Idill se frotta mollement ses yeux. Il avait passé une mauvaise nuit par terre. Galant, il avait laissé la tente aux femmes du groupe, et avait fini par dormir près de Bhohort sur une paillasse tressée à la va vite.

Le feu s'était éteint tardivement, laissant le loisir au guerrier d'observer le worgen faire sa garde, sans que celui ci ne découvre qu'il veillait au lieu de se reposer. Il remarqua ainsi la grande complicité qu'il avait avec sa goule. Celle ci apparaissait de temps en temps, regardait le ciel, et grognait des mots que seul Bhohort semblait comprendre.

- Et bien ma belle, qu'est que tu as? avait il demandé à son serviteur de la mort.

Celle ci lui avait répondu par des plaints successifs que le chevalier écoutait attentivement.

- Je sais.... Mais ne t'inquiète pas, je veille .

Bhohort révéla ainsi un visage qu'Idill ne lui connaissait pas. Était ce de la compassion? Il ne le savait pas, mais les gestes de tendresse qu'il avait en vers sa goule rassura le guerrier. Il fallait qu'il lui fasse plus confiance.

Sur cette note positive, Idill ferma les yeux et tomba dans un profond sommeil. Alors quand Doucenuit vint le réveiller, il n'avait pas eu l'impression d'avoir beaucoup dormi.

- Comment allons nous faire pour avancer? Idill n'a plus de monture, demanda Seline qui rangeait à proximité du guerrier encore engourdit de sa mauvaise nuit.

- J'ai un moyen !

Le worgen étira ses babines pour découvrir ses crocs dans un semblant de sourire.

- Je n'apprécie guère votre sourire malsain monsieur Bhohort... répondit Idill

- Et quel est votre moyen? demanda Doucenuit qui était en train de charger la tente démontée sur son tigre dent de sabre.

- Il suffit que je trouve de quoi... pour nous deux... Ronronna le worgen.

Idill fit une mine de dégout, comprenant les dires de Bhohort.

- Ne fais pas cette tête là, tu sais comment je procède c'est tout,

- Justement... répliqua Idill

- Je reviens! informa le lupin avant de disparaitre.

Seline se rapprocha d'Idill, le temps que son frère était parti à la recherche d'une monture apte à les transporter.

- Vous... n'avez pas émis le besoin de vous faire soigner... Es ce que vous allez bien?

- Vous vous inquiétez pour moi, mademoiselle Seline?

La druidesse hocha la tête.

- N'ayez crainte, c'est une vieille blessure que Bhohort a vu. Vous ne pouvez rien n'y faire, malheureusement.

La jeune femme marqua un temps d'arrêt, avant d'avancer sa main sur le bras d'Idill, et dit :

- Si il y a quoique se soit que je puisse faire, vraiment, faites appel à moi.

- M,merci... J'y penserai...

Ils restèrent quelques secondes ainsi, quand le bruit d'un galop venant vers eux les interrompit.

- Et voilà !!! S'exclama Bhohort fier de sa trouvaille.

- Qu'est que c'est??? demanda Idill

- Je ne sais pas, je l'ai relevé non loin d'ici... On dirait un énorme bélier, comme ceux que montent les nains, répondit Bhohort

- Qu'importe, si tout le monde est prêt, nous devons partir! enjoint Doucenuit.

Alors que l'elfe monta sur son tigre, et que Seline se changea en Cerf. Idill se pointa devant Sa nouvelle monture.

- Tu montes?? Ironisa Bhohort

- Vous voulez dire que nous allons être tous les deux dessus?

- Bien sur, tu as cru que j'allais marcher à coté? pfff... C'est surfait, faisons la route ensemble, entendons nous bien! plaisanta Bhohort.

Il se pencha pour donner la  patte à son futur compagnon de voyage. Idill hésita, puis finit par la saisir et monta en avant du grand roux. Les deux bras musculeux du worgen entourèrent le corps d'Idill, et le corps de ce dernier effleura celui du lupin, lui donnant au passage quelques sueurs froides. Bhohort attrapa les rênes de l'animal et donna une légère pression sur le flan de la bête, la mettant au pas pour rejoindre les deux femmes déjà prête à partir.

- Bhohort, Invoquez votre goule qu'elle puisse partir en éclaireur, demanda Doucenuit

- Elle est déjà à l'avant, je ne vous aie pas attendu pour le faire, répliqua le chevalier.

L'elfe hocha la tête d'entendement et avança la première, suivi de très prés par Seline. Bhohort les laissa prendre un peu de distance avant de faire marcher leur monture.

La bête se montra docile et se laissa facilement guider. Idill pour essayer de penser à autre chose qu'à ce corps collé au sien, observa la monture sur toute ses coutures. Il n'en avait jamais vu aucune de ce genre jusqu'à maintenant. L'animal portait de grandes cornes pointant à l'avant et il subsistait quelques ornements issus de son ancienne vie, dont une petite clochette attaché au niveau de son cou.

- Elle t'intrigue? demanda Bhohort

- Je me demande qu'est que cela pourrait être comme bête.

- Nous en saurons peut être plus  en rencontrant le chroniqueur Cho.

- Vous avez sans doute raison.

Idill se tue immédiatement. Il avait réussi à se décoller du worgen l'espace d'un court instant, mais celui ci s'était encore rapproché de lui, ne laissant plus aucun espace entre eux.

Il remarqua aussi que l'animal sur lequel ils étaient montés, était beaucoup plus lente que le reste du groupe. Les femmes avait maintenant bien plusieurs pieds d'avance. Les laissant seuls à l'arrière.

- Je te sens... tendu

Idill se braqua aux mots de Bhohort. Il essaya de sourire, en vain. Il était beaucoup trop angoissé à l'idée que le worgen ne profite de cette situation. Et il avait vu juste quand son compagnon de voyage lui tâta le torse. Sa respiration s'accéléra à la caresse du plus âgé. Les murmures du worgen se mélangèrent au bruit de son cœur battant à tout rompre dans ses oreilles.

- Idill ? Idill... gronda Bhohort

Le jeune homme sursauta à l'appel du worgen. Il déglutit bruyamment.

- Je ne vais point de manger, si c'est cela que tu as peur,

- Alors cessez de balader votre grosse patte de pervers, lâcha Idill

- Je veux savoir,

Idill leva les yeux vers la gueule du lupin.

- Quoi? demanda t'il ne comprenant pas la question posée.

- Je veux savoir pour ta grande balafre, tu n'en as pas parlé, que s'est t'il passé?

Le guerrier regarda la patte effectué de long va et vient à l'endroit même où la cicatrice se trouvait être.

Idill ferma les yeux. Il voulait s'échapper de ce piège mortel pour son esprit. Même si sa plaque d'armure séparait son corps de la patte de Bhohort, il avait l'impression de la sentir à même la peau. Creusant d'une griffe, le sillon déjà profond de cette entaille.

- Idill...minauda Bhohort

Son museau se posa sur son épaule, reniflant d'une tristesse surjouée.

- Cessez de faire le chien, répondit Idill agacé par le comportement de son compagnon de voyage.

- Ouaf! répliqua Bhohort, amusé par la tournure des évènements.

Idill se retourna les yeux écarquillés par la réaction du worgen. Puis il ne peut retenir un éclat de rire franc. Il rit et rit encore par la situation si saugrenue . Un worgen qui se prenait pour un chien, alors il aurait tout vu sur cette terre et pourrait mourir en paix. 

- Tu es si adorable quand tu rigoles, 

La phrase de Bhohort fait l'effet d'une bombe dans tout le corps du guerrier. Il s'arrêta net et son cœur recommença à lui faire mal. Il était tiraillé par toutes sortes de sentiments. Colère, peur, angoisse, amour?

- Je...

Il n'arrivait même plus à s'exprimer. Le bercement de leur monture avançant doucement lui donnait presque la nausée, ou était ce ce flot incessant d'émotions débordantes. Ses lèvres s'ouvrirent encore une fois , mais rien ne sortit.

- C'est si difficile que cela ? demanda Bhohort

Idill ferma les yeux, des images violentes revinrent en tête. Des souvenirs qu'il avait enfouit au plus profond de son être. Des images qu'il aurait souhaiter jamais revoir. Pourtant sa langue de délia subitement, et il raconta le terrible poids qu'il portait en lui depuis si longtemps.