Les semaines qui suivirent le départ de Yoongi furent une véritable descente aux enfers pour Jimin. Le deuil de sa perte était un combat bien plus difficile qu'il ne le pensait et l'accumulation de tous ces drames lui rendait la tâche difficile.

Comme promis, le médium avait récupéré l'argent de son défunt meilleur ami et l'avait amené à madame Min. Peu désireux de lui expliquer la provenance de tous ces Wons, il avait simplement déposé le sac sur le pas de sa porte, laissant simplement un mot derrière lui.

Après cela, Jimin s'était enfermé dans un mutisme le plus total, se consacrant pleinement à ses études. Il avait fait une promesse à Yoongi et comptait bien la tenir, mais pour cela, il devait être le meilleur pour obtenir son diplôme au plus vite. Au fil des semaines, son idée grandissait dans son esprit et même s'il n'était pas encore prêt à en parler autour de lui, il continuait de chérir ce qu'elle représentait.

Le temps passait bien trop lentement pour Jungkook. Même si son fiancé faisait de son mieux pour aller bien, la souffrance qu'il ressentait créait, contre leur volonté, un fossé qu'ils ne parvenaient plus à combler. Leur amour n'avait pas diminué, cependant, le médium était bien trop absent psychologiquement pour faire grandir cette fleur qu'était leur union. Son petit ami lui manquait énormément, mais le commandant prenait son mal en patience, faisant de son mieux pour l'aider.

⊱⋅ ──────────── ⋅⊰

14 février 2024

Aujourd'hui, comme la veille, Jimin avait passé sa journée la tête plongée dans ses livres. Installé à la table de la salle à manger, ses écouteurs dans ses oreilles, il était entouré de ses manuels et suivait un cours en visioconférence. Jungkook avait quitté leur domicile avant même que le soleil se lève pour prendre la garde suivante, laissant son amant seul avec Zeus. À cause de sa blessure, le commandant n'avait pu reprendre le travail qu'en début de semaine, il faisait donc beaucoup plus d'heures afin de rattraper tout le retard causé par son absence et soulager ses collègues.

La solitude lui convenait. Il n'avait rien à dire, et être en présence de son compagnon ou de leurs amis l'obligeait à interagir et il ne voulait pas de cela.

Le soleil était couché depuis quelques heures lorsque la porte d'entrée s'ouvrit sur Jungkook. Ce dernier fut accueilli par leur berger allemand qui couinait, quémandant son attention. Attendri par le comportement de leur animal, le médium se mit à sourire en observant son bien-aimé venir vers lui.

— Salut, murmura le tatoué en déposant un baiser chaste sur ses lèvres. Ça va ? Désolé, il est tard.

— Hm, répondit simplement Jimin tandis que son vis-à-vis s'appuya contre la table pour rester face à lui. Ce n'est pas grave.

— Tu as dîné ?

— Non, je n'ai pas faim. Tu veux que je te prépare quelque chose à manger ?

— Non merci ça va. Alors, tu t'en sors ? demanda-t-il en regardant les livres empilés sur la table.

— Oui, le cours d'aujourd'hui était intéressant. Et toi, ta journée ? questionna le plus jeune, le regard rivé sur l'écran de son ordinateur.

Jungkook, lui, ne le quittait pas du regard. Il l'observait avec tendresse, mais son sourire se fanait à mesure que son compagnon l'ignorait. Le manque d'attention commençait vraiment à le peser et à le blesser, mais il ne disait rien, ne voulant pas aggraver la situation.

— Ça va.

C'était un mensonge. Sa journée avait été un véritable enfer. Avant l'aube, Taehyung et lui avaient été appelés sur une scène de crime et avaient découvert le corps d'une petite fille. Cette dernière avait été enlevée la veille au soir avant d'être sauvagement assassinée, son corps abandonné à l'arrière d'un vieux bâtiment. En rentrant chez lui, le commandant espérait retrouver son amant et passer du temps avec lui pour oublier ces horreurs, cependant, ces projets étaient mis à mal.

Face au mutisme de son fiancé, Jungkook soupira faiblement et gratta l'arrière de sa nuque. Comment pouvait-il relancer la conversation ? Devait-il le faire ? Peut-être pas. Peut-être qu'il devait simplement le laisser tranquille. Toutefois, s'il ne faisait qu'ignorer le cœur du problème, rien ne s'arrangerait et ils finiraient par se déchirer. Cela faisait des mois qu'ils n'étaient que des colocataires. Des semaines que Jimin ne l'avait pas touché, qu'il avait repoussé chacune de ses approches. Au-delà du sexe, leur amour lui manquait.

— Est-ce que tu as beaucoup de devoirs ? demanda-t-il.

— Non, j'ai terminé.

— Cool. Tu sais que c'est la Saint-Valentin aujourd'hui. Il est pas trop tard, on pourrait aller au cinéma ? Il y a ce film d'horreur dont tu m'avais parlé, qui vient de sortir, proposa Jungkook d'une voix prudente.

Jimin se figea, mais ne répondit rien. Il ferma les fichiers de son ordinateur avant d'éteindre l'appareil et de se lever, rangeant rapidement ses livres.

— Je... je suis un peu fatigué. Tu pourrais y aller avec Lian ? Il adore ce genre de film.

Déception, voilà ce que ressentait le commandant, mais tout ça était prévisible. Sans rien ajouter, son amant passa devant lui et partit en direction du salon, avant de se figer lorsqu'un rire nerveux attira son attention. Derrière, lui, Jungkook s'était redressé et passait une main dans ses mèches sombres qui avaient bien grandi.

— Qu'est-ce qui te fait rire ?

— J'en ai marre, souffla-t-il. Je veux juste passer du temps avec mon fiancé. Est-ce que c'est trop demandé ?

— Jungkook, soupira le médium en baissant les yeux. Je n'ai pas la tête à ça, tu peux le comprendre, non ?

— Ce que je comprends, c'est que mon mec me manque et que j'ai l'impression de vivre avec un étranger. Je sais que ce n'est pas évident pour toi, et je suis là pour te soutenir, mais je-

Leur conversation fut avortée par la sonnerie de son téléphone. Agacé, il avisa qui tentait de le joindre et soupira.

— C'est Tae.

— Eh bien réponds, l'encouragea Jimin tout aussi irrité.

Le commandant leva les yeux au ciel et accepta l'appel. L'appareil contre son oreille, il écouta son frère débiter tout un tas de paroles incompréhensibles avant qu'un mot en particulier n'attire son attention.

— Attends, quoi ? lança ce dernier circonspect. Ok, ok je... Oui. Je sais Tae, arrête de crier et calme-toi ! Je passe chez toi et je prends le sac !

Jimin, qui écoutait cette conversation à sens unique, sentit sa curiosité le titiller quand il remarqua le large sourire qui dévorait le visage de son amant. Il déposa alors ses livres et son ordinateur sur la table basse du salon puis s'approcha de lui, tendant l'oreille.

— Ok. Oui, je pars tout de suite !

Quand Jungkook mit fin à l'appel, le jeune médium lui lança un regard interrogatif. Le brun ne prit pas le temps de lui répondre et partit en direction de l'entrée.

— Eh, attends ! Où tu vas ?

— Le travail a commencé ! Lilith va accoucher.

— Quoi ? cria presque le plus jeune, les yeux écarquillés. Je viens avec toi !

— Je croyais que tu n'avais pas la tête à sortir, répliqua le commandant, un rictus espiègle sur les lèvres.

— Rah, ferme-la et bouge ton cul. On va enfin rencontrer nos Gremlins !

Heureux d'enfin rencontrer leurs futurs neveux, le couple se mit à rire alors qu'ils quittaient l'appartement en troisième vitesse. Ils sautèrent dans la voiture puis Jungkook démarra en direction du domicile de son frère.

Ce dernier étant encore au commissariat, il avait simplement pris la route vers la maternité, voulant être auprès de sa moitié. La jeune femme était arrivée aux termes de sa grossesse, ce n'était qu'une question de jours avant qu'elle ne donne la vie à ses deux enfants.

Son téléphone en main, Jimin alluma l'écran pour regarder l'heure et tomba sur son fond d'écran. Il s'agissait de la dernière photo qu'il avait prise avec Yoongi, la veille de sa mort. La gorge nouée, il ne put retenir une larme qui ruissela sur sa joue avant de s'écraser contre l'écran de l'appareil.

Trop excité, Jungkook remarqua le chagrin de sa moitié seulement quand il l'entendit renifler. Inquiet, il tourna la tête vers lui et le vit essuyer ses joues du revers de sa manche avant de détourner le regard vers la vitre.

— Eh, souffla-t-il en posant sa grande main sur sa cuisse.

Honteux de pleurer à nouveau, Jimin resta statique, observant le paysage urbain défiler sous ses yeux. Ce silence ne plut guère à son compagnon qui pressa doucement sa jambe.

— Microbe, parle-moi.

— Il me manque tellement, déclara le plus jeune d'une voix éteinte et brisée par les sanglots qu'il retenait.

Ne sachant pas quoi répondre pour apaiser sa peine, le commandant entrelaça leurs doigts et amena sa main à ses lèvres pour l'embrasser. Quand l'Audi s'immobilisa devant le domicile de Taehyung et Lilith, Jungkook coupa le contact et se tourna vers son passager. Avec douceur, il passa une main derrière sa nuque et l'attira à lui pour l'embrasser chastement.

— Je t'aime, tu le sais, hm ? murmura-t-il en déposant un baiser sur son front.

— Je sais. Je... je suis vraiment désolé pour mon comportement. Je... je ne veux pas te faire de peine.

— Je le sais ça, mais tu ne dois pas t'enfoncer dans la solitude. Ça n'arrangera pas les choses. Qu'est-ce que le docteur Hwang t'a dit ?

— Il... il veut que je sorte pour m'aérer l'esprit.

— Voilà. C'est ce qu'on doit faire. Je suis là pour toi, microbe. Laisse-moi t'aider à remonter à la surface. Ok ?

Jimin hocha la tête en reniflant faiblement. Il essuya ses joues avec les manches de son sweat et offrit un autre baiser à son aîné. Ce dernier lui sourit tendrement tout en glissant une mèche blonde derrière son oreille.

— On va commencer doucement. Ce soir, on va apporter le sac à Tae, demain, on avisera, d'accord ?

— D'accord, accepta le médium, traversé par des hoquets de sanglots. On peut aller au cinéma si tu veux.

— Oublions le cinéma. Il sera sûrement tard quand on sortira de la maternité. On peut rentrer à la maison et se câliner pendant qu'on regarde un film sous la couette. Tout ce que je veux, c'est qu'on passe du temps ensemble.

Tout en inspirant pour calmer ses pleurs et sa respiration tremblante, Jimin hocha la tête en guise d'approbation.

— Ok, attends-moi ici, je vais chercher le sac à langer et je reviens.

Sans attendre de réponse, Jungkook quitta le véhicule et courut jusqu'à la porte d'entrée. Après avoir composé le code d'accès, il pénétra dans la maison et disparut du champ de vision de Jimin. Ce dernier s'appliquait à reprendre le contrôle de ses émotions. Il se rappelait la promesse qu'il avait faite à Yoongi le jour de son départ et même si pour le moment cela lui semblait impossible, il devait être heureux, pour lui, pour eux.

⊱⋅ ──────────── ⋅⊰

Le couple était arrivé à la maternité de Busan, quarante minutes après l'appel de Taehyung. L'hôtesse d'accueil les avait informés que l'accouchement avait commencé et qu'ils leur étaient donc impossible d'entrer en contact avec le père. Contre toute attente, Rose et Lian s'étaient, eux aussi, présentés sur place et avaient été dirigés vers la salle d'attente où les quatre amis s'étaient retrouvés.

La jeune femme à la chevelure de feu ne pouvait pas dissimuler son angoisse. Les accouchements n'étaient jamais simples, encore plus pour une grossesse gémellaire. Elle ne pouvait s'empêcher d'avoir peur pour la vie de sa meilleure amie et celles de ses neveux.

— Ça fait trois heures qu'on attend. C'est normal que ce soit aussi long ? demanda-t-elle.

— Je sais pas Rose, la dernière fois que j'ai accouché ça remonte à... jamais, la taquina Jungkook.

— Va te faire foutre, ricana la jeune femme.

Le petit groupe se mit à rire. Debout, Jimin faisait les cent pas. Il ne disait rien, mais son inquiétude était aussi grande que celle de son amie. Est-ce que c'était normal que cela prenne aussi longtemps ? Peut-être qu'accoucher de jumeaux était plus long ? Ou alors, il s'était passé quelque chose de plus grave ? Toutes ses questions se bousculaient dans son esprit et Jungkook sembla ressentir son anxiété. Quand le médium passa devant lui, il saisit son poignet et le tira jusqu'à son torse pour l'enlacer.

— Reste tranquille, tu me donnes le tournis, murmura-t-il, son visage enfoui dans son cou.

— Je n'y peux rien, ça m'angoisse d'attendre si longtemps.

— Je suis sûr que tout va bien. Je suppose que mettre au monde deux bébés, ça met plus de temps.

Au même moment, les portes de la salle d'attente s'ouvrirent sur une tête châtaigne qui souriait à pleines dents. Ses yeux bouffis par les larmes, Taehyung avança vers eux et fut accueilli par Rose qui lui sauta presque dessus.

— Est-ce que Lilith va bien ? Et les bébés ? demanda-t-elle.

— Tout va bien. L'accouchement s'est super bien passé. Ils sont si beaux ! s'extasia le nouveau père, les yeux brillants de larmes.

— Félicitation mon vieux, lança Jungkook en venant l'enlacer chaleureusement.

Il fut rapidement suivi par Jimin qui ne put retenir ses larmes, puis Rose et Lian l'imitèrent. Taehyung passa ensuite une bonne quinzaine de minutes à leur raconter l'accouchement dans les moindres détails, au plus grand dam du commandant qui ne cessait d'afficher une moue dégoûtée.

Ne voulant pas le retenir éloigné de sa fiancée et de leurs enfants plus longtemps, le groupe d'amis décida de le libérer. Malgré la fatigue, le couple tenait absolument à ce que Jungkook et son amant rencontrent leurs bébés en premier. Ils furent donc conviés à revenir le lendemain pour leur plus grand bonheur.

⊱⋅ ──────────── ⋅⊰

Pour la première fois depuis plusieurs semaines, Jimin avait dormi une nuit complète. Il ignorait si le bonheur de savoir leur famille agrandie y était pour quelque chose, cependant, il se sentait bien. Le couple avait pris leur petit déjeuner dans la boulangerie de madame Li, puis avait passé la matinée ensemble. Ils s'étaient rendus au centre commercial pour acheter un cadeau pour les bébés, mais aussi de belles fleurs pour la maman. Après le déjeuner, ils s'étaient rendus à la maternité pour enfin rencontrer leur neveu et nièce.

Main dans la main, les deux amants avaient traversé le bâtiment jusqu'à la chambre de leur amie. Le corps tremblant légèrement, Jungkook toqua à la porte et attendit l'aval de son frère. Lorsqu'ils eurent l'autorisation attendue, le couple pénétra dans la chambre et fut frappé par un effluve bien plus doux que celui des hôpitaux.

La première chose que Jimin vit, fut son amie qui était installée confortablement contre la tête de lit. La fatigue se lisait sur ses traits, néanmoins, il ne l'avait jamais vue aussi heureuse. Près d'elle se trouvait Taehyung qui se tenait au-dessus d'un grand berceau. En voyant cela, il prit conscience de la situation. Tout ça était réel. Lilith avait réellement accouché. Après tout ce temps à les attendre, les deux bébés Kim étaient enfin là et cela réveilla une émotion étrangement douce dans son cœur.

— Salut, fit Jungkook d'une voix douce, ramenant son fiancé à la réalité.

— Salut, sourit la jeune psychiatre.

Jimin restait muet, bien trop secoué par l'émotion. Malgré lui, ses yeux étaient bien plus brillants que d'ordinaire et il ne parvenait pas à détacher son regard du berceau.

— Min, appela Taehyung d'une voix douce.

Le concerné sursauta et porta son attention sur son aîné qui venait vers lui. Il vit également son amant qui embrassait leur amie sur le front et lui donnait le bouquet de fleur

— Merci, c'est adorable, fit la jeune femme.

— Eh, tout va bien ? lui demanda le lieutenant.

— Oui, je... je suis juste ému.

Taehyung enlaça son ami avant de le libérer pour qu'il aille saluer Lilith.

— Comment tu te sens ? questionna le médium.

— Épuisée, mais la plus heureuse des femmes.

— Tu n'as pas trop mal ? demanda Jungkook en caressant le haut de sa tête.

— Non. Ils sont sortis relativement vite et par chance, je n'ai pas été trop déchirée. Je m'attendais à pire, sourit la jeune psychiatre.

— Tu es une vraie guerrière, intervint Taehyung en venant l'embrasser.

Jimin et son amant observèrent les jeunes parents et ne purent s'empêcher de sourire, attendris par l'amour qu'ils se portaient.

— Ça, c'est pour les enfants, fit le médium en tendant le paquet-cadeau à son amie. On a choisi ensemble, mais si jamais ça ne vous plaît pas, vous pourrez échanger.

— Merci, vous n'étiez pas obligés, leur sourit Lilith, émue.

Sous le regard affectueux de son fiancé, la jeune psychiatre déchira l'emballage et découvrit deux attaches tétines. Toutes les deux faites de bois, elles se distinguaient grâce à leur couleur. La première était dans les tons vert pastel tandis que la deuxième était jaune pastel.

— On a évité le rose et le bleu, comme ça vous pourrez choisir à qui les attribuer, commença Jungkook.

— Vous avez bien fait, gloussa Taehyung.

— J'ai mis la carte de la boutique dans la boite, tu pourras faire graver leur prénom et tu n'auras rien à régler, c'est déjà fait, poursuivit Jimin.

— C'est très joli, annonça la jeune maman. J'aime beaucoup. Merci.

Ravi que leur présent ait plus aux parents, le couple se regarda et se sourit. Ressentant le besoin d'être près de sa moitié, le médium se rapprocha de lui et glissa timidement sa main dans la sienne. Sans qu'il ait besoin d'en dire plus, Jungkook comprit le message. Il se plaça derrière lui et l'enlaça tout en déposant un baiser sur sa tempe.

— Est-ce que vous voulez les voir ? proposa Taehyung.

— Parce que tu crois que c'est pour tes beaux yeux que j'ai traversé la ville ? répliqua le commandant d'un ton taquin. Évidemment que je veux les voir !

Lilith se mit à rire puis fit signe à son fiancé de leur donner les bébés.

— Allez, viens par là, grincheux, l'encouragea le jeune père.

Le concerné obéit et lâcha son compagnon pour s'approcher enfin du berceau. Son regard se posa sur deux bébés engouffrés dans leur pyjama gris qui semblait beaucoup trop grand pour eux. Leurs mains étaient prisonnières de moufles et leurs petites têtes protégées par un bonnet en laine.

Avec précaution, Taehyung prit le premier nourrisson dans ses bras, et s'approcha de son frère. Ce dernier ressentit subitement une grande peur le traverser.

— Fais attention à sa tête, fit le lieutenant avec douceur.

— Ok, souffla Jungkook, la mine bien plus sérieuse. Ils devraient les fournir avec un mode d'emploi, plaisanta ce dernier pour cacher son angoisse.

— Allez, tonton Kook, tu t'en sors à merveille, gloussa Lilith qui observait la scène, attendrie.

Le concerné grimaça à ce surnom, mais un sourire timide prit place sur ses lèvres. Lorsque le nourrisson fut bien installé, Taehyung posa son attention sur leur cadet qui n'avait pas bougé.

— Approche, l'encouragea ce dernier.

Le cœur battant à tout rompre, le médium obéit et traversa la chambre pendant que le châtain prenait son deuxième enfant dans ses bras. Afin de le tenir correctement, Jimin prit exemple sur son compagnon et réceptionna le bébé que son aîné avait délicatement placé contre lui.

En observant son visage, un sourire prit vit sur ses lèvres. La pureté qui se dégageait de ce petit être était si intense et belle qu'il ne put empêcher ses yeux de s'humidifier. Lorsqu'il leva la tête, il croisa le regard de son bien-aimé qui l'observait avec tendresse. Durant sa vie, Jungkook s'était toujours répété qu'il ne voulait pas d'enfant. Après la perte de ses parents, il craignait de ne pas savoir assumer ce rôle, puis Jimin était arrivé dans sa vie et avait balayé sans effort toutes ses convictions.

Aujourd'hui, en observant l'homme qu'il aimait avec ce nourrisson, il s'autorisa à espérer qu'un jour, il tiendrait leur propre enfant.

— Vous avez choisi les prénoms ? questionna le médium, brisant le contact visuel avec son bien-aimé.

— Oui, déclara Taehyung, un large sourire sur les lèvres.

— Kook, tu tiens dans tes bras le petit Jian, commença Lilith avant de porter son attention sur Jimin. Notre petite puce est née en première, mais avant d'enregistrer officiellement son prénom, nous voulions te demander ton accord.

Le concerné fronça les sourcils, perdu.

— Mon accord ? P-pourquoi ?

— Nous sommes bien conscients que ces dernières semaines ont été très dures pour toi, mais on espère que la venue de ces bébés t'apportera un peu de bonheur. Tu sais que tu comptes énormément pour nous et même si nous n'avons pas eu la chance de connaître Yoongi, nous savons qu'il était très important pour toi, commença la jeune maman.

Elle porta ensuite son attention sur son fiancé, lui demandant silencieusement de prendre le relais.

— Lilith et moi avons longuement discuté et nous avons décidé de l'appeler Jiyoon, annonça ce dernier.

— Ji... Jiyoon, souffla le médium en baissant les yeux sur la petite fille qui dormait dans ses bras.

— C'est grâce à toi que j'ai pu rentrer à la maison, alors on veut rendre hommage au courage de son super tonton, mais aussi à Yoongi, reprit Lilith.

— On a fait un mix de vos prénoms, clarifia Taehyung, sans perdre son sourire. Mais si tu n'es pas d'accord, on-

— Non, je... merci, l'interrompit Jimin, une larme orpheline ruisselant sur sa joue rougie. C'est un très beau prénom. Yoongi aurait adoré.

— Kim Jiyoon et Kim Jian, récita Jungkook, tout aussi émue que son amant. Ce sont de très jolis prénoms.

— Merci Kook, lui sourit Lilith sans parvenir à retenir ses larmes de joie. Je suis heureuse qu'ils vous plaisent.

Le commandant observa le petit garçon qu'il tenait dans ses bras, puis ses sourcils se froncèrent.

— Eh ! Pourquoi son prénom c'est un mélange de Jimin et Lian ?

Les trois autres adultes se mirent à rire, amusé par la moue boudeuse de leur ami.

— Eh moi alors, j'ai pas le droit à un hommage ? Je me suis pris un coup de couteau quand même.

— Quoi, tu veux qu'on l'appelle Jung-min ? ou Jikook ? plaisanta Taehyung.

Le brun afficha une mine de dégout en bougeant la tête de gauche à droite.

— Non t'as raison, Jian c'est mieux, ricana ce dernier. Jung-min, on dirait le prénom d'un méchant de bande dessinée, et Jikook, on dirait une star du porno.

— Roh, Jungkook ! le réprimanda Jimin. Ton langage !

— Quoi ? Ils comprennent rien à ce que je raconte, se défendit ce dernier. D'ailleurs, c'est normal qu'ils soient si minuscules ? On dirait des Playmobils.

Les parents se mirent à rire alors que Jimin leva les yeux au ciel sans parvenir à retenir un sourire. Il n'était pas dupe. Le comportement plaisantin de son compagnon n'était pas anodin. Derrière toutes ses railleries, se cachaient tout un tas d'émotions qui le chamboulait, cependant, sa pudeur l'empêchait de laisser quiconque voir tout cela.

— Oui, c'est normal. À la naissance, les jumeaux sont plus petits que les autres bébés, expliqua la mère de famille.

— Hm, ok, c'est toi l'experte. Après tout, c'est des Gremlins, faut pas qu'ils soient trop grands.

— Tu sais qu'ils vont grandir ? lança Taehyung sans cesser de sourire, heureux de voir le regard rempli d'amour que son frère portait sur son fils.

— Oui, je sais, mais pas trop vite, hein. Ils sont mignons parce qu'ils dorment, mais après, ils vont pleurer et baver partout, ce sera moins drôle, plaisanta le commandant.

Comme s'il avait compris les dires de son oncle, Jian se mit à gigoter dans ses bras avant de s'étirer de tout son long. Une moue apparut ensuite sur ses lèvres puis il se mit à pleurer. Le commandant écarquilla les yeux et commença à le bercer, cependant rien ne semblait l'apaiser.

— Oh non, pitié pas déjà ! Je rigolais hein, tu seras toujours mignon. Tu peux te rendormir, implora le commandant, en berçant le nourrisson.

Face à cette situation inhabituelle, Jungkook sentit une légère panique l'envahir. Comment on calmait un bébé qui pleurait ? Personne ne lui avait jamais appris à faire ça. Et puis, qu'est-ce qui avait causé cela ? Ses questions furent écourtées par d'autres pleurs sur sa droite.

Dans les bras de Jimin, Jiyoon ne tarda pas à imiter son frère et les deux bébés se mirent à pleurer en parfaite synchronisation.

— Ok, c'est l'heure de manger, annonça Lilith en tendant ses bras vers Jungkook.

Ravi, le tatoué lui donna prudemment le petit garçon pendant que Taehyung récupérait sa fille.

— On va vous laisser tranquille, parla Jimin.

— Merci d'être venu, fit le lieutenant.

— Merci à vous de nous avoir reçus. Quand est-ce que vous rentrez ? demanda le tatoué en posant une main sur la nuque de son compagnon.

— Je ne sais pas, tout dépendra de leur poids. Je l'espère début de semaine prochaine, répondit Lilith. Je dois attendre l'aval du pédiatre.

— C'est qui ?

— Le docteur Kim Seokjin.

Ce nom tilta dans l'esprit de Jimin qui se rappela sa première interaction avec lui quelques mois plus tôt.

— Jungkook, tu te souviens ? C'est le docteur qu'on avait vu pour Naeyun.

— La petite fille que tu as sauvée dans ce chalet ? question Taehyung après s'être rappelé le prénom de l'enfant.

— Oui ! confirma le médium. Il a vraiment été super avec elle.

— C'est un bon pédiatre, certifia Lilith. Je pense que ce sera lui qui suivra les enfants même après ma sortie.

Jimin hocha la tête en souriant. Il était soulagé que ses neveux soient suivis par un bon médecin.

— Tu nous tiens au courant de la suite par message ? demanda doucement Jungkook à l'attention de son frère.

— Bien-sûr, ne t'en fais pas.

— Si vous avez besoin de quoi que ce soit, n'hésitez pas, poursuivit le plus jeune en regardant à tour de rôle les jumeaux.

Le jeune père de famille acquiesça, puis accompagna le couple hors de la chambre avant de se stopper sur le pas de la porte.

— Au fait, t'as appelé maman ? questionna Jungkook.

— Oui, ils arriveront demain. Ils vont loger à la maison.

— Ok, je passerai les voir.

— On passera les voir, rectifia Jimin.

En entendant cela, le commandant ne put retenir un sourire de soulagement. Depuis leur retour à Busan, son fiancé faisait son possible pour ne jamais quitter l'appartement, refusant chaque soirée avec leurs amis ou sortie en couple. Cependant, il venait d'assurer qu'il l'accompagnerait pour aller voir ses parents. C'était un bon début.

Les pleurs de Jiyoon attirèrent l'attention de son père qui sursauta faiblement, surpris par la puissance de sa voix.

— Eh bah, je crois que celle-là va se faire entendre quand elle sera plus grande, plaisanta Jungkook.

— Grande gueule comme son oncle, répliqua Taehyung.

— T'es con, gloussa le concerné. Allez, va t'occuper de ta princesse.

— Tu nous envoies plein de photos ? quémanda Jimin, les joues légèrement teintées.

— Promis.

Cette fois, le couple s'en alla, laissant les jeunes parents s'occuper de leurs nouveaux-nés. Sans dire un mot, ils quittèrent le bâtiment et rejoignirent leur véhicule. Ce ne fut qu'après avoir mis le contact pour réchauffer l'habitacle que Jungkook tourna le haut de son corps vers son amant.

— Comment tu te sens ? demanda-t-il d'une voix douce.

— Hm, bien. Je crois. Je ne sais pas trop, mais je ne veux pas y réfléchir. Pour le moment, je me sens bien et ce n'était pas arrivé depuis des lustres.

— Je suis content d'entendre ça, sourit le commandant en embrassant le haut de sa main. Tu veux rentrer ?

— Non, allons au cinéma. Je veux qu'on passe du temps ensemble.

Jungkook acquiesça et réceptionna un baiser chaste de la part de son compagnon. Les joues rougies par la douceur de ce geste, il enclencha la première vitesse et démarra en direction du cinéma qui se trouvait à plusieurs kilomètres de leur position. Il n'était que dix-sept heures et pourtant, le soleil entamait déjà sa descente dans le ciel, leur donnant l'impression que la journée touchait bientôt à sa fin. Le brun ne voulait pas cela. Il ne désirait pas que ce jour si spécial se termine, car il savait que demain, son amant risquait d'être de nouveau noyé dans sa peine, s'éloignant à nouveau.

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20 mai 2024

Trois mois s'étaient écoulés depuis la naissance des jumeaux Kim. Lilith était rentrée avec eux après une semaine passée à la maternité et depuis, la petite famille prenait leur marque. Jungkook et Jimin leur rendaient souvent visite, voulant profiter de ces petits êtres qui grandissaient bien trop rapidement à leur goût.

Pour des raisons évidentes, ils n'avaient pas reparlé de leur tour du monde. Leur couple traversait une période difficile et ils savaient que les conditions n'étaient pas réunies pour que ce voyage soit un succès.

Au fil des semaines, Jimin était parvenu à trouver un rythme de vie qui facilitait sa guérison. Malgré les mois qui s'étaient écoulés, le traumatisme de cet acte qu'il avait commis continuait de le hanter et chaque jour qui passait, Yoongi lui manquait un peu plus. Les séances avec le docteur Hwang lui étaient d'une grande aide, mais la douleur persistait. Du côté de ses études, il se donnait au maximum et ses efforts semblaient payer.

Aujourd'hui encore, le médium revenait d'une de ses séances. Les écouteurs dans les oreilles et son sac bandoulière sur l'épaule, il passa la porte de la résidence et récupéra leur courrier. Tout en rejoignant leur appartement, Jimin épluchait les enveloppes qu'il tenait dans ses mains et porta son attention sur une en particulier.

Après avoir pénétré dans son logement, il se déchaussa, salua Zeus qui vint l'accueillir, et déposa ses affaires sur l'une des chaises de la salle à manger. Le courrier qu'il tenait dans sa main venait du gouvernement, et sans même avoir à l'ouvrir, il sut de quoi il traitait.

Lorsqu'il avait obtenu son émancipation presque une année plus tôt, maître Son lui avait parlé du devoir que tout citoyen coréen avait envers son pays et il ne faisait pas exception. Les mains tremblantes, il déchira le rebord de l'enveloppe et découvrit la lettre qui lui était adressée.

À mesure qu'il lisait les paragraphes tapés à l'ordinateur, ses yeux s'inondèrent de larmes. Sans qu'il ne comprenne pourquoi, la seule chose qu'il éprouvait, était du soulagement. Il avait beau faire des efforts pour aller mieux, rien ne semblait l'aider à cicatriser ce trou béant dans sa poitrine. La dernière fois qu'il s'était senti ainsi, il avait pris la fuite pour Jeju, mais cette fois, c'était différent.

Aujourd'hui, il avait Jungkook, ils étaient même fiancés. Quel genre de compagnon serait-il s'il l'abandonnait sans aucune raison ? C'était pour cette seule raison qu'il n'avait pas quitté la ville et tout ce qui le rattachait à Yoongi, et surtout à ce meurtre qu'il avait commis. Son amour pour Jungkook n'avait pas diminué, bien au contraire, mais il ne supportait plus d'être entre ces murs, et son beau visage lui rappelait constamment ce qu'il avait fait.

Si pour certain, ce courrier provoquait de la peine, Jimin voyait là une porte de sortie pour enfin espérer remonter à la surface et respirer. Désormais, tout ce qui lui restait à faire, c'était en parler à son fiancé et décider ensemble de la date de son départ.

Les heures qui suivirent furent les plus longues de toute sa vie. Jungkook était rentré tard du travail et sans même dîner, il s'était empressé de prendre une douche pour rejoindre son compagnon qui était couché.

Installé contre la tête de lit, Jimin lisait une dernière fois son cours de la journée. Quand son bien-aimé passa le seuil de la porte, il referma son ordinateur et le déposa sur la table de chevet.

— Salut, fit-il d'une voix douce.

— Salut, répondit le tatoué.

Un sourire doux sur les lèvres, Jungkook se glissa dans leur lit et vint se lover contre son cadet qui s'allongea également afin de le prendre dans ses bras.

— Tu as passé une bonne journée ? questionna Jimin en déposant un baiser sur le haut de son crâne.

— Ça peut aller. C'est un peu la course sans Tae et puis... tu me manques au boulot. J'ai du mal à me retrouver sans toi. J'ai l'impression qu'il manque quelque chose.

— Encore quelques jours et Taehyung sera de retour, répondit le médium en caressant ses mèches sombres.

— Hm.

Jungkook avait les yeux fermés, profitant de cette étreinte qui rechargeait doucement ses batteries et comblait le manque qu'il ressentait à chaque fois qu'il quittait l'appartement. Jimin, lui, réfléchissait au moment opportun pour lui parler du courrier. Est-ce qu'il devait le faire maintenant ? Il en était persuadé. Les deux hommes s'étaient promis honnêteté, il devait donc s'y tenir, même si la conversation risquait d'être douloureuse.

— Mon cœur, commença-t-il d'une voix prudente.

— Oui ?

— Je... je dois te parler de quelque chose.

Les sourcils froncés et le cœur battant à tout rompre, le plus vieux se redressa et s'assit en tailleur. Face à lui, Jimin fit de même et en voyant son visage fermé, le brun sut que la discussion allait être sérieuse.

Sans un mot, le médium prit l'enveloppe qu'il avait dissimulée sous son oreiller et la lui tendit. Toujours aussi confus et réticent, Jungkook prit le courrier, l'ouvrit et commença à en lire le contenu.

— Je... je l'ai reçu aujourd'hui, annonça l'ancien consultant.

— Ok. C'est normal, ils veulent simplement te rappeler que tu n'as pas encore fait ton service, mais il n'y a pas de date obligatoire. Tu as encore au moins quatre ans avant de devoir t'engager.

— Je veux y aller.

En entendant ces mots, Jungkook sentit la moindre goutte de son sang le quitter. Il était parfaitement conscient que ce jour viendrait, chaque coréen devait le faire, mais pourquoi maintenant ? Il y avait une bonne raison derrière cette décision et il comptait bien la découvrir.

— Qu'est-ce... pourquoi ? Je veux dire, pourquoi maintenant ? Tu as encore le temps.

— Parce que je... il faut le faire, alors pourquoi attendre ? Le plus tôt sera le mieux.

Foutaise. Le commandant ne croyait pas un seul mot que prononçait son amant et pour cause, il pouvait voir à son langage corporel qu'il lui cachait quelque chose.

— Jimin, sois honnête. Pourquoi tu veux y aller maintenant ?

— Parce qu'il le faut. Je... j'en ai besoin, avoua le plus jeune d'une voix basse, les yeux rivés sur ses doigts qu'il triturait nerveusement. Je n'en peux plus d'être ici, entre ses murs, dans cette ville. J'ai l'impression d'étouffer.

Abasourdi et blessé, voilà ce qu'était Jungkook. Il n'en croyait pas ses oreilles. Son amant voulait s'en aller, s'éloigner de lui, mais pour quelles raisons ? Avait-il fait quelque chose de mal ? Peut-être qu'à vouloir être trop présent, il l'étouffait ? Est-ce que c'était la fin de leur relation ? Les sentiments de Jimin à son égard avaient-ils disparu ? La douleur dans sa poitrine était telle qu'il sentit les larmes flouter sa vue et son cœur se broyer.

— Est-ce que j'ai fait quelque chose de mal ?

Le médium releva la tête et croisa enfin le regard de son vis-à-vis. En y voyant les larmes qu'il essayait tant bien que mal de retenir, la culpabilité l'envahit. Il haïssait voir ce type d'émotion dans ses yeux sombres, mais cette discussion était nécessaire. Ils devaient décider de ça ensemble et si pour cela, ils devaient mettre des mots sur ce qui leur faisait du mal, ils le feraient.

Pourtant, alors que son cerveau était confiant quant au bienfait d'une communication ouverte, son cœur l'obligea à prononcer des paroles totalement différentes.

— Non, tu n'as rien fait.

Ce n'était pas un mensonge. Jungkook n'était en aucun cas responsable de son mal-être, mais il en était l'une des causes.

— Je vois bien que tu mens, répondit-il, la voix tremblante. Jimin, ça fait des mois que tu t'éloignes. Depuis le départ de Yoongi... En fait non, bien avant ça. Depuis notre séjour à Séoul, tu n'es plus le même avec moi. On n'a pas fait l'amour depuis des mois et même sans parler de sexe, je vois bien que tu me regardes différemment. S'il te plaît, réponds-moi honnêtement. C'est... c'est pour t'éloigner de moi que tu veux commencer ton service ?

Au pied du mur, le jeune médium n'avait plus aucune échappatoire. Son compagnon avait raison, son regard sur sa personne avait changé, mais comment pouvait-il lui dire la raison de cela ? S'il prononçait ses mots, Jungkook penserait sûrement qu'il n'éprouvait plus rien pour lui et pourtant, son amour était toujours aussi grand.

— Oui.

Cette affirmation sortit de la bouche de Jimin sans qu'il ne puisse la retenir. Un si petit mot dont la violence fut telle que le commandant eut l'impression d'avoir reçu un coup de poing en plein estomac.

— Pourquoi ? demanda-t-il en essuyant rapidement ses yeux.

— Parce qu'à chaque fois que je te regarde, je me rappelle ce que j'ai fait.

À son tour, le médium sentit les larmes ruisseler sur son visage alors qu'il se décidait enfin à dire tout ce qu'il éprouvait à voix haute.

— J'ai tué quelqu'un, Jungkook. Ce soir-là, j'ai non seulement pris une vie, mais j'ai surtout tué mon père. Le pire dans tout ça, c'est que si on me laissait le choix de remonter le temps pour changer les évènements, je referais exactement la chose. Je le tuerai à nouveau parce que je préfère faire sauter toute une ville que de vivre sans toi. Pour cette raison, je me haïs. Je me déteste d'avoir tué un être humain, mais par-dessus tout, je déteste le soulagement que j'ai ressenti quand son corps est tombé au sol. Je ne ressens aucun regret d'avoir appuyé sur la détente. Quel genre de monstre je suis pour ne rien éprouver ?

Si Jimin ne retenait pas ses pleurs, son amant, lui, faisait de son mieux pour garder la face. La situation était des plus dramatiques. Même s'il n'avait rien demandé, Jungkook se sentait coupable d'être la cause des maux de son compagnon, mais que pouvait-il faire pour remédier à cela ? Le médium semblait avoir besoin d'espace, mais cela signifiait aussi que ça signait la fin de leur relation et rien que de penser à cette éventualité, une violente nausée le traversa.

— Je suis désolé, murmura-t-il. Si je pouvais, je remonterais le temps et je ne te donnerais pas cette arme. Pardonne-moi d'être la cause de ta souffrance.

Lorsqu'il prononça ces dernières paroles, Jungkook sentit ses joues s'humidifier et il réalisa qu'il avait lamentablement échoué. Il n'avait pas réussi à rester fort. Non, il n'y parvenait pas, car Jimin le rendait faible. Il faisait ressortir toutes ses émotions et brisait chaque barrière qu'il tentait de construire.

Le regard baissé pour cacher sa peine, le tatoué tressauta légèrement quand il sentit le lit bouger. Assis en tailleur, il releva la tête et vit son amant s'approcher de lui pour s'asseoir sur ses jambes pliées. Sans un mot, Jimin entoura son cou de ses bras fin et enfouit son visage contre celui-ci, inspirant son odeur boisée.

— Tu ne comprends pas, commença-t-il. Si tu ne m'avais pas donné cette arme, je n'aurais pas pu te sauver et je t'aurais perdu. Si c'était arrivé, je serais mort moi aussi ce soir-là. Tu n'es pas la cause de mes tourments, tu es la bouée qui me permet de ne pas couler, mais je dois apprendre à nager seul.

— Je ne veux pas te perdre, sanglota Jungkook en le serrant contre lui.

— Tu ne vas pas me perdre, assura Jimin en se redressant pour ancrer ses prunelles aux siennes.

— Tu as dit que tu voulais t'éloigner de moi. Ça veut bien dire ce que ça veut dire.

— Mes paroles étaient maladroites. J'ai besoin de m'éloigner de tout ça. Je sais que ce sera bon pour nous. La dernière fois, ça nous a réussi, mais je te promets sur ma vie que jamais, tu ne me perdras. Je t'aime plus que tout, mais je ne peux plus continuer comme ça. Je me fais du mal, pire, je te fais du mal et ça je ne le supporte pas.

— Q-quand est-ce que tu vas partir ? demanda le commandant en reniflant faiblement.

— Je n'en sais rien. Je n'ai pas encore fait les démarches.

— Ça va être si long, soupira le plus vieux.

— On pourra se voir, mon cœur. Je rentrerai à la maison dès que j'aurai une permission et tu viendras me voir, le consola Jimin avec douceur. On va s'en sortir.

La gorge nouée, Jungkook fut seulement capable de hocher la tête. Touché par son émotivité, le médium déposa un baiser sur chacune de ses joues, avant de venir à la rencontre de ses lèvres. Leur baiser était prudent, débordant de tendresse, et alors que le commandant s'attendait à ce que son amant ne coupe court à ce moment intime, Jimin se pencha en arrière, l'entraînant avec lui.

Le blond se retrouva allongé sur le dos, laissant le corps athlétique de son compagnon le surplomber. Sans quitter sa bouche, ses mains caressaient son dos, remontant du creux de ses reins jusqu'à ses omoplates.

Profitant de ces baisers, Jungkook se figea lorsqu'il sentit les doigts de son cadet passer au-delà de son boxer. Surpris par cette initiative qui ne s'était pas produite depuis de longs mois, il mit fin à leur baiser et se recula légèrement afin de voir son visage.

— On n'est pas obligé, murmura-t-il.

— J'en ai envie, assura Jimin d'une voix basse. Je suis désolé de ne pas t'avoir donné l'attention que tu mérites. Je t'aime de tout mon cœur et je te promets que ça ne changera pas.

— Je t'aime aussi, plus que tout.

— Alors prouve-le-moi.

Le brun prit tendrement la bouche de son compagnon en otage et après tant de mois privé de son corps, ils étanchèrent enfin la soif qu'ils avaient de l'autre. Leur couple devait affronter une nouvelle épreuve et cette fois, elle allait durer dix-huit mois.

⊱⋅ ──────────── ⋅⊰

14 juin 2024

Le jour tant redouté pour Jungkook était arrivé. Après trois semaines d'anxiété et d'appréhension, le moment des adieux était imminent. Assis sur le canapé, le regard rivé sur son téléphone qui affichait son fond d'écran, il attendait que son amant soit prêt à partir. Jimin avait été envoyé au camp d'entraînement de Nonsan qui se trouvait à trois heures et demie de route. Pour espérer arriver à l'heure, le couple devait quitter leur domicile dans l'heure qui suivait, mais le médium ne semblait pas encore prêt pour cela.

Dans son ancienne chambre, Jimin fixait le miroir face à lui. Le crâne fraîchement rasé, il avait la sensation d'être une autre personne. Ce n'était pas mauvais, mais il ne ressentait pas de joie non plus. Son cœur était lourd, secoué par diverses émotions qu'il ne parvenait pas à gérer. Il avait mal de laisser son fiancé pendant tant de mois, cependant, une part de lui espérait que cette séparation fortifierait davantage leur couple.

La veille, ses amis avaient organisé une soirée d'adieux en son honneur. Il avait pu profiter une dernière fois de ses neveux qui fêtaient leur quatrième mois de vie. Les laisser avait été une épreuve pour lui. Il était parfaitement conscient qu'il n'allait pas les voir grandir et cette réalité était un crève-cœur.

— Microbe, t'es prêt ? appela Jungkook depuis le salon, le sortant de ses pensées.

— J'arrive. Donne-moi deux secondes, répondit-il, la gorge nouée.

Sans quitter son reflet, il passa une main sur le haut de sa tête. La sensation de ses cheveux fraichement raccourcis était agréable, mais l'image qu'il renvoyait ne l'était pas autant.

— Quand faut y aller, soupira-t-il en se levant.

Expirant un bon coup pour se donner du courage, il saisit son sac qui se trouvait près de la porte et observa la pièce une dernière fois. Quand il reviendra entre ses murs, il espérait être un homme nouveau. Un homme en paix avec lui-même et prêt à vivre sa vie sans ses démons.

Sans se retourner à nouveau, il rejoignit le salon et y trouva son compagnon assis sur le sofa, la tête baissé sur l'écran de son téléphone. Avec tendresse, il posa sa paume à la base de sa nuque et la massa.

— Je suis prêt, annonça-t-il.

Jungkook se leva et lui offrit un sourire sans joie. Muet, il partit en direction de l'entrée et se chaussa. Jimin ne lui tint pas rigueur de ce manque d'enthousiasme, après tout, comment pouvait-il être heureux alors qu'ils allaient devoir se dire au revoir ?

Après s'être chaussé, le médium s'agenouilla sur le parquet et enlaça Zeus qui était venu les rejoindre. Le berger allemand se faisait de plus en plus vieux et malgré tout les soins et l'amour que lui donnaient ses maîtres, l'animal commençait à montrer de réels signes de fatigue.

— Au revoir champion. Sois sage hein ? fit-il en déposant un baiser au-dessus de sa truffe.

Sur le pas de la porte, Jungkook assistait à la scène, le cœur au bord des lèvres. S'il tentait de rester de marbre, à l'intérieur, son âme criait déjà de désespoir. L'idée être loin de cet être qui était le centre de son monde le brisait d'avance. Il savait que la prochaine année allait être difficile et il ne se sentait pas prêt à affronter la solitude qui l'attendait.

Le couple quitta enfin l'appartement et rejoignit la voiture. Sans grande motivation, Jungkook mit le contact et démarra, direction Nonsan.

⊱⋅ ──────────── ⋅⊰

L'heure des au revoir était arrivée. Stationné à quelques mètres du centre d'entraînement, Jungkook fixait un point invisible devant lui, tentant de calmer les nœuds qui obstruaient son œsophage.

Si dans la vie de tous les jours, l'homosexualité commençait à être acceptée, il n'en était rien dans le monde militaire. Ne voulant pas attirer d'ennuis à son compagnon, le commandant avait donc décidé de se garer à l'écart.

— Il faut que j'y aille, annonça Jimin d'une voix prudente.

— Ok, souffla-t-il en prenant une grande inspiration.

Soufflant un grand coup pour se donner du courage, Jungkook ouvrit sa portière et se dirigea vers le coffre. Il en sortit le sac de son amant et le posa au sol avant de porter son attention sur sa personne.

Ce dernier lui offrit un sourire débordant de tendresse et s'approcha de lui. Avec douceur, il entoura son buste de ses bras fin et l'enlaça, plongeant son visage dans son cou, respirant son odeur boisée.

— Ça va aller, grincheux, on se revoit bientôt, fit-il d'une voix douce.

Jungkook déposa un baiser sur le haut de sa tête et l'étreignit plus fort.

— Pas avant cent jours, soupira-t-il, le cœur serré.

— Ça va passer vite.

Jimin n'était pas convaincu par ses paroles. Il avait peur de l'avenir, il craignait tellement de choses. Est-ce qu'il allait réussir à s'intégrer ? Ses camarades allaient-ils le reconnaître et évoquer ce qu'il voulait tant oublier ? Allait-il supporter l'absence de Jungkook ?

— Sois prudent au travail, ne te mets pas en danger. Prends plein de photo des jumeaux, je veux tout voir quand je rentrerai. Surtout, nourris-toi correctement et ne passe pas ta vie au poste, hein. Tu dois me promettre d'avoir une vie saine, ok ?

— Si je ne passe pas ma vie au boulot, le temps passera encore plus lentement. Qu'est-ce que tu veux que je fasse d'autre ? répliqua le commandant d'une voix éteinte. Je... je sais plus fonctionner sans toi.

— Je sais mon cœur, moi aussi je vais avoir du mal à être séparé de toi, mais ça va nous faire du bien.

— Hm, je n'en suis pas si sûr, grommela-t-il. Ça se trouve, tu vas réaliser que je suis nul comme petit ami. Tu vas te trouver un mec pendant ton service et je partirai aux oubliettes.

Sa moue boudeuse fit rire Jimin qui se hissa sur la pointe des pieds et vint l'embrasser. Ces craintes, il les avait également, mais il avait une foi indéfectible en eux. Il était persuadé que le temps n'entacherait pas leur amour.

— Ne dis pas de bêtises, gloussa le plus jeune en caressant la base de sa nuque. C'est toi l'amour de ta vie, aucun de ces hommes ne t'arrive à la cheville. Je pourrais dire la même chose. Tu pourrais te trouver une brune ténébreuse avec qui tu voudrais faire ta vie et m'oublier, mais je sais que nos âmes sont liées. J'ai confiance en toi. J'ai confiance en nous. Ce sera difficile, mais on va surpasser tout ça.

Jungkook hocha simplement la tête, le regard triste. Il observa son fiancé de longues secondes, gravant chaque détail de son visage dans sa mémoire.

Le couple s'embrassa une dernière fois, puis Jimin se recula. Avec prudence, il détacha son collier, qu'il n'avait pas le droit de prendre avec lui, et le passa autour du cou de son bien-aimé. Grâce à leur aimant respectif, les deux pendentifs s'unir immédiatement, arrachant un sourire débordant de tristesse au médium.

— Garde ça bien au chaud pour moi, demanda-t-il d'une voix légèrement tremblante d'émotion.

— Promis.

— Allez, si je ne pars pas maintenant, je vais être en retard.

Impuissant, Jungkook accepta simplement la fatalité qui lui tombait dessus. Son amant allait lui être enlevé durant cent jours complet. Quatorze semaines sans aucune nouvelles, autant dire un véritable enfer pour lui qui allait devoir réapprendre à vivre sans sa présence.

Sans rien ajouter, Jimin trouva enfin le courage et s'éloigna de son aîné. Les mains tremblantes, il saisit son sac et partit sans se retourner. Près de son véhicule, le commandant sentait son cœur se déchirer un peu plus à chaque pas que son compagnon faisait.

— Je t'aime, microbe ! lança-t-il assez fort pour être entendu.

Le concerné se stoppa, le regard rivé devant lui. Il s'écoula de longues secondes avant qu'il ne pivote le haut de son corps et dévoile un visage inondé par les larmes. Malgré sa tristesse, un large sourire s'étira sur ses lèvres pulpeuses.

— Jusqu'à ce que la mort nous sépare, grincheux, répondit-il avant de reprendre sa marche.

Lorsqu'il disparut de son champ de vision, Jungkook sentit ses jambes trembler et toute la force qu'il avait, le quitter. Le cœur lourd, il s'appuya contre le coffre de sa voiture et essuya ses larmes.

À cet instant précis, il maudissait la vie de s'acharner autant sur eux. Si toutes ces horreurs n'étaient pas arrivées, il serait probablement avec l'homme qu'il aimait, en train de faire le tour du monde. Au lieu de cela, il venait de le regarder s'en aller, emmenant avec lui, la moitié de son âme.

⊱⋅ ──────────── ⋅⊰

Dix-huit mois plus tard

14 décembre 2025

Un nouvel hiver s'était abattu sur Busan, amenant avec lui la fin d'une autre année. Jimin accomplissait son service militaire depuis cinq cent quarante-huit jours et même s'il voyait son compagnon et leurs amis régulièrement, sa vie lui manquait.

Si avant d'entamer les démarches, le médium ressentait le besoin de s'éloigner, aujourd'hui, il n'avait qu'une hâte, rentrer chez lui et retrouver sa moitié. Le temps avait fait son travail. Yoongi lui manquait toujours, cependant, il était parvenu à accepter son départ.

Jungkook, de son côté, avait appris de cette séparation, mais avait également vécu de longs moments de solitude et de tristesse. En début d'année, son berger allemand était tombé malade. Inquiet, le commandant l'avait conduit chez le vétérinaire qui avait diagnostiqué un cancer de l'estomac bien avancé. Après huit longs mois de traitement et plus de dix années de bons et loyaux services, Zeus s'était éteint paisiblement dans les bras de son maître.

Ce jour-là, Jungkook avait cru que son cœur s'était brisé. Si pour certain un chien n'était qu'un animal de compagnie, pour le tatoué, ce canidé au pelage noire avait été son meilleur ami, son compagnon qui était resté à ses côtés lorsqu'il était au fond du trou. Il se souvenait encore du jour où il l'avait trouvé derrière une benne à ordure alors qu'il était en mission à l'étranger. Affaibli par l'abandon de sa mère, le chiot n'avait que très peu de chance de survie, mais l'amour et les soins de Jungkook avaient fait de lui l'un des meilleurs chiens militaires et policiers. Zeus lui avait sauvé la vie tant de fois qu'il en avait perdu le compte, et voilà qu'après tant d'années, il avait senti la vie le quitter au moment où il avait le plus besoin de lui.

Lorsqu'il avait pu contacter Jimin, le commandant lui avait annoncé la triste nouvelle. Comme il s'y attendait, le médium avait fondu en larmes, regrettant de ne pas avoir été présent pour lui dans ses dernières heures.

Les jours qui avaient suivi cette perte avaient été des plus difficiles pour Jungkook. Totalement seul, il passait ses journées au commissariat, et lorsqu'il rentrait chez lui, son regard restait rivé sur le collier de l'animal ou le cadre photo sur lequel il reposait. Quand la douleur devenait trop insupportable, le commandant se réfugiait chez son frère où il retrouvait le sourire grâce à ses neveux. Jiyoon et Jian grandissaient et s'épanouissaient dans un environnement sain et rempli de douceur. La relation avec leurs oncles était plus forte que jamais et l'amour que le brun leur portait était indescriptible.

À quelques jours de Noël, Jungkook s'était réveillé avec un sentiment de bien-être qu'il n'avait pas ressenti depuis longtemps. Après dix-huit mois, son fiancé rentrait enfin à la maison et il ne pensait qu'à une chose, la surprise qu'il lui réservait.

Installé devant son ordinateur, le commandant vérifiait les derniers détails, puis il se leva et alla chercher ses affaires dans la chambre. Il était sur le point d'atteindre le couloir lorsque la sonnette retentit. Surpris par ce visiteur inattendu, il revint sur ses pas et rejoignit le hall d'entrée.

Sans regarder par le judas, Jungkook ouvrit la porte et se figea. Son cœur battait si vite dans sa poitrine qu'il eût l'impression qu'il allait exploser dans sa cage thoracique.

— Bonjour commandant.

— Q-qu'est-ce que tu fais là ?

Sur le pas de la porte, vêtu de son uniforme, Jimin lui offrait un large sourire tandis que ses yeux brillaient d'émotion.

Pourquoi son fiancé se tenait-il devant lui, alors qu'il était censé aller le chercher ? S'était-il trompé de jours ? Pire, d'heure ? Non, impossible, il avait mémorisé cet évènement qu'il avait tant attendu.

La stupeur passée, Jungkook agrippa le poignet de son fiancé et le tira jusqu'à lui. Après trois mois sans se voir, leurs lèvres se rencontrèrent et leurs langues se mirent à danser comme si elles ne s'étaient jamais quittées. Poussé par le manque qu'il ressentait, le commandant souleva son amant sans même lui laisser le temps de rentrer ses affaires et l'entraîna dans l'appartement.

— Eh, mon sac, ricana Jimin en mettant fin à leur baiser.

Étourdi par le manque soudain de contact, le commandant cligna plusieurs fois des paupières et laissa son bien-aimé descendre de ses bras. Ce dernier trottina jusqu'au pas de la porte et rentra son sac. Sans aucune délicatesse, il retira ses rangers puis pivota et sourit à pleines dents.

— Maintenant, je suis tout à toi.

À peine ces paroles quittèrent ses lèvres, il courut jusqu'à son fiancé et sauta dans ses bras. Pendant qu'il se laissait porter jusqu'à leur chambre, le médium entrechoqua de nouveau leur bouche dans un baiser vorace et passionnel. Tant de temps sans se voir ni se toucher avait été une véritable torture pour eux. À présent, leur corps et leur âme quémandaient leur moitié et le couple comptait bien satisfaire ce besoin.

Avec tendresse et passion, les deux hommes s'unirent sans attendre plus longtemps. Les murs de leur appartement furent témoins de leur amour et pêché charnel jusqu'à ce qu'ils soient totalement rassasiés.

⊱⋅ ──────────── ⋅⊰

Le soleil entamait lentement sa descente dans le ciel. Lovés l'un contre l'autre, les deux amants s'étaient endormis après avoir fait l'amour jusqu'à épuisement. Ce qui les extirpa de ce repos furent les vibrations d'un téléphone.

Un œil mi-clos, Jimin tendit sa main jusqu'à la table de chevet, mais ne trouva rien. Désorienté, il se redressa et observa la pagaille autour de lui. Leurs vêtements gisaient sur le sol et s'il en croyait la provenance des bruits, le portable en question devait être sur le parquet, perdu entre tout ce linge.

Ne voulant pas réveiller son compagnon, il s'extirpa tel une anguille du lit et alla directement à la cherche de son treillis. Il fouilla ses poches et trouva enfin l'appareil qui l'avait réveillé. Il n'eut malheureusement pas le temps de répondre à l'appel et vit que sa mère avait tenté de la joindre. Ne voulant pas l'inquiéter, il lui envoya un message, promettant de la rappeler plus tard.

Sans perdre plus de temps, il retourna dans les bras de Jungkook qui grommela dans sa barbe tout en le serrant contre lui. Désormais face à face, le commandant enfouit son visage dans son cou et soupira de bien-être. Attendri, Jimin ne put retenir un petit rire alors qu'il déposait un baiser sur le haut de son crâne.

Ce genre de moment lui avait tant manqué. Même s'ils avaient fait leur maximum pour se voir à chacune de ses permissions, le médium avait la sensation que ces retrouvailles étaient toujours annonciatrices de nouvelle séparation. Aujourd'hui c'était différent, il avait terminé son service militaire, il avait fait son devoir et surtout, ce temps passé loin de Busan l'avait réellement aidé à guérir.

Au fil des mois, il avait fini par accepter le départ de Yoongi et la tristesse avait laissé place à la paix qu'il avait tant recherchée. La culpabilité d'avoir mis fin à la vie de son père sommeillait toujours en lui, cependant, il avait appris à vivre avec. Il s'était convaincu que ses actes avaient été justifiés par l'amour qu'il portait à son fiancé et cela lui suffisait. Jungkook était l'amour de sa vie, il avait besoin de lui pour vivre sereinement et ne laisserait personne le priver de ce bonheur.

Son amant endormi contre lui, Jimin profita du calme qui les entourait pour envoyer un message à ses amis afin de les avertir de son retour. Sa main libre caressant les mèches longues de son fiancé, son attention fut portée sur sa personne lorsqu'il se mit à marmonner dans son sommeil tout en plongeant davantage son visage contre son cou.

Attendri par son comportement, le médium activa l'appareil photo de son téléphone et immortalisa ce moment. Le bruit de son téléphone réveilla son aîné qui fronça les sourcils avant de cligner plusieurs fois des paupières.

— Qu'est-ce que tu fais ? demanda-t-il d'une voix enrouée.

— Tu étais trop mignon, j'étais obligé de prendre une photo, répondit Jimin d'une voix basse.

Un rire grave fit vibrer les cordes vocales de Jungkook qui enlaça encore plus le buste de son amant.

— Quelle heure il est ?

— Hm, bientôt dix-huit heures.

Le commandant se redressa subitement, les yeux écarquillés.

— Quoi, déjà ? Mais tu... On a perdu toute une journée.

Confus, Jimin l'imita et s'assit derrière lui, posant son menton sur son épaule. Il entoura son torse nu de ses bras fin et caressa tendrement sa ligne abdominale du bout des doigts.

— Ce n'est pas grave, on a encore toute la soirée pour profiter.

— Si ! Tu... tu ne restes jamais longtemps quand tu-

— Eh grincheux, l'interrompit le médium en comprenant la désorientation de son compagnon.

Voulant établir un contact visuel, il se plaça devant lui et s'assit à califourchon sur ses cuisses. Il prit ensuite son visage en coupe et déposa un baiser chaste sur le bout de son nez, arrachant un faible sourire à son vis-à-vis.

— Je ne vais nulle part, mon cœur. Je suis rentré à la maison pour de bon.

Jungkook le fixa quelques secondes et sembla peu à peu se reconnecter à la réalité. Chaque séparation avait été si difficile, que son esprit avait du mal à croire que c'était terminé pour de bon, qu'enfin son fiancé lui était revenu.

— Désolé, je... je suis un peu fatigué.

— Ce n'est pas grave, lui sourit Jimin en embrassant sa joue. Est-ce que tu as faim ?

Le commandant hocha innocemment la tête, les joues faiblement teintées.

— Ok, je vais nous préparer quelque chose à manger, mais avant, j'ai besoin d'une douche parce qu'on en a mis partout.

Jungkook se mit à rire, entraînant avec lui son compagnon qui quitta le lit. Ensemble, ils prirent une douche rapide, puis rejoignirent la cuisine où le plus jeune s'attela à leur préparer le diner. Pendant ce temps, le tatoué s'installa à la table de la salle à manger, un stylo en main pour gribouiller sur un carnet.

— Qu'est-ce que tu fais ? roucoula Jimin, intrigué.

— Hm, tu verras, j'ai bientôt fini.

Curieux, le médium eut envie de jeter un coup d'œil et s'approcha, mais la réaction de Jungkook fut immédiate. Une moue enfantine sur les lèvres, il cacha les morceaux de papier et jeta un regard noir à son fiancé.

— Reste où tu es, démon, répliqua-t-il, se servant de son crayon à bille comme arme de défense.

— Allez, montre-moi ! implora le plus jeune. Tu m'écris un poème ?

— Pff, tu rêves, gloussa le brun. Je veux bien être romantique, mais je suis pas Victor Hugo.

— Tss, même pas drôle.

Tout en riant, le commandant continua d'écrire et de déchirer la feuille. Cherchant où il pourrait mettre les morceaux de papier qu'il avait plié, il scanna les alentours et porta son dévolu sur la panière de fruits vide qui se trouvait près de lui.

— Tu veux jouer à un jeu ? demanda-t-il en se levant, le récipient de verre dans ses mains.

Méfiant, Jimin l'observa venir jusqu'à lui, les yeux légèrement plissés.

— Ça dépend, qu'est-ce que je risque ?

— Rien, tu seras obligatoirement gagnant, assura Jungkook en se stoppant face à lui, ses deux mains dans son dos.

— Ok. Quelles sont les règles du jeu ? questionna le médium en sautant sur le plan de travail pour s'y asseoir.

— Pioche un papier et tu comprendras.

Jimin observa son fiancé de longues secondes. Il admira les traits de son visage qu'il trouvait toujours aussi magnifiques, et réalisa à quel point cet homme avait évolué. Ils s'étaient connus deux ans plus tôt et en regardant derrière eux, il vit le chemin qu'ils avaient parcouru en tant qu'individu, mais aussi en tant que couple.

Avant de se connaître, ils étaient deux entités solitaires, brisées par la vie. Deux êtres dont le cœur avait été piétiné, mais aujourd'hui, ils avaient trouvé leur âme-sœur, la pièce qui manquait à leur puzzle.

— Hm, si ce sont des positions sexuelles, je te préviens, je ne suis pas élastique, plaisanta Jimin pour cacher la timidité provoquée par le regard intense que son amant portait sur sa personne.

— Pour une fois, je ne pensais même pas au sexe. T'es vraiment pire que moi ! s'indigna faussement Jungkook. Allez, pioche avant que nos nouilles soient prêtes !

— Ok ok, gloussa le plus jeune.

Une main légèrement tremblante, Jimin plongea sa main dans le saladier et prit l'un des petits papiers. Suspicieux, il planta ses prunelles dans celles de son vis-à-vis qui l'encouragea d'un mouvement de tête. Il le déplia et lit ce qui y était inscrit d'une voix basse.

— Paris.

Il s'écoula quelques secondes durant lesquelles le médium resta statique, son regard rivé sur le morceau de papier. Face à lui, Jungkook sentait son cœur battre si rapidement dans sa poitrine, qu'il était persuadé qu'il pourrait exploser d'un moment à l'autre. Pourquoi ne réagissait-il pas ? N'avait-il pas compris son intention ? Aurait-il dû procéder différemment ? En peu de temps, toutes les certitudes qu'il avait quant à sa surprise s'affrontèrent, laissant place à un embarras et une angoisse des plus désagréables.

Lorsque Jimin comprit la signification de cette capitale, il releva la tête si vite que son aîné tressauta. Ses yeux écarquillés s'humidifièrent d'émotion, faisant sourire son amant.

— On va...

— Oui bébé. On s'envole pour Paris.

— Q-quand ?

— Quand tu voudras, lui sourit le tatoué en caressant sa joue. Je t'ai promis un tour du monde, tu te souviens ?

N'ayant aucune confiance en sa voix, Jimin hocha la tête, les yeux larmoyants et ses doigts serrés autour du t-shirt de son compagnon.

— Maintenant qu'on s'est retrouvé, il est temps qu'on pense à nous et à notre avenir. Qui sait, peut-être qu'on trouvera un endroit où on se sentirait bien pour fonder notre famille ?

— E-et ton travail ? hoqueta le plus jeune, la gorge nouée par l'émotion.

— J'ai posé des vacances à durée indéterminée.

— Mais tu... tu adores Busan et tu aimes ton métier. Tout ça, c'est ton monde, ta maison.

Un sourire tendre sur les lèvres, Jungkook s'approcha de son compagnon et essuya la larme orpheline qui venait de ruisseler sur sa joue. Sa grande main contre l'os de sa mâchoire, il releva légèrement sa tête et vint à la rencontre de ses lèvres, lui offrant un baiser débordant de douceur et d'affection. Quand il rompit le contact, leur front se rencontrèrent alors que les deux hommes gardaient leurs yeux fermés, profitant du silence et de la présence de l'autre.

— Peu importe où on se trouve sur cette terre, microbe, tant que je suis à tes côtés, je suis à la maison.

The End

(avant l'épilogue ❤️)