1. KISS
- PUTAIN. DE VALISE. DE MERDE.
Ça, c'est moi, pour ceux qui se posent la question. Il faut dire que se trimballer avec des bagages dans une ville bondée et inconnue n'est pas des plus pratiques. Encore moins lorsqu'on a aucune idée de comment se rendre à destination.
- Je t'aurais bien aidée mais je suis dans la même galère, halète Lana.
- Et moi donc, soupire Elodie.
Demander de l'aide ne nous viendrait jamais à l'idée, car arrêter un inconnu dans la rue ne se fait pas trop en Corée il me semble. Notre seule aide extérieure : google maps, et une carte des transports. Nous remontons les marches de la bouche du métro que nous avions emprunté (après une éternité à chercher quoi faire).
- Bien, et maintenant, on fait quoi ? je demande entre deux essoufflements.
- Une pause, peut-être, répond notre guide.
- Je suis pas contre, répond Elodie. Mes jambes vont me lâcher.
- C'est encore loin ? je questionne.
- T'as pas envie de savoir... répond sombrement Lana.
- Punaise, il nous faudrait un taxi. Ou faire du stop. Ça se fait en Corée ?
- Aucune idée, répond Elodie. Comment elle avait fait, Kitty ? Elle avait loupé son bus, donc elle avait pris le métro, comme nous. Et après... elle s'était faite renversée par la voiture de Yuri.
- Ah oui, c'est marrant quand on y pense, vu que le chauffeur est le père de Dae, elle a rencontré son "beau-papa" avant de revoir son copain, dis-je en souriant. Enfin, là n'est pas la question.
- Donc Yuri l'a emmenée à KISS, dit Lana. Mais nous on n'a pas de Yuri. Alors à moins d'être vraiment motivées pour y aller à pieds...
- OH ! je m'exclame.
Mes deux amies me regardent, attendant que j'exprime ce qui vient de me passer par la tête.
- On n'a pas de Yuri, mais on va s'en inventer une, dis-je.
- Gné ? fait Lana.
- Comment ça ? se méfie Elodie.
- On va se jeter sous les roues d'une voiture ! Comme ça, par culpabilité, la personne va accepter de nous conduire à KISS !
Lana et Elodie me regardent avec des yeux ronds, ne sachant pas trop si je rigole ou pas. Voyant que je suis très sérieuse, Elodie déclare :
- Y'a tellement rien qui va dans ce que tu viens de dire.
- Non mais, je peux le faire toute seule, je vais pas vous forcer à vous faire percuter, hein !
- Mais Sasha ??? se lamente Lana. Je vais te lister ce qui pourrait mal se passer : 1) tu es blessée ou pire, tu meurs. 2) imaginons tu ne meurs pas, mais la personne ne s'arrête pas, en mode délit de fuite. 3) imaginons la personne s'arrête mais refuse de nous conduire, ce qui peut arriver pour plein de raisons. Bref, juste... non.
- Sauf qu'on est dans une série assez comique et feel-good donc personne ne meurt ou n'est gravement blessé, enfin ça m'étonnerait.
- Mais on vient du monde réel et on sait pas ce qui peut nous arriver.
- Oui mais... je me mets assez loin pour que la personne ait le temps de freiner. Et les coréens sont pas aussi connardesques que les français, donc il ou elle s'arrêtera, là on lui fait les yeux doux pour qu'il ou elle nous conduise et il ou elle se sentira obligé(e) pour se faire pardonner.
- Gustave, fait Lana en mettant ses mains devant elle. Ne te bute pas.
- Comprends-nous, ajoute Elodie.
- Y'a pas d'autres solutions ! je m'exclame. One life ! On tente le tout pour le tout !
(Car marcher est définitivement exclu.)
Quelques minutes de débat plus tard, me voilà au bord de la route avec les filles derrière moi, anxieuses. J'ai un peu (beaucoup) peur mais... adrénaline. Je laisse passer quelques voitures le temps de trouver le courage d'être conne.
- Ok, j'y vais après elle.
- Putain je le sens pas, dit Elodie en se cachant les yeux.
- YAH ! je m'exclame en me jetant en avant les yeux fermés.
Klaxon, bruit de frein brusque. J'attends mais ne sens rien. J'ouvre un œil, puis l'autre. Hey, bah je suis en un seul morceau.
Un homme, la cinquantaine, visiblement entre la colère, la peur et le soulagement, sort de la voiture qui s'est arrêtée à quelques centimètres de moi et commence à me hurler un truc dans sa langue. Elodie et Lana me rejoignent avec les valises. Il s'arrête de crier et les regarde, l'air de se dire "Parce qu'en plus elles sont trois ?". Il me regarde à nouveau et recommence à me crier quelque chose en faisant des grands gestes alternatifs entre sa voiture et moi. Je ne pense pas avoir une tête à parler coréen, mais visiblement il ne se pose pas la question. De toute façon je comprends très bien par son langage du corps et par la situation ce qu'il essaye de me dire.
- 당신은 완전히 미쳤어 ! 널 죽일 수도 있었어 ! 그런 식으로 사람들을 겁주는 건 옳지 않아 !
- Sorry, I don't speak korean, je l'interromps.
- I don't speak english, répond-il avec un accent à couper au couteau.
- Eh bien, euh... could you drive us to KISS ? Korean Independant School of Seoul ?
- Il vient de dire qu'il parle pas anglais, me rappelle Elodie.
- YOU, dis-je en le pointant, le faisant sursauter. DRIVE ? (je mime un volant) US ? (je nous désigne) KISS ? (je désigne le lointain).
- Huh ?
Je soupire et me frappe le front du plat de la main. On n'est pas sorties de l'auberge. Lana s'interpose et lui montre son téléphone ouvert sur google traduction. Il lit notre demande.
- Aah, euh school... far... not me go there...
- C'est pas dans la direction où il va je pense, dit Elodie. Et on est en train de boucher la route et de peut-être le mettre en retard.
En désespoir de cause et sans trop réfléchir, je me jette à genoux en joignant mes mains en signe de supplique en disant "PLEASE" pour bien faire comprendre que c'est urgent. Interloqué, le monsieur regarde mon cirque sans dire un mot. Je jette un regard aux filles, qui sont elles aussi surprises. Lana comprend mon appel et, bien qu'elle ne soit pas fan du fait d'aller dans la voiture d'un HOMME, qui plus est INCONNU, se met à genoux à son tour, puis tire la manche d'Elodie qui se résigne à faire pareil. Très gêné, le brave homme nous fait signe de nous relever.
- Ok ok ok ! panique-t-il.
Nous le remercions vivement. Il soupire puis nous laisse mettre nos valises dans le coffre et monter à l'arrière. Jamais, en temps normal, n'aurions-nous fait ça. Mais... voilà, quoi.
- Quelle honte, mais quelle honte, marmonne Lana.
Et nous éclatons de rire.
...
Voilà. Nous y est. KISS.
- Wooow, disons-nous en même temps.
C'est vraiment une sensation bizarre, d'y être pour de vrai. Ça y est, c'est concret. Et à tout moment, on rencontre l'un des personnages. Cas de figure dans lequel je n'ai aucune idée de la réaction que j'aurai. On a déjà vu Kitty, mais au loin, donc ça ne compte pas vraiment. Si ça se trouve, on va être amenées à leur parler. Voire être amies avec eux. Oh, merde, ça, ce serait mauvais. Et génial. Mais mauvais. Puisqu'on ne doit pas prendre le risque d'interférer et de s'attacher. En vrai, c'est tellement vaste que je me dis qu'il y a moyen qu'on ne soit pas dans leur classe et qu'on ne les croise jamais. Ou PIRE...
- Et si nous trois, on n'était pas ensemble ? je m'exclame.
Nous nous jetons un regard angoissé.
- Je suppose qu'il faut y aller pour savoir, dit Elodie.
Alors nous voilà avec nos grosses valises, maladroites que nous sommes, à nous trainer en haut des marches que nous avions vues seulement à travers un écran jusqu'à maintenant. Aucune trace d'un visage connu.
Une fois dans le hall, nous faisons une pause le temps de réaliser ce qui est bel et bien en train de nous arriver, regardant avec émerveillement autour de nous.
- J'en reviens toujours pas, dit Elodie.
- Ah moi si, dis-je ironiquement. Je suis totalement habituée et à l'aise avec l'idée d'être littéralement plongée dans une série.
- T'as fini d'être sarcastique ? rigole Lana.
- Le sarcasme est ma seule défense.
Nous nous dirigeons vers la dame installée à une table dans le hall pour l'admission. Oh la la je sens littéralement mon cœur pulser dans ma poitrine. Lana arrive la première et, en anglais :
- Bonjour, nous sommes nouvelles !
- Bonjour, bienvenue à KISS, nous sourit la dame. Vos noms ?
- Lana Jullien, Sasha Berry et Elodie Berardet.
- Alors...
Elle cherche nos dossiers du côté des filles et les trouve facilement, visiblement rangés à côté. Ce qui veut dire que...
- Vous êtes dans le même dortoir, nous annonce-t-elle en nous tendant des feuilles. Remplissez ces formulaires. Ah et...
Elle s'empare de badges comme celui de Minho que Kitty remarque dans l'épisode 1 à l'aéroport lors de leur premier... "contact".
- Tenez, dit la dame en nous les tendant.
Nous nous contenons, prenons nos formulaires et badges et attendons d'être assises sur les gradins pour exprimer notre joie.
- Un dortoir de trois, c'est marqué ! s'exclame Lana. Donc pas de quatrième personne random pour faire chier.
- Pas besoin de quatrième roue du carrosse, dit Elodie.
- On dit "cinquième roue du carrosse", Elodie... répond Lana. Vu qu'un carrosse a déjà quatre roues.
- Oui bon ça va hein ! Je sais que je suis blonde, pas la peine de me le rappeler. Pas besoin de quatrième roue du tricycle on va dire.
Nous rions et commençons à remplir nos fiches.
- Mais du coup on met quoi concernant notre famille ? je demande. On sait pas si elle existe encore.
- Eh bah on va pas s'en inventer une donc on met la vérité je suppose, répond Elodie.
- Oui mais notre vérité c'est peut-être pas leur vérité. Et on sait pas si on est titulaires d'une bourse. En clair, on peut rien remplir de ce formulaire !
- Alors ne le remplissons pas, dit Lana. Ils sont censés déjà avoir les infos, c'est qu'une formalité. Et on enquêtera sur les infos qu'ils ont dès que possible. En attendant, faut qu'on aille demander nos uniformes !
- Ohhh, t'as raison, j'ai trop hâte de porter l'uniforme de KISS !
Retour vers la dame, qui nous envoie vers une autre dame dans un petit local/dressing où elle nous laisse chercher notre taille.
- Regardez, nous dit Lana en se pavanant avec la veste.
Nous nous amusons à faire quelques petits essayages puis repartons avec le nécessaire. Par contre, pour s'orienter et trouver notre dortoir, ça va être compliqué. Parce qu'après plusieurs minutes à errer dans des couloirs (c'est vraiment super grand comme campus) et essayer de trouver les bons panneaux, nous voilà bredouilles.
- Bon, on va demander à quelqu'un, se résout Lana en arrêtant une personne au hasard.
Il s'agit d'un blond gringalet très pâle qui parait surpris qu'on lui adresse la parole. Il regarde Lana d'un air ahuri alors que celle-ci demande dans un anglais impeccable :
- Excuse-moi, on est nouvelles et on cherche le dortoir des filles. Tu saurais où c'est ?
- Oh oui bien sûr, c'est dans l'autre partie du bâtiment, là-bas.
A son accent, on comprend tout de suite qu'il est anglais.
- Ah oui on était vraiment à côté de la plaque ! réagit Lana.
Il sourit.
- Moi c'est Milo, dit-il.
- Lana, répond Lana (logique me direz-vous).
- Lana, répète-t-il avec un sourire bizarre.
Et comme il a l'air de se perdre dans les yeux de notre amie je décide d'intervenir :
- Et nous c'est Sasha et Elodie !
Il remarque alors notre présence et nous lance un sourire crispé.
- Bon bah on va y aller hein, dit Lana, gênée. Merci encore.
- A bientôt, j'espère !
- C'est ça oui...
Nous voilà en train de marcher loin de lui en essayant de nous retenir de rire.
- C'était quoi ça ? je finis par exploser de rire.
- Lu-naire ! répond Lana.
- Ah mais il est tombé fou amoureux de toi, se marre Elodie.
- Les hommes quand on leur demande quelque chose, ça y est on les veut, plaisante Lana. Mais j'ai déjà ma girlfriend.
Je remarque alors son visage s'assombrir à l'évocation de Louane. C'est vrai que subitement ne plus avoir de contact avec elle doit être déchirant. Elle n'existe sûrement même pas dans ce monde. Alors que nous marchons en direction des dortoirs, nos premières réelles interrogations sur la situation sortent : Qu'est-ce qui a bien pu faire qu'on se retrouve là ? Est-ce pour un but précis ou un hasard, un accident ? Est-ce définitif ? Jusque là, on partait du principe que non, qu'il y a forcément un moyen de retourner en arrière. Même si pour l'instant on a envie de profiter... admettons que l'on soit vraiment coincées. Et même si ce n'est pas le cas, pour combien de temps sommes-nous là ? Est-ce que tout va rentrer dans l'ordre tout seul ou bien c'est à nous de trouver un moyen ? Qui pourrait nous aider ? A qui peut-on parler de ça sans influencer l'histoire ? A-t-on de la famille ici, dans cette autre vie ? Qui nous a inscrites et paye potentiellement notre place ici ? Il faudrait que l'on aille fouiller nos dossiers. Quelles répercussions notre présence ici aura-t-elle sur le déroulé de l'histoire, et sur la vie réelle ? Est-ce que les gens de la vie réelle nous voient à l'écran ? Est-ce qu'ils nous cherchent, est-ce qu'on a disparu ? Ou est-ce que notre vie réelle est sur pause et qu'on reviendra comme si rien ne s'était passé ? Est-ce que tout cela est réel, est-ce qu'on s'en souviendra ? Est-ce qu'on est mortes ou dans le coma ? Est-ce que je m'imagine être avec Lana et Elodie mais en réalité tout ça n'est qu'un rêve que je fais toute seule ? (peut-être qu'elles se disent la même chose ?)
Et si tout ça était l'œuvre du Mauvais Génie ??????
Nous arrivons à une conclusion en même temps que nous arrivons devant notre porte de chambre (n'est-ce pas symbolique ?) : nous n'avons aucune réponse à ces questions. Pour l'instant, du moins. Mais avant d'enquêter, nous sommes d'accord sur le fait qu'il faut profiter. ET garder notre secret... eh bien, secret.
Même si je sens que tôt ou tard, la réalité commencera à me manquer. Ma famille, mes autres amis, mon quotidien. Ma vie.
Bip (bruit de badge qui ouvre la porte du dortoir)
- Oh, wow, c'est la classe, dis-je.
Nous nous précipitons à l'intérieur en même temps, ce qui nous bloque dans l'entrée avec les valises et manque de nous faire tomber. Nous parvenons à nous décoincer, posons nos valises dans le salon (canapés, bureau, meubles...) et faisons le tour. Cuisine, salle de bain, et une grande chambre avec trois lits. QUA-LI-TÉ. EN MODE APPART DE LUXE. ON EST BIEN REÇUES.(sans oublier le plan de sorties de secours du bâtiment en cas d'incendie)
- AU NOM la chambre est juste trop cute, dit Lana. TOUT. Les couleurs, la fenêtre, les rideaux, les étagères, le petit bureau, et LES PETITES MARCHES POUR ALLER DANS LE LIT PUISQU'IL EST HAUT. Ça a l'air trop confortable.
- Moi j'dis faut tester pour s'en assurer, lance Elodie.
Aussitôt dit, aussitôt fait. Chacune se jette dans un lit, léger rebond, et aaaaaaah je pourrais m'endormir instantanément. Même si on s'est réveillées qu'à la fin du voyage en avion, techniquement on subit la fatigue et le décalage horaire ! (8 heures entre la France et la Corée du Sud il me semble)
Je suis la première à me décider à me lever, pour ranger mes affaires dans les étagères, ce que les filles finissent par se résoudre à faire également.
- C'est où et à quelle heure la soirée de bienvenue ? demande Elodie dans notre séance de pliage.
Lana et moi suspendons nos mouvements et nous regardons.
- Aucune idée, je réponds avant de reprendre ma tâche.
- C'est bizarre, remarque Lana. Je commençais à me faire la réflexion mais j'ai l'impression que plus je réfléchis sur ce qui est censé se passer, moins je m'en souviens.
- Maintenant que tu le dis, pareil... fait Elodie. Et plus bizarre encore : quand j'entends les gens parler anglais, je comprends. Genre sans difficulté. Au point que je me dis que je pourrais parler anglais sans problème, alors que c'est pas mon fort normalement.
- C'est vrai, ça, remarqué-je. Lana et moi on est fortes en anglais mais j'ai l'impression qu'on réfléchit plus trop quand on doit parler. Quand tu as parlé à ce type, là... J'ai oublié son prénom. Bref, bah je suis sûre que t'as même pas eu besoin de traduire en anglais dans ta tête.
- Eh maintenant que tu le dis, c'est vrai, répond-elle.
- Même si tu veux être prof d'anglais et que t'as des aptitudes, bah, là, on a vachement progressé en peu de temps quand même.
- L'effet du pouvoir de l'immersion en terre inconnue, on va dire !
- C'est trop cool en vrai, sourit Elodie. On parle en anglais avec eux, et entre nous on peut parler français sans qu'ils comprennent.
- Sauf Florian, je rétorque.
- HAN ! s'écrie Lana. GENRE ON A UN POINT COMMUN AVEC FLORIAN. On va trop pouvoir lui parler en mode amitié exclusive, il se sentira tellement moins seul.
- Par contre il a personne avec qui parler grec.
A cet instant mon téléphone vibre, nous faisant sursauter. C'est une alarme. Je regarde et l'arrête.
- On a notre réponse. Welcome Party dans une heure, à 19h, annoncé-je. Nom d'un chien on n'est pas prêtes ! On a de quoi s'habiller pour ça, même ?
Je jette un regard circulaire au bazar vestimentaire que nous sommes en train de causer.
- Moi j'ai ma robe dorée, répond Lana en brandissant le vêtement en question.
Elodie et moi regardons dans nos affaires si nous avions prévu quelque chose à cet effet dans nos valises.
- Robe orange, trouve-t-elle. Enfin une occasion de la porter.
De mon côté, j'ai beau fouiller, je ne trouve rien. Les filles partent se changer et se maquiller et je suis là, les bras ballants. Je commence à me sentir oppressée au niveau de la poitrine. Sérieux, je suis pas ici pour continuer à subir de l'anxiété...
- Et puis merde, ça me saoule !
Les filles reviennent, et me trouvent en jean et top simple.
- J'y vais comme ça, je me maquille pas.
- Femme indépendante, répond Lana.
Mini description physique des deux bombes atomiques qui me servent d'amies : Lana, cheveux longs teints à peu près en roux, yeux marron, lunettes. Elodie, cheveux longs à peu près blonds, yeux bleus et fonctionnels.
(Et moi, cheveux très courts châtains, yeux marron avec des lentilles qui parfois s'éjectent de mes yeux en plein cours. Comprendra qui pourra.)
Trois filles très différentes, mais toutes avec des origines réunionnaises du côté de leur père, figurez-vous. Toutes en train de subir un mélange d'angoisse et d'excitation à l'idée de cette soirée, pas tant pour la soirée en elle-même (c'est pas nécessairement notre truc) que pour les personnes que l'on va sûrement y croiser.
- Si on tombe sur eux on fait quoi ? je demande en chemin.
- Surtout, rien de suspect, répond Elodie.
- C'est à nous que tu parles, Elo, lui rappelle Lana.
Et finalement en suivant tous les gens (bien habillés, contrairement à moi), nous voilà dans les couloirs qui nous mènent à la salle des fêtes où se trouvent déjà la plupart des élèves. WOW. Trop de... de tout, en fait. Surtout, pas de pression, hein.
Y'a des ballons trop jolis, des endroits pour prendre des photos... et des tables de boissons et nourriture comme dans un mariage. En morfales que nous sommes, nous échangeons un regard nous mettant d'accord sur le fait que l'on risque de finir là-bas toute la soirée à s'empiffrer.
- C'est la mère de Yuri, là ! pointe Elodie.
- Oh putain Jina, réagit Lana.
Un peu dans mes pensées, je ne réagis pas, concentrée sur le fait que tout le monde est sur son trente et un et que je suis... moi, quoi. Je les détaille un à un, m'infligeant leur élégance en punition du manque de la mienne. Même les mecs sont mieux habillés que moi, par exemple lui, là, qui... est totalement Minho.
Je pousse un cri aigu et le montre à Elodie et Lana.
- PURÉE DE PATATES, Minho et Q droit devant !
(Respectivement leurs personnages préférés.)
Les filles ont une exclamation de surprise. On n'était clairement pas prêtes.
- Je propose qu'on aille se servir de cette boisson inconnue qui se trouve à la table juste derrière eux, chuchoté-je comme si on était espionnées (et que quelqu'un comprenait le français). Comme ça, au hasard...
- Go, répond Lana.
Nous avançons dans leur direction en essayant d'avoir l'air détendues alors que j'ai soudainement l'impression d'avoir oublié comment marcher normalement. A tout moment on se casse la figure et on finit comme un chien dans un jeu de quilles. J'essaye de contrôler ma respiration pour qu'elle soit régulière. De toute façon, normalement, on ne va pas leur parler, et ils ne vont pas nous remarquer, donc tout va biennng.
Mission accomplie, nous voilà debout à la table juste derrière eux à les observer, incrédules. Visiblement, Kitty n'est pas encore arrivée. Ils sont en pleine conversation, mais avec le bruit, je n'entends pas de quoi ils parlent. Sûrement rien de trop important.
- C'est incroyable de les voir de si près, dis-je. Même si on a l'air un peu bizarres.
- Non mais j'en reviens toujours pas, répond Elodie. Ils sont encore plus grands que ce que je pensais.
Disons que notre moyenne de taille à nous trois doit être autour des 160,5 cm. Lana s'apprête à dire quelque chose mais Q se tourne vers notre table pour se servir à boire et nous remarque par la même occasion. Nous nous figeons.
- Ah pardon, j'avais pas vu que vous alliez vous servir, dit-il avec un sourire amical. Vous en voulez ?
Le son de sa voix m'ayant fait oublié jusqu'à ma propre langue maternelle, j'émets un léger balbutiement impertinent en guise de réponse.
- C'est quoi, exactement ? demande Lana en désignant la boisson.
- J'en ai... aucune idée, répond comiquement Q. C'est pour ça que je me suis dit que j'allais goûter.
Minho se tourne vers Q.
- Sûrement pas de l'alcool, en Corée on tient à garder ça interdit aux mineurs. Surtout que la fête est organisée et encadrée par des adultes.
MAPDJPAPENCMEPNAMDPENCAPNEPEPSNEF.
- Je vous sers ? demande Q.
Serait fou celui qui refuserait que Quincy lui serve à boire. Nous acceptons et prenons des verres dans lequel il verse de ce liquide bizarre. MON COEUR BAT PLUS VITE QUE NE ROULE UNE FERRARI. Nous le remercions et nous réfugions dans la boisson pour ne pas traduire notre émotion. Il se sert et sert Minho et HOP, fin de notre premier contact. Je peux mourir en paix. (En passant, c'est dégueulasse, j'aime pas les boissons qui pétillent et celle-là est plus pétillante que des yeux de fille de manga). Nous nous éloignons avec nos verres pour ne pas avoir l'air de les coller. Une fois assez loin, nous explosons de rire.
- Ça a été, en vrai, on a fait aucune gaffe et on n'a rien influencé, remarque Lana.
- Je suis presque un peu déçue qu'il n'y ait rien eu de plus, remarque Elodie. On s'est même pas présentées.
- C'est peut-être mieux comme ça pour le moment, mais qui c'est ce qui arrivera plus tard ! je réponds.
Nous les observons de loin et... KITTY ! VOILA MA QUEEN !
- AAAAH! je hurle et quelques personnes me jettent des regards de travers.
- Ok ok, observons la suite, dit Lana.
Nous nous taisons et l'observons percuter Minho (hihi), qui parle bien anglais finalement. Et Q lui parler pour la première fois. Puis, l'arrivée de Dae (dans son costume payé par sa fausse petite amie). Kitty qui se jette dans ses bras. Lui qui la fait voler dans les airs sans que ça ait l'air de choquer personne. Et... l'arrivée de Yuri (cette fille est d'une beauté juste incroyable.)
- Putain ça m'éneeerve, grincé-je entre mes dents. La pauvre, elle va à l'autre bout du monde pour ça quoi !
Kitty s'en va en courant, Dae essaye de la rattraper mais Yuri le retient. C'est dingue ce qu'elle peut m'énerver au début de la saison 1. Je commence à me lancer à la poursuite de Kitty mais Lana me retient par le bras
- Tu fais quoi, là ?
- Ah merde, pardon, je marmonne en me reprenant. Je voulais aller la voir pour m'assurer qu'elle allait bien, jsuis trop spontanée. Surtout qu'elle me connait pas. Et qu'on doit pas interférer.
- Elle va revenir, de toute façon, répond Elodie.
- Si c'est pour foncer dans une tour de cupcakes à la façon de Lara Jean devant John Ambrose, j'aurais préféré lui épargner cette honte ! je me lamente.
- Elle s'en remettra, et puis... "ne pas interférer", me rappelle Lana. Même pour des détails, on évite.
- Hey ! fait une voix inconnue.
- AAAAAAAAH ! hurlons-nous de surprise en nous retournant.
Un mec blond gringalet, qui, plutôt que de s'excuser de la frayeur qu'il vient de nous faire, s'adresse uniquement à Lana :
- Je m'attendais pas à te revoir si vite, Lana !
Frisson de gêne.
- Oui, haha, ça alors...
- Tu es resplendissante.
- Merci, haha, répond-elle avec un sourire forcé.
Il sourit et décide finalement de s'éloigner, lâchant un petit "A bientôt !" à destination de Lana seulement, puisque visiblement nous n'existons pas à ses yeux. Elle se tourne vers nous et chuchote entre ses dents :
- Qui est cette personne ?
- C'est le mec de tout à l'heure, répond Elodie.
- C'est quoi son nom ?
Nous haussons les épaules.
- Ça commence par un "m" je crois, dis-je. Malone ? Milane ?
- Milo ! se souvient Lana. J'arrivais pas à savoir d'où je le connaissais.
- "Je m'attendais pas à te revoir de sitôt", MEC, c'est la soirée de BIENVENUE, où TOUT LE MONDE va. Bref, effaçons ce moment gênant. Il faut toujours se méfier des figurants...
Nous rions un peu puis Elodie nous administre un coup de coude avant de nous désigner Q et Minho, que Kitty vient de rejoindre pour leur demander où est Dae.
- C'est le moment où ils se rendent compte de qui elle est ! dit-elle.
- Oui donc les cupcakes arrivent bientôt... je marmonne. Où sont Dae et Yuri ?
- Hum, là ! pointe Lana. Avec Madison et Jina. C'est dingue comment on vit la soirée juste par procuration.
Nous les regardons quelques instants avant que je ne me rende compte de quelque chose.
- Justement, et si on vivait juste notre propre soirée plutôt que la leur ? On peut très bien se détacher d'eux, non ? Tout ce qu'il se passe de leur côté, on l'a déjà vu. Mais le reste non. Tous ces autres gens, non. Nous, ici, non. Alors arrêtons de nous concentrer sur eux, surtout si c'est pour ne rien y faire, et amusons-nous !
- Eh mais t'as raison, répond Elodie. C'est pas normal qu'on n'ait pas encore bouffé quoi que ce soit.
- Venez on va voir si y'a du salé, propose Lana. Même si ça vaudra jamais la quiche au saumon de ta mère !
Nous nous dirigeons joyeusement de table en table à la recherche de quelque chose qui pourrait nous satisfaire, amassant plusieurs trouvailles. Contentes, nous allons dans un coin avec moins de monde (seulement trois mecs en pleine discussion) et nous voilà bientôt posées tranquilles à nous empiffrer. Au loin, j'aperçois Dae et Yuri en train de poser pour une photo et Yuri lui faire un bisou sur la joue. MDRRRRRRRR. Pauvre Kitty... Ah, c'est le moment où...
BAM (onomatopée certes mal choisie). La tour de cupcakes s'effondre et tout le monde s'arrête de parler pour regarder Kitty. Elodie, Lana et moi échangeons un regard de compassion à son égard. C'est tellement quelque chose dont on serait capables.
- Quoi ? Vous n'avez jamais vu une fille foncer dans une tour de cupcakes ? se défend Kitty. Y'a rien à voir !
Elle commence à s'éloigner dignement mais glisse sur les desserts en question et s'étale par terre, sous les cris de surprise des gens. Elle se redresse, sonnée.
- Très bien, peut-être qu'il y a quelque chose à voir... reconnait-elle.
Dae se précipite vers elle mais elle le repousse et quitte la soirée, sa jolie robe toute tâchée. Dans ces moments-là, je suis bien contente de ne pas être le personnage principal et de ne pas avoir à vivre ça...
Alors que les gens reprennent leur soirée et que je m'apprête à dire aux filles que j'ai envie de rentrer au dortoir, j'entends une voix masculine dire en riant moqueusement :
- Tellement ridicule ! Mais bon, je vais pas m'en plaindre, ça fait enfin un peu de distraction dans cette soirée de merde.
Outrée que quelqu'un daigne trouver Kitty ridicule et se moque ouvertement d'elle, je me tourne vers l'origine de la voix. Il s'agit d'un des trois mecs près de nous. Un américain, de toute évidence.
- Excuse-moi ? je m'écrie spontanément, la bouche pleine.
J'avale difficilement ma bouchée et le gars, jusque là de dos, se tourne vers moi, découvrant ma présence. Grand, brun, yeux noirs et profonds, buzzcut. T'sais, la gueule d'un mec qui serait du genre à croire que tout faire par esprit de contradiction le met au-dessus du lot. Il arque un sourcil, surpris par mon intervention. Ses deux amis nous regardent également : un mec noir qui a l'air curieux de ce qui va se produire et un autre, visiblement à moitié coréen, à l'expression indéchiffrable.
- Tu m'as parlé ? demande Buzzcut.
- J'ai juste réagi à ce que tu viens de dire. De façon indignée. Parce que ça se fait pas de critiquer les gens.
- Excuse-moi mais... t'es qui ? répond-il en me toisant avec un sourire narquois, bras croisés.
Putain, ça commence mal, il me tape déjà sur le système.
- Qui je suis, on s'en fout. En revanche, qui TU es ? Je vais te le dire : personne d'assez bien placé pour parler en mal de quelqu'un sans connaitre sa situation.
Le mec noir laisse échapper un rire et Buzzcut lui lance un regard noir, le faisant se taire.
- J'ai vu une fille s'étaler dans des cupcakes, j'ai pas besoin d'en savoir plus : c'est juste drôle. Alors je vois pas pourquoi tu viens me prendre la tête. T'es de la police ?
Punaise, je regrette de le dire mais même si sa dernière phrase m'a fait mourir de cringe, il a pas entièrement tort. Mais c'est parce que je connais Kitty et que ça me fait de la peine pour elle ! Je suis juste trop impliquée.
- Je... BREF ! je réponds, à court d'arguments.
Je commence à me détourner.
- Quoi, c'est tout ? s'étonne-t-il. T'as pas envie d'avoir le dernier mot ? Parce que là ça fait un peu pitié comme répartie.
Je lui jette un regard exaspéré.
- Le dernier mot, je l'ai, c'est : "Bref" ! je réponds. Alors, bref.
- D'habitude, les gens comme toi sont plus distrayants.
- C'est qui, "les gens comme moi" ?
- Les meufs qui sont persuadées d'avoir toujours raison sur tout, d'être irréprochables, qui n'aiment pas les gens qui jugent... ce qui fait qu'elles se retrouvent les premières à juger.
- Eh bah je te trouve vachement bavard et lancé sur le sujet pour quelqu'un qui a l'air de se la jouer "désintéressé". Je sais pas ce que tu cherches en me disant ça, si c'est m'énerver, me blesser, prouver une capacité d'analyse psychologique à deux balles, ou juste égayer ton morne et solitaire quotidien par une dispute... mais, j'ai rien à te dire. Je réponds pas à la provocation.
- Pourtant là tu me réponds.
- Pour te dire que je te réponds pas.
- Oui mais du coup...
- POUR LA ÉNIEME FOIS : BREF.
- Tu vois, t'es énervée.
- Je suis pas énervée.
- T'as l'air vachement énervée pour quelqu'un de pas énervé.
- Je suis parfaitement calme.
Il sourit et me détaille de haut en bas. Oui, bon, j'aurais peut-être dû faire un effort vestimentaire. Je peux même pas me comparer à lui sur ce point de vue-là, il est parfaitement élégant et... beau ?
- Tu juges mes chaussures, là, non ? je demande.
- Pas du tout... elles sont juste très... roses... avec des tournesols.
- Nickel, je m'en vais !
- Bah attends !
Mais je suis déjà loin. Je fais toujours ça dans les situations que je ne contrôle pas. Je m'enfuis. Et... merde, j'ai complètement planté les filles sur place, j'ai même pas réfléchi, je me désespère. Mais si je me retourne pour les attendre, il va me voir, et je perds ma dignité ! Je vais les attendre à l'extérieur de la salle, ça vaut mieux. Argh, j'en ai marre ! De tout ! Et surtout de moi !
POV LANA :
Le mec avec qui Sasha vient de s'embrouiller la regarde partir avec un mélange d'amusement et de je sais pas trop quoi. C'est HI-LA-RANT. Faudra qu'on fasse un débrief toutes les trois ! Parce que... je ship.
Le mec noir (qui a l'air super sympa et bon délire) lui lance un sourire en coin avec un regard lourd de sous-entendus, l'air de dire qu'ils vont eux aussi devoir débriefer.
- Quoi, Zack ? s'exaspère le mec que je ship désormais avec Sasha.
"Zack" hausse les épaules.
- Bon bah on va y aller maintenant si on veut la rattraper, dis-je à Elodie. Avec tes rotules à l'envers, là.
Le dernier mec, celui à moitié coréen, et qui jusque là paraissait neutre face à la situation (n'aurait-on pas affaire à un mec qui intériorise ? de la même façon qu'Elodie intériorise tout ?), parait enfin s'éveiller et laisse échapper un sourire devant ma remarque. Sourire en coin avec du potentiel, à noter. Et il n'est vraiment pas mal du tout, à noter aussi. (Je parle pour Elodie parce qu'elle n'avouera jamais rien par elle-même)
- Non mais c'est vrai, j'ai vraiment les rotules à l'envers, se justifie Elodie, gênée.
- J'ai rien dit, se défend-il, levant les deux mains devant lui en signe d'innocence.
Et une belle voix grave pour accompagner le tout. Je les regarde alternativement, calculant la compatibilité. Bon bah... ok. C'est décidé. Je les ship aussi.
Maintenant que j'ai toutes les conclusions qu'il me faut...
- Bon, ce fut un plaisir, hein... au revoir et bonne soirée ! je m'exclame avant d'empoigner Elo et de déguerpir avec elle (il faut bien mettre un terme à l'embarras généralisé de la situation à un moment donné, aussi drôle puissent être les choses).
Bilan : on a le prénom d'un des trois (Zack), qui est aussi le seul qui ne se présente pas comme un love interest, mais bon c'est mieux que rien. (Eux, ils n'ont aucun de nos noms donc on les bat 1-0.) J'espère qu'on va les recroiser et que ça va nous faire un peu de distraction et de choses à vivre par nous-mêmes ! S'il le faut je me transforme en matchmaker ou j'embauche Kitty comme entremetteuse. Mais là, je sens qu'on tient quelque chose d'intéressant.
XO, XO, gossip girl...
P.S. : Louane me manque...
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