, commença-t-il.

— Oh, je ne l'ai pas fait par pure charité. J'avais une dette envers lui.

— Je me doute. La mafia n'est pas réputée pour son altruisme.

Un petit rire quitta les lèvres du brun tandis qu'il but une gorgée de son verre de vin. Sa posture était bien plus détendue que celle de son amant, démontrant bien à quel point il avait le contrôle sur la situation.

— Je t'aime bien Jimin, confessa le mafieux. Peu de gens ont le cran d'être si direct avec moi.

— Je ne suis pas vraiment du genre à tourner autour du pot, surtout lorsqu'il s'agit du meurtre de mon meilleur ami.

— Jungkook m'a fait un bref résumé de la situation. J'ignore qui est derrière tout ça, mais vu comment mon prisonnier a résisté avant de cracher le morceau, quelque chose me dit que tu cours tout droit vers une mort certaine.

Jimin sentit son cœur louper un battement et une certaine peur grandir en lui. Si même un homme puissant et dangereux comme Hoseok lui disait cela, il savait désormais qu'il devait s'attendre au pire. Toutefois, une part de lui savait déjà cela. Il avait déjà fait les frais de la cruauté de cet inconnu, après tout, il avait déjà tenté de le tuer, deux fois.

— Hm, vous savez ce qu'on dit, on meurt tous un jour, répliqua le médium avec nonchalance, alors que ses doigts tremblaient légèrement. Qu'est-ce que votre prisonnier vous a dit ?

— Eh bien, je n'ai pas réussi à savoir le nom de son patron, je pense qu'il ne le connait même pas. En revanche, j'ai l'identité de son complice lors de ton enlèvement.

— Je vous écoute.

— Jonathan Osborn.

Jonathan Osborn, voila le nom de l'homme qui, huit ans plus tôt, avait appuyé sur la détente et mis un point final à la vie de Min Yoongi.