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Mutisme

J´ai toujours eu l'impression, où que j´aille, quoique je fasse, que ma voix ne portait pas.

Qu´elle n´était jamais assez forte que pour dépasser le niveau du sonore à l´oreille humaine. Qu´elle n´arrivait aux tympans des autres qu´en un drôle de murmure qu'on ne distingue qu´à peine -ce genre de son qu'on ne tente même plus de comprendre-, ou comme un silence pesant qui n´indique rien d´autre qu´une incapacité de s´expliquer au monde.

Qu´elle ne dépassait jamais le bruit du vent, pas même les douces brises d´été, qu´elle n´en venait jamais à perturber le monde alentours de ses contours incertainement agencés. Qu´elle n´avait pas même réussi à surpasser le clapotis des vaguelettes qui s'écrasent contre le sable fin les jours de basse marrée. Qu´elle n´était qu´un néant comme un autre, que le genre de trou noir dans lequel on s´balance une fois crevé, que le genre de silence insupportable qu´on essaye au mieux d´éviter.

Je m´accroche néanmoins à cet espoir débile que le monde l´a entendu au moins une fois. Que la Terre a un jour frémis, ne serait-ce que quelques instants, au contact de ces quelques ondes mal agencées. J´aime à le croire, j´aime à le penser, et les chiens qui tournent doucement la tête, et les oiseaux qui s'arrêtent de pialler quand
s´élèvent mes murmures enroués me poussent à continuer d´y croire. À m´accrocher de toutes mes forces à cette sombre illusion que le monde se rappelera de ma voix. Que mon existence ne sera pas si vaine que celle de mes cordes vocales qui restent là, inertes, attendant qu´un jour enfin le monde prenne le temps de les entendre. Et peut-être même de les écouter, qui sait.

De les écouter comme tu n´as jamais su le faire.

Parce que comme toute cause a toujours son lot de conséquences, toute conséquence a également son lot de causes. Et si les miennes proviennent peut-être quelque peu de ma personnalité hautement prostrée face au monde, elles viennent certainement aussi en grande partie de toi.

Parce que quoique je fasse, quoique je dise, ma voix ne t´a jamais atteinte.
Qu´elle eut un jour été baignée de sanglots et accompagnée de larmes, qu´elle eut été si sèche que la colère qui l´habitait me brûlait la gorge, ou encore aussi désespérée que celle d'un homme en proie à l'idée terrifiante que sa vie ne comportera peut-etre plus de lendemains, elle n'a jamais été assez digne d'intérêt pour toi. Elle n'a jamais été assez forte que pour te montrer quoique ce soit, jamais assez puissante que pour que tu continues à m'entendre quand vous vous mettiez, toi et tes putains de lèvres pincées, à hurler. Elle n'a jamais été assez. Tout comme moi d´ailleurs. Et elle et moi, on le sera probablement jamais.

En tout cas, aujourd'hui, on ne l´est toujours pas. Toujours pas de taille à affronter ta voix sans arrêt un peu plus grave ou un peu plus aiguë que la nôtre. Je crois même qu´on ne fait plus l´effort de tenter. Parce que si tu ressortais toujours gonflée d´un sentiment de puissance de nos quelques échanges, heureuse de pouvoir poser le point final à chacune de mes phrases et de pouvoir retourner à l´affirmation chacune de mes questions, moi j´en ressortais toujours anéantie. Parce que ta voix portait -et porte toujours d´ailleurs- si fort et si loin qu´elle me transpercait le cœur et le laissait crever dans son grand bain de liquide carmin. Et que mon cœur et moi, on a plus le courage d´affronter ça. Que ça vienne de toi où d´un autre.

C´est moche quand on y pense. Il aura suffit d´un début de vie avec toi pour anéantir toute possibilité pour moi d´un jour reprendre la parole. D´un jour oser à nouveau élever la voix, que ce soit face au monde ou face aux autres. D´oser dire quelques mots doux à quelqu´un, ou d´oser prendre la gueule aux quelques uns qui éleveraient la voix sur moi. T´as fait de moi un être affaibli de ce dont
l´humain tire usuellement sa force. Tu
m´as dénuée d´une partie de mon humanité -pas que de ma parole d´ailleurs- et c'est affreusement douloureux de sentir toutes ces choses se mourir en moi, par faute de toi.

C´est douloureux. Vraiment très douloureux, de perdre la voix. Je ne suis pas née muette, non, tu m´as élevée à
l´être. Tu m´as élevée à embrasser le silence. Peut-être même à lui baiser les pieds.

Et là, je suis allongée derrière mon vieux tracteur, sous ce même grand hangar qui ne ressemble à rien d'autre qu´un colossal trou noir, et rien n´est plus dévoué au silence que ma voix. Rien ne perturbe les cris des oies au loin qui migrent vers les pays frontaliers, rien ne surpasse le doux bruit des feuilles qui s´éclatent sur le toit en tôles de la vieille bâtisse isolée. Rien. Pas même cette voix qui s´extirpe difficilement de mes lippes percées, cette voix qui ne semble même plus être mienne tant je refuse d´en user.

Cette nuit, comme toutes les nuits depuis des années sûrement, je fais le deuil de ma parole. Je fais le deuil d´une partie de mon humanité.

Et je me dévoue au mutisme, qui, bien plus simple d´accès, me prend dans ses bras comme tous les soirs.

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