Sonorités et sens mêlés

Nos coeurs battaient à l'unisson.
Rien ne venait perturber la douceur du moment ; tous écoutaient, tous voyaient, tous sentaient.
Oh, que cette sensation était enivrante. Et, malgré le fait que nul ne bougeait, que nul ne parlait, la salle était plus vivante que jamais. Bien que tous inconnus, nous partagions un moment intime.
Devant, les lumières, les mouvements parfois sacadés, parfois lents, la sueur coulante... Tout se mélangeait de façon harmonieuse. On ne pouvait quitter des yeux ce spectacle. Puis...
Ce fut le noir. Le silence avait pris place. Personne ne faisait un seul bruit, de peur de briser le calme, ne faisait un seul mouvement, le coeur au bord des lèvres. Il aurait pu être angoissant, ce silence.
Cependant, l'air était rempli, rempli de ces milles et une sonirités.
On entendait encore la trille jouée par le basson.
On voyait toujours L'homme faire de grands gestes, sauter et donner vie au bâton fin qui prolongeait son bras, le faisant zigzaguer, le baissant, battant l'air encore et encore, comme une partie de son propre corps.
On frissonnait à nouveau de la longue note grave et vibrante qu'avait fait résonner la grande caisse de cet instrument si majestueux, si beau.
Pour nous, ce n'était pas fini. Nous étions tous à l'affut du moindre mouvement, n'osant en faire nous même.
Je sentais mes mains moites s'accrocher désespérément ensemble, priant pour que ça ne s'arrête pas là.
Enfin. La lumière s'était alors faite. Le bois lustré avait luit à nouveau. Et mon coeur s'était arrêté de battre, avant de repartir dans une folle course.
Ils étaient là, droits, fiers.
Comme j'aurais voulu les rejoindre !
Comme j'aurais voulu émouvoir les gens comme je l'ai été !
Mais, je me contentais simplement de les regarder, mon esprit partant à la dérive.
Je me délectais à nouveau d'entendre toute cette homogénéité, tentant de joindre un goût aux sensations que je ressentais.
Un doux parfum s'était répandu dans ma bouche tandis que je fermais les yeux, savourant les sons, goûtant les basses du bout de la langue et repassant sans cesse les aigus contre mon palet, ne m'en lassant jamais. Que c'était bon.
J'aurais pu rester là des années durant.
Toute bonne chose à une fin, cependant.
Et je ne pouvais faire autre chose que faire résonner ma joie avec les centaines d'autres personnes se trouvant dans la salle avec moi.
Certes, ça ne sera jamais assez pour montrer toute mes émotions, mes états d'âme.
Et, je sais d'ailleurs que je ne suis pas la seule à l'avoir ressenti et pensé,
Jamais,
Jamais,
Jamais je n'oublierais les sonorités qui ont éveillé tout mes sens ce soir là.

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