cнαριтяε 4
⚜️18h10
J'ai fait les six autres appartements, quatre étaient habités par des mecs, la fille de l'appartement huit était trop bizarre pour que j'entre, et la fille du trois faisait un mètre soixante-quinze. Autant dire qu'avec mon mètre soixante-trois j'allais nager dans ses vêtements. Elle m'a quand même proposé de me doucher chez elle, mais si je ne peux pas me changer
ça ne sert strictement à rien. Donc j'ai décliné, et suis revenu au point de départ Je frappe avec acharnement à la porte de l'appartement qui est censé être le mien.
— Ouvre cette porte ! Espèce de boîte de conserve périmée ! Si je suis en retard à mon premier jour de travail je vais te le faire payer fois mille !
Pour seule réponse, j'ai droit au silence. Je me sens seule et idiote jusqu'à ce qu'un papier glisse sous la porte. Je m'accroupis pour le ramasser et le déplie.
« Chut, y'en a qui travaillent. »
J'écrase le papier dans ma main et
le jette par terre.
— VA MOURIR ! je hurle en frappant
la porte avec rage.
Je finis par m'asseoir contre le mur
avec dépit. Je n'ai d'autres choix que d'accepter mon sort. Je ne peux même pas appeler mon employeur pour lui
dire que je ne vais pas pouvoir venir.
Me présenter dans ma tenue actuelle, dégoulinante de sueur, c'est juste signer
mon renvoi immédiat.
J'enfouis mon visage dans mes mains, ressassant le fait que ma carrière est finie avant même d'avoir commencer, quand la porte de l'appartement d'en face s'ouvre. La fille qui m'a fermée la porte au nez il y a vingt minutes réapparaît sur le palier. Elle est blonde aux yeux bleus, avec une peau laiteuse et des lèvres rosées. C'est le genre de fille qui paraît hautaine et qui l'est réellement. Quand elle me regarde j'ai l'impression qu'elle va me cracher dessus.
— Ton coloc' c'est le grand avec
les cheveux brun ? Celui qui
est membre d'une fraternité ? questionne-t-elle sans quitter son
air hautain. Je hoche la tête.
— Je veux bien t'aider si tu
me présentes.
Mes yeux doivent pétiller de joie à l'entente de sa phrase, je la prendrais dans mes bras si elle ne me faisait pas aussi froid dans le dos.
— Oui ! Tout ce que tu veux, je te donne même ses vêtements si tu veux !
— Oh seigneur, je ne suis pas une psychopathe, il est juste carrément canon. Mais je déteste faire le premier pas, donc ça passera mieux si c'est sa coloc' qui présente. Et puis sincèrement tu me fais pitié, regarde-toi, on dirait une clocharde.
En d'autres circonstances, je lui aurais certainement répondu quelque chose de super vexant, mais là je ne peux que faire la lèche botte. Pour ma survie.
— Dépêche-toi avant que je change d'avis.
— — — —
⚜️18h28
— Tu vas travailler où ? me
demande-t-elle en ouvrant son
dressing.
— Au Madison Avenue.
— C'est sérieux ? Ils t'ont embauchée ?
— Oui. Ils cherchaient une serveuse, et quand j'ai dit que je parlais français et espagnol, et que j'aimais chanter, la patronne m'a dit
« ok on te prend à l'essai mais t'as intérêt à être compétente ».
— Je vois. Tu sais qu'ils te donnent un uniforme là-bas ?
— Oui, mais elle m'a dit de venir bien habillée. Je ne pouvais pas
y aller complètement décoiffée
et...
— Ça va de soi, tiens, tu vas mettre ça avec ça et... ça.
Elle me donne successivement un débardeur noir, un jean slim basique
et un gilet à grosses mailles beiges.
C'est casual, ça me convient, alors
je prends sans protester.
— Allez enfile ça. Par contre, tu devrais prendre des couleurs t'es tellement... blanche, grimace-t-elle.
— J'aimerais bien mais c'est pas moi qui décide, t'es marrante.
— Les UV ça existe.
— M'exposer à des rayons ultra violet uniquement pour bronzer, non merci. J'ai autre chose à faire
moi. Le temps c'est de l'argent.
— — — —
⚜️19h02
— Ok, tu me présentes demain.
— Oui... merci, je réponds en
claquant la portière de sa décapotable.
Ma voisine de palier remonte ses lunettes de soleil sur son nez et démarre en trombe. Je ne sais même pas comment elle s'appelle. Cette rentrée va de mieux en mieux, d'abord je dois vivre avec quelqu'un, et maintenant je dois copiner avec une fille, que je vais en plus devoir présenter au colocataire que je n'ai pas désiré. Tous ces contacts humains vont me rendre folle.
Je me tourne vers la façade du Madison Avenue. C'est un bar très populaire auprès des étudiants de Boston. Je n'y suis jamais venue puisque je n'en voyais pas l'interêt, mais quand j'ai vu qu'ils embauchaient, j'étais obligée de me présenter. Niveau salaire ils payent mieux que beaucoup d'autres bars ou restau,
je crois d'ailleurs que le personnel est composé essentiellement d'étudiants.
— Tu as trois minutes de retard, m'annonce la patronne dès que je me présente au bar.
— Je suis désolée j'ai eu quelques... désagréments, ça n'arrivera plus.
La femme me dévisage, elle doit avoir la quarantaine, des airs latino, des traits fins, des cheveux bruns, des yeux marrons en amande et un style un peu rock. En
la voyant, je crois qu'on ne peut qu'être impressionné, elle est très charismatique et a un charme envoûtant.
— C'est quoi déjà ton nom ?
— C'est Nora, Madame.
— Ok, écoute Nora, ici
on ne rigole pas, soit tu es performante soit tu dégages,
c'est clair ?
— Vous pouvez me parler moins familièrement ?
— Tu veux prendre la porte tout de suite ?
— Non. Mais ne me prenez pas pour la dernière des incapables sous prétexte que j'ai trois minutes de retard, s'il vous plaît.
— Bien... tu me plais bien.
Cherry va t'expliquer comment
on fonctionne et te donner ton uniforme du jour, j'ai des choses
à faire.
Ok, je ne suis pas virée... il ne reste plus qu'à faire mes preuves.
Je n'ai jamais réellement travaillé, mais j'aimais bien aider ma tante dans son restaurant quand j'étais encore au lycée. Espérons que ça me serve, parce que pour qu'ils acceptent de m'employer,
j'ai dit que j'avais travaillé dans un restaurant en tant que serveuse pendant mes trois années de lycée, or ce n'est pas vraiment le cas. Je faisais plus ça pour m'amuser qu'autre chose.
— CHERRY ! hurle la patronne.
Une minute plus tard, une fille aux cheveux rose-orangé noués en deux chignons de part et d'autre de sa tête
sort d'une porte battante à côté du bar. Elle a un look totalement excentrique, habillée d'une brassière avec un tee-shirt en résille, d'une salopette en jean et de chaussettes hautes. Elle a d'incroyable yeux, d'un bleu très clairs.
Elle me fait un grand sourire en me voyant et me prend tout naturellement dans ses bras. Ça me fait grimacer mais
je ne dis rien.
— Salut ! Moi c'est Cherry et toi ?
— Euh, Nora... enchantée.
— Je suis sûre que tu vas rapidement t'intégrer à la famille ! Je suis trop heureuse qu'il y ait une nouvelle ! s'exclame-t-elle en joignant les mains.
— Cherry calme toi, tu peux rester un minimum professionnel ? Regarde la tête qu'elle fait, râle la patronne. En effet, ma tête doit trahir mon dérangement quant à l'attitude de
la dénommée « Cherry », et je n'y peux rien.
— Pardon chef, dit-elle avant de me prendre par le bras, allez viens je vais te présenter aux autres !
— Ne traînez pas on ouvre bientôt.
Cherry m'entraîne déjà vers la porte par laquelle elle est apparue sans me lâcher une seule seconde. Rah je déteste qu'on me touche comme ça !
Je jette un dernier coup d'œil à la grande salle, la déco est dans un style ancien
et plutôt rock. Les murs sont en brique rouge, et le sol semble être du vrai parquet. Le bar prend presque tout le mur à gauche de l'entrée, le mur en question est meublé d'étagères jusqu'au plafond. Plafond qui doit être à minimum cinq mètre du sol. Les étagères sont décorées sur les étages du haut et remplies de bouteilles sur les deux derniers étages. Quant au reste de la pièce, elle est remplie par de nombreuses tables et une scène occupe le mur du fond.
— Alors Nora, t'as quel âge ?
me demande Cherry en me faisant
passer de l'autre côté de la porte.
— Vingt ans, et toi ?
— Vingt-quatre ! Mais je ne suis
plus étudiante, je travaille ici tous les soirs et je fais d'autres boulot
la journée ! Tu étudies quoi ?
— Le droit, à Harvard.
— Waouh c'est cool, j'aurais aimé avoir cette chance !
Derrière la porte il y a un grand couloir, elle m'entraîne jusqu'à une pièce au fond où se trouvent cinq autres filles.
— Alors présentation ! La blonde
c'est Ashley, la brune c'est Thalia,
la fille aux cheveux violet c'est Marina, la rousse c'est Emy et la métisse c'est Inaya.
— Mais tu peux m'appeler Ina,
me dit celle-ci en souriant.
— Les filles je vous présente Nora !
Oh mon dieu, est-ce qu'elle va arrêter d'être aussi enthousiaste, elle me donne envie de vomir des arc-en-ciel...
— Contente de te rencontrer
Nora ! répondent-elles en chœur.
Une secte ?
— Cherry arrête d'empiéter sur
son espace vital comme ça, soupire
la fille qui se nomme Marina.
— Elle a raison, regarde là elle
n'est pas sereine, rajoute Ashley.
Je remarque rapidement qu'elles sont toutes plutôt jolies, et qu'aucune d'elles ne se ressemblent même un petit peu. Je suppose que c'est voulu, mais embaucher sur des critères physiques je trouve ça moyen, et puis de quoi j'ai l'air moi ?
— J'espère que t'es bien formée,
me prévient Thalia en passant à côté de moi pour sortir de la pièce.
— Thalia ne commence pas,
râle Cherry.
— On a pas besoin d'une nouvelle, répond celle-ci du couloir.
— Excuse-moi mais si j'ai été embauchée c'est sûrement que vous n'arrivez pas à tenir la cadence, lancé-je. Je l'entends ricaner, puis sortir par la porte battante sans répliquer.
— Laisse tomber, elle est à cran à cause du barman en ce moment,
me rassure Inaya. Je hausse les épaules.
— Elle peut bien me dire ce
qu'elle veut, c'est pas comme
si ça m'intéressait.
— En parlant de barman, où ils
sont les deux idiots ? demande
Emy.
— Nadia a dit qu'ils allaient arriver dans dix minutes.
— Nadia ? demandé-je.
— C'est le nom de la chef, me répond Cherry avec enthousiasme. Allez viens je vais te donner ton uniforme !
Elle me fait passer dans la pièce d'en
face et j'y découvre tout une penderie
de vêtements.
— On change régulièrement tu verras, mais aujourd'hui... Les filles ! Vous avez choisi quoi ?
— Tu mets du S Nora ? me demande Marina.
J'acquiesce alors elle cherche dans la penderie et me donne une robe style salopette avec un tee-shirt blanc à manque courte.
— Avec des chaussettes hautes non ?
— Hm... tu te débrouilles avec des talons Nora ?
— Euh... oui plutôt...
— Ok alors va pour les chaussettes hautes et... les bottines qu'on a achetées la dernière fois là, Ashley tu peux les prendre ?
Elles sont serveuses, mais j'ai l'impression d'être « La maison du style ». Je ne sais pas si c'est cool ou too much.
• • •
Ashley revient avec une paire de bottines noires qui m'ont l'air légèrement hautes pour que j'arrive à tenir un plateau rempli de boissons avec.
— J'A—DORE ! lance Cherry dans un français approximatif. Allez vite ou la chef va nous passer un savon, les gens vont commencer à arriver !
Où est-ce que je suis tombée ?
Était-ce une grave erreur ou une
superbe idée de prendre ce job ?
Je penche plutôt pour la grave
erreur pour le moment.
— — — —
⚜️19h45
— Bon je te préviens, la cadence est dure à suivre au début, mais tu vas vite t'habituer, on est là pour t'aider si t'as un problème. Le plus important c'est que tu fasses attention à bien débarrasser pour libérer les tables, et une fois que t'as donné tes commandes au bar on se les récupère entre nous. Le numéro de table tu dois l'inscrire en haut de la commande et l'entourer ok ?
J'essaie d'assimiler tout ce dont Cherry
m'informe avec attention, mais je sens que je ne vais pas faire long feu.
— Ok, viens je vais te montrer comment sont numérotées les tables.
Elle pousse la porte qui mène à la salle et au même moment, je tourne la tête et me regarde dans le miroir du couloir. Elles m'ont fait deux petits chignons comme ceux de Cherry, et je n'ai pas du tout l'habitude d'avoir un style un peu rock mais je trouve ça sympathique.
— Salut mes biches ! s'exclame-t-elle en s'approchant du bar. Je me dépêche de la rejoindre et me retrouve face à deux garçons qui sont sans conteste les barmans.
— Les gars je vous présente Nora ! Nora je te présente Rayan et Ash.
Je dévisage Monsieur Delta Uspilon avec toute la rancoeur que je peux transmettre tandis qu'il me détaille de la tête aux pieds.
— Nora ? C'est ça ton nom ? sourit-il.
Sans répondre directement, je jette un coup d'œil à l'autre garçon. Il est métisse, rasé et... beau, comme le reste des gens qui travaillent dans ce bar, si on m'oublie. Il agrémente le sourire qu'il me fait d'un clin d'œil.
Je sens que le geste est fait par pure gentillesse donc je lui rends son sourire avant de me tourner vers Ash. Ne pas montrer que tu es surprise ni que tu as envie de lui arracher la tête, pensé-je.
— Oui, c'est Nora. Mais comme je l'ai dit, ne m'appelle pas, c'est mieux.
— Vous vous connaissez ? demandent Cherry et Rayan en chœur.
— Longue histoire, répond-t-on.
— Alors c'est ici que tu vas travailler ? Si j'avais su je t'aurais pas enfermée dehors, se moque-t-il.
— Vous sortez ensemble ? questionne Emy qui nous a rejoint dans la foulée.
— Quoi ?! Non ! protesté-je en grimaçant.
— T'es jalouse Emy ? lui demande
le concerné. Elle sourit.
— Rêve pas trop chéri. T'es trop jeune pour moi.
— Bon les jeunes je vais ouvrir donc vous discuterez plus tard ! Les garçons prenez les commandes de Nora en priorité elle risque d'être plus lente que les autres ! nous crie Nadia.
— Ne t'assois pas par terre en position du lotus en plein service,
me taquine Ash, souriant.
— Ferme ta boîte à merde et concentre toi sur ton propre travail, rétorqué-je en prenant le plateau que me donne Cherry.
— Ouh mais c'est qu'elle a du caractère, plaisante Rayan. Je le
dévisage mais ne répond rien. Pas
besoin de m'embrouiller avec qui
que ce soit dès mon premier jour.
— Elle ne fait pas peur au premier abord mais c'est une vraie chieuse, répond Ash en enfilant un tablier à la taille.
Il enlève sa veste de jogging et je découvre que tout son bras droit est tatoué. La perspective qu'il garde ça à vie, jusqu'à devenir papi me donne envie de rire. Ce sont des tatouages conséquents, il ne peut clairement pas les cacher. Mais bon je suppose que c'est le dernier de ses soucis.
Jusqu'à ce qu'il finisse les études et commence les entretiens. À moins qu'être diplômé d'Harvard compense ? Je crois bien que oui.
— Cool mes tatouages, hein ?
Pour toute réponse, je lève les yeux au ciel.
— Il va falloir nous expliquer comment vous vous connaissez, nous interpelle Thalia, me regardant
d'un œil mauvais.
Je vois, c'est ce qu'on appelle la jalousie ? Si elle savait, elle n'a pas à s'en faire, je ne suis pas une menace pour elle !
— On ne s'apprécie pas. Donc pas besoin de me regarder comme ça,
lui dis-je en la défiant du regard.
— Ah oui bien sûr. C'est ce qu'elles disent toutes.
— Bah c'est pas que je t'aime pas Miss pourrie gâtée. C'est de bonne guerre toi et moi.
J'arque un sourcil et le dévisage avec ironie.
— Tu m'as enfermée dehors, tu as jeté mon matelas dans la rue et tu as dit à notre voisin que j'étais une prostitué, énuméré-je.
Il lâche un rire.
— Tu lui as dit que j'étais un misogyne doublé d'un psychopathe, et je me suis fait passer un savon par les gars de ma fraternité tout à l'heure tu sais ? Sans parler du fait que mon matelas sentira l'huile d'olive toute sa pauvre vie.
— C'est de bonne guerre, comme tu dis.
— Ouais, d'ailleurs t'as fait quelque chose à la télécommande de la télé ?
— Oui, avoué-je fièrement.
Avant qu'il ne m'enferme dehors, j'avais collé un minuscule bout de scotch opaque sur le capteur de la télécommande. Du coup, elle ne peut plus marcher. Je sais, c'est petit, mais comme toutes nos autres actions, j'ai envie de dire.
— Eh. Vous avez fini là ? Pourquoi vous êtes tous rassemblés en troupeau ? J'ouvre alors au travail ! s'énerve Nadia.
— Ash connaît la nouvelle, lui dit Thalia.
— Oh bon dieu ne me dis pas que c'est une de tes conquêtes ?
Il sourit malicieusement, comme s'il
allait dire une bêtise alors je le fusille
du regard.
— Disons que...
— Ash ne mens pas ou je t'oblige
à faire la plonge, tranche Nadia.
— Comment tu... bref, non. On doit cohabiter pendant quelques temps parce que ni elle ni moi ne savons lire un contrat. C'est tout.
— Oui, enfin tu n'as pas été capable de prendre des lunettes, je dis.
— On peut parler deux secondes du fait que toi t'as pas besoin de lunettes, et t'as quand même loupé l'info ? réplique-t-il.
— BON ! Vous réglerez vos affaires plus tard, je suis en retard de cinq minutes à cause de vous ! AU TRAVAIL !
— — — — — — — — — — — — —
2777 mots
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