Chapitre 16 : Bec et Ongles
Je descendis les escaliers, marche après marche, d'un pas pesant. Vous savez quand vous avez l'impression d'avoir un troupeau de pachydermes jouant du tambourin contre votre boîte crânienne ? Et bien ajoutez-y Hiroshima, Nagasaki et quelques pétards de fête nationale et vous aurez approximativement la moitié de la douleur que je ressentais... Je rentrais dans la cuisine où ma mère buvait tranquillement son thé, puis me laissa tomber lourdement sur une chaise.
- Bien dormi ma chérie ?
- Je peux répondre à cette question ce soir ? Ou dans trois ans ?
Elle se leva pour aller chercher la théière et versa le liquide fumant dans mon bol. Je la remerciais avant d'avaler une première gorgée et de soupirer de soulagement. La boisson me réveillait doucement, avec délicatesse.
- Tu ne m'avais pas dit que tu sortais avec Sasuke...
Ok, on va oublier la délicatesse.
- Peut-être parce que je ne sors pas avec Sasuke.
- Ah bon... Vous aviez pourtant l'air proche hier soir, très proche... voir même soudé... par les lèvres.
Je recrachais le liquide que j'avais en bouche et m'étouffais à moitié. Pouvait-on faire plus brutal comme matinée ?
- J' étais déchirée ! Ça ne compte pas !
Notez quand même que je préfère avouer à ma mère être rentrée bourrée qu'abdiquer en faveur d'un quelconque baiser volontaire et conscient !
- Si tu le dis...
J'avais embrassé Sasuke, et pas le petit smack sur la bouche, non, le bon gros baiser qui ne laisse aucun doute sur les intentions, celui qui fait frissonner, le langoureux, le baiser final des films romantiques. Je vais gerber... Je fais déjà des trucs débiles en étant sobre, mais là, j'étais carrément tombée dans les tréfonds de la stupidité ! Par contre, j'aimerais bien savoir pourquoi ma très chère génitrice avait pris grand soin de mémoriser cet échange maléfique et non le coup de genou bien placé et salvateur qui avait suivi. Je crois que Sasuke n'a pas du bien comprendre ce qui lui arrivait à ce moment-là... Si vous voulez, je collecte des fonds pour l'association « SOS Uchiwa battu », ça lui payera l'opération pour remplacer ses roubignoles.
Je gémis en laissant mon front cogner contre la table. J'avais juste eu une pulsion, une envie subite contre laquelle j'avais tout d'abord essayé de lutter. Le problème, c'était que lorsque le mec que vous avez subitement envie d'embrasser, vous empêche de détourner le regard de ses beaux yeux, ce n'est plus de la provocation mais un appel à la débauche ! Bref, j'avais eu un « contact » plus que gênant avec mon meilleur ami et j'étais dans la merde. Enfin surtout parce que j'avais eu un malencontreux réflexe défensif et qu'il me semble bien l'avoir entendu me maudire jusqu'à la cent trente-cinquième génération... C'est pas ma faute ! C'est un mode « par défaut » du système Sakura Haruno.
Voyons le bon côté des choses, ça avait tout de même été très agréable. Il embrassait bien le gus. Quoi ? Je me suis pas encore brossée les dents, je peux dire ce que je veux.
En parlant de lavage de chicots...
- M'man, elle est où la javel ?
- En sécurité, hors des pattes de cette famille...
- Et le canard WC ?
- Je doute que tu sois embarquée dans une frénésie du ménage après dix-sept ans de larvage intensif, alors pourquoi me poses-tu ces questions étranges ?
- Pour ôter toutes preuves compromettantes de ce qui s'est passé la nuit dernière.
- Embrasse le garçon qui te plaît, ça fera l'affaire, sauf s'il s'agit du même...
C'est à ce moment-là que la bouilloire choisit de me venger en projetant une partie de son liquide brûlant sur ma mère. Ça aide de copiner avec les couteaux et les casseroles, mine de rien.
❈❈❈
J'étais rapidement sortie de chez moi en début d'après-midi pour laisser mon père seul face à la corvée d'aspirateur. Donnant donnant, il m'avait laissé tomber le mois dernier pour le déblayage du grenier. Eh oui, je suis rancunière. Comme je le pensais, je trouvais Hiro tranquillement installé sur un banc du parc, un livre en main et je vins m'asseoir lourdement à côté de lui en soufflant bruyamment. Après un instant de silence, il soupira en laissant tomber son livre sur ses genoux et tourna la tête vers moi.
- Que t'arrive-t-il ? me demanda-t-il entre lassitude et amusement.
- J'ai eu un contact indécent avec l'être immonde des enfers alors que j'étais dans un état second.
- Et quel rapport entre ta venue ici et le fait que tu aies embrassé Sasuke en état d'ébriété ?
Ça vous impressionne hein ? Je n'avais jamais su comment Hiro, Ino et Itachi faisaient pour comprendre mon langage que j'avais parfois moi-même du mal à suivre. Ce phénomène resterait certainement un des grands mystères de ma vie, mais au moins, il me permettait de ne pas employer des mots qui m'arracheraient la gorge.
- Je sais plus quoi faire, je me sens lessivée. Un jour j'ai l'impression que je peux lui faire confiance et le lendemain je trouve milles et un prétexte de ne pas le faire. Le dernier en date étant cette connerie de pari, et il a lui-même avoué que ça justifiait son comportement, soupirais-je.
- Il a vraiment dit « Je t'ai couru après à cause de notre pari » ?
- Non... pas vraiment, mais il l'a fortement sous entendu.
- Tu sais, Lincoln a dit : « aucun homme n'a assez de mémoire pour réussir dans le mensonge ».
- Qu'est ce que t'essayes de me dire ? Que Lincoln avait une mémoire de poisson rouge ?
Il leva les yeux au ciel puis me donna un léger coup sur la tête à l'aide de son bouquin en affichant un air trop sérieux pour être totalement honnête.
- Tu auras beau continuer de te voiler la face des années durant, arrivera bien un jour où tu te retrouveras piégée par ta mauvaise foi. Votre petit jeu du chat et de la souris, je l'ai connu. Il n'y avait pas de pari à cette époque et ça soulevait déjà beaucoup de question.
- C'est rien qu'une habitude. Il pourrait avoir une beauté exotique à son bras s'il voulait et tu crois vraiment qu'il viendrait s'amuser à pêcher un vieux poisson comme moi ?
Hiro posa le livre à sa gauche et passa un bras dans mon dos pour que je puisse venir poser ma tête contre son épaule.
- Je pense que Sasuke aurait pu tomber sous le charme d'une des midinettes qui lui tourne autour, je suis certain qu'il y en a de très intelligentes et intéressantes dans le tas, mais il n'a pas pris le temps de les connaître, parce qu'il a déjà les yeux braqué sur une fille qu'il connait par cœur et qui lui plait.
- Tu veux dire que Sasuke pourrait ne plus s'intéresser à moi si il prenait le temps de connaître d'autres filles ?
- Pourquoi tu interprètes toujours tout de travers ? grogna-t-il.
Faudra demander au créateur de mon cerveau, l'auteur de la plus grosse arnaque du siècle, si vous voulez mon avis...
- Malgré les écailles et l'odeur, faut se dire que c'est un fana de poisson, c'est tout. Et il a bien raison. Mais tant qu'il refusera de voir plus loin que ses provocations et que tu n'auras pas assez confiance en toi, ça risque d'être compliqué.
- J'ai confiance en moi ! protestais-je vivement.
- T'es flippé rien qu'à l'idée de ne pas être à la hauteur !
- Non mais tu... tu... tu extrapoles complètement !
- Et alors ? Tu sais très bien que j'ai raison et que j'en sais même beaucoup plus.
Dieu avait compensé ma défaillance cérébrale par des amis intelligents, trop intelligents. Ça en devenait gênant et je n'avais plus beaucoup de place au fond de mon jardin.
- Si tu étais un tant soit peu honnête avec toi-même, je pense que tu serais bien moins stressée.
Je suis honnête en mon for intérieur... parfois.
- Ça a l'air si simple dit comme ça...
- Tu sais où tu vas, tu sais ce que tu veux et on est là pour toi Sakura, alors qu'est-ce qui pourrait te faire peur ?
Ce type avait toujours les mots pour me remonter le moral. Pourquoi ne pouvait-il pas être l'amour de ma vie ? Tout serait infiniment plus facile et limpide. Peut-être qu'un jour le tout-puissant arrêtera de me torturer les neurones et me laissera me reposer, mais ça n'avait pas l'air d'être à l'ordre du jour...
- Pourquoi es-tu parti à Suna ?
- Parce qu'il va te falloir un excellent avocat le jour où tu exécuteras ta liste noire. D'ailleurs, Roosevelt disait...
Mon regard menaçant le stoppa net et il soupira finalement, gardant le silence pour me laisser cogiter. Ne pouvait-on pas me donner la vie d'un Bernard l'Hermite ? Ça devait être fun de passer ses journées à changer de coquille et à courir sur le sable. Faudrait que je fasse part de cette idée à mon poto des cieux le jour venue.
- Je pense que tu as toujours éprouvé des sentiments pour Sasuke, ils ont juste évolués avec le temps, émit-il finalement, non sans se confronter à mon mutisme forcé. Sakura ?
Laissez-moi dormir. Je me défendrais plus tard.
- T'as une araignée sur la jambe...
Je vous passerais mon hurlement de terreur vachement glamour qui a dû alerter toutes les forces spéciales du pays. Honnêtement, je ne voulais pas de ces sentiments, mais ils avaient la dent dur et une fois leur cible verrouillée, c'était peine perdu. Pourtant, étrangement, en réalisant ce simple fait, je me sentis encore plus paumée qu'avant... Où tout ça allait me mener au final ? Comment devais-je m'y prendre ? Je détestais ne pas pouvoir appréhender les choses, ne pas avoir de contrôle. Et puis comment réagirait Sasuke ? Après tout, à notre âge, les comportements ne sont pas les plus matures qui soient. Preuve en était de notre jeu stupide. Tiens, et notre pari... Il me semblait l'avoir perdu avant même de l'avoir créé. Enfin, j'avais tenté ma chance, et puis le plus amusant, était de faire croire à sa défaite imminente, après tout. Peut-être que s'amuser encore un peu... repousser encore de quelques jours la fin de la partie.
- On dirait que tu cherches à repousser une corvée de vaisselle... glissa-t-il en me sentant soucieuse.
- Impossible, ma mère, c'est pire que l'amour, je lui échapperais jamais.
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Je ne m'étais jamais sentie aussi stressée. Rien qu'à l'idée de sortir de cette pièce pour affronter l'univers qui bouillonnait à l'extérieur me terrifiait. Pourquoi mon esprit a-t-il un tel pouvoir de contradiction seigneur ?
- Sakura arrête de gratter cet accoudoir, tu vas finir par faire un trou dedans !
Je ramenais nerveusement ma main sur mes genoux. Bien installée dans un fauteuil face au bureau de Tsunade, je ne cessais de redécouvrir un certain nombre de tics que je pensais complètement annihilés. Elle est marrante, elle... faut bien que j'extériorise mon angoisse comme je peux !
- Il va falloir que tu dépasses ta peur, je n'ai pas envie de te récupérer à l'autre bout de l'hôpital à chaque intervention, compris ?
- Compris...
Tsunade me lança un regard peu convaincu puis porta son attention sur son assistante. Cette dernière avait été de garde toute la nuit et semblait pourtant aussi fraîche qu'après une grasse matinée. Bain de sang de vierge, rituel sacrificiel de nouveaux nés, quel qu'il soit, je veux son secret !
- Shizune, donne-lui sa blouse et son bipeur, elle restera avec toi pour la matinée, je te fais confiance.
- A vos ordres !
- Une fois que tu seras plus à l'aise, on pourras te faire passer les tests médicaux que tu as si habilement évité jusqu'ici.
Pour la onzième fois, je tentais de me justifier sans pouvoir éteindre la lueur de suspicion présente dans les yeux bruns de l'adulte. Ce n'était tout de même pas ma faute si j'avais une vie palpitante et mouvementée !
J'y étais enfin. Mon stage débutait ce matin et à la fin de ces deux semaines se tiendrait le gala de noël chez les Uchiwa. Dernière ligne droite avant le premier janvier. Dieu aillez pitié de moi pour la nouvelle année et laissez-moi vivre normalement avec des gens normaux !
- Viens Sakura, on va d'abord faire le tour des chambres.
Génial... Qu'est-ce qui avait bien pus me pousser à m'inscrire à ce cours d'orientation professionnelle ? Ah oui, Naruto. Littéralement d'ailleurs.
Depuis hier, je n'avais pas arrêté de penser à ma discussion avec Hiro et au départ de Sasuke et Itachi. Pour l'un j'avais encore le temps de voir venir mais pour l'autre... J'aurais très bien pu faire une crise et me rouler au pied du brun en geignant pour qu'il ne parte pas, mais d'une, j'aurais eu l'air plus ridicule que Gaara suçant son pouce et de deux, je pense qu'il n'en aurait tout simplement rien eu à foutre. Ce n'était pourtant pas avec lui que je devais régler quelques comptes, mais son soutien m'était inestimable. Et puis peut être que si finalement... Lui aussi était au cœur de certaines choses.
- Sakura, tu m'écoutes ?
Est-ce que j'ai l'air d'écouter ? Non... Pourquoi les gens me posaient toujours cette question stupide ? Quand j'ai l'air de ne pas écouter, généralement, c'est que je n'écoute pas ! Y'a aucun piège là-dedans !
- Heu...
- Peu importe reprenons !
Oui, reprenons. Comment allais-je survivre à ma dernière année si je devais avouer les quatre vérités à Sasuke sans l'incommensurable soutient d'Itachi ? Surtout qu'après, c'était au tour de Dom Juan de quitter nos contrées. Une chose qui m'avait relancé sur la voix du « ne dit rien et laisse le temps passer encore un peu », mais j'avais pris l'explosion de l'ampoule de mon plafonnier pour une menace divine et j'étais repartie à reculons. Fallait pas plaisanter avec le tout puissant, surtout quand on s'appelait Haruno Sakura.
- Et tu devras aller pêcher ces truites tout les mardis.
Des truites... Génial, j'adore la truite ! Une minute... Je fais pas mon stage en poissonnerie...
- Plaît-il ?
- Je te parle d'un ours exerçant à l'hôpital depuis dix minutes.
- Vous savez, les animaux sont plus intelligents qu'on ne le crois...
Son regard perçant me jaugea un instant, la sanction n'allait pas tarder à tomber.
- Prochaine étape : le service chirurgie.
Qu'est ce que je disais ? La semaine serait longue... très longue.
❈❈❈
Un bout d'ongle vola contre le coffrage de la baignoire alors que la pince se refermait déjà sur sa prochaine victime. Presque confortablement assise contre le pied du lavabo, par terre, sur le tapis de ma salle de bain, je m'affairais à redonner à mes ongles de pied une longueur descente, histoire de sauver les dernières chaussettes que contenait mon tiroir. J'avais coincé mon portable entre mon épaule et mon oreille pour discuter en parallèle avec l'une de mes blondes préférées.
- Non mais je te jure Tem' ! C'est de la torture ! Quel abruti a décidé d'ajouter un deuxième étage à ce bâtiment ?
- Sakura, l'hôpital fait quatre étages. Dans une logique humaine le « deux » vient avant le « quatre ».
- Mais je n'ai rien contre le quatrième étage, c'est là qu'ils ont mis la cafète mais celui du service chirurgie n'a...
Quelques coups donnés à la porte interrompirent mon argumentation et ma mère passa la tête par l'entrebâillement.
- Ma chérie, Tsunade va bientôt arriver, tu descends ?
- J'arrive.
C'était déjà pas suffisant de la voir tout le long du stage, fallait aussi que je me paye sa tête à la maison... Façon de parler hein.
- Temari, faut que je te laisse, j'ai mon tortionnaire qui va débarquer et faut que je prépare ma défense.
- N'oublie pas qu'on mange ensemble vendredi soir !
- C'est gravé dans mon petit cœur !
- Ce serait plus crédible si tu te le gravais sur ton égo...
Connasse.
Je laissais donc ma comparse pour descendre, avec toute l'envie et le dynamisme du monde, à la cuisine d'où raisonnait déjà la voix de ma supérieure. Comprenez bien, j'étais très contente de faire ce stage hyper intéressant –et traumatisant-, mais franchement, Tsunade était tyrannique comme boss ! Je comprenais maintenant parfaitement le caractère solide et sans faille de Shizune ! Il fallait encaisser encore et encore, sans ciller, c'était une formation d'excellence et, franchement, parfois, je doutais de mon endurance...
La seule chose qui me permettait de tenir encore un peu était l'approche des vacances. De quoi se payer une bonne tranche à la montagne, dans le chalet des Hyuuga. Sauna, piscine chauffée, jacuzzi, piste privée... tout pour faire rêver, sauf que... Je ne savais absolument pas skier. Pire : la neige était une ennemie jurée. Encore une lacune de mon éducation de petite gens. Naruto avait prévu de m'apprendre, mais l'énergie du blond me faisait un peu peur, alors je pense que je m'en remettrais finalement à Hinata ou Shikamaru.
Enfin tout ça c'était si je survivais à la soirée des Uchiwa. Probabilité de réussite ? Incalculable...dans l'infiniment petit.
J'aurais pu prévoir de rester coller à Mikoto Uchiwa, mais je n'avais pas vraiment envie de squatter au milieu des petits doigts en l'air, même si cette perspective était plus alléchante que celle de rester coincée avec Sasuke. Mon Dieu, heureusement qu'Ino, Temari et Hinata seraient de la partie.
- Sakura !
Bordel ! Maman, tu veux éliminer ta progéniture ou quoi ?
- Chère mère, si à l' avenir vous pouviez éviter les tentatives de meurtre sur votre propre chair, je vous en serais très reconnaissante.
Elle leva les yeux au ciel tandis que Tsunade laissait passer une légère exclamation amusée.
- Ne t'en fais pas Mebuki, c'est l'hôpital qui doit la stresser comme ça...
- Ce serait moins stressant si on me laissait mes quinze minutes de pause réglementaires !
- Aucune utilité, il faut rester dans le mouvement, sinon on devient des limaces incapables. Je ne veux pas d'une limace incapable dans mon service.
Ben tiens...
Tandis que ma mère blablatait sans relâche avec son amie de toujours, je m'occupais du dîner. Je ne vie pas une incroyable histoire d'amour avec les casseroles, couteaux et autres ustensiles de cuisine, mais au moins, moi, ils n'essayaient pas de me tuer. Rien que ce matin, le grille-pain avait suivi la bouilloire dans son esprit de rébellion et avait fait vivre un enfer à ma mère, allant jusqu'à sacrifier une tartine pour lui brûler les paluches. Pas étonnant qu'elle ait changée l'écriteau « cuisine » par « Enfer ».
Bref, je regardais la poêle dans le blanc des œufs au plat qu'elle cuisait lentement, laissant une oreille traîner vers les deux commères de service. Apparemment, Jiraya avait encore fait des siennes...
- C'est bientôt prêt Sakura ?
- Encore un mot et j'ordonne au tir bouchon de t'attaquer, alors fait gaffe !
Elle me tira la langue puis repartie dans sa conversation. On pourrait penser que les discutions des quadragénaires sont largement différentes des nôtres, mais ma mère me prouvait exactement le contraire. Devrais-je leur rappeler que c'est moi qui suis censée être ado ? Les pipelettes continuèrent tout le long du repas, m'enfin j'avais l'habitude. J'étais devenue une pro pour éviter les questions puériles et gênantes de ma mère. J'avais développé une tactique infaillible qui consistait à me remplir la bouche de bouffe ou d'eau en mode hamster boulimique, ce qui empêchait toute possibilité de communication. Malheureusement, ce soir-là, ma mère était tellement en forme qu'en plus d'une incroyable envie de pisser, je me retrouvais avec un affreux mal de bide... je hais les mercredis soir !
Je crois que j'aurais encore préféré me trouver en compagnie de mon prof de chimie... Et ce type est, sans conteste, premier de ma liste noire. Après Sasuke... et le mec du fast-food qui a tenté de me refourguer un sandwich tombé parterre.
Pour une fois je n'eus pas à simuler un mal de ventre pour regagner ma chambre puisque j'étais réellement en train d'agoniser. Bref, nous en étions désormais à la moitié de la semaine, soit trois jours de galère, et je n'avais toujours aucune nouvelle de mes deux meilleurs amis. Peut-être que Dieu avait enfin daigné accéder à ma requête. Après tout, j'en avais suffisamment bavé en ce moment, entre le plan totalement foireux de mes super copines, l'affaire Gaara et... Oh seigneur Dieu !
J'attrapais mon portable coincé entre un livre de cours et un tas de papier non identifié, et composais rapidement le numéro de ma collaboratrice numéro deux tout en m'avachissant sur ma chaise de bureau. La sonnerie s'éternisa, mais bientôt, la voix fluette de ma brune préféré raisonna agréablement à mes oreilles d'un « allô » essoufflé.
- Tenten ?
- Non, c'est Sadako, tu n'as plus que sept jours à vivre. Bonne chance.
- Boah ! Ça pouvait pas mieux tomber pour me soustraire au stage de l'enfer et à la somptueuse soirée grotesque des Uchiwa.
- A laquelle tu te rends quand même je te signale.
- Je le fais par solidarité envers Mikoto.
- C'est le nom du buffet ?
Est-ce qu'on avait instauré une journée des amies grognasses aujourd'hui ?
- Bon, trêve de stupidité, où t'en es avec le patriarche ?
- Pas bien loin... Il veut poursuivre sa propre chair pour harcèlement si on divulgue les photos.
Si j'avais eu un père comme ça, foi de Haruno, je serais déjà en prison pour parricide ! Non mais franchement, le paternel de Tenten devait tenir la folle position des parents les plus indignes de cette planète. Juste après le géniteur esclavagiste d'Hinata et celui passablement sadique de Temari. Perso, j'en venais à être fière de mes parents, c'est pour dire !
Tout le monde s'était un jour rebellé contre son père et sa mère. Les psy appellent ça « la crise d'ado ». Moi, j'appelle ça « le syndrome du Che », Viva la revolución ! Mais franchement, dans mon entourage, certains recevaient la palme de la crise adolescente la plus longue de tous les temps.
- Faut faire plonger sa boîte.
- Sakura, ta vocation c'est médecin et pas détective privé ou agent de la CIA.
- On commet tous des erreurs de parcours dans la vie...
- T'es dingue ! Moi je veux bien enquêter sur une fille du bahut ou sur mon père, mais là on parle quand même d'une multinationale !
- Faut être ambitieux ma cocotte !
- C'est pas de l'ambition ça, c'est du suicide !
- Et alors ? Tu n'as pas hâte de savoir ce qui se planque après la mort ?
- Non non non non non, je ne te suivrais pas cette fois Sakura, je veux bien que tu détestes le quotidien rébarbatif et que tu t'ennuies mais, là, c'est trop dangereux !
Une demi-heure plus tard, j'avais une collègue brune à macarons inscrite sur l'enquête « Papa machiavélique 2.0. ». Bon, ça allait me coûter vingt boîtes de Mars, quatorze sachets de M&M's et le double de mes devoirs de maths pendant trois mois, mais ça valait le coup.
Maintenant, il fallait que je sache si oui ou flûte, le père Noël tout-puissant m'avait apporté mon cadeau en avance. Par gentillesse pour mon postérieur, je décidais de me poser sur mon lit, soit l'endroit le plus confortable du monde juste après ma chaise pendant les cours d'histoires. Oui, je fais beaucoup de classement aujourd'hui.
J'appuyais rapidement sur un numéro et n'eus même pas le temps d'entendre la deuxième tonalité que mes tympans maudirent mon geste.
- Sakura ! C'est cool que tu m'appelles !
J'écartais mon portable de mon oreille en grimaçant, c'était ça qui était cool avec Naruto, nul besoin d'activer le haut-parleur.
- Arrête de crier et dis-moi ce que tu deviens en cette belle soirée de décembre.
- Il pleut dehors...
D'accord, la semaine prochaine on apprendra le mot « ironie ».
- Naruto. Rapport.
- Hum... Mon ventre est plein, je vois encore la moquette de mon appart donc je dois avoir quelques fringues en rab, je me suis lavé il y a à peu près... houlà ! Deux jours ! Faut que je reprenne une douche ! Et la voisine ne s'est pas encore plainte de l'odeur des poubelles, donc j'ai encore le temps de les descendre.
Vend Blondinet dégueulasse mais attachant contre vrai ami avec de l'hygiène et du savoir-vivre. Annonce Urgente.
- Ôte-moi d'un doute Naruto, t'es sorti quand de ton appart pour la dernière fois ? Eh non, le balcon ça ne compte pas !
- Bah... Dimanche...
- D'accord, et ton stage ?
- Quel stage ?
Le long silence qui s'en suivit répondit à ma place et bientôt je dû éloigner ostensiblement le combiné de mon oreille.
- Merde ! J'ai oublié !
Et dire que c'était pour lui que je m'étais jeté dans tout ce traquenard. Heureusement qu'il ne faisait pas son stage aux Urgences, quoi que ce serait un bon moyen pour lutter contre la surpopulation. Le restaurant qui avait accepté d'avoir Naruto dans les pattes pendants deux semaines n'était nul autre qu'Ichiraku Ramen, notre QG officieux. Enfin ex-QG officieux si mon meilleur ami ne se rachetait pas rapidement auprès de Teuchi et sa fille.
Après quelques minutes de plus à converser avec mon acolyte de toujours, il m'abandonna pour filer à deux pâtés de maisons de chez lui et supplier le chef de le pardonner. Bonne chance mon grand.
L'envie subite de téléphoner ensuite à Sasuke s'empara de mon esprit comme un éternelle habituée que j'aurais préféré dissuadé de revenir. Avais-je vraiment envie d'entendre sa voix douceâtre me couvrir de compliments jusqu'à plus soif ? C'est de l'ironie, pas sur que mon coup de genoux l'enjoigne à m'envoyer des fleurs. M'enfin, quand faut y aller, faut y aller !
- Oui ? répondit bientôt une voix grave et morne.
Bon, j'imagine que le père Noël ne lit pas les listes de cadeaux en dehors des périodes marketing. De toute façon j'étais toujours trahie par le gros bonhomme rouge. Il zappait constamment la ligne « disparition de Sasuke et Naruto. »
- Dit moi, est-ce que ça t'arracherais la gorge de me spécifier si tu as enfin rejoint Lucifer au royaume des enfers ou si je dois encore te supporter ?
Toujours donner le ton pour ne pas laisser sous-entendre que ce type me manquait... chose qu'il ne faisait absolument pas. Vraiment.
- Excuse moi Sakura, mais j'ai beaucoup de travail en journée, mon père ne me laisse pas une minute... Je te manquais ?
- Autant que mon premier hamster...
- Tu parles de celui que tu as oublié de nourrir pendant deux semaines ?
Je suis déjà dans les fichiers de la SPA et de toutes les animaleries du pays, n'ayez crainte...
- Paix à son âme.
- Je dois donc en déduire que tu t'ennuies.
- Ma tyrannique directrice de stage a investit ma cuisine, soit l'endroit le plus intéressant de toute la baraque, donc, oui.
- Tu t'en sors ?
- Ça pourrait être pire, mais je survivrai, et toi ?
- C'est dur, mais je tiens. D'ailleurs que dirais-tu d'un petit pari ?
Vous voyez dans ces moments-là, logiquement, y'a une petite voix dans votre tête qui gueule bien fort « danger » « arnaque » « NON» ! Sauf que moi, cette petite voix, elle n'avait même pas le temps d'ouvrir la bouche que ma fierté et mon goût du jeu se jetaient violemment sur elle pour la tabasser jusqu'à ce que mort s'ensuive.
- Dis toujours...
- Si je me tape une salle remarque à mon compte-rendu de stage, je m'engage à faire ce que tu voudras pendant trois longs mois. Si tu échoue pendant ton stage, je gagne et c'est à toi de faire tout ce que je te demanderais.
Je fronçais les sourcils non que cette proposition ne me tentât pas, bien au contraire, je manquais cruellement de distraction maléfique à cette heure, mais pourquoi une si belle récompense ?
- Tu es sûr que tu tiendras suspendu au mât de l'école pendant trois mois sans eau ni nourriture ?
- Le mât de l'école attendra mais prépare le costume de soubrette.
- C'est plutôt classique comme donne, mais pourquoi pas... ? Ce serait amusant de t'avoir à ma botte... et si on résiste tous les deux ?
- C'est simple, chacun demande une seule chose à l'autre parti dans les limites du raisonnable.
Oh je sens que je vais le regretter, vraiment le regretter.
- Je marche !
Putain de cerveau traître et fourbe ! Si je pouvais le mettre à la retraite celui-là ! Parfois je me demande s'il n'y est pas déjà d'ailleurs...
- Bien. Cet appel étant sur haut-parleur, Itachi est témoin du pacte. Tu n'auras donc aucun moyen de t'y soustraire...
Je restais interdite un instant le temps de digérer cette information qui, entre parenthèses, signerait peut-être mon arrêt de mort. Oh le... !
- Itachi !
- Désolé Sakura, tu as appelé au beau milieu d'une réunion fraternelle... répondit celui-ci d'une voix un peu étouffée par la distance.
Une quoi ? Non mais c'est une blague ? Depuis quand les deux zigotos se serraient les coudes ? « L'union fait la force » ce n'est pas vraiment une devise d'Uchiwa que je sache ! L'un après l'autre c'est déjà assez compliqué, alors en même temps, c'était de l'injustice divine ! Mon regard se tourna vers le ciel bleu dehors. Toi, le jour où on se verra, va-y avoir du règlement de comptes...
- Depuis quand vous faites des réunions fraternelles ?
- Depuis qu'on a appris que Kameko et Inari venaient à la soirée de nos parents...
Ouf ! Un instant j'ai cru ça sentirait mauvais pour ma pomme, après tout, ils auraient très bien pu me refourguer leurs cousines dans les pattes pour la soirée. Une minute...
- Pourquoi je ne le sens pas ? demandais-je en me levant pour aller chercher le carton d'invitation de la dite soirée.
- Parce qu'on pensait te les confier le temps de la soirée, comme tu t'entends bien avec... me répondit Sasuke.
L'information me déstabilisa tellement que je me pris les pieds dans mon drap me vautrant magistralement avec fracas par terre.
- Sakura ? Qu'est-ce que tu trafiques ?
Mon lit, mon meilleur ami, mon allié de toujours venait d'attenter à ma vie...Il me fallait des vacances.
❈❈❈
Le liquide amer et bouillant me brûla la langue. Grimaçante, je soufflais sur ma soupe avant que la porte de la salle de pause ne vole contre le mur, amorçant l'un de mes réflexes étranges, ici, le célèbre « s'accroupir derrière la machine à café et ne plus bouger d'un poil ».
- Où est-elle ? claqua une voix que je ne connaissais que trop bien.
Les deux infirmières présentes n'attendirent pas une seconde de plus avant de pointer ma modeste planque du doigt. Eh merde ! Qui aurait cru que la délation était une pratique aussi courante dans les hôpitaux ?
- Sakura !
- Laissez-moi mourir...
- Tu as dépassé ta pause-déjeuner de dix minutes, tu as une explication ?
Je me relevais doucement, grimaçant de gêne.
- Y'avait la queue à la cantine.
Best excuse ever...
- Au boulot !
- C'est que, je ne me sens pas très bien, j'ai peut-être choppé la varicelle de la petite Suzuko...
- Tu as déjà eu la varicelle.
Et merde... c'est vraie qu'elle connaissait mon dossier médiale par coeur depuis mes premiers "areuh". Pourquoi j'avais pas eu le pédiatre du bout de la rue comme tout le monde ? Je tentais tout de même le petit regard larmoyant et ni une ni deux, elle piocha un brassard dans sa poche et me l'enroula entour du bras pour le gonfler avant que je n'ai le temps de dire ouf. La petite aiguille monta puis redescendit doucement. Elle remit son stéthoscope en collier puis rangea le matos. Ça allait barder pour mon matricule...
- Je te laisse encore dix minutes et pas une de plus.
Puis elle sortit de la pièce en beuglant le nom de son assistante. Je m'allongeais dans le canapé fort peu confortable. Bon, j'avais eu le cul bordé de nouille. Tension je t'aime, pour une fois que quelque chose chez moi m'était favorable. Après dix minutes à profiter de ma pose substantielle, je me mis en quête de Shizune que je retrouvais à l'angle d'un couloir... un peu plus brutalement que je ne me l'imaginais.
- Bon sang Sakura ! Fait attention, on est dans un hôpital !
Et voilà c'est toujours ma faute...
- Je vous cherchais.
- Et moi je cherche Tsunade. Elle a une opération dans quinze minutes, j'espère qu'elle n'a pas encore oublié...
Je suis la seule à trouver cette explication inquiétante ?
Shizune m'entraîna à sa suite avec toute la douceur et la délicatesse dont elle était capable, quasiment aucune, en somme. C'est en abordant un croisement qu'elle me lâcha enfin et se retrouva le cul parterre.
- Shizune ! Fais attention tu es dans un Hôpital !
- Pardon mais je vous cherchais ! pépia-t-elle nerveusement.
Si la formation de Tsunade incluait un tel niveau de stress à terme, je ne donnais pas cher de ma peau...
- Shizune, calme-toi, tu vas finir par nous faire une rupture d'anévrisme.
- Au pire, comme vous l'avez dit, on est dans un hôpital... intervins-je.
Tsunade me jeta un rapide coup d'œil désabusé avant de se concentrer sur son assistante.
- Qu'est ce que tu veux ?
- J'ai les résultats de Sakura.
Mes résultats ?
- Mais j'ai même pas passé les tests...
- Non, pas toi, une autre Sakura.
Excusez moi, c'est vrai que ça ne porte pas du tout à confusion.
L'autre Sakura est une petite fille de sept ans atteinte de péricardite et particulièrement agaçante. Je ne dis pas ça parce que je n'aime pas les enfants, mais bien parce que je déteste me faire attaquer par la pompe à solution hydro-alcoolique pendant que je prends le pouls d'une patiente. J'ai encore mal aux yeux, mais Tsunade m'a promis que ça passerait avant demain.
M'enfin, j'avais beau me plaindre de mes journées, de ma responsable de stage, des patients, etc. Je sentais ma phobie hospitalière diminuer rapidement au profit d'une aisance agréable. Oui, je me sentais bien à voguer entre les services, de chambre en chambre, à jongler avec les activités, responsabilités. Désolé Sasuke, mais ton pari, je l'avais déjà gagné, tout comme j'avais gagné le droit de passer un check up médicale foutrement épuisant en fin d'après midi.
Je gagnais les vestiaires après une journée de dur labeur. J'avais décidé de passer chez Sasuke pour parler du moment gênant survenu samedi soir. Ce serait déjà un premier pas dans mon exercice de rédemption.
❈❈❈
Le chauffeur de bus de la ligne 200 eut l'insigne honneur de voir un ours mal léché dépressif lui quémander un ticket au prix exorbitant. Le pauvre devait déjà voir tellement d'horreur... J'avais eu un peu pitié de lui. J'étais désormais chez les Uchiwa et me trouvait face à mon second meilleur ami, quelque peu perplexe de ma visite. Je n'ai même plus le droit de venir voir mes amis sans que ce ne soit suspect maintenant.
Personnellement, j'en étais à m'empêcher de fuir en hurlant. Se parler au téléphone était une chose, se revoir après ce qui s'était passé en était une autre.
- Qu'est-ce que c'est que cette tête ? On dirait que t'a avalé ta collection de brosses à dents...
- Qu'est-ce que tu fais là ?
- C'est dingue ça ! Pourquoi ne pourrais-je tout simplement pas avoir été prise d'un élan de gentillesse ?
- Parce que la dernière que l'on s'est vue tu as bien failli bousiller mes chance d'avoir une descendance. Entre autres.
Ce « entre autres » me força à lutter contre une gêne incommensurable et je réussis difficilement à paraître détachée. Sasuke me fit signe de le suivre, aussi impassible qu'il pouvait l'être. J'engageais le combat avec ma mâchoire qui semblait peser des tonnes et ma voix qui avait apparemment pris quelques vacances improvisées.
- Qu'est-ce que ça peux te faire ? Tu déteste les mômes...
Il leva les yeux au ciel et m'invita enfin à entrer, refermant la porte derrière moi.
- Alors, ton stage ?
- Sasuke, au sujet de ce qui s'est passé Samedi...
- Laisse tomber, c'est oublié.
De quoi « c'est oublié » ? Mais il allait me laisser parler ce débile, avant de répondre ? C'était déjà assez difficile à aborder, mais si en plus il me coupait avant la fin... ! Je le fixais un moment, dubitative.
- Tu étais ivre et ça ne voulait rien dire, c'est ça ? J'ai l'habitude Sakura, tu rebrousses toujours chemin.
Alors s'il y avait bien une chose que je ne supportais absolument pas, c'était que l'on s'improvise télépathe pour connaître mes potentielles réactions. Et puis je n'étais pas la première à reculer dans ce genre de situations, preuve en était de la dernière soirée que nous avions passée avec toute la bande.
- T'es sacrément gonflé de me dire ça. Qui m'a dit d'oublier ce qui s'était passé à l'anniversaire de Lee ?
- Parce que t'allais m'avouer tes sentiments peut-être ?
J'allais réellement commettre un meurtre. Sincèrement, je crois qu'à ce moment-là, le frapper était la solution la plus apaisante que mon esprit me proposa. Je prenais mon courage à deux mains pour parler de quelque chose de gênant, de terriblement angoissant et Sasuke se mettait a jouer au plus con.
- Non, moi je lance juste les paries qui t'oblige à m'embrasser.
- Attend, là tu es en train de tout interpréter de travers.
- Et comment je pourrais faire autrement ? Tu me dis tout et son contraire ? Comment tu veux que je te fasse confiance et que je te crois ? Tu sais, j'ai l'impression que le plus indécis de nous deux, c'est toi, Sasuke.
Il me fixa un instant surpris par mon agressivité, ou le contenu de ma phrase peut-être...Je n'en savais rien à vrai dire, et c'était ça le problème, je ne savais plus rien. Ni comment me comporter, ni ce que je devais comprendre ou même dire. Je laissais hébété, planté au beau milieu de la pièce. Venir avait été une mauvaise idée finalement. J'aurais dû m'en tenir à ce que je pensais. Sasuke avait le goût du jeu ni plus ni moins. C'était tout ce qu'il y avait à comprendre. Je croisais Itachi dans l'entrée, tellement furax que je manquais de lui rentrer dedans.
- Sakura ? Ça va ?
- Non ! aboyais-je.
Le monsieur tira une tronche dont j'aurais pu rire jusqu'à la trente-sixième génération si je n'avais pas été aussi énervée, vexée et considérablement frustrée.
- Sakura, attends !
- Non, j'en ai marre !
- On devrait en parler !
Et bien il n'avait qu'a en parler avec son ours en peluche, moi, j'en avait ras le bol ! Alors qu'il tentait de me rattraper, il fut rapidement stoppé par son frère aîné.
- Oh non ! Tu restes là ! C'est toi qui as fait la connerie, c'est à moi de la réparer.
- C'est débile comme raisonnement... Je n'ai jamais réglé les problèmes que tu créais !
- Quels problèmes ?
- Itachi ! Ramène-moi tout de suite !
Je n'avais rien contre le fait qu'il me suive, mais je n'étais pas d'humeur à faire preuve d'une grande patience. Le jeune homme haussa les épaules devant le regard interloqué de son cadet puis me rejoignit au pas de course.
❈❈❈
Sur le trajet le silence pesant s'empara de l'habitacle, me laissant ruminer tranquillement. Mon opération était un véritable fiasco. Pouvais-je réussir au moins une chose avec ce type ? Ou étions-nous destinés au chaos perpétuel ? Je pensais qu'Itachi me questionnerait sur la raison de notre dispute, mais étrangement, il n'en fit rien et me laissa tranquille. Cet homme savait quand se taire, c'était agréable et réconfortant, comme on pouvait s'y attendre de la part du plus mature de la fratrie. Apaisée par son comportement conciliant, je me décidais enfin à briser le silence.
- Alors, tu as eu une réponse de New York ?
- Je suis pris.
- Connard.
Il me jeta un regard éberlué, surpris par ma réaction aussi vive que vulgaire.
- C'est sortit tout seul.
- Ah ouais, quand même...
Vous voyez la catégorie de gens qui réfléchisse trop avant de parler... ? Bah je n'en fais pas partie.
Je ne m'étais jamais vraiment demandé comment je réagirais si mes amis se dispersaient à un moment. Je crois que je n'osais pas vraiment y penser, mais maintenant il fallait bien que je m'adapte à cette réalité imminente. Bon, personnellement, j'étais à deux doigts d'acheter des chaînes pour chacun. Ils ne m'en voudraient pas de les garder auprès de moi après tout... Si ?
- Et tu t'envoles quand pour le pays du hamburger en folie ?
- J'ai obtenu un peu de temps, je pense partir le jour de votre rentrée.
Génial ! Déjà que c'était le jour le plus moisi de l'année mais là ça allait devenir mon vendredi 13. Attendez... Je me penchais vers mon sac pour brasser grossièrement son contenu et en extirper un petit agenda noir que je feuilletais consciencieusement.
- Qu'est-ce que tu fais ?
- Je regarde si la rentrée ne tombe pas un vendredi 13...
- T'es mignonne Sakura, tu pleureras mon départ ?
Déjà que je n'ai pas pleuré à la mort de mon hamster, alors pour sa fuite de l'autre côté du globe...
- Itachi, regarde-moi bien, le jour où, ta jolie gueule me soutirera une larme ce sera une larme de joie lors de ton enterrement... Aïe ! Non mais ça va pas ? Tu m'as fait hyper mal !
Je le fixais d'un regard choqué tout en me massant le bras. Ce con venait de me pincer ! Et c'est à croire qu'il avait des pinces de crabe à la place des doigts !
- Bah voilà, je t'ai soutiré une larme.
- Va rôtir en enfer comme le petit cochon que tu es!
Son petit ricanement m'arracha une moue partiellement amusée. Fallait bien que je profite de mes derniers instants à côté de Casanova, non ? Nous arrivâmes enfin devant chez moi et je ne pus retenir un soupir d'allégresse et d'épuisement. Cette journée m'avait émotionnellement détruite.
- Un bisou ?
Je considérais un instant la demande d'Itachi, et, au final, ce fut la vache en peluche de mon porte-clefs qui se chargea de cette tâche sous le regard blasé du brun. Quoi ? Faut pas trop m'en demander non plus ! Qu'à cela ne tienne ! Ce fut lui qui me lâcha un smack sur la joue. Note à moi-même : Remettre la main sur cette foutue javel pour me laver le visage. On ne sait jamais, c'est peut-être contagieux le gène Uchiwa.
La voiture noire démarra derrière moi et je pus enfin regagner mes pénates. Tiens, post-it sur le frigo... Message maternel.
« Appelle-moi »
Ok... sinon, maman, j'ai un outil franchement magique qui s'appelle un portable ! Ça sert à joindre les gens n'importe quand et... à faire des économies de papier jaune à l'occasion. Je plongeais ma main dans ma poche pour me saisir de mon téléphone avant de me figer. Non... Non, attendez... Je tâtonnais frénétiquement mes poches de veste et de jean puis fouillais rapidement dans mon sac avant de déverser intégralement son contenu sur la table de la cuisine.
Je restais un long moment aussi immobile et glacée qu'un bonhomme de neige face à la disparition de mon portable. Puis mon cerveau consentit doucement à se mettre en marche.
- Oh le... !
Je me ruais sur mon fixe en vociférant pour composer rapidement le numéro du mec le plus démoniaque au monde. Rapidement, la tonalité laissa place à une voix mielleuse.
- Allô ?
- Itachi ! Espèce de vieille enflure moisie ! Ramène ton cul ici et rend-moi mon portable !
- Tu connais mon numéro par cœur ?
Le premier qui fait un commentaire, je viens le découper en tranches dans son sommeil, pigé ?
- Change pas de sujet, petit merdeux ! T'as peut-être ma vie entre tes mains, mais je peux te jurer que t'es en train de foutre la tienne entre mes griffes !
- Tu veux vraiment que je vienne ?
- Expressément !
Il raccrocha pour toute réponse, signe qu'il obtempérait. Bien. Ça sert à ça l'autorité ! Il n'y avait plus qu'a l'attendre... Et je crois que je venais de me faire royalement avoir. Oh bon sang, qu'est-ce qu'il avait encore inventé celui-là ?
Procédons par ordre. Pourquoi mon portable ? Ça ne pouvait pas être pour les photos de mes pieds lorsque Ino m'avait posé son nouveau vernis à ongles, ni mes messages décrivaient ma palpitante vie et qui devaient bien valoir un malabar. Je n'y avais pas de notes privées ou de contacts ultras confidentiels...
La sonnette de l'entrée me fit sursauter et je me ruais sur la porte pour l'ouvrir à la volée, me retrouvant face au malfrat.
- J'espère pour toi que tu as une bonne explication...
Le brun écarta les bras un sourire satisfait collé au visage.
- Je dois comprendre quoi, là ? Que tu vas t'envoler comme un oiseau ?
- Non, que je suis présent devant toi.
- Oui bah merci, je suis pas bigleuse non plus.
Il leva les yeux au ciel avant d'entrer. Non mais je l'ai pas invité à pénétrer dans ma baraque moi ! Qu'est-ce qu'il fout ? L'Uchiwa gagna le salon et se vautra sur le canapé. Bon, maintenant est-ce que quelqu'un peut m'expliquer ce que cet individu est en train de faire ?
- Itachi, je peux savoir ce que tu fous?
- Viens voir.
Je m'approchais suspicieusement de deux ou trois pas avant de me retrouver d'un coup sur ses genoux... Qu'est ce qui vient exactement de se passer là ?
- Je ne vais plus te voir pendant des mois, il faut bien que je profite un peu...
- Et t'as besoin de me piquer mon portable et d'investir ma maison comme un cancrelat pour ça ?
Non mais c'est vrai, je n'avais rien contre le fait qu'il veuille passer plus de temps avec moi le machin, mais fallait tout de même trouver une cohérence à tout ce bordel !
- Si je ne t'avais pas piqué ton portable, explique-moi comment j'aurais pu me faire inviter ici ?
Mais je ne t'ai PAS invité ! Je t'ai juste demandé de me rendre mon précieux ! Parlons-nous la même langue ?
- Si tu ne m'avais pas piquée mon portable, tu ne risquerais pas ta vie actuellement.
- Tu comptes vraiment me faire hurler de douleur avec tes griffes de chaton ?
J'étais choquée ! De toute ma vie on ne m'avait jamais qualifiée de chaton ! Miaou...
Mon portable sonna dans sa poche détournant notre attention sur celle-ci, l'ainé Uchiwa haussa un sourcil. Ma sonnerie est tout à fait correcte, même si elle veut ma mort. Itachi m'attrapa le poignet, alors que je m'apprêtais à attraper mon téléphone, et décrocha. Je le fixais un moment, médusée tandis qu'il répondait à mon interlocuteur d'une voix séductrice.
- Oui madame Haruno.
Diantre ! Ma mère ! S'il lui dévoilait être chez moi en ce moment, seul en ma compagnie, c'en était fini de moi et de ma réputation ! Je tendis le bras pour tenter de récupérer mon portable, mais le vil petit merdeux n'eut qu'à lever le sien pour mettre l'appareil hors de ma portée !
- Sakura, tiens-toi tranquille, tu me fais mal aux jambes.
Non mais il est malade ! Ma mère est peut-être autoritaire et à cheval sur mon éducation, elle crie sans doute souvent pour un rien mais s'il y a une chose qui l'éloigne du portrait de la mère « vieille école » c'est sa propension à avoir l'esprit mal tourné... Oh oui, pour ça, elle était pire qu'un jeune pré pubère.
- Non, nous sommes chez vous en ce moment.
Je veux mourir...
- Itachi, rends-moi mon téléphone !
- Oui, au revoir Madame Haruno.
Je le fusillais du regard et tentais à nouveau de récupérer mon portable qu'il teint à nouveau hors de ma portée. Oh oh... impression de déjà-vu.
- Embrasse-moi.
- T'es malade ?
- T'as bien embrassé Sasuke à la soirée chez Lee.
- Alors d'une, c'est lui qui m'a embrassée, et de deux, comment tu sais ça toi ?
- Ils en ont parlé avec Naruto.
Bon, d'accord... J'ai plus envie de me poser de questions.
- Que voulait ma mère ?
- Pourquoi je te le dirais ?
Bah... parce que c'est ma mère. Et mon téléphone accessoirement. Bon, qu'est-ce qu'il allait me sortir maintenant ? Je refuse catégoriquement de...
- Si tu m'embrasses, je te le dis.
Faire ce genre de chose par exemple.
Est-ce qu'une sorte d'aphrodisiaque circulait librement dans l'enceinte de la demeure Uchiwa ou alors c'était génétique ? Pourquoi ne prenaient-ils pas l'une des pimbêches qui leur courraient après ? J'avais des cheveux roses, des grosses cuisses, un caractère de merde et une incroyable propension à me foutre dans la merde... alors en quoi étais-je aussi attractive pour cette famille de dégénérés du bulbe, hein ?
- Mais je vous ai fait quoi pour vous avoir tous les deux à dos ?
- Sasuke, je l'ignore, quoi que j'ai bien ma petite idée, mais pour ma part j'aime beaucoup les jolies filles récalcitrantes.
- Tenten aussi est récalcitrante...
- Oui, mais je n'attire pas Tenten...
- Tu...je...t'essayes de me piéger.
- Aller, embrasse-moi, je sais que tu en meurs d'envie.
Je lui apposais un smack sur la joue avant de tendre ma main à plat, lui faisant bien comprendre mes attentes.
- Oh non, pas comme ça Sakura...
Avant que je n'ai le temps de réagir, il m'attrapa par le menton et accola nos lèvres un bref instant. Je restais un moment perplexe avant de rougir comme une pivoine. Qu'est-ce qu'il est en train de se passer bordel de merde ?
- Itachi ! Mais... mais t'es complètement malade !
- Quoi ? Il faut bien que je mette mes pions sur l'échiquier avant que tu ne commences à sortir avec Sasuke... ou Hiro.
Aïe... Monsieur avait eu vent du retour de mon ex. Il y'avait trois personnes qui ne pouvaient pas pifer le brun dans mon entourage : Sasuke, Naruto et Itachi. D'après Temari, les pauvres petits s'étaient sentis abandonnés durant mon idylle avec ce beau garçon. En était restée une rancœur farouche même pour le plus mature des trois, à mon grand désespoir.
- Embrasse-moi encore une fois sans mon accord et je t'arrache la langue !
J'attrapais mon portable et filais à l'étage pour me réfugier dans ma chambre en claquant la porte... Que je rouvris pourtant rapidement.
- Et dégage de chez moi ! lui hurlais-je avant de m'enfermer à nouveau.
Non mais merde ! Va falloir arrêter les conneries à un moment ! Je pouvais pas avoir un gentil bêta comme Hinata avait Naruto ? Non, fallait que je me tape les deux provocateurs à la con ! Et est-ce que mon cœur pouvait arrêter d'imiter les tambours de guerre ? Merci...
Avec tout ça, je ne savais même pas ce que ma daronne me voulait... et je n'osais pas vraiment la rappeler, des fois qu'elle se mette à me poser certaines questions étranges...
Bon sang, j'en avais des vertiges avec toutes ces bêtises, trop d'émotions en une journée ça vous terrasse une Haruno. Je m'affalais sur mon fauteuil de bureau et me pris la tête entre les mains en attendant que ça passe. La prochaine fois que je me plains de ma vie monotone, rappelez-moi de m'auto-lyncher.
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