J'entrouvris doucement les yeux. Je ne me souvins pas tout de suite de ce qu'il s'était passé, mes souvenirs étaient encore flous. La première chose que j'aperçus était une table et une chaise. J'étais allongé sur la moquette rouge du sol de la cafétéria. Je ne cherchais même pas à me relever, et me contentais de regarder devant moi.

Après quelques secondes d'attente, mains plaquées sur le sol, je pris appui puis me levai. Futé comme j'étais, ma tête heurta la table quand je me relevai.

- Aïe ! m'exclamai-je en frottant l'arrière de mon crâne.

Ma tête tourna. Je m'étais levé un peu trop vite. Je posai une main sur la table et essayai de tenir en équilibre. Quand je fus stabilisé, je regardai autour de moi. Chloé était encore allongée à l'endroit où nous l'avions laissé, mais Laurine et Lucas avait disparu.

Je m'avançai jusqu'à Chloé avant d'essayer de la réveiller. Elle ne réagit pas.

Je levai la tête et aperçus le barman encore inconscient à côté du comptoir. Je soupirai. Mon regard se posa de nouveau sur Chloé qui ouvrit ENFIN les yeux.

- Qu'est ce qu'il s'est passé..? bredouilla-t-elle avant de bâiller.

- On s'est évanoui, annonçai-je.

- Qui ça ?

- Nous tous, répondis-je.

Elle regarda autour de nous avant de rajouter :

- Où sont Lucas et Laurine ?

- Je ne sais pas, je viens de me réveiller, répondis-je.

Elle se leva, s'appuyant à la table afin de ne pas retomber. Nous nous sentions assez faible. Je me retournai et regardai en haut des escaliers qui donnaient aux chambres de l'internat.

- Ils sont peut-être repartis dans les chambres, supposai-je.

- Ils nous auraient réveillés, non ?

Sur ce point là, elle avait raison. Pourquoi n'étaient-ils plus ici ? Je ne pense pas que Lucas m'aurait laissé ici, seul et inconscient. Il y avait sûrement une solution logique à cette histoire.

- Au pire, on va les chercher : moi à la bibliothèque et toi dans les chambres ? proposa-t-elle.

- Mh.

Cette idée ne me plaisait pas beaucoup. Je savais que ça pouvait être "dangereux" de se promener seul dans les couloirs de l'internat dans la situation dans laquelle nous étions. (trop de dans, j'avoue)

- On se rejoint ici dans 15 minutes alors, finis-je. (encore un dans, tiens...)

- D'accord.

Elle partit en direction de la bibliothèque et moi en direction des chambres. Je montais les marches une par une. 23. Il y avait 23 marches. Je les comptais à chaque fois que je les montais ou les descendais, je n'arrivais pas à m'en empêcher.

Une fois en haut, je me dirigeai vers ma chambre, pensant que Lucas pourrait y être. J'ouvris la porte et entrai. Hector dormait au sol. Je m'approchai de lui et m'agenouillai à ses côtés.

- Hector, réveille-toi, chuchotai-je en le secouant légèrement.

Il entrouvrit les yeux et se leva doucement. Il me regarda d'un air perdu et interrogateur, attendant une explication au fait qu'il était allongé au sol.

- Tu t'es évanoui, je crois, dis-je.

Il se frotta la tête et regarda son ballon de basket. Il le prit et commença à le tâter.

- Il est dégonflé, dit-il.

- Et ?

- Bah, il ne rebondit plus, ajouta-t-il.

Je ne voyais pas où il voulait en venir. Il avait l'air de n'être préoccupé que par son ballon.

- Ouai'p. Bon, Lucas et Laurine ont disparu. On était à la cafétéria et on s'est tous endormis, puis quand Chloé et moi nous sommes réveillés, ils n'étaient plus là.

- Et ? répondit-il insensiblement.

Je le dévisageai. Il disait ça sur un ton indifférent, ça ne lui faisait ni chaud ni froid. Il ne me regarda même pas. Il se contenta de scruter chaque recoin de son ballon de basket, qui commençait à moi aussi me troubler.

- Fais-moi voir ton ballon, demandai-je.

Il me regarda et me lança un regard noir.

- Il est à moi, tu ne le touches pas, répondit-il sèchement.

- Mais c'est bon, je vais te le rendre, de toute façon il est dégonflé, répondis-je, tendant mes mains vers le ballon.

- TU L'PRENDS PAS ! hurla-t-il.

Il me terrifia. Il était très agressif et son regard perça le mien. Il avait l'air de ne plus être lui-même. Je pensai directement à un "sort" d'Armelle. Je ne compris pas le comportement d'Hector, et ne cherchai pas à comprendre, j'avais deux disparus à retrouver.

- Garde-le ton ballon, soupirai-je. Moi j'bouge retrouver Lucas et Laurine, finis-je.

Je sortis de la chambre, le laissant à l'intérieur complètement excité. Je refermai la porte derrière et fis bousculé par deux adolescents qui se poursuivaient. Je fus plaqué violemment contre le mur, ce qui me fit mal à l'épaule.

Je fixais les deux adolescents tourner au coin du couloir en direction de la cafétéria. Ils avaient l'air de se chamailler comme deux enfants.

Je réfléchis et essayai de me mettre à la place de Lucas. "Où serait-il allé ?" me demandai-je incessamment dans ma tête. Le connaissant, je ne pensai vraiment pas qu'il serait allé dans une chambre. Il ne connaissait que très peu de monde. Alors que j'essayai de trouver un endroit auquel il aurait pu aller, je fus extirpé de mes pensées par Chloé qui cria mon nom tout en courant en ma direction.

- MATHEO !! VIENS VOIR !! s'écria-t-elle, paniquée.

Des élèves ouvrirent leurs portes de chambres, interloqués par les exclamations de Chloé. Je ne fis pas attention à eux puis suivis Chloé qui repartit en courant. Nous descendîmes une seconde fois les 23 marches de l'escalier puis allâmes à la bibliothèque.

- Qu'est-ce qu'il se passe ? m'écriai-je, entre deux inspirations.

- Ils sont là !

Elle pointa du doigt le fond de la bibliothèque.

- Où ça ? questionnai-je, n'apercevant pas où elle pointait exactement son doigt.

- Le grand miroir au mur ! cria-t-elle.

J'écarquillai les yeux, surpris. Elle s'approcha du miroir et commença à ne plus le quitter des yeux. Je posai également mon regard sur ce fameux miroir doré. Il avait des motifs semblables à ceux de l'ancien temps et avait une fine couche de poussière sur le dessus. Dans le miroir, j'aperçus la symétrie de la bibliothèque, mais un détail ne m'échappa pas.. Je ne me voyais pas à l'intérieur.

- Je t'assure que je les avais vu à l'intérieur ! s'écria-t-elle, tentant de se persuader elle-même.

Je la crus instantanément. Avec tout ce qui était déjà arrivé, j'étais prêt à tout croire.

- Aaah ! sursautai-je.

J'aperçus à l'intérieur du miroir quelqu'un marchant dans les rayons. Je me retournai et n'aperçus personne. Je reposai mon regard sur le miroir. Lucas et Laurine étaient dans la bibliothèque, juste à l'endroit où je me trouvai, mais ils n'étaient pas là. Ils me regardèrent à travers le miroir avant de s'approcher de celui-ci.

C'était comme si.. nous étions dans deux mondes identiques.. en parallèle.. Deux mondes séparés..