Le claquement d'une porte raisonna dans cet appartement dans lequel un silence assourdissant s'était installé. Seuls les couinements de Zeus, qui s'était allongé dans l'entrée, se faisaient entendre à travers ces murs désormais vides de toute joie et d'amour. À présent, il n'y avait que la tristesse et la détresse qui faisaient vibrer l'air de ce lieu.

Au fond du couloir, enfermé dans la chambre, le commandant Jeon s'était assis sur le sol au pied de son lit. Les genoux ramenés contre sa poitrine, il fixait son dressing où traînaient encore quelques vêtements qui ne lui appartenaient pas. Il pouvait voir le pull violet que Jimin aimait tant et plus il le fixait, plus les larmes qu'il ne tentait même plus de retenir le quittaient.

Il ignorait combien de temps, il était resté ainsi. Des minutes ? Des heures ? Il n'en avait aucune idée. Depuis que le médium avait quitté les lieux avec ce qui restait de joyeux en lui, il avait le sentiment que l'espace temps s'était arrêté. Plus les secondes passaient et plus il avait l'impression de suffoquer. Il avait la sensation que les cloisons se refermaient sur lui, que ce parfum qui l'avait tant apaisé, brûlait désormais sa trachée.

Ressentant un désir vital de fuir, brun se leva et prit sa veste en cuir ainsi que son équipement de moto. D'un pas pressé, il traversa l'appartement et le quitta pour rejoindre le parking souterrain.

Il avait besoin d'air, d'espace et il n'y avait qu'une seule chose qui pourrait le faire se sentir un peu mieux, la vitesse. Courant presque jusqu'à sa Ducati, il la chevaucha et fit gronder le moteur avant de démarrer à la hâte.

Sur les grands axes qui étaient dégagés, dû à l'heure tardive, le motard tourna l'accélérateur à son maximum et se pencha sur le réservoir, donnant à son bolide encore plus de vitesse.

Pendant qu'il slalomait entre les véhicules, tous les moments qu'il avait passés avec Jimin défilèrent dans son esprit. Leur premier baiser, leur première fois, le premier je t'aime qu'il avait entendu et son cœur se broya davantage.

— Mensonge, murmura-t-il dans son casque.

Perdu dans ses pensées, le commandant ne remarqua qu'à la dernière seconde le camion qui fonçait droit sur lui, néanmoins, il ne bougea pas. Continuant de rouler à grande vitesse vers ce véhicule qui le tuerait sur le coup, il ferma simplement les yeux, attendant que la mort vienne le chercher. Cependant, cette dernière ne voulait pas de lui.

Ce fut le klaxon aigu du poids lourd qui le fit de nouveau ouvrir les yeux et il vit que ce celui-ci l'avait évité de justesse. Pourquoi ? Pourquoi refusait-elle de le prendre ? Pourquoi devait-il continuer de vivre alors que son âme était en morceaux ?

Jungkook passa le reste de la nuit sur sa moto. Il avait simplement roulé sans destination et durant un instant, il avait pensé à se rendre chez Lilith. Il avait besoin de réconfort, qu'on l'écoute, mais son égo l'avait arrêté. Jimin l'avait trompé avec Lian. Il l'avait fait parce qu'il avait été un mauvais amant, à l'inverse de son ami qui avait toujours été parfait avec le médium. Il n'avait pas le droit d'en parler. C'était son fardeau, son nouveau démon qui venait rejoindre l'ancien pour qu'il puisse le hanter à deux.

Vers six heures, lorsque les premiers rayons de soleil commencèrent à teinter timidement le ciel, Jungkook décida enfin de rentrer chez lui. Telle la coquille vide qu'il était, le commandant prit une douche puis s'habilla sans même prendre la peine de se nourrir. Ne voulant pas que ses amis et collègues aperçoivent sa peine, il enferma son cœur à double tour derrière ses barricades, puis s'en alla.

Le trajet jusqu'au commissariat sembla interminable, mais il eut également la sensation de ne pas être présent. Comme si son corps agissait seul, conduisant l'Audi rouge tel un pilote automatique. Une fois sur place, il salua très rapidement les officiers en uniforme et se réfugia dans son bureau, priant pour que personne ne vienne le déranger.

Jungkook était bien conscient que tôt ou tard dans la journée, il devrait sans doute faire face à Lian, peut-être même accompagné de son ancien amant. Toutefois, il ne voulait pas y penser, il ne voulait pas avoir mal avant que la situation n'arrive réellement.

En se laissant tomber sur sa chaise à roulettes, son regard se posa sur le bureau de Jimin sur lequel reposait son ordinateur et il ne put s'empêcher de se demander où il avait passé la nuit. Était-il allé chez Lian ? Probablement. À présent, ils n'avaient plus besoin de cacher leur liaison.

⊱⋅ ──────────── ⋅⊰

À l'autre bout de la ville, ignorant totalement la tempête qui avait ravagé son deuxième foyer pendant la nuit, Taehyung stationnait son véhicule sur la place libre. En le quittant, le châtain remarqua l'absence de l'Audi rouge et, surpris par ce détail, il regarda sa montre s'assurant qu'il n'était pas en retard. Ce n'était pas le cas, il n'était que sept heures trente, alors pourquoi ses deux amis n'étaient déjà plus à l'appartement ? Est-ce que Jungkook avait été appelé pour une urgence pendant la nuit ? Non, il en aurait été informé.

D'un pas rapide pour se protéger du froid, il entra dans le bâtiment et longea le couloir qui menait à son appartement. Il tapa le code d'accès et y pénétra. Ce fut le calme plat qui l'accueillit, un silence presque anormal. Les sourcils froncés, il observa les alentours et remarqua que les baskets de Jimin n'étaient pas là, ni même les rangers de son meilleur ami.

— Kook ? appela-t-il en avançant dans le hall et la cuisine.

Une boule de poils se montra enfin. Loin d'être si enthousiaste que d'habitude, Zeus vint se coller à lui en couinant.

— Alors champion, comment tu vas ? demanda Taehyung en s'accroupissant devant l'animal pour le couvrir de caresses. Où sont tes maîtres ?

Zeus aboya, surprenant le châtain qui se redressa. Il scruta les alentours, mais ne vit aucun signe qui montrait que le couple était réveillé. La cuisine était propre, aucune vaisselle dans l'évier, aucune trace de petit déjeuner, ni même de repas.

D'un pas lent, il partit vers le couloir et remarqua que la porte de chambre de Jungkook était ouverte.

— Kook ? réitéra celui-ci.

En arrivant sur le seuil de la porte, il remarqua que le lit était fait au carré, comme s'il n'avait pas été défait. Il connaissait son frère, ce n'était pas le genre de personne à faire son lit dès le lever, et Jimin non plus d'ailleurs.

Les sourcils froncés et le pouls en pleine accélération, il traversa le couloir et remarqua que la chambre de son cadet était parfaitement rangée elle aussi.

— Mais où êtes-vous passés ?

À court de temps, Taehyung décida qu'il appellerait ses deux amis plus tard. D'un pas rapide, il rejoignit sa chambre, mais se figea sur le pas de la porte lorsque ses iris se posèrent sur une enveloppe blanche, posée si délicatement sur son oreiller, que le tissu de celui-ci était resté intact.

Les mains branlantes, il s'approcha de son lit et saisit le papier. Le cœur battant plus rapidement dans sa poitrine, il l'ouvrit et déplia la feuille qu'elle contenait. Il reconnut immédiatement l'écriture de Jimin et quand son cerveau comprit les premiers mots qu'il était en train de lire, il eut l'impression que le toit venait de lui tomber dessus.

"Je suis désolé de te dire au revoir de cette façon. J'aurais préféré que les choses se passent différemment, mais je n'ai pas pu faire autrement."

— C'est quoi ce délire, murmura-t-il, la gorge nouée.

"J'ai décidé de m'en aller. Je crois qu'il est temps que je vole de mes propres ailes et que je vous laisse reprendre le cours de votre vie qui était bien plus calme avant mon arrivée."

Ses yeux glissaient sur l'encre noire qui avait immortalisé les dernières paroles que son cadet n'avait pas eu le courage de lui dire. Qu'est-ce qui avait bien pu se passer de si grave pour que Jimin en arrive à cet extrême ?

"Je vous souhaite, à Lilith et toi, tout le bonheur du monde. J'espère un jour avoir la chance de rencontrer vos bébés qui, je le sais, seront les enfants les plus chanceux du monde. Qu'est-ce que j'aurais aimé être à leur place..."

En lisant ces lignes, Taehyung ne put empêcher une larme de s'écraser sur le papier. Il pouvait ressentir tout l'amour que son protégé avait pour lui, mais aussi toute la tristesse et la détresse qu'il avait ressentis en écrivant cela.

— Putain Jungkook, qu'est-ce que tu as fait ? fulmina-t-il, la mâchoire serrée.

Totalement chamboulé par cette lettre d'adieux, le lieutenant de police oublia totalement la raison de sa présence et se précipita hors de la chambre. Le corps tremblant, il sortit son téléphone de sa veste et sélectionna le numéro de Jimin. Contrairement à ce qu'il pensait, il n'y eut aucune tonalité, simplement la voix robotique du répondeur qui lui annonçait que son correspondant était actuellement indisponible.

— Fait chier ! cria presque Taehyung en quittant l'appartement d'un pas rageux.

La lettre de Jimin dans une main et son téléphone dans l'autre, il tenta une nouvelle fois de contacter son cadet, mais la réponse fut la même.

— Jeon Jungkook, j'espère que tu as une bonne explication.

⊱⋅ ──────────── ⋅⊰

À huit heures, le manque de sommeil se fit ressentir pour le tatoué qui n'avait pas dormi depuis vingt-quatre heures. D'un pas lent et dénué de motivation, il se leva et traversa le bureau pour le quitter. Dans l'espace commun du QG, il vit la porte s'ouvrir sur Rose, suivie de l'homme qu'il ne voulait pas voir. Lian.

— Bonjour Kook, tu es déjà là ? lança la rouquine avec enthousiasme.

— Ouais, répondit-il sans quitter l'autre brun du regard.

— Salut Jungkook, ça va ? demanda l'inspecteur avant de poser son regard sur le bureau vide derrière son supérieur.

Le commandant le toisa une fraction de seconde, prenant sur lui pour ne pas lui sauter dessus et assouvir la pulsion meurtrière qui le traversait. Cependant, malgré tout son self-contrôle, les paroles que l'inspecteur prononça ensuite furent de trop pour lui.

— Tu es seul ? Où est Jimin ? demanda-t-il.

Sans parvenir à se contenir plus longtemps, Jungkook saisit le col de sa veste et le premier coup de poing vint s'abattre sur la joue du plus grand. Un cri d'affolement s'échappa des cordes vocales de Rose qui sursauta en voyant son ami qui venait de se jeter sur son compagnon.

— JUNGKOOK ! s'écria Rose en se ruant sur les deux hommes pour les séparer.

Aveuglé par sa rage, le commandant n'entendit même pas la voix de son amie qui l'implorait de le lâcher. Ce dernier tenait fermement le col de son subordonné avec l'intention de le cogner de nouveau au visage, néanmoins, même s'il était étourdi, le corps de Lian réagit pour lui et esquiva le second coup.

— Arrête, je t'en supplie ! implora la rouquine.

Malgré tout la force que la jeune femme usait pour le stopper, Jungkook l'ignorait totalement. Voulant la mettre à l'abri d'un éventuel coup qui ne lui était pas destiné, Lian parvint à la repousser pour l'éloigner. La mâchoire en feu, l'inspecteur secoua vivement la tête pour reprendre ses esprits et esquiva de justesse le troisième coup. À cet instant, il vit une ouverture et avec une rapidité qu'il ne se connaissait pas, il effectua une clef de bras, faisant pivoter le corps du commandant.

Plaquant le bras de Jungkook dans son propre dos, il le tira jusqu'à son torse, tentant ainsi de l'immobiliser. Contre lui, son supérieur se débattait comme un enragé.

— Calme-toi, ordonna Lian d'un ton ferme.

— Ne me dis pas de me calmer ! Lâche-moi ! répliqua Jungkook sur le même ton.

Lorsque ces paroles quittèrent ses lèvres, le brun s'apprêtait à assener un coup de tête à son subordonné, mais celui-ci l'évita, amenant son visage près de son oreille.

— J'ignore ce qui te met dans un tel état, mais arrête-toi ! réitéra l'inspecteur.

— Kook s'il te plaît, calme-toi ! Qu'est-ce qui t'arrive ? intervint Rose en faisant un pas vers eux.

— Non, bébé reste où tu es ! imposa Lian.

Ce dernier commençait à perdre ses forces. Maintenir un homme comme Jeon Jungkook immobile n'était pas une mince affaire. Ce grand tatoué avait une carrure plus imposante que la sienne et surtout, il était bien plus lourd et plus fort que lui, ça, c'était indéniable.

Attirés par l'agitation, Seo-joon et Chul sortirent de leur bureau à la hâte. Ils se précipitèrent vers leurs deux amis et virent Lian qui, à bout de force, finit par relâcher sa prise sur Jungkook. Le commandant s'écarta et lui lança un regard noir. Sa rage était lisible sur son visage et toutes les personnes présentes dans la pièce se demandèrent si leur supérieur n'avait pas perdu la raison.

Depuis qu'il avait pris la tête de cette unité, jamais Jungkook n'avait été violent avec l'un de ses subordonnés, surtout pas sans raison et encore moins avec ses amis.

Incapable de raisonner correctement et incité par sa peine, le tatoué poussa violemment Lian contre la cloison en bois. La vitre qui y était encastrée, céda sous le choc dans un bruit sec. À présent séparés par quelques millimètres, le tatoué ne lâchait pas sa cible du regard, tandis que ce dernier le fixait également, confus et déboussolé par l'attaque qu'il venait de subir.

— Tu as un sérieux problème ! beugla Lian, essuyant la commissure de sa lèvre.

— Ferme ta gueule ! cingla Jungkook, enragé. Ce n'est pas moi le problème ici !

Avant que le grand brun n'ait le temps de répliquer, une voix résonna dans l'immense pièce où seuls les souffles haletants se faisaient entendre.

— Je peux savoir ce qui se passe ici ?!

Toutes les têtes se tournèrent vers l'homme qui venait d'intervenir et ils firent face à Taehyung qui se tenait près de la porte, une enveloppe blanche en main. Les yeux du châtain passèrent de son frère adoptif à ses amis avant de revenir sur le plus vieux.

— Je t'ai posé une question ! cingla le lieutenant d'un ton autoritaire.

— Ça ne te regarde pas ! répliqua froidement Jungkook.

— Ah oui ? Et ça, ça ne me regarde pas non plus ? cracha Taehyung en levant l'enveloppe qu'il tenait dans sa main.

Comprenant que ce dernier venait, par sa présence, de mettre fin à ce conflit, Rose s'approcha de son amant et prit son visage en coupe pour l'examiner.

— Est-ce que ça va ? demanda-t-elle en essuyant le filet rougeâtre qui s'échappait de sa narine droite.

— Oui, ce n'est rien, répondit Lian, tentant de paraître le plus sincère possible.

— Lian, va à l'infirmerie. Les autres, retournez au travail, ordonna une nouvelle fois le lieutenant. Il n'y a plus rien à voir.

— Je ne bougerai pas tant qu'il ne m'aura pas expliqué pourquoi il vient de me sauter dessus comme un chien enragé, cingla Lian avant de poser la question à laquelle il n'avait pas eu de réponse plutôt. Où est Jimin ?

En entendant ce prénom, Jungkook fit un pas un avant, la mâchoire et les points fermés, mais Taehyung posa la main sur son torse, lui barrant la route.

— Tu oses me demander où il est alors que tu l'as baisé toute la soirée ? cingla le commandant.

La question du tatoué planta un silence pesant dans la pièce. Les prunelles de Lian voyageaient entre celles de son supérieur. Il y cherchait une quelconque trace de plaisanterie, mais il n'y vit que de la colère et de la souffrance. Confus, il prit enfin la parole, tentant de maîtriser sa voix qui menaçait de se briser.

— Q-quoi ? Tu délires.

— Ne joue pas les innocents ! s'emporta Jungkook. Quelqu'un vous a filmés et m'a envoyé la vidéo ! Je vous ai vus de mes propres yeux !

— Kook, de quoi tu parles ? demanda Rose, perdue.

— Figure-toi que ton mec a couché avec le mien hier soir et à mon avis, ce n'était pas la première fois !

— Non ! C'est faux ! se défendit Lian. Tu es complètement malade ! Que tu ne me fasses pas confiance, c'est une chose, mais fais au moins confiance à ton petit ami !

— Que je lui fasse confiance ? C'est ce que j'ai fait et regarde où ça m'a mené ! cria le commandant, la gorge déchirée par l'émotion. Je vous... je vous ai fait confiance et pendant que j'étais ici à travailler, vous étiez en train de vous envoyer en l'air ! Arrête de nier, j'ai vu ton visage ! 

Taehyung et Rose assistaient à toute la scène, impuissants. Ils ne comprenaient pas ce qui était en train d'arriver, mais ils pouvaient voir à quel point leur chef d'unité était brisé par la situation.

— Lian te dit la vérité, fit enfin la jeune femme.

— Il te manipule ! Ouvre les yeux ! Ça fait des mois qu'il lui tourne autour ! rétorqua le brun, sidéré et blessé que son amie ne prenne pas sa défense.

— Non ! insista Rose d'un ton plus ferme. Je t'assure que ce que tu avances est impossible ! Lian a passé la nuit avec moi. J'étais avec eux au bar et ensuite, on est rentré chez moi. Ça fait presque une semaine qu'on passe nos soirées ensemble alors, je ne sais pas qui t'a envoyé ces vidéos, mais c'est un tissu de mensonges. Jimin ne te tromperait jamais et encore moins avec mon petit copain.

— Jungkook, tu te rends compte de ce que tu dis ? lança Lian, outré. Tu... merde, tu m'accuses d'avoir non seulement trompé ma petite amie, mais aussi de t'avoir trahi ? Tu me fais si peu confiance pour me penser capable de te faire ça ?

— Je vous ai vu ! martela le commandant, aveuglé par sa douleur et sa peine. Comment tu peux me dire que je me trompe alors que je vous ai vus, Lian ! Comme je te vois, tu... tes mains, elles...

— CE SONT DES CONNERIES ! s'emporta le grand brun en repoussant la main de Rose qui reposait sur son avant-bras. Je n'aurais jamais touché à Jimin et j'aurais encore moins été infidèle. Tu dérailles complètement alors ressaisis-toi ! Je n'ai pas touché à ton mec ! articula plus fermement Lian. J'ai passé la nuit avec Rose et ça a été le cas la nuit d'avant et encore celles d'avant ! Maintenant, si tu ne me crois toujours pas, alors je ne peux plus rien faire pour toi ! Je ne vais pas me plier en quatre pour calmer ta paranoïa ! J'en ai ma claque de tes délires !

En écoutant la conversation, Taehyung assimila les pièces du puzzle et fit rapidement le lien entre la lettre et cette dispute. Cette soi-disant vidéo était la raison de cette séparation, il en était persuadé, voilà pourquoi son frère était si fou de rage.

— C'est à cause de ça que Jimin est parti ? intervint Taehyung, les sourcils froncés. C'est à cause de cette vidéo qu'il a écrit cette lettre ? reprit ce dernier en levant l'enveloppe.

— Q-quelle lettre ? demanda Jungkook en tendant la main pour attraper le morceau de papier.

Une sonnerie de téléphone résonna dans l'air, interrompant la conversation et interpelant chaque personne qui était encore présente. Sentant l'appareil vibrer dans la poche de sa veste, Taehyung soupira tout en sortant son portable. Le nom sur son écran le fit écarquiller les yeux et accélérer son pouls.

— C'est Jimin, annonça-t-il en croisant le regard de ses trois amis.

En entendant ce prénom, Jungkook détourna le regard, puis le reste de son corps suivit et il commença à marcher vers son propre bureau. Il avait besoin de prendre l'air, non, il avait besoin de solitude. Il s'apprêtait à changer de direction quand la voix de son frère adoptif attira son attention.

— Jimin où es-tu ? Je t'ai appelé une cent-

Voyant la mine grave qui avait pris place sur le visage de Taehyung, le commandant sentit chaque muscle de son corps se tendre.

— Qui êtes-vous ? demanda le lieutenant d'un ton plus dur.

Le cœur battant à tout rompre, Jungkook s'approcha de son meilleur ami, imité par Lian et Rose qui avaient ressenti la même crainte. Quand les quatre policiers se retrouvèrent côte à côte, le châtain décolla le téléphone de son oreille et mit le haut-parleur.

— Peu importe qui je suis, répondit une voix grave qu'aucun d'eux ne connaissait. Ce qui nous intéresse, c'est plutôt le gamin que j'ai avec moi. Hum, c'est quoi son nom déjà ?

— Park Jimin, lança un deuxième homme.

— Oui, c'est ça, Park Jimin, reprit le premier interlocuteur.

— Qui êtes-vous et où est Jimin ? intervint Jungkook, le cœur tambourinant dans ses tempes, alors que son corps était traversé par des sueurs froides.

— Oh, qui avons-nous là ? Commandant Jeon, ricana-t-il.

— Vous connaissez mon nom, maintenant donnez-moi le vôtre, imposa le concerné en prenant le téléphone de la main de Taehyung.

— Vous pouvez m'appeler Jo.

— Très bien Jo, je ne sais pas qui tu es, mais je ne suis pas d'humeur à plaisanter, alors si tu ne veux pas que les choses tournent mal pour toi, dis-moi où-

— À votre place, j'éviterais les menaces commandant, sauf si vous voulez que je vous envoie la tête de votre petit ami ? le coupa Jo avec un rire narquois.

Le cœur de Jungkook tomba au sol pendant qu'à ses côtés, ses trois amis ressentaient une panique incontrôlable les envahir.

— Qu'est-ce qui me dit qu'il est vraiment avec vous et que vous n'avez pas simplement trouvé son téléphone ?

— Sortez votre téléphone, je vais vous envoyer un petit cadeau.

Les mains tremblantes, le brun sortit son portable de sa poche et y vit une notification. Anxieux, il l'ouvrit et cliqua sur le lien qui se trouvait sur le message. Quand il comprit ce qui se déroulait sous ses yeux, Jungkook crut que le sol venait de s'ouvrir sous ses pieds.

— Au cas où vous vous poseriez la question, c'est en direct, informa Jo toujours amusé par la situation.

Dans sa main, projeté sur l'écran du téléphone, il pouvait voir Jimin, assis sur un sol en métal, les pieds et les mains ligotés tandis qu'un morceau de ruban adhésif recouvrait sa bouche. Quand le regard de son cadet se tourna vers la caméra, Jungkook eut la sensation que son cœur venait d'être traversé par des milliers de lames. La terreur était visible à travers ses prunelles sombres, mais ce qui attira l'attention du policier, fut le sang qui s'écoulait de son arcade sourcilière.

Étant le seul en total maîtrise de ses émotions, Taehyung décida de prendre les choses en main. Jimin était en danger, il devait tout mettre en ordre pour le retrouver et le plus vite possible.

— Va chercher Lim. Dis-lui que Jimin a été enlevé, ordonna-t-il à l'attention de Rose dans un murmure. Lian, projette la vidéo sur l'écran et tente de tracer l'appel.

La rouquine quitta le QG en troisième vitesse pendant que de son côté, Lian se précipita vers la table tactile et commença à pianoter sur la vitre. En silence, le lieutenant prit le poignet de son meilleur ami et le tira jusqu'à leur espace de travail.

— Alors commandant Jeon, vous avez perdu votre langue ? le nargua Jo.

Le ton provocateur de son interlocuteur réveilla une colère que Jungkook eut du mal à maîtriser. Les membres tremblants de peur et d'angoisse, il sentit son rythme cardiaque s'accélérer considérablement alors que ses oreilles se mirent à bourdonner. Jimin avait été enlevé, ce qu'il redoutait le plus était arrivé et il était en partie responsable.

Lorsque Lian parvint enfin à projeter la vidéo, les six yeux se posèrent sur l'image à présent bien plus grande et chacun d'eux semblait avoir cessé de respirer. Au même moment, la porte du QG s'ouvrit sur le capitaine Lim et Rose qui marchèrent en troisième vitesse vers leurs collègues.

— Écoute-moi bien enfoiré, je ne sais pas ce que tu veux, mais si tu touches à un seul de ses che-

Avant qu'il n'ait le temps de finir sa phrase, un homme cagoulé apparut sur l'écran et frappa Jimin en plein visage, faisant vaciller sa tête sur le côté. Un halètement de surprise résonna près de Jungkook et il n'eut pas besoin de tourner la tête pour savoir qu'il s'agissait de Rose. La jeune femme s'était brusquement tournée vers son amant, cachant son visage pour s'empêcher de voir le mal qu'on faisait à son ami.

— Je vais te tuer. Je te jure que je vais te retrouver et je te tuerai de mes propres mains ! menaça le commandant, d'une voix plus grave.

— Arrêtez, commandant, lança Jo, nullement préoccupé par les menaces du policier. Si vous continuez à être si désagréable, mon ami ici présent, continuera de lui faire mal. Ce n'est pas ce que vous voulez. Si ?

— Lian, tu as trouvé d'où vient l'appel ? demanda Taehyung d'une voix basse.

— Non toujours pas, il se sert d'un proxy pour bloquer le signal. À chaque fois que je pense le trouver, il change de satellite, répondit-il, le regard rivé sur l'écran tactile.

— Jungkook, fais le parler, ordonna le lieutenant dans un murmure.

Le concerné hocha la tête et baissa les yeux vers le téléphone qui était posé sur le rebord en bois. Il n'avait plus le courage de regarder le visage de l'homme qu'il aimait. Il ne supportait plus de le voir si vulnérable.

— Comment ? lança-t-il subitement, la mâchoire serrée.

— Comment quoi ? répliqua le kidnappeur. Comment nous avons mis la main sur votre petit ami alors que vous le colliez comme une sangsue ? Facile. Nous avons envoyé un petit journaliste et nous avons attendu le bon moment. Vous êtes si lâche et effrayé qu'il n'a suffi que d'un montage vidéo pour que votre confiance en lui soit anéantie.

Le brun mit quelques secondes avant de comprendre la portée de ces paroles. Toutes les informations s'assimilaient dans son esprit et il comprit. La vidéo, Woong, tout était lié. Tout ce qu'il pensait être vrai, n'était qu'une autre manigance de la part de cet homme. Encore une fois, il était parvenu à détruire sa vie.

— Alors commandant, vous êtes bien silencieux. Je n'ai pas le droit à une insulte ? Une petite menace ? Je suis déçu, se moqua Jo. Mais vous savez ce qui me déçoit le plus ? C'est la facilité avec laquelle ce petit journaliste de Séoul a réussi à vous manipuler. J'aurais payé cher pour voir votre tête quand vous avez ouvert la vidéo. Je trouve ça triste que vous ayez eu si peu confiance en votre petit ami. Regardez-le, avec sa gueule d'ange, on aurait presque envie de la salir.

Quand ses mots quittèrent ses lèvres, Jungkook vit un homme entrer dans le champ de la caméra et s'approcher de Jimin. Il le vit s'accroupir devant lui avant qu'il ne vienne caresser du bout de son doigt, la mâchoire du médium, descendant dans son cou. Ligoté, le blond se débâtait comme un lion, tentant de s'éloigner de ce toucher qui le dégoutait et même s'il était bâillonné, le commandant pouvait l'entendre crier à travers la bouche fermée.

— Ne le touche pas, somma le tatoué, d'un ton presque suppliant.

Au même moment, Jimin asséna un coup de tête à l'homme qui se tenait face à lui. Ce dernier tomba en arrière en beuglant toute sorte d'insultes puis se releva. Le brun savait ce qui allait arriver alors, avant que le coup ne tombe, il détourna le regard et ferma les yeux, sentant encore une fois, son cœur se briser.

— S'il vous plaît, arrêtez, implora cette fois Jungkook.

— Ce fils de pute m'a pété le nez ! beugla l'individu avec la cagoule, ses deux mains couvrant la partie inférieur de son visage.

— C'est un vrai lionceau qu'on a là, vous ne trouvez pas commandant ? lança Jo.

En regardant l'écran, le commandant comprit que l'homme qui parlait à travers le téléphone n'était pas celui qui était à l'écran. Il savait déjà qu'ils étaient deux, il avait pu l'entendre parler plus tôt, mais à présent, il se demandait s'ils étaient dans la même pièce.

— Lian, est-ce que tu l'as trouvé ? intervint pour la première fois le capitaine de la police.

Avant que le concerné n'ait le temps de répondre, la voix du premier kidnappeur, résonna à travers le téléphone, attirant de nouveau l'attention de tout le monde.

— Capitaine, cela ne sert à rien de tracer l'appel, vous ne pourrez pas remonter jusqu'à nous.

— Très bien, alors qu'est-ce que vous voulez ? questionna Lim.

— Lutter contre le réchauffement climatique, et la paix dans le monde, répondit Jo avec sarcasme.

Le commandant posa ses mains à plat contre le rebord en bois et se pencha en avant. Il avait l'impression que tout son corps était en ébullition et que son cerveau allait exploser tant l'inquiétude et la culpabilité le dévoraient.

— Quoi, personne n'a trouvé ça drôle ? reprit le ravisseur. Bon d'accord, parlons business alors. Commandant, vous et votre petit ami avez mis le nez dans les affaires de mon patron et il déteste ça. Vous avez eu un premier avertissement quand Ramez est venu le saluer, mais vous n'en avez pas tenu compte. À présent, il ne rigole plus.

Jungkook releva immédiatement la tête quand il réalisa qui était l'homme au bout du fil.

— Vous bossez pour Mister D, n'est pas ? C'est lui qui a fait assassiner Min Yoongi, il y a huit ans.

Taehyung et les autres personnes présentes tournèrent vivement la tête vers le commandant, confus, mais surtout surpris par ses accusations.

— Ce fils de pute fait dans son froc parce qu'il sait qu'on se rapproche de lui, pas vrai ? reprit le tatoué.

— Surveillez vos paroles, commandant Jeon. Il serait regrettable que Jimin subisse les conséquences de votre impolitesse, l'avertit Jo d'un ton plus sérieux.

— D'accord monsieur, vous nous avez prouvé à quel point vous étiez sérieux et que vous aviez le contrôle total de la situation, intervint de nouveau Lim. Qu'attendez-vous de nous ?

— De vous capitaine ? Rien. En revanche, je veux que Jungkook me ramène tout ce qui touche de près où de loin au meurtre de ce prostitué. J'ai déjà récupéré le téléphone de Jimin. Je veux tout le reste. Ordinateur portable, dossier papier et surtout, n'oubliez pas le carnet que Seok-min vous a donné, imposa le kidnappeur. Et oui commandant, nous savons tous. Nous avons des yeux et des oreilles partout alors, tâchez de faire ce que je vous demande.

— Ok, répondit Jungkook sans hésiter. Je vous donnerai tous ce que vous voulez, mais ne le touchez plus.

À ce moment précis, le brun avait mis sa fierté de côté. Pour sauver l'homme qu'il aimait, il était prêt à tout, s'il le fallait, il était même prêt à se mettre à genoux.

— Ce qui lui arrivera, dépendra de votre capacité à satisfaire ma demande en temps et en heure.

— Je le ferai, dites-moi où vous êtes et je viendrai en personne.

Un rire se fit entendre à travers le téléphone avant que Jo ne prenne la parole.

— Me prenez-vous pour un imbécile, commandant ? Je vous connais. Je connais votre passé et vos compétences. Vous donner ma position serait du suicide, ricana le ravisseur. Le lieu de l'échange vous sera envoyé par message. Vous avez jusqu'à vingt-deux heures ce soir pour me ramener ce que je veux. Passé ce délai, je vous enverrai sa tête dans une boite, mais avant, je laisserai mon ami s'amuser avec lui et je m'assurerai que vous soyez témoin de tout ce qu'il lui fera.

Sans rien ajouter ni même attendre une réponse quelconque, Jo mit fin à l'appel. Pourtant, la vidéo en direct, elle, continuait de diffuser et avant que celle-ci ne se termine aussi, Jungkook et son équipe purent voir l'homme cagoulé saisir Jimin par les cheveux et le traîner hors de la pièce.

En voyant cette scène des plus insupportables, Rose ne put retenir un sanglot qu'elle étouffa avec ses deux mains contre sa bouche. Choquée, elle vint enfouir son visage contre le torse de son petit ami qui la prit dans ses bras. Le commandant, lui, fixait l'écran, les yeux vitreux et les poings fermés. Son âme hurlait tant ce moment était insupportable, mais il tentait de rester le plus calme possible.

Quand le médium disparut totalement de l'écran, l'image se figea avant que celle-ci ne devienne noire et Jungkook sut que c'était fini.

Faisant les cent pas dans la pièce, les mains sur les hanches, le brun tentait de reprendre le contrôle de ses émotions, mais il n'y parvenait pas. Il sentait sa poitrine se resserrer tel un étau et la douleur devenait de plus en plus insupportable. Sans pouvoir se contrôler davantage, Jungkook shoota rageusement dans la poubelle qui se trouvait à ses pieds, surprenant ses amis qui tournèrent subitement la tête vers lui.

Lim posa les yeux sur ce garçon qu'il aimait comme son fils et vit la panique le gagner. La main sur sa poitrine, ce dernier marchait de gauche à droite, tentant difficilement de reprendre son souffle. Inquiet, le capitaine de police mit de côté son rôle de dirigeant et s'approcha du brun.

— Jungkook, regarde-moi, fit-il avec douceur.

— Je... je... c'est ma faute. Ils... ils vont le tuer.

— Non, non, ne pense pas à ça maintenant. Pour le moment, tu dois te calmer.

— Je... j'y arrive p-pas, paniqua Jungkook, la gorge nouée par les sanglots.

— Kook, murmura Taehyung en faisant un pas vers lui.

En remarquant cela, le tatoué tendit sa main devant lui, demandant silencieusement à tous ceux qui l'entouraient de ne pas l'approcher. À cet instant, chaque toucher, aussi bienveillant soit-il, était pour lui, semblable à une brûlure d'acide.

Lim nota la peine présente sur le visage de son lieutenant alors, d'une voix basse, il fit un pas vers lui et chuchota quelques mots.

— Il fait une crise de panique, déclara-t-il. Il a besoin d'espace. Va chercher un verre d'eau avec du sucre, s'il te plaît. Je vais gérer ça.

Le châtain hocha la tête et à contrecœur, il abandonna son frère aux mains d'un homme en qui il avait toute confiance.

— Rose, emmène Lian à l'infirmerie, s'il te plaît, demanda-t-il avec douceur.

La rouquine hocha la tête et prit la main de son petit ami pour le trainer hors de la pièce. Pendant qu'il marchait, le grand brun croisa le regard de son commandant et il put y lire toute la culpabilité et la détresse qui le consumait. Lian lui en voulait, c'était un fait. Son ami l'avait agressé sans raison, il avait porté des accusations graves à son encontre, mais même après tout cela, il ne put empêcher sa poitrine de se serrer. Jungkook était fou amoureux de Jimin, voilà pourquoi sa réaction avait été si violente, et à présent, le garçon qu'il aimait était entre les mains d'hommes prêts à tout et dont ils ne savaient rien. Sa vie était en danger, c'était la triste vérité, mais l'inspecteur savait que chaque personne ici, ferait son maximum pour le retrouver.

Maintenant qu'ils étaient seuls, le capitaine porta toute son attention sur son cadet et prit de nouveau la parole, prenant le ton le plus compatissant et rassurant possible.

— Fiston, écoute-moi. Je sais ce que tu ressens, mais tu dois retrouver ton calme. Jimin est en vie, tu entends. Il est en vie et on fera le nécessaire pour le ramener sain et sauf, je t'en fais la promesse, mais pour ça, j'ai besoin que tu reprennes tes esprits.

Jungkook écoutait les paroles de son aîné, mais son cœur et sa conscience ne voulaient rien savoir. Il était le seul responsable. Tout ce qui arrivait était sa faute. S'il avait eu confiance en Jimin, s'il ne l'avait pas repoussé, il serait ici, avec lui. Il serait dans ses bras, en sécurité.

— Jungkook, reprit Lim en posant ses deux mains sur les épaules du brun, ancrant son regard dans le sien. S'il y a bien une personne ici qui est capable de le retrouver, c'est toi. Jimin compte sur toi pour le sortir de là et c'est ce que tu vas faire ok ?

Le concerné resta silencieux ses longues secondes, ses prunelles passant entre celles de son aîné. Son cœur battant à tout rompre, il prit une grande inspiration et hocha la tête, arrachant un sourire fier à son vis-à-vis. Loin de son rôle de capitaine, Lim vint le prendre rapidement dans ses bras puis ils furent interrompus par la porte du QG qui s'ouvrit sur Taehyung.

— Tiens, fit ce dernier en tendant un verre d'eau à son frère.

— Merci, murmura-t-il.

Le commandant but son contenant d'une traite et inspira de nouveau, tentant encore de ralentir son rythme cardiaque.

— Ça va mieux ? demanda Taehyung, inquiet.

— Oui Tae, merci. Je...

Son regard se porta sur l'enveloppe qui se trouva sur la table tactile et sur laquelle le brun reconnut l'écriture de son cadet.

— Je peux la lire ?

— Non, je... je crois que ce n'est pas le moment, refusa le châtain.

— Pourquoi ? Qu'est-ce qu'il te dit là-dedans ? questionna Jungkook, les sourcils froncés.

— Simplement qu'il s'en va, mais tu n'as pas besoin de lire ça maintenant. Notre priorité, c'est de le retrouver, on verra pour ça plus tard.

En voyant son frère adoptif ranger l'enveloppe dans la poche de sa veste, le commandant comprit qu'il n'obtiendrait pas ce qu'il voulait, alors il se résigna.

— Ok, le temps presse, intervint Lim en regardant sa montre. Il nous reste quatorze heures avant que le temps imparti soit terminé. Il faut qu'on réfléchisse et qu'on fasse les choses bien.

— Je-

Jungkook fut interrompu par la porte qui s'ouvrit de nouveau, mais cette fois sur Rose et Lian dont l'os de sa mâchoire présentait la naissance d'une belle ecchymose.

En voyant l'état de son ami, la culpabilité qui dévorait le commandant se fit encore plus grande, plus douloureuse. Il lui était impossible de le regarder dans les yeux tant il se sentait honteux, alors il détourna simplement la tête, fixant le sol.

— Comment tu te sens Lian ? demanda Lim, préoccupé par l'état de son agent.

— Ça va capitaine, ne vous inquiétez pas. J'ai connu pire, répondit-il avec son éternelle gentillesse.

— Ok, on s'occupera de ça plus tard, fit le capitaine avant de se tourner vers Jungkook. Maintenant qu'est-ce qu'on fait ?

Le tatoué leva la tête vers son aîné, surpris par sa question. C'était lui le chef de la police, il était plus haut gradé, c'était à lui de donner les ordres. Pourquoi voulait-il que ce soit lui, simple commandant qui le fasse ?

— Je...

Jungkook était perdu. Lui qui avait toujours réussi à gérer les situations de crise d'une main de maître, ne savait pas quoi faire. Il savait que la moindre erreur mettrait la vie de Jimin en jeu et cela le paralysait.

— Je sais que c'est dur, mais tu vas devoir mettre de côté tes sentiments et agir comme s'il s'agissait d'une affaire de kidnapping ordinaire. Qu'aurais-tu fait si la victime t'était inconnue ? lui demanda Lim.

Un silence de plomb s'installa dans la pièce alors que tous les regards étaient braqués sur le tatoué. Ce dernier était devant la table tactile, les yeux fermés, inspirant et expirant à un rythme régulier. Quand il se sentit prêt, Jungkook leva la tête, le visage dénué d'émotion. Il était redevenu le commandant Jeon, rien de plus, rien de moins. À présent, il devait garder son masque et se concentrer s'il voulait avoir une chance de ramener son amant en vie.

— On va visionner la vidéo, analyser les mouvements de sa carte de crédit, peut-être que ça nous donnera un indice sur l'endroit et l'heure de son enlèvement. Pendant ce temps, je vais rassembler toutes les infos sur le meurtre de Yoongi. On va leur donner ce qu'ils veulent-

— Kook, si tu fais ça, on n'aura plus rien pour arrêter le tueur de Yoongi, le coupa Taehyung d'une voix prudente.

— Je m'en tape. Je ne le vois pas, mais je suis persuadé que si Yoongi était avec nous en ce moment même, il serait d'accord avec moi. Ce qui compte, c'est de récupérer Jimin, coute que coute, répliqua immédiatement Jungkook d'un ton dur.

— Je pourrais cloner l'ordinateur de Jimin ? proposa Lian attirant toute l'attention sur lui. Ça nous permettrait de garder une trace de tout ce que vous aviez concernant ce meurtre.

— Tu pourrais faire ça ? demanda le commandant, surpris.

— Bien-sûr, répondit-il.

— Attention les enfants, vous avez entendu ce qu'il a dit ? intervint Lim d'une voix plus basse.

— Ils ont des yeux et des oreilles partout, récita Rose, le regard rivé sur son supérieur.

— Exactement. Je ne sais pas de quoi il parlait, mais notre réseau est peut-être compromis.

— Comment on fait alors ? S'ils nous ont piraté, ils vont savoir tout ce qu'on fait, lança Taehyung.

— C'est pour ça qu'il nous faut un expert, fit Lian.

Jungkook croisa pour la première fois le regard de son ami et sans rien dire, les deux hommes se comprirent.

— Appelle-le, accepta le commandant.

L'inspecteur hocha la tête et sortit son téléphone pour contacter son indic, mais il fut stoppé par Lim qui leva la main.

— Pas de téléphone. Va à l'armurerie, on y stock les téléphones satellitaires, c'est plus sûr comme moyen de communication.

Lian hocha la tête et partit d'un pas rapide vers le sous-sol. Son départ laissa un calme s'installer dans la vaste pièce avant que Jungkook ne reprenne la parole.

— Lim, je sais qui est derrière tout ça. Je vais le retrouver et aller le voir, mais je te préviens, je-

— Tu as carte blanche et je te donne l'autorisation d'user de tous les moyens nécessaires pour ramener Jimin, assura le capitaine en posant sa main sur l'épaule de son cadet.

Pour unique réponse, le brun hocha la tête et se tourna de nouveau vers ses amis.

— Ok, Lian va appeler Namjoon. Je ne sais pas s'il vient jusque ici où s'il faudra se déplacer, mais on fera le nécessaire. Toutes les affaires que vous avez en cours sont mises en attente jusqu'à ce qu'on retrouve Jimin.

Taehyung et Rose hochèrent la tête avant que son meilleur ami ne prenne la parole.

— Kook, montre nous la vidéo que tu as reçue.

Le brun fut surpris par sa demande, mais hocha la tête. D'une main tremblante, il sortit son téléphone de sa poche et le posa sur la vitre tactile. La connexion avec l'appareil fut instantané, alors d'un geste hésitant, il sélectionna le fichier en question et l'ouvrit.

— Attends, fit Rose en posant sa main sur son poignet. Lian n'est pas là. Je crois qu'il a le droit de voir ça aussi, surtout après ce qui s'est passé.

Jungkook hocha silencieusement la tête et laissa son bras retomber le long de son corps. L'ambiance dans la pièce était si lourde qu'il ressentit de nouveau ce besoin vital de prendre l'air.

— Je... je vais prendre l'air, annonça-t-il.

Sans attendre une quelconque réponse, il prit la direction de la sortie et monta sur le toit. L'air frais de ce mois d'octobre le frappa de plein fouet, le faisant frissonner, mais il ne retourna pas à l'intérieur. À la place, il alla s'asseoir sur le rebord et sortit une cigarette de sa poche qu'il glissa entre ses lèvres avant de l'allumer. Le regard perdu dans l'horizon, le brun ne cessait de revivre les dernières paroles qu'il avait eues envers Jimin, se maudissant d'avoir été si aveugle.

Une quinzaine de minutes plus tard, Jungkook était redescendu au QG où ses amis l'attendaient. Lim, lui, était parti. Il avait prévenu Taehyung de son absence pour la journée, mais restait joignable à tout moment et surtout, il voulait être tenu au courant de l'avancée des choses.

— Qu'est-ce que Namjoon t'a dit ? demanda le commandant à l'attention de Lian.

— Il ne devrait plus tarder, répondit-il sans le regarder.

Le tatoué savait que son ami lui en voulait, c'était légitime et il savait qu'il devait s'excuser, mais ce n'était pas le moment.

— Jungkook, montre nous la vidéo, lança Rose.

Le concerné hocha la tête et ouvrit le fichier. Il montra d'abord la photographie qu'il avait reçue sur laquelle l'on voyait Jimin de dos, puis il lança la vidéo. Durant les premières secondes, aucune des quatre personnes ne parlait. Leurs regards étaient rivés sur l'écran sur lequel défilaient les images que Jungkook était incapable de regarder. Même si à présent, il savait que ce n'était pas Jimin, cela lui rappelait trop ce qu'il avait fait et les accusations qu'il avait portées.

— Merde, murmura Rose.

— Qu'est-ce qu'il y a ? demanda le tatoué en regardant son amie.

— C'est... c'est moi. Enfin là, on ne dirait pas parce que la vidéo a été modifiée, mais c'est moi, fit la jeune femme d'une voix tremblante.

— Quoi ?

— C'est chez moi, remarqua Lian les sourcils froncés.

— C'est.... c'est nous. Cette vidéo a été prise jeudi soir, expliqua la rouquine.

Les yeux débordant de larmes, la jeune femme posa un regard débordant d'inquiétude sur son petit ami qui s'approcha d'elle et la prit dans ses bras en venant embrasser son front.

— Qui a fait ça ? demanda Lian en regardant son supérieur.

— Je pense que c'est Myong Woong.

— Woong ? intervint Taehyung, confus. Il y a quelques semaines, je suis allé boire un café avec Jimin à la boulangerie de madame Li et un homme est venu le voir. Il s'appelait Woong et je dois avouer que je l'avais trouvé étrange. Est-ce que c'est le même d'après toi ?

— Grand, brun, visage assez fin et des yeux de chat ? récita Jungkook.

Le plus vieux de l'équipe hocha la tête puis Rose prit la parole.

— C'est qui ce mec ? demanda-t-elle.

— Mon ex, souffla le tatoué, le regard fuyant.

Un autre silence s'imposa dans la pièce alors que les trois policiers se regardaient à tour de rôle. Personne à part Taehyung n'était au courant pour le passé amoureux du commandant. Ce dernier ne s'était jamais étalé sur sa vie privée, mais ils savaient que quelqu'un avait brisé le cœur de leur ami. À présent, il avait son nom.

— Ce Woong, c'est lui qui a filmé ça et enlevé Jimin ? questionna Lian.

— Je ne pense pas que ce soit lui qui l'ait enlevé, il n'a pas assez de couilles pour ça, mais je pense que c'est lui qui leur a donné les infos, répondit le commandant avant de soupirer. Je... je n'en suis pas sûr, mais je vais tirer ça au clair.

— Je veux venir, imposa le grand brun.

— Non, je vais gérer ça.

— Cet enfoiré a violé notre intimité ! Tu penses que je vais rester là les bras croisés ? cingla l'inspecteur.

— J'ai besoin de toi ici. Je m'occupe de Woong, répondit Jungkook d'un ton plus autoritaire.

Tandis que les deux hommes se livraient à un duel de regard, un officier en uniforme ouvrit la porte du QG, mettant fin à leur échange.

— Commandant, monsieur Kim est arrivé, annonça l'officier Cho.

— Merci Hyun, répondit-il.

L'homme en uniforme s'inclina poliment et repartit, laissant derrière lui le hacker qui observait les alentours. Depuis qu'il était devenu indic pour la police de Busan, c'était la première fois que Namjoon mettait les pieds au QG de la criminelle. En examinant les lieux, il devait avouer que l'équipement informatique qu'il avait sous les yeux était bien plus récent et performant qu'il ne l'aurait cru.

— Salut, fit-il en regardant enfin les quatre personnes qui le fixaient.

— Salut, parla Lian en avançant vers le grisé. Merci d'être venu.

— Tu m'as dit que Jimin avait des soucis, je ne pouvais pas refuser. Où est-il ?

— Il s'en fait enlever, répondit Jungkook.

— Quoi ? Quand ?

— Cette nuit.

— Ok euh... qu'est-ce que tu veux que je fasse ?

— On pense que les ravisseurs ont piraté notre système pour nous espionner. Je sais que tu utilises un réseau privé alors, il faudrait que tu t'en serves pour faire quelques recherches.

— Ok. Où est-ce que je peux m'installer ? demanda Namjoon en avançant vers eux.

— Ici, répondit le commandant en désignant la table ronde qui se trouvait dans un coin.

Le hacher hocha la tête sans discuter et s'installa. Il sortit tout son équipement et brancha tous les câbles nécessaires, puis se tourna vers Jungkook qui faisait les cent pas.

— C'est bon, je t'écoute, annonça le grisé.

— Cherche tout ce qui pourrait nous indiquer où Jimin était hier soir. Cherche les traces laissées par sa carte crédit, les appels qu'il aurait pu passer, les caméras de surveillance des rues, dicta le commandant. Il a quitté l'appartement aux alentours de minuit et il était à pied.

— S'il a pris un taxi, il a sûrement payé en liquide, intervint Taehyung.

— Non, Jimin n'a jamais de monnaie sur lui, assura le tatoué.

— Ok, c'est un jeu d'enfant ça. Donne-moi deux minutes, lança Namjoon, sûr de lui.

Jungkook hocha la tête puis se tourna vers Lian et Rose.

— Je n'arriverai pas à regarder cette vidéo. Est-ce que...

— On s'en charge, conclut Rose avec douceur.

Malgré ce qu'elle venait de voir sur sa vie privée, la jeune femme garda son professionnalisme. Elle savait que son ami était rongé par la culpabilité, elle le connaissait, et bien qu'il ait mal agi, elle n'arrivait pas à lui en vouloir. Elle savait qu'à sa place, si elle avait reçu cette vidéo, elle aussi aurait réagi pareil.

— Merci, souffla le tatoué.

Encore une fois, elle lui offrit un de ses éternels sourires puis la jolie rousse se tourna vers son petit ami et reprit la parole.

— Viens.

Le grand brun hocha la tête et ils partirent en direction de leur bureau. Quand les deux frères furent seuls avec le hacker, ce dernier se racla la gorge et enfouit sa main dans son sac bandoulière.

— Je suis désolé, je n'ai rien trouvé de concluant à propos de... enfin, tu sais, fit-il visiblement gêné par la présence de Taehyung.

En prononçant ses paroles, le grisé lui tendit le petit carnet que Seok-min leur avait donné.

— Tu peux en parler devant mon frère. Il est au courant de... enfin de presque tout, répondit le commandant en glissant le calepin dans sa poche arrière.

— Comment ça, presque tout ? intervint Taehyung les sourcils froncés.

— Disons que j'ai fait quelques trucs illégaux pour obtenir certaines réponses, mais je voulais te garder hors de ça au cas où ça tourne mal.

Le châtain sonda son frère quelques instants avant de soupirer et de passer une main dans ses cheveux.

— La situation ne s'y prête pas, alors je vais faire abstraction de ce que je viens d'entendre, mais dès que tout sera terminé, tu auras intérêt à tout me raconter.

— Promis, assura Jungkook avant de porter son attention sur le hacker. Tu as quelque chose ?

— Oui, la dernière fois que Jimin s'est servi de sa carte, c'était à vingt-deux heures quarante-neuf dans un bar du centre-ville. Ensuite, elle n'a plus été utilisée depuis.

— Ok, il s'est servi de son téléphone ?

— Non, pas avant ce matin huit heures vingt-six.

— Lian n'a pas réussi à retracer l'appel, est-ce que toi, tu peux le faire maintenant ?

— Non, soupira Namjoon. J'ai déjà essayé, mais le téléphone est éteint. En revanche, s'il rappelle, je pourrais le faire. Lian n'a pas pu parce qu'il n'a pas les compétences pour, mais c'est normal, surtout s'ils se servent d'un brouilleur.

— Ok, connecte-toi à mon téléphone, exigea Jungkook. S'il rappelle, tu pourras t'occuper de ça ?

— Oui, assura le hacker.

— Ok. J'ai besoin d'un autre service.

— Je n'ai pas encore fini ma recherche sur les caméras de surveillance, mais vas-y, balance.

— Trouve-moi où se planque Myong Woong.

— C'est qui ? demanda Namjoon en entrant son nom sur son logiciel.

— Il a participé à l'enlèvement de Jimin.

— Ok. Je vais le trouver. Donne-moi juste quelques minutes.

— D'accord. Une dernière chose, avant vingt-deux heures ce soir, j'ai besoin que toi ou Lian, vous copiiez tout ce qu'il y a sur l'ordinateur de Jimin et d'autres dossiers sur une clé USB verrouillée et cryptée.

— On le fera, assura le grisé sans quitter son écran du regard.

Un silence pesant s'installa dans la pièce. Son téléphone en main, Jungkook ne cessait de fixer l'appareil, priant pour que le ravisseur le rappelle. Il avait besoin de savoir que Jimin était en vie, qu'il allait bien, mais rien n'arriva.

— Kook, je vais aller voir Lilith, annonça Taehyung en sortant de son bureau.

— Il y a un souci ? Elle va bien ? demanda le commandant, sentant une point d'inquiétude le transpercer.

— Oui, elle va bien, mais je vais aller la chercher. Je... je préfère la savoir ici. Woong a suivi Lian et Rose, je ne veux pas prendre le risque qu'ils en prennent à elle.

— Oui bien sûr. Elle sera en sécurité ici, accepta Jungkook.

— Toi, tu ne quittes pas ce bureau sans moi, compris ?

— Quoi ? Non, dès que Namjoon a l'adresse de Woong, j'y vais. Tu n'as pas besoin de venir avec moi.

— Ce n'est pas une demande Jungkook ! imposa le châtain. C'est un ordre et ce n'est pas ton collègue de travail qui te parle, mais ton grand frère. Tu ne bouges pas d'ici avant que je revienne.

— Je peux me débrouiller seul !

— Oh, je le sais. C'est justement ça le problème ! Quand t'es en colère, tu ne réfléchis pas et s'il y a bien quelqu'un qui va te mettre hors de toi, c'est lui. Je n'ai pas envie de suivre les cadavres que tu vas laisser derrière toi. Alors, tu m'attends ! Compris ?

Jungkook regardait son frère droit dans les yeux, le défiant silencieusement, mais le châtain n'en démordait pas. Il ne comptait pas céder cette fois.

— Jungkook ! fit-il d'un ton autoritaire.

— Ok ! se résigna le concerné, agacé. C'est bon, je vais t'attendre.

Taehyung hocha la tête, satisfait, puis se tourna vers Namjoon qui avait assisté à ce bras de fer, mais qui avait gardé le regard rivé sur son ordinateur.

— Namjoon ?

— Oui ?

— Ne lui donne pas l'adresse tant que je ne suis pas de retour.

— À vos ordres monsieur, répondit le hacker en hocha la tête.

Jungkook grommela tout un tas de noms d'oiseaux dans sa barbe, puis tourna les talons et disparut à travers la porte du QG.

⊱⋅ ──────────── ⋅⊰

QG de la criminelle,

H-12

Le minuteur projeté sur les trois écrans du QG de la criminelle affichait douze heures et cinq minutes. Le compte à rebours était lancé depuis deux heures maintenant et Jungkook tournait comme un lion en cage. L'estomac uniquement rempli des quatre cafés qu'il avait bus depuis son arrivée au poste, il commençait sérieusement à être pris de vertige.

Adossé contre la cloison en bois, il observait Namjoon qui pianotait frénétiquement sur les touches de son clavier.

— J'en peux plus d'attendre, donne-moi l'adresse, somma le commandant.

— Non, répondit simplement le hacker sans même le regarder.

— Tu te fous de ma gueule ? Je te rappelle que je suis ton patron, alors donne-moi cette putain d'adresse !

— Tu auras beau hausser le ton et me menacer, la réponse restera la même, non.

Jungkook grogna de rage et s'approcha du grisé qui ne cilla même pas.

— Je t'arrête tout de suite, l'intimidation ne fonctionnera pas non plus. Ni même l'imploration, alors ne te fatigue pas. Ton frère m'a fait promettre d'attendre son retour et c'est ce que je vais faire, alors dessers tes baskets et va manger un truc, tu as l'air d'un cadavre. Ce serait con que tu nous claques dans les pattes avant de sauver ton mec.

Le commandant était dévoré par la frustration et la colère, mais il avait bien compris qu'il ne tirerait rien de cet homme. Il ne le connaissait que depuis quelques semaines, mais Jungkook avait déjà compris quel genre de personne, il était. Avec du recul, s'il ne lui était pas aussi insupportable, il aurait presque pu l'apprécier.

Sans rien répondre, le brun tourna les talons et partit en direction de la sortie. En passant devant le bureau de Rose, il remarqua que cette dernière était seule. Préoccupé par son état, il se stoppa sur l'encadrement et toqua contre celui-ci, attirant l'attention de la jeune femme.

— Entre, fit-elle avec douceur.

Le policier s'exécuta et vint poser une fesse sur son bureau.

— Comment tu vas ? demanda-t-il.

— Un inconnu m'a filmé en train de faire l'amour avec mon copain et s'en est servi contre mes amis pour les séparer. Je me sens salie et surtout désolée pour vous deux. Je suis aussi morte d'inquiétude pour Jimin et il me manque, répondit Rose avec sincérité.

Jungkook baissa la tête, honteux, mais la releva quand il sentit la main de son amie sur son genou.

— Je ne t'en veux pas, si jamais tu te poses la question et je pense que Lian non plus, mais tu lui dois des excuses.

— Je sais, soupira le brun. Je me sens tellement bête. Comment j'ai pu être si stupide pour ne pas voir la supercherie.

— Si je n'avais pas vécu ce moment en personne, je n'aurais jamais su que c'était un montage. Woong savait ce qu'il faisait, mais Kook, ce corps, c'est celui de Jimin ?

— Oui. Je... je l'ai vu et revu cette vidéo. Je connais chacune de ses courbes, chaque détail de sa peau. Je le connais par cœur, c'est pour ça que j'ai cru que c'était lui, expliqua-t-il, honteux.

— Tu sais ce que ça veut dire ? Pour que le montage soit aussi réussi, Woong a dû vous espionner, il a dû le faire durant des semaines.

— Je sais, grogna Jungkook, la mâchoire serrée. Je... je vais le tuer.

— Je sais que tu en as envie, mais il faut que tu gardes la tête froide. Tu dois nous ramener Jimin.

Le commandant sonda son amie de longues secondes, se perdant dans ses yeux émeraude intenses. Il y voyait toute la douceur et l'amour qu'elle lui portait et encore une fois, il remerciait le ciel de l'avoir dans sa vie. Malgré toutes les fois où il avait été désobligeant avec elle, cette dernière ne l'avait jamais abandonné.

— Je suis désolé, Rose, fit Jungkook, mettant de côté sa fierté.

— Je sais que tu l'es, répondit-elle en se levant.

Sans hésitation, la jeune femme vint l'enlacer, lui offrant un peu de réconfort au moment où il en avait le plus besoin.

— Félicitations pour ton couple. Lian est un bon gars, il te rendra heureuse.

— Il le fait déjà, sourit timidement la rouquine.

Jungkook se défit de l'étreinte de son amie, et se mit sur ses deux pieds.

— Je vais aller me chercher un café, et je vais aller voir ton mec, annonça-t-il.

— Il est sur le toit. Prends-lui un café noir sans sucre, ça lui fera plaisir.

— À vos ordres, madame.

Avec un salut militaire, le brun quitta le bureau sous le regard bienveillant de son amie. D'un pas décidé, il alla dans la salle de pause et sortit deux cafés du distributeur. Après avoir avalé quelques snacks pour calmer les crampes qui tordaient son estomac, il sortit de la pièce et rejoignit le toit.

Comme Rose lui avait indiqué, Lian était bel et bien là. Assis sur le banc en bois, il fixait l'horizon. Le regard du commandant examina rapidement son visage meurtri par ses propres poings et de nouveau, la honte et la culpabilité le dévorèrent. En quatre ans d'amitié, les deux hommes n'en étaient jamais venus aux mains, jusqu'à aujourd'hui, et il était le seul responsable de cet accrochage.

— Salut, fit-il avec prudence.

Lian tourna la tête vers lui, le fixant quelques secondes avant de reposer son regard sur le paysage. Conscient qu'il avait bien mérité cette ignorance, le tatoué s'installa à côté de lui et tendit le gobelet de café.

— Noir et sans sucre.

— Merci, parla enfin l'inspecteur en prenant le récipient en kraft.

Sans rien dire de plus, Lian prit une première gorgée de sa boisson chaude. Les deux hommes restèrent silencieux de longues minutes, regardant le panorama de cette ville qu'il connaissait par cœur.

— Je suis désolé, fit subitement Jungkook.

— T'es un connard, répliqua Lian sans le regarder.

— Je sais, souffla le brun.

— Jimin t'aime plus que tout. Il ne cesse de parler de toi et d'à quel point tu le rends heureux. Je n'arrive pas à croire que tu aies pu douter de lui. Que tu aies douté de moi.

— Je ne sais pas quoi te dire d'autre à part que je suis désolé.

— Merde... Tu as cru que j'étais capable de te trahir de la sorte ! Pourquoi ? Je n'ai jamais rien fait qui puisse te donner une raison de te méfier de moi !

— Je... quand j'ai reçu la vidéo, ça m'a ramené six en arrière. Je ne me cherche pas d'excuse, ça ne sert à rien, j'assume totalement ma connerie, mais j'ai eu l'impression d'être à nouveau trahi et ça a été trop dur à supporter. J'ai voulu à tout prix me protéger pour ne pas sombrer à nouveau.

— Je suis ton ami Jungkook ! Comment as-tu pu croire que j'allais te faire ça ?

— Je ne sais pas. Mon cerveau n'a rien voulu savoir. J'ai vu le corps de mon petit ami nu et tes mains qui...

— Je ne l'ai jamais touché ! cingla Lian.

— Maintenant, je le sais. Je... écoute, je ne suis pas doué pour ces trucs-là, alors je suis désolé. Je le suis vraiment.

Le grand brun observa son vis-à-vis de longues secondes avant de soupirer. Cela ne servait à rien de garder une rancœur. Une part de lui comprenait ce que son ami avait ressenti alors, il décida d'oublier.

— Ok. Ça ne sert à rien de ressasser ça pendant des heures. Notre priorité, c'est de trouver Jimin, mais je veux que tu saches que tu m'as vraiment blessé avec tes accusations. Je comprend ce que tu as ressenti, j'aurais probablement pensé la même chose, mais jamais, je ne m'en serais pris à toi. Je... je tiens à notre amitié, alors je vais passer outre, mais c'est la dernière fois.

Jungkook hocha la tête avant de se lever et de tendre sa main vers son ami. Ce dernier la saisit et se mit sur pied à son tour. Il but la dernière gorgée de son café puis jeta le gobelet à la poubelle sous le regard du commandant. Tandis qu'ils marchaient en direction de la porte, la voix de Lian résonna dans l'air, attirant l'attention de son ami.

— Hé Jungkook, appela le grand brun.

Le concerné se stoppa et pivota vers son collègue. Ce dernier le regardait, un rictus sur les lèvres, ce qui fit froncer les sourcils du commandant. Sans aucun avertissement ni aucune explication, le poing de Lian vint violemment s'abattre sur sa joue, le faisant tituber en arrière de quelques pas.

— Maintenant, on est quitte.

La main sur sa mâchoire endolorie, Jungkook la massait doucement sans rien dire.

— Putain, tu as un sacré crochet.

— Je sais, mais tu l'as mérité, répliqua l'inspecteur.

— Oui, c'est de bonne guerre.

Les deux hommes se sourirent puis le tatoué reprit sa marche vers la porte qui menait aux escaliers. Quand il tira le battant en acier vers lui, Jungkook sentit son portable vibrer dans sa poche. Paniqué à l'idée que ce soit les ravisseurs qui tentaient de le joindre, il sortit le téléphone d'une main tremblante.

— C'est eux ? demanda Lian.

— Oui, il vient de m'envoyer l'adresse pour l'échange, déclara le tatoué, la gorge nouée.

— Où ça ?

— Je ne comprends pas c'est... il n'y a rien ici. C'est le côté abandonné de la zone industrielle.

Posté l'un près de l'autre, les deux hommes fixaient l'écran, observant l'image satellite qui se trouvait sous leurs yeux.

— Descendons, on aura un meilleur aperçu sur le grand écran, proposa l'inspecteur.

Le commandant hocha la tête et ils se mirent à marcher d'un pas rapide vers le QG. Quand ils passèrent la porte, la voix de Taehyung se fit entendre, annonçant son retour.

— Jungkook, allons choper cet enfoiré de Woong.