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Chapitre 20.1

Ce fut soulagés et exténués que nous pûmes enfin tous pénétrer dans l'immense ville souterraine. Lorsque mes amis me rejoignirent, ils ne manquèrent pas de m'expliquer entre deux quintes de rire ce qui s'était passé durant mon absence. Contrairement à ce que j'avais espéré, Jase n'avait pas tenu en place. Alors que les minutes s'allongeaient et que le silence se faisait de plus en plus pesant, mon frère avait commencé à s'agiter, pensant que quelque chose de grave était en train de se passer. De ce que Jackson me racontait, il était devenu fou. Il avait demandé de mes nouvelles à plusieurs reprises, mais les gardes n'avaient pas bronché. Il avait frappé maintes fois du plat de la main sur la porte, espérant qu'elle s'ouvre. Voyant que personne ne réagissait, il s'était emporté. Les gardes lui avaient demandé de se calmer et, sans hésiter, Jase avait frappé le plus grand des deux, le mettant K.O. Le second l'avait regardé avec des yeux ronds, effrayé. Il n'avait pas riposté.

Alors que Jesse me contait tout cela, hilare, je ne pus m'empêcher de secouer la tête et de soupirer. Jase était vraiment incontrôlable lorsqu'il était sous pression. Il avait tellement besoin de tout contrôler, de me protéger, qu'il était prêt à tout pour parvenir à ses fins. Je fus toutefois heureuse de constater que Clay n'en avait pas tenu compte. Depuis notre discussion, le chef de ce refuge semblait plus serein. Je le regardai, intriguée. Il paraissait si cruel lorsque je lui avais parlé. Il m'était difficile d'accepter son comportement jovial et accueillant. C'était pourquoi je gardais mes distances, restant sur mes gardes. Clay était calculateur. Il valait mieux s'en méfier.

Toutefois, il eut l'amabilité de nous faire visiter l'endroit, non sans se vanter de toute la technologie qu'il possédait ici. Il se pavanait, démontrant la beauté et l'immensité des lieux. Malgré tout, je ne pouvais m'empêcher de trouver cette ville repoussante. Nous étions enfermés sous terre, à l'abri de la fraîcheur et du soleil. Même s'ils avaient réussi à faire pousser des plantes çà et là grâce à des lumières artificielles, cet endroit avait indéniablement moins de charme que le Repaire.

Plus nous avancions, plus la voix stridente de Clay m'horripilait. Il avait beau paraître moins menaçant, il était toujours aussi méprisant et arrogant. Un peu comme David, mais en pire. Je souris. Je ne pensais pas que c'était possible.

Nous nous enfonçâmes finalement dans le dédale de couloirs creusés à même la roche. Clay nous fit visiter les différentes pièces et chambres. Je frissonnai devant l'impersonnalité des lieux. J'espérais que nous pourrions partir d'ici au plus vite car je savais que je ne pourrais pas tolérer cette ambiance lugubre longtemps. Je ne pourrais jamais m'y sentir chez moi. Certes, l'endroit était démesuré, impressionnant et à la pointe de la technologie. Je n'avais jamais vu d'aussi grandes prouesses architecturales et scientifiques. Mais cela ne suffisait pas à rendre l'endroit idyllique.

Clay continua de se pavaner, ne remarquant pas que nous en avions tous plus qu'assez. Une partie du groupe nous avait d'ailleurs abandonnés, nous laissant en comité restreint. Mes amis, Jase, Kaden et moi suivions Clay d'un pas las. Il était si imbu de lui-même... J'espérais ne pas avoir à le côtoyer trop souvent.

Après une bonne heure de monologue interminable sur la puissance et l'intelligence des habitants de cette ville, non sans oublier de mentionner une énième fois l'immensité et la modernité des souterrains, Clay nous laissa vaquer à nos occupations dans nos quartiers. Une aile entière de la ville n'était pas habitée et il en avait profité pour nous y caser. La ville grouillante de monde et d'animation n'était déjà pas très attirante. Alors cette partie isolée des souterrains était carrément lugubre.

Jase s'installa dans la première chambre avec Jackson, ce qui mit ce dernier mal à l'aise. Je fronçai les sourcils, ne comprenant pas ce qui pouvait le déranger dans le fait de partager une chambre avec mon frère. Jase n'était pas toujours facile à vivre, mais tout de même... Jesse empoigna ensuite Grace par la main, ce qui détourna mon attention, et l'emporta dans leur petite pièce exigüe qu'elle voulut à tout prix décorer à sa manière, imaginant déjà les tableaux et les objets qui pourraient égayer cet endroit. Alors qu'elle parlait à toute vitesse, demandant à son amie de prendre note, Grace me lança un regard de détresse, tentant de fuir. Jesse la rattrapa par le bras et la sermonna. Je ris. Elle avait un caractère difficile à supporter, alternant entre exigences et sautes d'humeur, mais elle apportait toujours une touche d'humour et de fraîcheur.

Jesse, plongée dans ses réflexions artistiques, ne vit pas Grace s'éclipser en emportant Glad-y dans ses bras afin de trouver un endroit calme où elle pourrait se concentrer. Alors que je m'éloignais en souriant, Kaden m'attira dans ses bras, ma tête reposant sur son torse musclé. Je l'enlaçai à mon tour, sentant l'anxiété me quitter peu à peu, et il embrassa délicatement le sommet de mon crâne. Je fermai les yeux pour me délecter de sa caresse, sentant la fatigue poindre le bout de son nez, et, après une étreinte que je jugeai trop courte, il nous emmena dans notre chambre. Clay lui avait réservé la pièce la plus grande et la plus belle. Néanmoins, elle avait beau être gigantesque, elle restait froide et triste. Je frissonnai, observant le grand lit aux draps gris. Je regrettais déjà la douceur des draps de Kaden. Je me souvenais des tableaux qui décoraient l'espace, triste de ne pas en retrouver ici. La pièce semblait sans vie.

Je m'assis sur le lit, épuisée, et réprimai une grimace de dégoût en tâtant le matelas rigide. Nous n'allions pas passer de bonnes nuits... Les coussins étaient plats, ne servant pratiquement à rien. Les draps irritaient ma peau nue et l'atmosphère froide et humide fit friser mes cheveux. Je ne devais pas ressembler à grand-chose avec mes cernes violacés, mon visage fatigué et mes cheveux emmêlés. Alors que je regardais dans le vide, l'air morose, Kaden vint s'asseoir près de moi, me caressant le dos au passage. Il partageait le même sentiment que moi, mais nous étions tous deux heureux d'avoir un toit.

Je fermai les yeux et me laissai tomber en arrière. Le matelas aussi dur que le sol rocheux m'arracha un gémissement plaintif. Maintenant que la BPP avait envahi le Repaire, ce n'était qu'une question de temps avant que la guerre ne se déclenche vraiment. Je soupirai, regrettant amèrement ma vie d'avant. Si je n'avais pas rencontré Kaden, rien de tout cela ne serait arrivé. Le bon comme le mauvais. Je souris. Bien que je souhaitais retrouver mon confort d'antan, je ne regrettais pas d'être arrivée jusqu'ici, car, aujourd'hui, mon existence avait un sens.

Alors que je pensais faire une rapide sieste pour me reposer, Kaden se glissa à mes côtés. Sa chaleur me recouvrit et je gémis, ouvrant les yeux. Les siens étaient noirs de désir, ce qui m'impressionna. Son souffle chaud s'écrasa sur mes lèvres et je répondis à ses caresses, heureuse de pouvoir le retrouver après notre voyage éreintant. Nous n'avions pas eu un seul instant pour nous. Le doux contact de ses lèvres charnues sur les miennes m'arracha un gémissement de bonheur et Kaden en profita pour approfondir notre étreinte langoureuse. Ses doigts parcoururent avidement mon corps et je me laissai aller contre lui. Je caressai son dos musclé tandis qu'il me faisait ressentir une myriade d'émotions, allongé au-dessus de moi. Je fermai les yeux et rejetai la tête en arrière, le laissant m'explorer. Une fois débarrassée de mes vêtements, j'en profitai pour inverser les rôles et me retrouvai sur lui, le regard brûlant et le souffle haletant. Son regard intense me fit frémir et toute trace de pudeur me déserta. J'étais bien avec lui. Il me faisait sentir belle. Il me faisait sentir femme.

Nos mouvements fluides se firent plus saccadés, nos corps se mélangeant dans un ballet somptueux. Nos souffles et nos gémissements étouffés se mêlèrent, nous enfermant dans un concerto agréable. Alors, nos âmes fusionnèrent, nos cœurs battant en rythme. Notre lien se fit plus intense et mes émotions explosèrent. Son corps épousa parfaitement le mien et je me laissai aller à notre étreinte amoureuse, murmurant son nom à son oreille tandis qu'il m'apaisait de ses mots doux.

***

Quelques heures plus tard, je me trouvai dans une petite clairière au sol aride, délimité par des arbres aux formes surprenantes. Leurs feuilles luisaient de manière si étrange et les couleurs étaient si resplendissantes qu'ils semblaient surnaturels. Peut-être venaient-ils d'une autre planète ? Je me demandais comment les habitants de ce refuge étaient parvenus à faire pousser ce genre d'arbres sous terre, mais je mis ma réflexion de côté. Je n'étais pas ici pour m'extasier sur l'étrange beauté des végétaux.

J'avais été la première à sortir de ma chambre, me défaisant à regret de l'étreinte bienveillante de Kaden avant de prendre une douche brûlante. Lorsque j'étais sortie de la salle de bain, Kaden s'était profondément endormi. Je l'avais embrassé sur le front, caressant son visage reposé et serein. Il était si beau lorsqu'il dormait. Il abaissait toutes ses barrières, ce qui le rendait moins soucieux. Alors que je fermais délicatement la porte, les cheveux encore trempés, j'avais croisé Jesse. Cette dernière avait haussé les sourcils à plusieurs reprises et était revenue à la charge avec toutes ses questions intimes que j'avais esquivées à nouveau. Ce qu'elle pouvait être têtue...

Jackson nous avait très vite rejoints et la conversation était devenue plus légère. Nous nous étions baladés dans les couloirs sombres, n'ayant aucune idée de l'heure qu'il pouvait être. Nous avions alors profité de ce temps libre pour visiter cette aile isolée du reste de la ville grouillant de monde, nous familiarisant avec cet endroit que Clay, de sa voix stridente et de son sourire suffisant, dénommait fièrement « Diamond ». Pour lui, cette ville était un véritable bijou, aussi resplendissant qu'un diamant. Pourtant, alors que j'avais observé le moindre recoin, grimaçant devant la froideur des lieux, je m'étais dit que cette ville était loin de resplendir autant qu'une pierre précieuse. Jesse avait partagé mon avis, fronçant le nez de dégoût en traversant les couloirs sombres.

Cette ville méritait des tas de dénominations, mais surtout pas celle de diamant. Quel nom pourrait-on bien lui donner à la place ? L'appellation « Garbage », ordures en anglais, serait-elle trop rustre ? J'avais ris. La ville était loin de ressembler à un dépotoir. Mais cela lui correspondait déjà un peu mieux. Une poubelle n'était pas forcément repoussante, mais elle n'avait rien de magnifique non plus. Je m'en étais donc tenu à cette appellation, fière de moi. Ici, il n'y avait pas de néon coloré, de plafond étoilé, de couleur chatoyante ou de fresque originale. On devait se contenter de couloirs de pierre éclairés à la lueur étrange de torches moyenâgeuses qui ne s'éteignaient jamais et d'arbres tordus aux allures de films d'horreur.

Entretemps, Kaden s'était joint à nous, rattrapant la distance qui nous séparait en quelques secondes. Il avait déboulé à toute vitesse, ce qui avait arrché un cri de stupeur à Jesse. Jackson avait même sursauté en voyant Kaden apparaître devant lui. J'avais souri face aux réactions de mes amis. S'y feraient-ils un jour ?

Nous avions poursuivi notre chemin, nous dirigeant vers une étrange clairière, tandis que j'avais souri d'un air triste. Le Repaire était coloré, unique en son genre et confortable. On se sentait à sa place et tout le monde paraissait toujours souriant et aimant. Même si je n'avais pas vraiment eu l'occasion de faire connaissance avec la petite cinquantaine de résidents, j'avais tout de même créé des liens forts avec plusieurs personnes. Mon œil morne était alors passé sur le dédale de couloirs qui se faufilait en contrebas, parcourant le vide. Ici, tout était froid, sombre et les habitants semblaient antipathiques. À l'image de leur chef...

Kaden avait tenté de me faire voir le positif, mais j'avais rapidement remarqué qu'ici, les gens ne souriaient pas. Ils semblaient vivre dans la peur en permanence. Lorsque nous passions à côté d'eux, ils nous lançaient des regards effrayés, accélérant l'allure. Ma Marque n'était pas passée inaperçue et cela devait sûrement justifier leur mine effarée. J'avais passé une main sur mon bras pour la cacher, mais sans succès. Mon tatouage était maintenant si développé que je ne pouvais plus le dissimuler.

En chemin, nous avions croisé mon frère qui semblait arpenter la ville, soucieux. Il jetait des regards fréquents aux gens qui l'observaient, les poings serrés et la mine sombre. Ses traits s'étaient détendus lorsqu'il nous avait aperçus et il avait décidé de nous rejoindre dans la clairière. Nous avions discuté un long moment. Puis, rapidement, chacun était parti vaquer à ses occupations. C'était donc aux côtés de mon frère, les bras dénudés, que nous étions restés assis à discuter.

Maintenant que nous étions seuls, les résidents de la ville souterraine nous dévisageaient avec méfiance. Nous étions deux Chasseurs et je supposais qu'ils avaient peur de nous. Mais leurs regards inquisiteurs me mirent mal à l'aise. Au début, je m'étais efforcée de garder fière allure. Cependant, peu à peu, je me sentis coupable. Le comportement tantôt agressif, tantôt horrifié des habitants me désarçonnait. Si j'avais eu un pull à proximité, je l'aurais immédiatement enfilé.

Assis sur un banc donnant vue sur une grande partie de la ville qui se tenait en contrebas, Jase me parlait de tout et de rien. Mais je ne l'écoutais qu'à moitié. J'étais effarée par la réaction des résidents. Mon moral en avait pris un coup, mes doutes revenant au galop. Jase parut s'en apercevoir car il se tut, me questionnant du regard. Alors, je me mis à parler, les mots s'enchaînant rapidement. Pour nous, Chasseurs, notre Marque était notre fierté. Sans elle, nous n'étions rien. C'était ce que j'étais, ce qui me définissait, et j'avais besoin d'en parler avec quelqu'un qui me comprenait.

Le temps sembla se suspendre tandis que j'exposai mes craintes et mes doutes à mon frère, des larmes dévalant mes joues. Il m'écouta sans m'interrompre, tentant de me rassurer comme il le pouvait, son regard s'étant adouci. Me confier à lui me faisait du bien. Cela faisait une éternité que nous n'avions pas eu l'occasion de nous retrouver, juste tous les deux, comme au bon vieux temps.

À l'abri des regards, dans les bras de mon frère, mes larmes séchées, je sursautai lorsque la voix de Kaden résonna dans mon esprit.

« Clay souhaite organiser une réunion très importante. Il veut que vous y assistiez. Tout de suite, précisa-t-il. »

Je grimaçai. S'il y avait bien une personne que je ne voulais ni voir, ni entendre, c'était Clay. Mais nous n'avions pas le choix. Je m'essuyai le nez en reniflant, tentant de reprendre contenance, transmettant l'information à mon frère. La réunion allait sûrement bientôt commencer, mais nous nous en fichions éperdument. Nous avions besoin de profiter de ce moment fraternel qui s'était imposé à nous. Jase se redressa et ancra ses magnifiques yeux bleus dans les miens. Il parlait, mais je ne l'écoutais pas vraiment. Voyant que je ne répondais pas à sa question, il me secoua doucement.

« Tu m'as écouté ou tu pensais encore à autre chose ? me sermonna-t-il avec un petit sourire en coin, révélant sa fossette. »

Je lui lançai un regard désespéré et il s'esclaffa, attirant l'attention de quelques passants. Certains chuchotaient et me dévisageaient étrangement. J'avais l'impression d'être une bête de foire avec ma Marque aux reflets étranges. Le nez rougi, les yeux gonflés et les cheveux emmêlés, je me pressai un peu plus contre lui.

« Je te demandais si ça allait avec Kaden, répéta-t-il sérieusement. »

Légèrement surprise par sa question, je hochai la tête. Il me dévisagea, les sourcils froncés et la mine soucieuse.

« Tu en es sûre ? Tu peux tout me dire, tu sais, insista-t-il. Si c'est à cause de lui que tu es dans cet état, je dois le savoir. »

Je me redressai subitement. Pensait-il réellement que Kaden serait capable de me faire du mal ?

« Ce n'est pas à cause de lui que je suis dans cet état, répondis-je, la mine fermée. »

Il pencha sa tête sur le côté, faisant tomber quelques mèches blondes devant ses yeux. Il pensait sûrement que j'avais prétexté me sentir mal vis-à-vis de mon statut de Chasseuse pour éviter de parler de ce qui me blessait vraiment. Mais, en réalité, je me sentais mal et je ne savais pas pourquoi. Cela devait certainement être dû à un trop-plein d'informations et d'émotions. Il m'était difficile de mettre des mots sur mon ressenti.

« Le Repaire me manque, avouai-je, changeant un peu de sujet. »

Il se redressa aussi et regarda dans le vide, l'air triste.

« J'avais l'impression pendant ces quelques semaines d'enfin vivre. Nous n'étions plus bloqués dans le passé, manipulés par la BPP. Je n'éprouvais plus de rage, ni de haine, ni de tristesse à cause de la disparition de papa et maman. Je me sentais vraiment bien pour la première fois de ma vie, dis-je en soupirant. »

Mon frère serra les poings et sa mâchoire se contracta. Je fus surprise par son changement d'humeur.

« Ta vie d'avant ne te satisfaisait pas ? me demanda-t-il sèchement. »

J'écarquillai les yeux, surprise par sa véhémence. Comment pouvait-il penser ça ? Avant que je n'ouvre la bouche, Jase se leva et s'adossa à l'arbre aux formes étranges non loin de nous. Il avait mal interprété mon ressenti. Il devait sûrement penser que je n'aimais pas la vie que je menais avant avec lui. Mais c'était faux. J'avais juste quelque chose en plus maintenant. Tout semblait plus... intense ? Significatif ? Je n'arrivais pas à trouver le mot exact.

Mon frère détourna le regard. Sa tristesse et son indignation me toucha en plein cœur. Je lissai mon pantalon et enroulai mes bras autour de ma taille pour trouver un peu de chaleur.

« Ce n'est pas ça que je voulais dire, et tu le sais très bien, répliquai-je d'une voix douce en me levant à mon tour. Ce que je veux dire, c'est que c'est la première fois depuis des années que je ne pense pas à papa et maman et au fait qu'ils ne sont plus là. Évidemment, les événements de ces dernières semaines m'ont bouleversée. Et, bien sûr, mon ancienne vie et mon train-train quotidien me manquent cruellement. Mais... Depuis que j'ai rencontré Kaden et que j'ai... changé, me hasardai-je, tout est plus...

— Intense ? m'interrogea Jase en haussant les sourcils, semblant comprendre ce que je ressentais. »

Je hochai légèrement la tête et mon frère se gratta le menton où une légère barbe avait poussé. Ses bras croisés sur son torse firent gonfler ses muscles et ressortir sa Marque. Il regarda quelques instants dans le vide avant de reprendre :

« Je comprends ce que tu veux dire, finit-il par déclarer. Tu avais un objectif. On avait tous deux un objectif. Nous voulions nous venger de la mort de nos parents. Et maintenant que tout a changé, que tu as changé, insista-t-il en me regardant, tout est différent. Je suppose que tu dois te sentir aussi perdue que moi. Que devons-nous faire maintenant que nous connaissons la vérité ? »

J'acquiesçai, surprise qu'il me comprenne si bien.

« C'est vrai, je suis complètement perdue. Et ce, depuis des semaines. Je ne pensais pas que tu ressentais la même chose que moi. J'avais l'impression d'être la seule... »

Il sourit.

« On vit tous les choses différemment, Lili. Tu as eu besoin de temps et d'espace pour réfléchir. J'ai eu besoin de me noyer dans le travail. C'était la seule chose qui m'apportait de la stabilité, qui me rappelait notre vie d'avant. »

Il se retourna, les traits tirés et le regard sombre.

« Honnêtement, je ne sais même pas ce que je ressens. Je ne sais même pas si ce que nous faisons est juste, avoua-t-il. Ces extraterrestres ont tué nos parents... Je ne sais pas comment me comporter. Et toi qui sembles si épanouie maintenant, comme si tu l'avais oublié... »

Il soupira, cherchant ses mots, et ses paroles me brisèrent le cœur.

« Je n'ai rien oublié, Jase. Mais je ne vis pas uniquement pour venger nos parents, déclarai-je doucement. Oui, ils sont morts. Et cela m'attriste à chaque fois que j'y pense. Ils me manquent. Tous les jours. Ceux qui ont fait ça méritent de mourir, je suis entièrement d'accord avec toi. Mais les extraterrestres que tu vois ici ne sont pas responsables. Ils ne sont pas tous responsables de la mort de nos parents. Comme tu n'es pas responsable de leur sort. »

Sa mâchoire se crispa. Je vis dans ses yeux le mal-être qui l'habitait. Et je m'en voulais. J'avais passé tant de temps avec Kaden que je n'avais pas remarqué que mon frère ne gérait pas mieux la situation. Si je doutais autant et que je me sentais si coupable d'être Chasseuse, il n'y avait aucune raison qu'il ne ressente pas la même chose. Comment avais-je pu croire une seule seconde que Jase allait bien ? Et lui qui avait tout fait pour réussir, pour être le meilleur dans sa catégorie, dans le seul et unique but de venger mes parents... Il devait être déchiré. Déchiré entre la loyauté qu'il ressentait vis-à-vis de mes parents et les véritables intentions de la BPP.

Je baissai les yeux et observai mes chaussures. Je ne savais pas quoi dire pour le rassurer, pour lui faire comprendre que ce que nous faisions était juste. Cette situation nous dépassait car elle ne nous concernait pas uniquement. L'avenir entier de l'Univers était en jeu. Nos parents n'étaient qu'une pièce de l'énorme puzzle catastrophique que nous tentions de résoudre.

Jase passa une main tremblante sur son visage. Je ne l'avais jamais vu ainsi, si fragile. Il était mon grand frère, celui qui me protégeait contre tout. Celui qui m'avait rassurée quand j'étais au plus bas et qui m'avait tout appris. Je ne pouvais pas imaginer qu'il puisse être, lui aussi, aussi fragile.

« Parfois, je me dis qu'ils ne devraient pas être là, murmura-t-il en regardant quelques passants. Certains sont innocents. Mais d'autres sont ici parce qu'ils voulaient venir sur Terre et nous détruire. Qui sait à quoi ressemblerait la Terre maintenant si la BPP n'avait pas été là... Parfois, il m'arrive de penser que ces aliens ont eu ce qu'ils méritaient, avoua-t-il à demi-mot, les dents serrées. »

Je le regardai, choquée. Si seulement j'avais les mots justes pour l'apaiser...

« Mais, parfois, je me dis aussi que ces gens sont tout simplement innocents. Ils sont tout aussi malheureux que nous. Eux aussi, ont perdu leur famille. Et je suis complètement paumé, avoua-t-il. Je suis perdu entre ce que mon instinct de Chasseur me dit de faire et ce que mon cœur me pousse à faire. Je suis perdu, Lili, répéta-t-il en fermant les yeux. »

Mes yeux brillèrent de larmes. Au fond, Jase et moi étions pareil. Le même conflit intérieur nous habitait. Bon sang, je m'en voulais de l'avoir délaissé. Je m'approchai de lui, contenant mes larmes. Son langage corporel agressif contrastait nettement avec la douleur et la tristesse qui dansaient dans ses yeux. C'était pour ça qu'il jouait les gros bras. C'était sa manière à lui de se détacher des choses. Mais, en réalité, il était tout aussi chamboulé que moi. Il doutait encore de ce que nous faisions et je le comprenais mieux que quiconque. Nous avions appris tant de choses sur la BPP et les extraterrestres. Il était parfois compliqué de discerner le vrai du faux.

Je m'approchai jusqu'à me trouver à quelques centimètres de lui et posai ma tête sur son épaule en l'étreignant, comme il l'avait fait pour moi auparavant. Mon frère, si fort, si sûr de lui, était en réalité tout aussi brisé que moi.

Il se tendit à mon contact, puis se laissa finalement aller, m'entourant de ses bras musclés. Nous restâmes ainsi un long moment et je l'observai. Le masque d'animosité qui cachait son mal-être avait disparu. Son regard glacial s'était adouci et ses traits s'étaient détendus. Il me l'avait dit : nous réagissions tous différemment aux situations. J'avais plutôt tendance à douter et à m'isoler. Lui répondait par la colère. Il en avait le droit et je l'acceptais. Tout comme j'étais là pour le rassurer lorsqu'il finissait par se briser. Je m'accrochai à lui pendant des minutes, des heures, cherchant les mots justes pour l'apaiser.

« Je te comprends, Jase. Je comprends ta rage, je comprends ta tristesse, je comprends ton désespoir. Mais ce que nous avons fait par le passé ne nous définit pas dans le présent. Que nous soyons Chasseurs, humains ou extraterrestres. Tout le monde ici veut que ça s'arrête. Nous voulons de la justice et de l'équité. »

Il se dégagea de mon étreinte et m'observa longuement.

« Sans eux, dis-je en désignant quelques rares passants du doigt, nous n'aurions jamais découvert la vérité. Nous aurions continué à suivre les ordres de la BPP, à tuer des innocents. Nous avons eu la chance de découvrir la vérité. Il faut que nous agissions en conséquence, même si c'est difficile à accepter. Même si, parfois, tu aimerais retrouver ta vie d'avant. Même si, parfois, tu aurais souhaité ne jamais apprendre la vérité. Mais, sans ça, notre vie aurait été moins...

— Intense, devina-t-il, le regard pétillant.

— Oui, moins intense, dis-je en souriant. Tu n'as pas l'impression d'avoir enfin trouvé un sens à ta vie ? »

Jase baissa la tête, ses yeux cachés par sa tignasse blonde. Je retins mon souffle lorsqu'il ouvrit la bouche :

« Si, Lili, soupira-t-il. Depuis quelques semaines, je me sens enfin vivant. Je me sens enfin utile et serein, moins aveuglé par la violence. Mais je ne suis pas comme toi... Je n'arrive pas à tout oublier. Je n'arrive pas à m'accrocher à toutes ces personnes que l'on connait depuis quoi ? Deux semaines ? Quatre tout au plus ? dit-il en insistant bien sur la courte durée. Je leur suis reconnaissant de nous avoir hébergés et protégés. Sans eux, nous serions morts à l'heure qu'il est, dit-il d'une voix tremblante. Mais j'ai parfois l'impression que tu sembles oublier que, tes amis et moi, nous sommes là. Depuis le début, insista-t-il. Et que, nous aussi, nous avons besoin de toi. »

Je fus incapable de répondre quoi que ce soit tant ses aveux m'ébranlèrent. Je n'avais pas imaginé qu'il puisse ressentir cela, qu'il puisse penser que je les avais délaissés. Mais il avait raison. Même si j'avais de temps en temps papoté avec mon frère et mes amis, je les avais mis de côté. Je me maudis mentalement. Pas une seule fois, j'avais demandé à mon frère comment il se sentait.

« Comme tu l'as dit, nous avons tous eu des difficultés à accepter les choses. Tu as réagi d'une certaine manière et je ne t'en veux pas. Mais que tu m'éloignes de toi, ça m'a blessé, me confia-t-il d'un souffle. »

Mon cœur se brisa un peu plus.

« Oh, Jase... Je suis tellement désolée, murmurai-je en m'approchant de lui. J'aurais dû m'en rendre compte ! »

Il leva la main, signifiant que cela ne faisait rien.

« Ce n'est pas grave, Lili. Je ne t'en veux pas, répéta-t-il. Je comprends. Mais quand tu t'es confiée à moi, j'ai eu besoin de te dire ce que je ressentais aussi. »

Je hochai la tête, le remerciant silencieusement. Cette conversation m'avait fait du bien.

« Mais bon, ce n'est pas ce que je souhaitais te dire à la base. Allez, viens, dit-il en me tendant la main, nous n'avons plus de temps à perdre. »

Je fronçai les sourcils.

« Si tu parles de la réunion qu'a organisée Clay, on peut se permettre d'arriver en retard. Tu es bien plus important. Le reste peut attendre.

— Non, je ne parle pas de ça, rétorqua-t-il en souriant. Ça ne peut plus attendre, Lili. Nous devons passer à l'action. Nous n'avons plus le temps de débattre sur ce que nous aurions dû faire ou non, sur ce que nous ressentons. Nous devons mettre un terme à cette situation.

— Jase, je ne te suis plus... Il y a quelques instants, tu te confiais à moi. Et, maintenant, tu veux agir ? demandai-je, perplexe. Nous ne sommes pas à quelques minutes près. Tu es important pour moi, Jase. Bien plus que tout ça, dis-je en englobant l'espace autour de moi. »

Il sourit tendrement et me pris dans ses bras.

« Tu ne comprends rien, crevette. Ce que j'essaie de te dire, c'est que je suis un Chasseur et je le resterai. Même si je m'entends bien avec les autres... personnes, dit-il en hésitant sur le terme à utiliser, ça ne me rassure pas d'être coincé avec eux. Plus vite la BPP sera démantelée, plus vite tout reviendra à la normale. Je ne demande que ça, Lili. Je veux que nous retournions chez nous, que nous chassions les méchants extraterrestres en buvant un café avec les gentils. J'en ai marre de cette vie de fugitif. Ce n'est bon ni pour toi, ni pour moi. Ce n'est bon pour personne, ajouta-t-il tristement. »

Je le considérai longuement. Il avait raison. Ses paroles faisaient écho à mon ressenti et à ce plan que j'échafaudais discrètement dans ma tête depuis longtemps. La situation que nous étions en train de vivre était oppressante, presque insoutenable. Mes instincts de Chasseuse étaient toujours présents et je vivais constamment sur mes gardes. Je vivais chaque jour dans la peur et l'anxiété, craignant que quelque chose de grave ne se produise. Certes, j'aimais Kaden. Plus que tout. J'aurais souhaité trouver la solution miracle qui aurait permis de démanteler la BPP et de sauver tout le monde. Mais cette solution n'existait pas. Il fallait minimiser les risques. Il était temps de reprendre les choses en main et de cesser de fuir.

Je haussai les sourcils et lui demandai, les bras croisés sur ma poitrine en une pause que je voulais désinvolte, mais qui le fit sourire :

« Alors, que proposes-tu ? »

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Le chapitre est un peu plus long que d'habitude, mais je ne pouvais pas le couper autrement :-)

J'espère que ce revirement de situation - Jase et Lili se la jouant solo - vous plaît.

***

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LosUnivers

Publié le 23 mai 2018 / Modifié le 08 septembre 2022

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