Il n'y avait pas un bruit dans le couloir de cet hôpital. Tout était trop silencieux, faisant monter l'anxiété des les personnes présentes. Lorsque les portes battantes des urgences s'ouvrirent sur un homme vêtu d'une tunique médicale bleue qui était désormais tâchée de sang, tous les regards se posèrent lui. Personne n'osait respirer ou poser de questions, ils attendaient tous que la nouvelle tombe.

— Je suis désolé, il ne s'en est pas sorti, annonça le médecin.

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Plus tôt ce jour-là,
Résidence de Li Wang

— Jungkook, il y a du sang ! Il... il est touché ! Tae est touché ! s'écria Jimin, la voix débordante de panique.

En entendant cela, le sang de Jungkook ne fit qu'un tour et cette fois, la peur le posséda. Ce n'était pas la situation qui l'effrayait, mais le fait que son meilleur ami soit blessé. Lorsqu'il vida le premier chargeur des deux armes, le brun s'accroupit derrière le muret et appuya sur le petit bouton pour retirer les chargeurs vides. Les balles continuaient de pleuvoir autour d'eux et le tatoué commençait sérieusement à se demander quelle puissance d'arme ses hommes pouvaient bien avoir en leur possession.

— Où est-ce qu'il est touché ? demanda-t-il d'une voix étrangement calme.

— À-à l'épaule, indiqua le médium en retirant son gilet pour venir le placer contre la plaie.

— D'accord, écoute-moi, commença Jungkook avant de s'interrompre lorsqu'une balle vint s'écraser à quelques millimètres de lui.

Le médium tentait de rester concentré, mais toutes ses détonations résonnaient dans ses tympans. Cela lui donnait des vertiges et la sensation de désorientation était encore plus grande.

— Jimin ! cria le commandant d'un ton autoritaire pour attirer son attention.

Quand il parvint à établir un contact visuel, Jungkook tenta d'être le plus calme et rassurant possible. Il savait que Jimin n'était pas un soldat. Il comprenait la peur qu'il devait ressentir et il ne lui en tenait pas rigueur, c'était normal. Il se souvenait encore de ce qu'il avait ressenti lorsqu'il s'était retrouvé sous les balles pour la première fois.

— Regarde-moi, respire ! Ça va aller ok, je ne laisserai rien t'arriver, mais je vais avoir besoin de toi, continua ce dernier en rechargeant l'arme de Taehyung. Tu vas courir jusqu'à la voiture en restant baissé le plus possible.

Jungkook s'interrompit pour prendre son chargeur qu'il glissa dans son arme avant de tirer le canon pour mettre la première balle dans la chambre de cette dernière.

— Tu vas prendre la radio et contacter le central. Tu te souviens comment j'ai fait hier matin ?

— O-oui.

— Très bien, lui sourit Jungkook. Donne-leur notre adresse et demande-leur d'envoyer une ambulance. Tu leur dis bien que c'est la voiture treize et que le lieutenant Kim est à terre. Je veux aussi que tu ouvres le coffre de la voiture. Tu soulèves le double-fond et tu trouveras des armes. Ramène-moi le HK qui s'y trouve.

— HK ? Jungkook, je ne comprends rien ! s'emporta le plus jeune, débordant de panique.

— C'est un fusil d'assaut, le même que celui que tu utilises quand tu joues à Call of Duty.

S'ils n'étaient pas en train de se faire tirer dessus, cette situation aurait pu paraître drôle, mais pas aujourd'hui. Il n'y avait rien de comique.

— D-d'accord, acquiesça le plus jeune, la voix tremblante.

Le tatoué vit ses yeux s'humidifier et même si en temps normal cela l'aurait probablement agacé, cette fois, il fit preuve de compréhension.

— Hé Jimin, regarde-moi, ça va aller. Je sais que tu peux le faire, l'encouragea ce dernier.

— J-j'ai peur, murmura honteusement Jimin.

— Je sais, mais tu t'en sors très bien, tenta de rassurer Jungkook. J'ai besoin de toi, si tu ne le fais pas Tae va se vider de son sang.

Le médium prit une grande inspiration avant de hocher la tête pour se donner du courage.

— Je vais le faire !

— Tu es prêt ? demanda le policier en vérifiant une dernière fois son chargeur.

— Oui ! assura le brun.

— Dès que je commence à tirer, tu cours.

De nouveau un hochement de tête puis Jungkook commença à compter. Lorsque le décompte fut terminé, Jimin se précipita vers l'Audi en tentant de rester le plus penché possible. Arrivé à la voiture, il ouvrit la portière et se jeta sur le siège passager avant puis saisit la radio. Malgré l'angoisse, le brun parvint à se souvenir de ce que son colocataire avait fait la veille et contacta le central.

Quelques mètres plus loin, Jungkook comptait dans sa tête le nombre de balles qu'il lui restait avant d'être à sec.

— Putain, grogna une voix à quelques pas de lui.

Le tatoué se baissa pour se mettre à couvert et posa son regard sur son coéquipier qui clignait frénétiquement des paupières. Sa respiration était rapide et des gouttes de sueur s'étaient formées sur son front déjà humidifié par la fine pluie. Jungkook savait la douleur qu'il ressentait, il avait déjà reçu trois balles au cours de sa carrière, mais parfois, ce qui était le plus douloureux était celle qui finissait contre le gilet. La puissance de l'impact était si fort que les os qui se trouvaient derrière étaient fracturés par le choc.

— Ça va mon pote ? ricana le commandant avec soulagement.

— Ces fils de pute m'ont touché à l'épaule, râla le châtain en tentant de s'asseoir contre le muret.

Il prit le vêtement qui servait de pansement de sa main valide et appuya contre sa blessure.

— Tu es blessé autre part ? demanda Jungkook, inquiet.

— Non, la deuxième balle a frappé le gilet, mais je crois que j'ai des côtes cassées, annonça le blessé en gémissant de douleur.

Cette réponse déclencha un rire chez le tatoué qui fut heureux de constater que son ami allait assez bien pour se plaindre. Les tirs cessèrent enfin pendant une fraction de secondes, signe que leurs assaillants rechargeaient à nouveau leurs armes.

À la voiture, Jimin avait prévenu le central et demandé une ambulance, comme Jungkook lui avait ordonné. Il ouvrit le coffre et souleva le double-fond.

— Bordel de merde, souffla ce dernier en découvrant la petite armurerie qui s'y cachait.

Sans perdre plus de temps, il prit le fusil avant de claquer le coffre et de repartir en courant vers ses deux collègues. Lorsqu'il se rapprocha et que son regard se posa sur Taehyung, il eut envie de pleurer.

— Tu vas bien ? demanda-t-il, inquiet en venant s'agenouiller à côté de lui, ruinant ainsi le reste de son jean clair.

— Oui ne t'en fais pas, c'est juste une égratignure, fit le châtain malgré la douleur qui engourdissait ses membres.

— Jimin, le flingue ! intervint Jungkook impatient.

Sans lui laisser le temps de réagir, il prit le fusil d'assaut des mains du plus jeune et un rictus s'afficha sur la commissure de ses lèvres. Maintenant qu'il avait une puissance de feu plus importante, les choses sérieuses allaient commencer. Bien que son meilleur ami soit en vie, sa colère n'était pas redescendue. Ces criminels avaient osé tirer sur son coéquipier, alors il comptait bien rentrer dans cette maison et leur régler leur compte.

— Jungkook, non, lui interdit Taehyung en comprenant ce qu'il comptait faire.

— Tu peux te servir de ton arme ? demanda le tatoué sans tenir compte de ses paroles.

— Je crois.

— Parfait, alors je vais faire le tour, tu descends tout ce qui passe par la porte principale.

— Jungko-

— C'est un ordre ! Toi, retourne dans la voiture, exigea le commandant en portant son attention sur Jimin.

Jungkook posa ses yeux sur son coéquipier et hocha la tête. C'était une promesse silencieuse qu'il allait revenir. Il avait connu des situations bien pires que celle-ci et s'en était toujours sorti. Sans rien dire de plus, le tatoué retira le cran de sureté de son arme et longea le mur pour contourner la propriété en tentant de ne pas être vu. Quand il fut totalement hors de portée des hommes qui se trouvaient dans la maison, il sauta par-dessus le muret et s'avança à travers le jardin.

La crosse de son arme pressée fermement contre son épaule, Le policier avançait à pas de loup en direction de la porte arrière. Les détonations étaient audibles depuis l'arrière de la résidence et si Taehyung ripostait, alors il devait se dépêcher, car son ami serait bientôt à court de balles.

En arrivant devant la porte arrière, Jungkook appuya sur la poignée et poussa légèrement la porte, juste assez pour s'assurer que celle-ci n'était pas piégée. Voyant que ce n'était pas le cas, il l'ouvrit entièrement et avança en prenant garde de ne pas se faire surprendre. Sans prendre la peine d'observer la décoration, il entra dans la première pièce dont la porte était ouverte. Son regard se posa sur un homme agenouillé devant l'une des fenêtres.

Jungkook voulait l'éliminer sans faire de bruit, mais par manque de chance, il fit un pas en avant et son pied heurta une babiole traînant sur le sol, attirant l'attention de l'homme. Alerté, ce dernier pivota immédiatement et le brun le reconnut. Jovan Petrovic, c'était sur lui qu'il avait tiré la veille.

Crachant des mots dans une langue que le policier ne comprenait pas, son assaillant sortit de sa ceinture un couteau de combat et se rua sur lui. Afin de le couper dans son élan et éviter une attaque frontale, le commandant frappa violemment le bras qui tenait l'arme blanche avec la crosse de son arme avant d'enchaîner avec un coup de pied sur la cuisse blessée. Heureusement pour lui, les bruits de coup de feu couvrirent les cris de douleur de son adversaire qui hurlait des jurons dans sa langue natale.

Malgré la douleur qu'il ressentait et sa difficulté à se servir de sa jambe meurtrie, Petrovic brandit de nouveau sa lame. Celle-ci déchirait l'air dans un sifflement aigu, menaçant à chaque attaque, de s'enfoncer dans la chair de Jungkook qui faisait de son mieux pour l'éviter. Pourtant, malgré ses esquives et sa maîtrise des arts martiaux, son assaillant parvint à ses fins. Tandis qu'il s'apprêtait à riposter, il sentit une douleur vive, exploser dans son bras gauche. Son deltoïde venait d'être entaillé de quelques centimètres et cette réalisation ne fit qu'augmenter sa colère.

— C'était mon t-shirt préféré, grogna Jungkook.

Voyant le sourire vainqueur sur les lèvres du Serbe, le brun décida d'en finir. En position de garde, il recula d'un pas avant de venir frapper son assaillant d'un coup de pied retourné. L'impact fut si brutal que Jungkook aurait juré avoir entendu sa mâchoire se fracturer. Étourdi par l'attaque, le mercenaire tituba en arrière, mais refusait d'abandonner. N'ayant pas plus de temps à perdre, Jungkook se jeta sur lui, le poing fermement levé et vint le cogner en plein visage, l'assommant une bonne fois pour toutes.

Son corps tomba lourdement au sol puis Jungkook se mit au-dessus de lui pour l'attacher. Il prit les attaches zip qui étaient accrochées à son gilet pare-balle et retourna l'homme sur le ventre, le ligotant ainsi, les bras dans le dos pour l'empêcher de bouger. Par simple précaution, le tatoué s'approcha de la fenêtre et balança le semi-automatique que Petrovic avait utilisé pour leur tirer dessus quelques minutes plus tôt. Il prit également son couteau et le glissa dans son dos.

— Allez, fais de beaux rêves connard, lança Jungkook avant de prendre son arme qui était près de la porte.

Lorsqu'il bougea son bras, une décharge de douleur se réveilla à l'endroit où l'homme l'avait blessé. Effleurant prudemment sa plaie, il sentit un liquide chaud glisser le long de ses doigts.

— Fils de pute. Encore une cicatrice, comme si je n'en avais pas assez, pesta le policier.

Agacé, Jungkook nettoya sa main sur son treillis noir et quitta la pièce. Dans le couloir, il suivit la direction des détonations dans l'espoir d'y trouver les trois autres mercenaires qu'il recherchait. Son arme en position, le commandant continua son chemin dans ce mode furtif, fouillant chaque pièce jusqu'au salon. Là, il vit non pas trois, mais deux hommes, et il comprit ; le quatrième, celui qui était à la tête de ce groupe, n'était pas là.

Dehors, Jimin était retourné à la voiture et attendait les renforts. Devant la maison, caché derrière le muret qui était maintenant criblé de balle, Taehyung était à court de munitions. Deux balles, c'était tout ce qui lui restait dans le chargeur de son Glock.

La quantité de coup de feu avait diminué depuis quelques minutes et le lieutenant savait pourquoi. Jungkook était entré et le connaissant, l'un de ses hommes devait déjà être mort. Sa blessure à l'épaule le faisait souffrir, mais il tentait de faire abstraction de cela. Il savait qu'il perdait du sang et qu'il était de plus en plus faible, pourtant le châtain ne voulait pas laisser tomber son coéquipier. Taehyung devait faire diversion pour que son meilleur ami puisse les neutraliser et il comptait bien assurer cette tâche.

Alors qu'il s'apprêtait à se redresser pour tirer ses dernières balles, le lieutenant entendit au loin les sirènes de police et de l'ambulance qui s'approchaient à grande vitesse.

— Taehyung ! s'écria Jimin en venant vers lui.

— Reste où tu es, c'est trop- merde, gémit le châtain lorsqu'il ressentit une nouvelle décharge de douleur.

Sa main valide pressée contre sa blessure et la mâchoire serrée, Taehyung tentait de rester concentré, mais c'était de plus en plus difficile. Sa tête tournait considérablement, lui donnant envie de vomir, sans compter les bouffées de chaleur qui le traversaient.

— L'ambulance est là. Tu peux te lever ? demanda le médium en venant s'accroupir près de lui.

Ce fut à cet instant que les deux hommes remarquèrent à quel point tout était devenu silencieux.

C'était terminé.

Jimin passa un bras derrière le dos de son aîné et le souleva comme il put. Les jambes du châtain étaient flageolantes et heureusement pour lui, son protégé semblait assez robuste pour le soutenir.

— Est-ce que... est-ce que tu as vu sortir Jungkook ? questionna Taehyung d'une voix faible.

Le brun regarda derrière eux en direction de la maison, mais il ne vit aucun signe de leur ami.

— Je suis sûr qu'il va bien. Pour le moment, il faut que tu ailles à l'hôpital, fit Jimin en portant son ami comme il pouvait.

Il tentait d'être le plus rassurant possible pour ne pas préoccuper son colocataire, mais il devait avouer qu'il était lui-même inquiet. Jungkook n'avait pas donné signe de vie depuis qu'il était rentré dans la maison, cependant Jimin avait confiance en lui.

Alors qu'ils titubaient vers l'ambulance, les deux hommes furent rejoints par des policiers en uniforme qui étaient venus en renfort. Voyant que Jimin peinait à soutenir son ami qui était de plus en plus faible, l'un d'eux vint l'aider.

— Qu'est-ce qui lui est arrivé ? demanda l'officier en passant le bras valide de Taehyung par-dessus son épaule afin de l'accompagner jusqu'à l'ambulance.

— Il a reçu une balle dans l'épaule et l'autre dans le thorax, mais il avait son gilet, expliqua Jimin alors qu'ils arrivaient près du véhicule médical.

Rapidement, le châtain fut pris en charge. Les deux ambulanciers l'installèrent sur un des brancards avant de poser leur regard sur Jimin.

— Êtes-vous blessés ? questionna l'un deux.

— Non, je... je vais bien.

Était-ce la vérité ? Il n'en savait rien, tout ce qui comptait à cet instant était cet homme allongé sur ce brancard.

— Où est le commandant ? demanda une voix que le médium ne connaissait pas.

— Il est dans la maison, répondit-il en pivotant vers l'officier

— C'est à vous ? parla un autre homme en s'adressant au plus jeune.

Toutes ces voix autour de lui était en train de lui donner des vertiges. Le jeune médium prit une grande inspiration et tourna la tête vers le deuxième ambulancier qui venait de prendre la parole. Il tenait dans sa main le gilet que Jimin portait plus tôt. Ce dernier le remercia d'un hochement de tête avant de prendre son vêtement.

— J'ai deux cadavres dans la maison !

À peine ses mots arrivèrent à ses oreilles, Jimin gravita sur lui-même pour poser son regard sur Jungkook qui sortait de la demeure. Au bout de sa main gauche, prisonnier de sa poigne, le commandant tenait par la nuque un homme qu'il forçait à avancer.

— Foutez-moi cette merde en cellule, cracha ce dernier en jetant brutalement le mercenaire contre l'une des voitures de patrouille.

Les prunelles sombres du tatoué ne tardèrent pas à tomber sur l'ambulance puis sur Jimin qui le fixait déjà. Ce dernier se mit à courir vers lui, le visage marqué par l'inquiétude.

— Ça va ? Tu n'as rien ? Tu n'es pas... merde, tu saignes ! paniqua le plus jeune en voyant la coupure horizontal sur son bras.

— Hé microbe, respire, commença Jungkook avec douceur en venant presser son épaule. Je vais bien. Ça va toi ? Tu n'es pas blessé ?

— Je... je vais bien.

— Parfait, où est Tae ?

— Dans l'ambulance, répondit Jimin avant qu'ils ne se mettent tous les deux en route vers le véhicule. Il... il ne va pas très bien.

En arrivant près de celui-ci, les deux amis remarquèrent que Taehyung était déjà dans le véhicule, prêt à être transporté aux urgences.

— Hé salut mon pote, je suis revenu et sans avoir tué tous les méchants, plaisanta Jungkook pour cacher son inquiétude.

En montant à bord, il voulait surtout voir l'état de son meilleur ami. Cet homme qu'il considérait comme son frère et pour qui il donnerait sa vie, était blessé et quelque part, une petite voix lui disait que c'était lui le responsable.

Taehyung était pâle, le front couvert de sueur et malgré toute sa volonté, il peinait à garder les yeux ouverts. Avec douceur, le tatoué vint dégager une mèche humide qui était prisonnière de l'élastique du masque à oxygène qui recouvrait le nez et la bouche de son coéquipier. Sa blessure était protégée par un pansement provisoire, stoppant le saignement jusqu'à son arrivée à l'hôpital.

— Nous devons y aller, informa l'un des ambulanciers.

— D'accord. On sera juste derrière toi Tae, ne me lâche pas ok, fit Jungkook en descendant de l'ambulance.

Le concerné hocha faiblement la tête avant que ses yeux ne se ferment et qu'il disparaisse derrière les portes du véhicule qui vinrent se fermer à leur tour. Le brun essayait de garder son calme sans rien laisser paraître, mais à l'intérieur, son cerveau était en feu, la colère et la préoccupation le dévorait. Il avait dû prendre sur lui pour ne pas massacrer ses trois hommes. Durant son intervention, il n'avait pas eu le choix, il avait été obligé d'en tuer deux, mais si cela n'avait tenu qu'à lui, il les aurait tous éliminés. Le monde n'avait pas besoin d'ordures comme eux.

— Commandant, vous êtes blessé ? intervint un officier, le ramenant ainsi à la réalité.

— Ce n'est rien, c'est une égratignure, répondit ce dernier avec un sourire forcé.

— Vous devriez aller à l'hôpital.

— Oui, ne vous en faite pas, merci, gratifia ce dernier avant de se tourner vers Jimin. Allons-y, fit-il en prenant la direction de la voiture.

La première chose qu'il fit fut se débarrasser de son gilet pare-balle et le fusil d'assaut qu'il n'avait pas lâché. Lorsqu'il referma le coffre, son regard se posa sur un des officiers qu'il connaissait bien.

— Hyun ! appela ce dernier.

Le concerné leva la tête et trottina jusqu'à lui.

— Oui commandant ?

— Je vais aux urgences rejoindre Taehyung. Quand la scientifique arrivera, dit leur qu'il y a une M16 sous la fenêtre Est du jardin et deux cadavres dans le salon. C'est moi qui les ai descendus. Qu'ils prennent tous les effets personnels de nos cadavres et les analyse. Surtout les portables.

— À vos ordres, fit le jeune homme.

— Merci Hyun, à plus tard.

Sans rien ajouter, le brun monta dans le véhicule où Jimin l'attendait déjà. Ils étaient tous les deux trempés par la fine pluie qui n'avait cessé de tomber, mais l'adrénaline les empêchait de ressentir le froid ou la douleur de leurs muscles courbaturés et crispés par la peur et la panique.

Jungkook démarra et prit la direction de l'hôpital. Sur le chemin, son téléphone, qui était branché au Bluetooth de la voiture, se mit à sonner. Sans regarder qui essayait de le rejoindre, le brun décrocha et la voix forte de Rose envahit l'habitacle.

— Jungkook, est-ce que ça va ? Je viens d'avoir la nouvelle ! Où est Taehyung ? Et Jimin ?

— Rose, s'il te plaît parle moins fort, j'ai une migraine des enfers, soupira le conducteur. Je vais bien et Jimin aussi. Tae est aux urgences.

— Aux urgences ? C'est grave ? demanda la rouquine d'une voix plus basse.

— Je ne pense pas. Il a été touché à l'épaule.

— On vous rejoint immédiatement.

— Non ! formula Jungkook d'un ton dur. L'un des mercenaires va arriver. Je veux qu'il soit placé sous surveillance maximale. Pas d'eau, pas de nourriture, rien tant que je ne suis pas arrivé et tu ne t'approches pas de lui !

— Mais-

— C'est un ordre Rose ! Liam et toi, vous continuez vos recherches. L'un des mercenaires n'était pas dans la maison, il doit être à la rechercher de Oh Jun-Hae. On doit le trouver avant lui ! Est-ce que vous avez du nouveau avec la caméra espion ?

— Non, Lian est encore en train de visionner l'une des vidéos.

— D'accord, alors continuez.

— D'accord, donne nous des nouvelles de Tae s'il te plaît, demanda la jeune femme.

— Je le ferai.

Jungkook mit fin à l'appel sans même laisser le temps à son amie de répondre. Le visage barré par la colère et la frustration, il fixait la route en silence. Jimin voulait l'aider, le réconforter et lui dire que tout irait bien, mais n'osait pas parler. L'aura qui se dégageait de son colocataire était oppressante et il ne voulait pas risquer de s'attirer ses foudres.

En vingt minutes, les deux hommes étaient arrivés aux urgences. Jungkook stationna la voiture puis ils la quittèrent en quatrième vitesse. En arrivant à l'accueil, ce dernier sortit sa plaque et la montra à la jeune femme aux cheveux bruns qui s'y trouvait.

— Mon collègue vient d'être admis avec une blessure par balle, expliqua ce dernier.

— Quel est son nom ?

— Kim Taehyung.

La brune pianota rapidement sur le clavier de son ordinateur avant de lever les yeux vers les deux hommes qui la fixaient, impatients.

— Il est au quatrième étage. Vous pouvez attendre dans la salle d'attente, le médecin vous appellera.

— Merci beaucoup.

Le commandant fit signe à Jimin de le suivre et se précipita vers l'ascenseur. Lorsque les portes s'ouvrirent, le plus jeune se figea. En voyant le peu d'espace qu'il y avait entre ses parois de métal, il sentit sous souffle se bloquer dans sa gorge et ses mains devenir moites.

— Je... je vais prendre les escaliers, fit-il d'une voix tremblante.

— Quoi ? Ne sois pas stupide, c'est au quatrième étage ! s'indigna Jungkook, impatient de voir comme allait son meilleur ami.

— Je sais, mais je... je ne peux pas entrer là-dedans. Non, je-

La voix du médium se perdit dans sa gorge alors qu'il sentit l'anxiété l'envahir. C'était impensable pour lui de se retrouver enfermé dans cet endroit. Il n'aurait pas la force de surmonter ça. Le tatoué qui se tenait déjà dans l'ascenseur, le fixait avec insistance. Sa patience avait des limites et elle avait déjà était mise à rude épreuve aujourd'hui.

— Ok, soupira de dernier avec lassitude. C'est bon, on va prendre les escaliers.

— Merci, murmura timidement le plus jeune.

Résigné, le brun quitta la boite de métal et se dirigea vers la porte qui se trouvait à quelques pas. Alors qu'ils montaient les marches, l'attention de Jimin se porta sur la plaie de son ami.

— Tu devrais voir un médecin pour ça.

— Je vais le faire, dès qu'on sera en haut, répondit Jungkook d'une voix étrangement calme.

Jimin n'ajouta rien, il se contenta de hocher la tête. Lorsqu'ils arrivèrent enfin au quatrième étage, le médium ressentit une brise fraîche caresser ses bras nus. Tenant dans sa main le gilet de Jungkook, il l'enfila et continua de suivre son colocataire à travers les couloirs.

— Excusez-moi ! lança le brun en voyant une infirmière sortir d'une chambre.

— Oui ? Bonjour, en quoi puis-je vous aider ? demanda-t-elle avec un sourire bienveillant.

— Mon coéquipier a été admis avec une blessure par balle. Je voudrais avoir de ses nouvelles.

— Oh, je suis désolé, mais il va falloir patienter. Le docteur viendra vous chercher en temps voulu.

— Pouvez-vous au moins nous dire s'il va bien ? intervint Jimin d'un ton fragile.

— Je suis désolée, je n'ai pas cette information.

Le médium pouvait sentir son colocataire se tendre à côté de lui.

— D'accord, mon... mon ami est blessé. Vous pouvez vous occuper de lui ? demanda-t-il.

— Bien-sûr, suivez-moi.

— Ça va, je vais bien, le contredit Jungkook d'un ton dur.

— Tu ne vas pas bien ! le réprimanda Jimin sur le même ton. Tu saignes depuis au moins trente minutes et ça pourrait s'infecter alors, tu vas suivre cette infirmière sans discuter !

Surpris de ce ton autoritaire, le commandant haussa les sourcils avant d'abdiquer avec sarcasme.

— À vos ordres, capitaine.

Le médium afficha un sourire satisfait alors que la jeune femme fit signe au commandant de le suivre.

— Je vais aux toilettes, annonça le plus jeune.

— Ne t'éloigne pas.

— Ne t'en fais pas, répondit Jimin avant de prendre la direction des toilettes les plus proches.

Il poussa la porte battante et entra dans la pièce. Celle-ci était totalement déserte. Ses mains étaient recouvertes de sang et lorsqu'il croisa son reflet dans le miroir, il vit également la tache rouge sur sa mâchoire. Ouvrant le robinet, le médium aspergea son visage d'eau froide. Pour le moment, ses émotions étaient comme prisonnières à l'intérieur de lui, malgré toute la panique et l'angoisse qu'il avait ressenties, une seule pensée était omniprésente dans son esprit ; comment allait Taehyung ?

Après avoir nettoyé sa peau de tout le sang de son ami, Jimin passa ses mains mouillées dans ses cheveux pour venir les plaquer en arrière. En levant la tête, son regard se verrouilla sur son propre reflet et il sentit sa gorge se nouer. Cette journée était un véritable ascenseur émotionnel. Ce matin, il avait ressenti de l'angoisse, de la peur, du soulagement, de la colère ainsi qu'une grande tristesse aussi. À présent, voilà qu'il venait d'assister à une deuxième fusillade en moins de quarante-huit heures et que son ami était sûrement au bloc avec une balle dans le corps. Alors c'était ça la vie de policier ? C'était cela qui l'attendait chaque jour ? Le jeune brun n'était pas sûr d'être assez fort pour supporter une telle dose de stress, mais il ne voulait pas laisser tomber.

— Allez Jimin, tu peux le faire.

Dans un soupir d'encouragement, le brun sortit des toilettes pour retourner près de la salle de consultation ou Jungkook était entré. En arrivant, son regard se posa sur son ami qui était assis sur la table d'auscultation. Ce dernier avait retiré son t-shirt, dévoilant un torse tonique et une peau caramel. Jimin avait pris l'habitude de le voir ainsi, mais sans qu'il ne sache pourquoi, il sentait toujours un incendie venir réchauffer ses joues, l'obligeant à détourner le regard.

L'infirmière se trouvait sur le côté, tenant dans ses mains des pinces à suture. Celle-ci vint enfoncer l'aiguille circulaire dans la peau du commandant qui n'eut aucune réaction.

— Est-ce qu'il va bien ? demanda Jimin, signalant sa présence.

La jeune femme tourna la tête vers lui et afficha un sourire rassurant.

— Il va s'en sortir, plaisanta cette dernière. Quelques points de suture, un bandage et votre ami sera comme neuf.

— Merci, gratifia le médium.

— Tu as vu le médecin ? questionna Jungkook.

— Non, répondit-il en bougeant doucement la tête.

En silence, l'infirmière termina les points de suture avant de venir appliquer une pommade cicatrisante et d'enrouler un bandage autour de son deltoïde.

— Vous pourrez retirer le bandage dans deux jours. Veillez à ce que le pansement reste bien sec, ce qui veut dire, pas de douche.

— Douche ? Qui prend encore des douches ? lança le commandant avec sarcasme.

Sa réplique fit rire l'infirmière qui appliqua le dernier morceau de sparadrap.

— Donc commandant, pas de douche. Au bout des deux jours, vous pourrez retirer le bandage et mouiller la plaie. Surtout, pensez à bien sécher votre peau pour éviter les infections. N'hésitez pas à passer à la pharmacie pour aller chercher de quoi changer le pansement.

— C'est compris, merci, répondit Jungkook en venant prendre son t-shirt.

— Vous pouvez aller attendre dans la salle d'attente qui se trouve au fond du couloir. Le médecin viendra vous chercher dès qu'il aura des nouvelles de votre ami.

Les deux hommes hochèrent la tête et quittèrent la pièce. Côte à côte et dans un silence de plomb, ils longèrent le couloir dénué de vie pour arriver dans une salle d'attente où se trouvaient plusieurs personnes de tous âges.

— Il y a une place là-bas, vas-y, je vais passer un coup de fil.

— Tu vas appeler qui ? demanda Jimin.

— Lilith. Je dois la mettre au courant, si elle l'apprend par quelqu'un d'autre, elle me tuera.

Le médium ne put retenir un rire face à cette réplique. Imaginer une femme comme Lilith faire peur à un homme costaud comme Jungkook était amusant.

Répondant par un hochement de tête, Jimin alla s'installer sur la chaise vide alors que l'autre homme tourna les talons pour s'isoler. Il composa le numéro de son amie et la première totalité résonna. Jungkook savait qu'il devait être très tôt en France, mais la jeune femme avait le droit de savoir.

— Allô ? répondit une voix endormie.

— Salut Lilith, C'est Jungkook, je suis désolé de te réveiller.

— Ce n'est pas grave, qu'est-ce qu'il y a ? demanda-t-elle avec douceur.

— Je... écoute, ne panique pas, mais Taehyung est aux urgences.

— QUOI !? s'écria la psychiatre, soudainement bien réveillée. Qu'est-ce qui s'est passé ? Est-ce que c'est grave ?

Le tatoué put entendre la voix de son amie se briser à la fin.

— Hé, écoute-moi ! Respire ! Je ne pense pas que ce soit grave. J'attends le médecin, mais sa blessure était superficielle, tenta ce dernier avec le plus de calme possible.

— Putain, mais qu'est-ce qui s'est passé ? s'impatienta la jeune femme.

C'était rare que Lilith ne jure ainsi. Elle était toujours si douce et avec une élocution parfaite, pourtant en ce moment, Jungkook pouvait sentir toute la peur et la panique qui émanait de sa voix.

— Il a reçu une balle à l'épaule.

— Mon dieu, souffla la jolie brune. Je saute dans le premier avion !

— Ce n'est pas-

— Mon fiancé est aux urgences alors ne me dit pas que ce n'est pas nécessaire ! le coupa cette dernière. Je suis obligée d'aller à une consultation ce matin, mais dès qu'elle est terminée, je saute dans le premier avion. Tu as intérêt à veiller sur lui jusqu'à ce que j'arrive !

Jungkook qui avait pour habitude de ne laisser personne lui parler ainsi, ne répondit rien. Il s'écrasa complètement face aux ordres de son amie. Comprenant parfaitement ce qu'elle ressentait, le brun ne voulait pas l'énerver davantage.

— Je te le promets, mais s'il te plaît garde ton calme. Je te donnerai de ses nouvelles dès que j'aurai vu le médecin.

— Je compte sur toi ! Tu as promis de veiller sur lui.

— Je sais et je l'ai toujours fait.

Un silence s'installa entre eux. Durant une fraction de seconde, le tatoué put entendre son amie renifler à l'autre bout du fil.

— Tu me promets que ce n'est rien de grave ? fit-elle d'un ton plus fragile.

— Je... je te le promets.

À peine ses mots sortirent de sa bouche, le policier les regretta instantanément. Il ne faisait jamais de promesse sur un coup de tête. Pourtant, pour apaiser l'angoisse de la jeune femme, il n'avait pas hésité à le faire, même sans savoir comment allait son meilleur ami. Peut-être était-ce aussi un moyen de se convaincre que tout irait bien.

— Je vais raccrocher maintenant, je te tiens au courant.

— D'accord, merci de m'avoir prévenue.

— De rien, fais attention à toi.

— Promis, répondit Lilith avant de raccrocher.

La tonalité de fin d'appel résonna dans les oreilles du commandant qui laissa échapper un soupir. Il détestait faire ça. Devoir annoncer ce genre de nouvelle était la pire chose, encore plus lorsqu'il s'agissait de personne proche.

— Y a-t-il de la famille de monsieur Kim Taehyung ? appela une voix à quelques pas de lui.

En entendant le nom de son meilleur ami, Jungkook fit signe au médecin et chercha Jimin du regard. Ce dernier était déjà debout et venait vers eux. Ensemble, ils allèrent à la rencontre du médecin qui s'isola un peu pour leur accorder un peu plus de confidentialité.

— Comment va-t-il ? demanda Jimin avant que Jungkook ne puisse prendre la parole.

— Heureusement, la blessure de monsieur Kim est superficielle. La balle a traversé alors, nous n'avons pas eu besoin de l'opérer. En revanche, il a perdu beaucoup de sang alors pour le moment, nous l'avons mis sous perfusion. Il a également deux côtes cassées à cause de l'impact. Je peux vous dire que son gilet par balle lui a sauvé la vie.

Les deux amis laissèrent échapper un soupir de soulagement en entendant les nouvelles que le médecin venait de leur donner. Taehyung était hors de danger.

— Est-ce qu'on peut le voir ? questionna le commandant.

— Pour le moment, il dort. Il va avoir besoin de beaucoup de repos. Vous pouvez rentrer et revenir dans une heure ou deux, je pense qu'il sera réveillé.

— D'accord, merci docteur, gratifia Jungkook.

L'homme leur offrit un sourire compatissant puis partit en direction des portes battantes qu'il avait traversées quelques minutes plus tôt. Les deux colocataires se retrouvèrent seuls, face à face, chacun ressentit l'adrénaline quitter leur corps, laissant les émotions qu'ils avaient bridées les envahir.

Jimin était si soulagé d'apprendre que Taehyung allait bien, qu'il ne pouvait pas s'empêcher de sourire, malheureusement lorsqu'il baissa les yeux sur la manche de son gilet, son sourire disparut totalement.

— Ton... ton gilet, chuchota ce dernier, la gorge nouée. Je suis désolé, il est taché de sang.

Ce dernier mot fut la goutte de trop et Jimin éclata en sanglots. Face à lui, Jungkook était décontenancé.

Le tatoué était la pire personne pour consoler les autres. Pourtant, il sentit son cœur se comprimer dans sa poitrine quand il vit la détresse que son vis-à-vis éprouvait. Sans réellement réfléchir, il vint saisir son poignet et le tira jusqu'à lui pour venir l'enlacer. D'un geste qui se voulait rassurant, il tapota doucement le dos du plus jeune.

— C'est qu'un bout de tissu, ce n'est pas grave, murmura Jungkook.

Les caresses étaient maladroites, néanmoins, Jimin le remercia intérieurement pour cela. C'était ce dont il avait besoin, une simple étreinte suffisait parfois. Il n'avait pas besoin d'entendre de mots rassurants ou de grands discours, une simple présence suffisait.

De longues minutes passèrent durant lesquelles le commandant tenta de réconforter son ami comme il pouvait. Lorsque les pleurs s'atténuèrent, Jungkook mit fin à leur accolade, installant de nouveau cette barrière entre eux.

— Tu te sens mieux ? demanda-t-il.

Jimin hocha la tête, étourdi par ce manque de contact. Que venait-il de se passer ? Jungkook l'avait-il vraiment enlacé et réconforté ?

— Je suis désolé, ça fait beaucoup pour une journée, expliqua le plus jeune, la tête légèrement baissée.

— Je comprends, mais tu dois te ressaisir maintenant, on a encore du boulot. Tu penses que ça va aller ou tu veux rentrer ?

La voix de Jungkook n'était pas dure, ni froide, contrairement à d'habitude. Elle était neutre, mais Jimin pouvait tout de même y ressentir une certaine prudence, une certaine douceur qui lui faisait du bien. Après avoir séché ses larmes, le jeune médium planta ses orbes sombres dans celle de son collègue.

— Je viens avec toi ! affirma-t-il avec assurance.

Un sourire satisfait prit place sur les lèvres du commandant.

— Ok, allons-y alors. On reviendra voir Tae dans une heure ou deux. Je vais placer des agents devant sa chambre.

— Tu penses qu'ils voudront lui faire du mal ?

L'inquiétude prit de nouveau possession de Jimin et Jungkook se maudit d'avoir réfléchi à voix haute.

— Simple mesure de précaution, le rassura ce dernier.

Le plus jeune n'était nullement convaincu par cette réponse, mais il décida de faire confiance à son colocataire. Jungkook savait ce qu'il faisait, il veillait toujours sur son meilleur ami. Rapidement, le tatoué envoya un texto à leur capitaine, résumant la situation et lui demandant à ce qu'une patrouille soit placée devant la chambre de leur lieutenant.

— Quand on sera au poste, tu pourras prendre une douche, tu es trempé et couvert de sang.

— Je n'ai pas de vêtements de rechange, fit remarquer le médium alors qu'ils arrivaient enfin au rez-de-chaussé.

— Il doit y avoir des vêtements de rechange propres qui traînent dans mon casier ou dans celui de Taehyung. Pour les sous-vêtements, tu as un distributeur dans les vestiaires, expliqua le commandant en quittant le bâtiment.

— Vous avez un distributeur à sous-vêtement ? pouffa le plus jeune en cachant son rire derrière sa main. Je ne savais même pas que ça existait.

— Oui, rigola Jungkook. C'est pratique quand on enchaîne les gardes.

— Vous pensez à tout.

Le ton moqueur de Jimin et le rire léger du tatoué apaisaient l'ambiance malgré les inquiétudes qui les habitaient. Le trajet jusqu'au commissariat fut calme et silencieux jusqu'à ce que le médium pose une question qui lui brûlait les lèvres.

— Qu'est-ce que Lilith a dit ?

— Elle a crié et a dit qu'elle prendrait le premier avion pour rentrer, répondit Jungkook.

— Elle doit être morte d'inquiétude, murmura Jimin en commençant à mordre la peau de son pouce.

— Elle l'était, mais ce sont les risques quand on fréquente un flic. C'est l'une des raisons pour laquelle je pense que les relations sérieuses ne sont pas faites pour nous.

Le ton du commandant n'était pas dur, ni méprisant ou une quelconque émotion négative. Cependant, Jimin pouvait déceler une émotion qu'il ne sut décrire. Tout ce qu'il pouvait dire, c'était que cela le peinait de savoir que Jungkook puisse penser ainsi. L'amour n'était-il pas le sentiment que toutes personnes cherchaient à ressentir au moins une fois dans sa vie ? Le médium n'avait jamais éprouvé cette émotion pour quelqu'un, du moins pas ce genre d'amour, mais il espérait le connaître un jour. Ce dernier osait croire que lui aussi, il réussirait à s'ouvrir et à faire confiance à quelqu'un.

Jimin resta silencieux, ne sachant quoi répondre à ce que son voisin venait de dire. Après, s'il ressentait cela, qui était-il pour juger ? Peut-être avait-il une bonne raison ?

Quelques minutes plus tard, l'Audi rouge se garait à sa place habituelle. Les deux hommes quittèrent le véhicule sans échanger un mot avant de marcher en direction du bâtiment. Une fois à l'intérieur, Jungkook l'invita à le suivre et ils prirent un chemin que le plus jeune n'avait jamais emprunté. Au lieu de prendre la porte qui se trouvait à gauche du bureau d'accueil, le commandant l'emmena à droite. Ils arrivèrent dans un long couloir qu'ils longèrent pour arriver dans un escalier qui menait au sous-sol. Jimin comprit qu'il était à l'opposé des salles d'interrogatoire qui se trouvaient dans l'aile Ouest du bâtiment.

Lorsque Jungkook poussa la porte battante en bois noir et en métal, le médium resta sans voix face à ce qu'il vit. Une immense salle de sport qui se divisait en plusieurs sections.

— Si jamais un jour, tu veux descendre ici, tu peux, commença le tatoué en avançant doucement. Là, tu as la partie cardio, ici, tu as la partie musculation et pour finir, la partie combat.

Dans la première partie qui se trouvait à quelques pas de l'entrée, on pouvait y trouver au minimum trois ou quatre exemplaires de chaque installation. Dans la seconde section, le nombre de machines était réduit, pourtant il y avait tout autant de matériel. Devant les vastes miroirs qui étaient accrochés au mur se trouvait une rangée de poids de musculation de toutes tailles et formes pour les différents exercices et machines. Jimin n'y connaissait rien, le peu d'information qu'il avait sur cette pratique, il les tenait des pubs à la télévision ou des films qu'il avait vus.

La dernière partie semblait être celle que Jungkook préférait. Au fond de la pièce avait été montée une cage octogonale ainsi qu'un ring de boxe. Le médium ignorait la différence entre les deux, mais il était persuadé qu'il y en avait une. Peut-être poserait-il la question une autre fois.

— Allez viens, je vais te montrer les vestiaires, fit le commandant, le ramenant ainsi à la réalité.

Jimin acquiesça et le suivit à travers une deuxième porte. Ils traversèrent un petit couloir qui desservait plusieurs portes, dont deux qui indiquaient être des WC, puis Jungkook s'arrêta devant la dernière qui se trouvait sur sa droite. Abaissant rapidement la poignée, le commandant poussa la porte pour dévoiler un grand vestiaire aux couleurs sombres.

Le plus jeune entra dans la pièce et regarda les alentours. Devant lui se présentait trois allées de casiers noirs. Au milieu de chacune d'elles, disposées symétriquement sur le carrelage gris, étaient positionnés de longs bancs en bois foncé qui réchauffaient l'ambiance du vestiaire.

— Ok, voyons s'il reste un casier de libre, lança Jungkook avant de se diriger vers sa gauche.

Le tatoué longea l'allée jusqu'au fond puis s'arrêta devant l'une des portes en acier.

— Celui-ci est vide, désigna le policier. C'est le tien maintenant. Tu as un cadenas sur la poignée, choisis un code et tu le refermeras avant de partir. Tu pourras ramener des vêtements propres de rechange, c'est toujours pratique d'en avoir. Je vais voir si j'ai quelque chose qui pourrait t'aller.

— Merci, gratifia Jimin, perplexe.

Il n'était pas habitué à ce que Jungkook soit si gentil avec lui. C'était étrange d'ailleurs. Pourquoi agissait-il ainsi ? Était-ce le fait qu'il ait pleuré tout à l'heure ? Avait-il peur qu'il craque à nouveau ? Qu'importe la réponse, le plus jeune n'allait pas s'en plaindre, car pour une fois, ils ne se disputaient pas.

— Tiens, voilà une serviette et de quoi te changer. Ça devrait t'aller, intervint le commandant en revenant près de lui.

Il tenait dans ses mains un bas de survêtement noir, ainsi qu'un t-shirt et un sweat à capuche de la même couleur. Maintenant Jimin en était sûr, le noir était la couleur préférée de son colocataire.

— Merci beaucoup, je ferai attention.

— Tu as intérêt, répliqua ce dernier avant de poursuivre sur un ton neutre. Tu es beaucoup plus fin que moi alors le pantalon risque d'être trop grand sur la taille. Il n'y a plus de ficelle alors, tu n'auras qu'à l'attacher avec ça.

Joignant le geste à la parole, le brun lui tendit un élastique pour cheveux que Jimin vint réceptionner au creux de sa main.

— Merci, murmura de nouveau le médium.

— Là-bas, tu as le distributeur de sous-vêtement, pose cette carte sur la surface en verre et rentre le code 0109, comme ça tu pourras te servir.

— C'est quoi ? questionna le plus jeune en regardant le morceau de plastique noir qu'il venait de lui donner.

Cela ressemblait à une carte de crédit, mais il n'y avait pas de chiffre dessus, juste une petite puce et le nom de Jeon Jungkook gravé en couleur dorée.

— C'est un pass d'accès. C'est avec ce genre de carte que tu peux entrer dans certains endroits du poste qui ne sont pas accessibles par tout le monde.

Jimin enregistra cette information dans un coin de sa tête, pensant que cela pourrait lui être utile plus tard.

— J'en aurai une moi aussi ? demanda-t-il, curieux.

— Je n'en sais rien, c'est le capitaine qui décide, rétorqua le plus vieux. Derrière la porte en verre opaque, tu as les douches. Je vais remonter, j'ai un mercenaire à aller interroger. Quand tu as fini, tu remontes dans le bureau, compris ?

— Oui.

— Ok, à plus tard alors.

Sur ces dernières paroles, le commandant tourna les talons et quitta la pièce, laissant derrière lui un Jimin confus et déboussolé. Comme il le lui avait expliqué, le jeune médium alla jusqu'au distributeur et avec quelques minutes de batailles avec cette machine des enfers, il parvint enfin à prendre le seul sous-vêtement à sa taille.

Avant de se diriger vers les douches, Jimin retira ses converses qui étaient, elles aussi, en piteux état à cause de la pluie, ainsi que ses chaussettes. La serviette sur l'épaule et ses habits propres en main, il marcha enfin vers la porte en verre opaque que Jungkook avait désignée plus tôt. En poussant la porte, le brun ne s'attendait pas du tout à cela. Il était bien dans les douches, mais aucune d'elles n'avait de porte.

Avançant d'un pas lent vers les dernières cabines, il priait silencieusement pour que personne n'entre. Après avoir enlevé ses vêtements, le brun observa un instant son t-shirt qui n'avait plus rien de blanc. Le vêtement qui n'avait même pas un mois de vie, était taché du sang de Taehyung.

— Il est fichu, soupira Jimin.

Une moue sur le visage, il le plia délicatement et le posa sur l'un des bancs en bois foncé qui étaient disposés en ligne au milieu de la pièce. Son pantalon ne tarda pas à aller rejoindre son haut puis vint le tour de son sous-vêtement.

Jimin détestait le fait d'être dans un espace qu'il ne pouvait fermer à clé. Tout le monde pouvait entrer ici, pire, s'il arrivait quelque chose, personne ne l'entendrait. Voulant quitter cet endroit au plus vite, il se précipita sous le jet d'eau et appuya sur le bouton qui se trouvait sur le mur en carrelage blanc. Un hoquet de surprise quitta ses lèvres lorsque le geyser d'eau froide vint s'écraser sur sa peau. Rapidement, il tourna le petit levier qui se trouvait devant lui et l'eau se réchauffa enfin.

Le brun resta de longues minutes sous le jet, dos au couloir et la tête penchée en arrière, il profitait du silence et de la sensation agréable que cette douche lui procurait. Il frotta ensuite son corps pour se débarrasser de toute trace de sang puis il se rendit compte que Jungkook ne lui avait pas donné de shampoing et encore moins de gel douche.

— Oh merde, soupira ce dernier.

Alors qu'il était sur le point de couper l'eau, un bruit sourd se fit entendre derrière lui, le faisant sursauter. Il pivota et sortit sa tête de la cabine pour regarder autour de lui.

— Il y a quelqu'un ? demanda-t-il d'une voix plus haute.

Aucune réponse.

Le jeune médium resta silencieux et immobile de longues minutes, les sens en alerte, il voulait s'assurer que personne n'était entré sans qu'il ne l'entende. Réalisant qu'il était seul et persuadé qu'il avait sûrement rêvé, Jimin termina sa douche avant de quitter la cabine pour aller se sécher.

Dans l'aile Est du commissariat, Jungkook quitta la salle d'interrogatoire où Jovan Petrovic avait été enfermé. Il venait de passer vingt minutes avec cet homme et son envie de lui fracasser le crâne n'avait pas diminué. L'interrogatoire avait d'ailleurs été musclé et bien que ce soit interdit, le commandant n'avait pas pu s'empêcher de venir chatouiller son suspect.

— Commandant, la caméra de la salle deux ne fonctionne plus, est-ce normal ? demanda l'un des agents de surveillance.

— Oui Marc, petit problème technique, mais cela devrait être réparé, mentit le tatoué.

L'homme en face de lui était peu convaincu par son explication, mais n'ajouta rien avant de disparaître par la porte qu'il venait d'emprunter.

— Officier Choi ! appela Jungkook en refermant la porte de la salle d'interrogatoire.

Le concerné apparu immédiatement avant de s'incliner devant son supérieur.

— Le suspect est tombé, faites venir un infirmier et ensuite, mettez le en cellule, ordonna-t-il.

— À vos ordres commandant !

— Merci. Faites attention, cet homme est très dangereux, informa ce dernier avant de prendre la direction des escaliers.

Il se demandait si Jimin avait terminé de prendre sa douche. Cela devait faire une demi-heure qu'il l'avait laissé là-bas. En arrivant au QG, Jungkook eut la réponse à sa question. Assis sur le fauteuil qui se trouvait près de la fenêtre de son bureau, son colocataire l'attendait patiemment. Lorsqu'il ouvrit la porte, ce dernier leva la tête et lui offrit un sourire timide. Ses cheveux encore humides tombaient légèrement devant ses yeux, laissant apparaître cette coupe au bol que le médium essayait tant bien que mal de dissimuler tous les jours. Ses joues légèrement rougies par la température de l'eau et le bout de son nez brillant lui donnaient un air si enfantin que le tatoué ne put s'empêcher de le trouver adorable.

— Les vêtements te vont ? demanda-t-il en refermant la porte derrière lui.

Pour lui répondre, Jimin se leva et remonta son haut, dévoilant ainsi un ventre plat, mais surtout le haut de jogging qu'il avait rassemblé en une petite boule avant de l'attacher avec l'élastique qu'il lui avait donné.

— Je crois que deux comme moi rentreraient là-dedans, pouffa le médium avant de baisser son pull. Mais avec ton élastique ça va, il tient.

— Parfait, répondit le tatoué, le visage neutre.

Pourtant, il avait eu envie de sourire en voyant à quel point ses vêtements étaient larges pour lui. Leur différence de taille et de poids était flagrante, encore plus maintenant. Comparé à lui, Jimin avait un corps si fin que c'en était mignon.

— J'ai faim, annonça le plus jeune en suivant Jungkook du regard alors qu'il allait s'installer à son bureau.

— Tu sais où se trouve la salle de pause ?

— Oui, pourquoi ? répliqua Jimin confus par cette question.

— Bien, tu peux aller manger alors.

Sans accorder le moindre regard à son collègue, le policier rangea son pass qui était posé sur son bureau, dans sa poche, et ouvrit son ordinateur portable. Il entra ses codes et mit en route son logiciel de travail sur lequel se trouvait toutes les vidéos de la caméra espion qui n'avaient pas encore été visionnées.

— Tu ne veux pas manger ? questionna le médium.

— Je n'ai pas le temps. Il faut que j'avance sur le visionnage des vidéos et j'ai des rapports à taper.

— Mais tu peux-

— Écoute microbe, on n'est pas dans une garderie. Tu es un grand garçon, alors si tu as faim va manger, mais ne me saoule pas, le coupa froidement Jungkook.

Pour Jimin, cette réponse et le ton dur que son colocataire venait d'employer, lui firent l'effet d'une gifle. Encore une fois, le changement d'ambiance fut si brutal qu'il se sentait étourdi. Oui, il avait faim, mais il ne voulait pas manger tout seul. Son besoin d'avoir de la compagnie après ce qui était arrivé plus tôt était vital, même si cette compagnie devait être Jungkook.

— Je... j'ai pas envie d'y aller seul, confessa-t-il, une moue sur le visage.

Le commandant le regarda enfin et quand il fit face à ce regard de chien battu, il dut prendre sur lui pour ne pas sourire à nouveau. Un ange passa durant lequel les deux hommes se regardèrent dans les yeux. Jimin gardait cette moue suppliante sur les lèvres tandis que le plus vieux faisait de son mieux pour ne pas craquer. C'était sans compter le pouvoir de persuasion que le plus jeune avait sur lui sans même le savoir.

— Tu fais chier, grogna le tatoué avant de lever les yeux au ciel, résigné. C'est bon, allons-y.

Un sourire vainqueur s'étira sur les lèvres de Jimin, fier d'avoir fait craquer une armoire à glace comme le commandant Jeon. Ensemble, les deux hommes quittèrent le bureau pour se rendre dans la salle de pause. À mesure qu'ils avançaient, des voix se firent entendre et au moment où le médium s'apprêtait à ouvrir la porte, un bout de phrase attira son attention.

— Vous avez assisté au discours du capitaine ce matin ? demanda un homme qu'il identifia comme Park Seo-joon.

— Celui où il présentait le nouveau ? lança une femme.

— Jimin. Le nouveau s'appelle Jimin, intervint un autre homme.

Le concerné était persuadé que c'était Lian qui venait de parler.

— Peu importe son nom. Depuis quand on a des consultants dans la crim ? À quoi il va nous servir ? demanda le détective Park.

— Je ne sais pas, en tout cas, vous l'avez vu ? Je suis passé aux douches tout à l'heure, il y était. Il a un cul à vous faire avoir un accident de voiture sans parler de sa bouche ! Je lui ferai-

Sa main fermement enroulée autour de la poignée et le corps paralysé, Jimin était choqué par cette conversation. Il ne connaissait pas l'homme qui venait de parler, mais les propos qu'il tenait sur sa personne lui firent mal. Subitement, le jeune homme se sentit sali, humilié. Alors, il n'avait pas rêvé, le bruit qu'il avait entendu dans les douches plus tôt, c'était cet inconnu qui venait de partir après l'avoir reluqué à son insu.

— Ferme ta gueule Byul, tu parles d'un collègue là, le réprimanda Lian.

— Quoi ? Toi aussi, tu veux te le faire ? Fais la queue comme tout le monde, répliqua le fameux Byul.

— Calme ta joie, je suis sûr que Jungkook est déjà passé dessus. À ton avis, comment il a eu ce poste, cracha Seo-joon, la voix débordante de mépris.

Cette fois s'en était trop. La gorge nouée et le corps tremblant de colère, Jimin lâcha la poignée avant de reculer. Au milieu de tout ça, il avait totalement oublié la présence de Jungkook jusqu'à ce qu'il vienne se heurter contre son torse.

— Je... je suis désolé, j-je n'ais plus faim. Je... je vais aller prendre l'air, bafouilla-t-il, le regard fuyant.

Il ne voulait pas que son colocataire le voit ainsi, les yeux larmoyants à cause de ces horreurs qu'il avait entendues. Alors c'était ce que l'on pensait de lui ? Qu'il était un garçon facile qui n'hésiterait pas à se donner pour obtenir quelque chose ? Lui qui n'avait jamais été intime avec qui que ce soit ? Lui qui n'avait même encore jamais embrassé quelqu'un ?

— Comme tu veux, mais ne t'éloigne pas. Je vais bientôt aller voir Tae, répondit Jungkook d'un ton détaché.

Pour seule réponse, le commandant eut le droit à un hochement de tête avant que le plus jeune ne le contourne pour s'éloigner d'un pas rapide.

Jungkook le suivit du regard jusqu'à ce qu'il disparaisse au fond du couloir, prenant probablement la direction de l'escalier qui menait au toit. Avant d'ouvrir la porte qui menait à la salle de pause, le tatoué soupira un bon coup pour calmer la colère qui grandissait en lui. Même s'il était resté de marbre, il avait entendu tout ce que ses collègues venaient de dire sur son colocataire et s'il y avait bien une chose qu'il ne tolérait pas, c'était le manque de respect.

D'un geste brusque, il abaissa finalement la poignée avant de la pousser pour voir enfin qui était présent dans la pièce. Comme il s'y attendait, les trois hommes de son unité étaient présents, ainsi que Soy, une jeune femme qui avait, à maintes reprises, essayé de rejoindre la section criminelle, mais en vain.

Quand le regard de Lian se posa sur son supérieur et qu'il vit sa mâchoire contractée, il comprit. Jungkook avait tout entendu, ils allaient tous devoir affronter sa colère.

— Bonjour commandant, le salua Soy d'une voix suave.

— Je peux savoir ce que tu fais ici ? Cette salle de pause est réservée à mon unité, que je sache, tu n'en fais pas partie, répliqua ce dernier d'un ton dur.

— Je-

— Que je sache, votre petit protégé ne faisait pas partie de notre unité non plus et pourtant il mangeait ici hier, intervint Seo-joon.

— Quand j'aurai envie d'entendre ta voix, je te sifflerai Park. En attendant, c'est à Soy que je m'adresse !

— C'est bon les gars, du calme, intervint Lian en posant sa main sur l'épaule de son collègue lorsque ce dernier s'apprêtait à se lever.

Jungkook lui lança un regard noir, lui indiquant ainsi de ne pas se mêler de ça. Alors qu'il se dirigeait vers le présentoir où se trouvait tous les ramen, le tatoué reprit la parole.

— Sachez, messieurs et madame, que s'il y a bien une chose que je ne tolère pas, c'est le manque de respect.

Plus personne n'osait ouvrir la bouche. Tous les regards étaient posés sur le plus haut gradé tandis que ce dernier s'affairait à préparer deux bols de nouilles au bœuf.

— Alors, commença Jungkook en pivotant vers les autres policiers, les bras croisés contre son torse. Écoutez bien ce que je vais dire, parce que si vous m'obligez à me répéter, ça finira mal pour vous.

— C'est une menace ? lança Seo-joon en se levant.

En voyant l'homme s'approcher de lui avec un air haineux, le commandant ne put retenir un sourire narquois.

— Moi, te menacer ? Non ! Parce que je ne menace jamais. Quand je veux faire quelque chose, je le fais. Maintenant écoute-moi bien parce que c'est la dernière fois que je te le dis. Si je t'entends encore tenir des propos aussi dégradants concernant un de tes collègues, je te le ferais regretter. Ce n'est pas une menace, mais une promesse !

La voix du commandant était débordante d'autorité.

— Tu m'as bien compris ? voulut s'assurer ce dernier.

Malgré son envie de répliquer et de lui tenir tête, le détective mit de côté sa fierté et hocha la tête. Satisfait, le tatoué le quitta enfin du regard. Ses prunelles sombres se posèrent sur Byul. Ce qu'il avait dit et fait était quelque chose d'inacceptable pour Jungkook. Lui qui mettait toujours un point d'honneur sur le consentement et le respect de l'intimité des autres, était ahuri de savoir qu'un représentant des forces de l'ordre avait ce genre de comportement. Qui plus est au sein de son unité.

— Quant à toi, dois-je te rappeler que le voyeurisme est puni par la loi ? lui demanda Jungkook en s'approchant de lui.

— Ça va, je plaisantais, détends-toi, lança Byul d'un ton moqueur.

Ce dernier se leva de sa chaise avec l'intention d'aller jeter ses déchets dans sa poubelle quand il fut violemment agrippé par le col de sa chemise, avant d'être brutalement plaqué contre le mur par son supérieur.

— Détends-toi ? DÉTENDS-TOI ?! Es-tu stupide au point d'oublier à qui tu t'adresses ?

— Jungkook, calme-toi ! implora Lian en venant près d'eux.

— Premièrement, même si ça t'arrache le cul de l'admettre, je reste ton supérieur, tu me dois le respect alors tâche de t'en rappeler. Deuxièmement, quel genre de gros porc es-tu pour aller mater un gamin sous la douche à son insu ? Tu n'as pas honte ? Tu portes un putain d'insigne ! Tu es censé donner l'exemple. Tu es censé représenter la loi, le respect et l'ordre, mais tu fais ce genre de chose ? Je ne sais pas ce qui me retient de te la couper avant de te retirer ta plaque et de te foutre à la porte. Ne t'avise même pas de poser à nouveau tes yeux sur lui, tu as compris ? Ne lui adresse même pas la parole ou je te jure que ça finira mal pour toi.

Le minuteur du micro-ondes brisa le silence pesant qui avait envahi ses murs. L'ambiance était électrique, chargé d'une dose incroyable de testostérone qui ne demandait qu'à s'exprimer. Les deux détectives savaient qu'ils n'auraient pas dû tenir tête à leur supérieur et encore moins le provoquer, pourtant, aucun n'avaient su mettre leur fierté de côté. Chacun d'eux avait joué à un jeu dangereux face à un Jungkook qui était sur le point d'exploser.

— C'est bon Jungkook, lâche-le maintenant, il a compris, fit Lian d'un ton calme.

Le tatoué écouta son ami et lâcha le col de Byul sans pour autant le quitter du regard. Un air menaçant sur le visage, il tourna les talons pour aller chercher son déjeuner. Sans rien dire, il avança vers la porte de sortie et l'ouvrit avant de se tourner une dernière fois vers ses subordonnés qui le fixaient, ahuris.

— Une dernière chose, je baise qui je veux, quand je veux et où je veux. Alors pour votre bien, restez loin de ce qui m'appartient.

Cette dernière réplique était un pur mensonge. Jamais Jungkook n'avait touché Jimin et cela ne se produirait pas, mais si c'était le moyen de lui assurer une protection contre les éventuelles attaques de ses abrutis, il était prêt à mentir.

Sur le toit, le jeune médium était parvenu à calmer l'avalanche de larmes qui avait ravagé son visage. Assis sur le rebord du mur, les pieds dans le vide, il fixait l'horizon, admirant ce paysage entaché par le ciel sombre qui planait au-dessus de sa tête. Bien qu'il tentait de les oublier, les paroles de ses deux hommes ne quittaient pas son esprit.

En arrivant ici, Jimin n'avait peur que d'une chose, que les gens le jugent et le voient différemment à cause de l'image de son père. Jamais il s'était imaginé que des personnes qu'il ne connaissait pas pourraient avoir une telle image de lui. Pourquoi ? Avait-il fait ou dit quelque chose qui aurait pu les faire penser ainsi ? Il avait été si innocent de croire qu'il serait accepté dans un milieu comme celui-là sans que l'on ne se fasse de fausses idées sur sa personne. Il pensa soudainement à Rose et Lian qu'il avait osé considérer comme des amis. Pensait-il cela de lui ? Si c'était le cas, pourquoi étaient-ils si gentils avec lui ? Était-ce de la pure comédie ?

Le médium fut extirpé de ses pensées sombres par un bruit métallique. Il pivota vivement la tête pour faire face à Jungkook qui venait vers lui avec un bol de nouille dans chaque main. Sans rien dire, le brun vint s'asseoir près de lui et lui tendit l'un des ramen.

— Mange, ordonna ce dernier.

Jimin le regarda quelques instants, les sourcils froncés par la confusion.

— Pourquoi tu es si gentil avec moi ? demanda-t-il.

— Parce que Tae me tuera s'il apprend que tu n'as rien avalé. Maintenant, prends ce bol, tais-toi et mange.

Le cadet ne put retenir un petit rire face à la mine grognon de son aîné. Avec prudence pour ne pas le renverser, il vint saisir le récipient en carton qui contenait son déjeuner et la paire de baguettes qu'on lui tendait.

— Merci, gratifia ce dernier d'une voix douce.

— Hum.

Ce fut la seule réponse qu'il reçut de la part de Jungkook qui fixait l'horizon alors qu'il commençait à dévorer son repas.

— Dépêche-toi de manger, ensuite, on ira voir Tae, lança le tatoué sans le regarder.

— D'accord, acquiesça le médium en venant prendre une première bouchée.

Ce plat de nouilles avait quelque chose de chaleureux et réconfortant pour Jimin. Ce geste pouvait sembler anodin pour quelqu'un d'autre, mais il ne l'était pas. Après tout ce temps qu'ils avaient été obligés de passer ensemble, après toutes ses disputes et cette animosité, c'était la première fois que Jeon Jungkook prenait soin de lui.