Chapitre 10 Le pavillon des rêveurs
Alors que les filles s'occupèrent activement du dîner avec Cho, Idill entreprit de nourrir les oiseaux dans le parc du pavillon.
Les hérons, nom du fameux oiseau qui avait essayé de protéger les lieux contre les envahisseurs, se précipitèrent sur la mangeoire qui était vide de graine. Il sourit de les voir si heureux de pouvoir enfin manger. Alors qu'il finissait de délivrer le dernier sac de graines, Il remarqua une ombre au fond du jardin qui s'activait sur un des murs de l'enceinte.
Il s'approcha prudemment, tout en attrapant le manche de sa hache, mais relâcha la pression quand il vit que ce n'était que Bhohort et sa goule. Cette dernière ronronnait de plaisir autour de lui. Le chevalier se tenait debout avec un pinceau dans une main et une palette dans l'autre. Il donnait des petits gestes précis sur le mur crépit, et plongeait régulièrement le pinceau dans une autre couleur. Absorbé par ce qu'il faisait, il n'entendit pas Idill se mettre derrière lui.
Le guerrier resta pantois devant la peinture qu'exécutait le chevalier.
- C'est...Moi? Murmura t'il encore subjugué
Bhohort se retourna brusquement. Il inspira fortement quand il découvrit Idill.
- Ouais...
Puis il retourna vers son œuvre inachevé mais reconnaissable. Il peint le roux de ses cheveux dépassant d'un casque qu'Idill reconnut immédiatement. C'était celui qu'il avait à leur première rencontre, quand il était Lieutenant de l'Alliance pendant la campagne de guerre du Norfendre.
Bhohort l'avait peint en position d'attaque, ses deux lames entrecroisés et ce sourire qu'il affichait malgré le peu de visibilité du heaume.
Idill se plaça à coté de Bhohort, qui ne le repoussa pas.
- Vous aviez remarqué que je souriais sous ce casque?
- Hum... juste avant que tu m'attaques. J'avais cru que tu tremblais de peur quand je t'ai provoqué en duel. Mais quand j'ai vu ton sourire, alors j'ai compris, bien trop tard, que j'allais perdre ce combat.
Le pinceau suivait la courbe de son torse, qu'il le souligna d'un ombrage gris foncé pour le faire ressortir. Puis il s'arrêta, reculant de quelques pas. Il fronça les sourcils et revint retoucher quelques chose au niveau de ses yeux.
- Comment?
- Je te l'ai dit, j'ai vu ton regard et ton sourire,
- Non, ce n'est pas cela, je ne savais pas que vous étiez doué dans le dessin. C'est un talent que vous nous aviez caché, monsieur Bhohort, c'est extraordinaire ce que vous faites! Vous êtes un véritable artiste! Vous avez encore en mémoire l'expression de mon visage qui date maintenant. Je suis...
Muet par l'émotion qui lui monter à la gorge, il posa une main sur le bras du chevalier, heureux de voir que ce dernier n'avait rien oublié de cette rencontre. Il sentit les picotements du froid mordant que Bhohort émettait naturellement, mais résista pour ne pas enlever sa main. Il voulait transmettre par son geste, sa reconnaissance.
- Quand j'étais encore un homme, un jeune homme, j'ai étudié à l'académie des arts de Gilnéas la peinture, le dessin et la sculpture. Je n'étais pas doué pour ce dernier, cependant j'aimais beaucoup la peinture. Mais,
Bhohort s'arrêta quelques secondes, le visage déformé par le regret,
- Mais, mon père m'a forcé à arrêter alors que mes maitres pensaient que je deviendrais un grand portraitiste. Les armes ont remplacé les pinceaux, et je suis devenu un soldat sous les drapeaux de Gilnéas. Mon père aura réussi à pourrir ma vie toute entière, cracha t'il
- Je... suis désolé, j'aimerai vous apporter plus de soutien, monsieur Bhohort, mais cela me dépasse complètement, répondit Idill
Le chevalier, tenant toujours dans sa main le pinceau pleine de peinture, vint le poser délicatement sur le nez du guerrier.
- Mais qu'est que !!!
Idill s'échappa du pinceau, et entrevit le sourire malsain l'espace d'un instant sur le visage de Bhohort. Il plongea son pinceau dans une couleur lambda avant de le braquer de nouveau sur le visage du jeune roux, qui s'écria :
- Vous êtes fourbe! Je ne puis combattre à arme égale!
Bhohort s'arrêta, se pencha pour attraper un autre pinceau par terre et le lança dans la direction d'Idill qui le réceptionna de justesse.
- Tu es armé, prêt pour un nouveau duel avec moi!
- Je n'ai pas de munition
- Ça, cela m'importe peu! En garde!
Idill, du coin de l'œil, aperçut un pot posé prés de la peinture. Il se jeta dessus, tout en effectuant une roulade, attrapa l'arceau du pot, et l'embarqua avec lui. Il plongea son pinceau dedans, et se mit en garde face à son adversaire, qui souriait à pleines dents.
- Comme j'aurai pu le prédire, tu ne manques pas de vivacité, mais sauras tu me contrer Idill Gantenor ? demanda Bhohort qui ne cachait plus sa satisfaction.
- Je vous attends monsieur!
Ils s'engagèrent dans un simulacre de combat, se contrant pinceau contre pinceau, dont les gouttelettes de peinture se projetèrent sur les armures des deux combattants.
Et Idill riait. Enfin il retrouvait celui dont il avait fait la connaissance quelques années plutôt.
Il esquiva autant qu'il put les attaques de Bhohort, tout en essayant de faire des touches. Ils furent vite barbouillés de peinture, riant de plus belle, l'un comme l'autre. La goule sautait joyeusement autour d'eux, évitant soigneusement les taches qui pouvaient tomber sur elle.
Une voix féminine s'éleva au milieu des rires des deux hommes.
- Ho! Mais qu'est que vous faites tous les deux!
Doucenuit qui s'était changé entre temps, descendit les marches du pavillon principale. Elle portait une longue robe attaché par un énorme noueux, et Seline qui la suivait derrière elle, arborait la même robe mais dans une teinture différente. Les deux femmes se statufièrent quand elles virent dans quel état étaient les deux comparses.
- Vous êtes... tout barbouillés ! s'exclama Seline
Idill marqua un temps d'arrêt en voyant Doucenuit froncer ses deux grands sourcils, puis sans prendre gare, il se pris un grand coup de pinceau en pleine figure.
- Monsieur! Je n'étais plus de la partie! Vous avez triché !
- Et toi tu te détournes quand tu vois de jolies femmes !
Bhohort avait raison, il était rare que Doucenuit soit en robe, alors son esprit avait décroché quelques secondes pour se concentrer sur son amie elfique.
- Et d'ailleurs où avez vous eu ces habits? demanda le chevalier
- Le maitre de ses lieux nous a proposé de nous rafraichir et nous a apporté des vêtements que portent certains pandarens traditionnellement. Je crois qu'ils appellent cela des Yukatas.
Seline descendit les dernières marches et vint jusqu'à Idill.
- Le diner est servi, dit elle avec de grands yeux, scrutant la moindre réaction du jeune homme.
Elle porta un éventail jusqu'à son visage et le secoua de haut en bas, essayant de rafraichir en même temps le décolleté qu'elle avait légèrement entrouvert.
Idill put deviner aisément la courbe débutante de sa poitrine généreuse. Il tourna aussitôt sa tête ailleurs, et son visage rougissant. Il tomba sur le regard furieux de Bhohort, qui avait assurément compris le petit manège de sa sœur.
- Il est hors de question que vous veniez à table dans votre état! déclara Doucenuit , fâchée de les voir ainsi.
- Hahaha,
Le rire gargantuesque du pandaren les firent tous sursauter. Il descendit à son tour et vint voir sans rien dire, l'œuvre de Bhohort.
- Vous avez fait du bon travail, Chevalier. Je reconnais aisément votre partenaire, Idill , c'est bien cela? demanda Cho
Seline laissa sur place des deux hommes pour aller admirer la peinture. Elle plissa les yeux, avant de claquer ses deux mains entre elles.
- Alors là, je reconnais bien la patte de mon frère! dit elle en se retournant vers l'artiste.
Doucenuit s'avança elle aussi. Elle l'observa le visage dessiné, puis acquiesça à son tour.
- Oui, je peux tout à fait reconnaitre le sourire espiègle et les yeux rieurs d'Idill, chapeau, Chevalier Bhohort. J'étais loin de me douter que vous auriez une telle sensibilité pour l'art. Mais cela n'excuse pas votre comportement à tous les deux... Regardez vous!
Idill se frotta la tête d'embarras. Il était rare qu'il s'emporte ainsi au jeu. Il jeta un coup d'œil sur Bhohort qui semblait nullement affecté par les piques de l'elfe.
- Ha, ce n'est pas bien grave, ils vont aller profiter à leur tour de la petite source d'eau chaude, derrière la maison comme vous l'avez fait mesdames. Le diner attendra qu'ils se soient nettoyés.
- Une source chaude? lâcha Idill
- Une source chaude... grogna Bhohort
- Venez ! Je vais vous montrer...
Cho les invita à faire le tour du pavillon, et ils découvrirent alors toute une installation en pleine air. Une petite cascade coulait tranquillement pour atterrir dans un énorme bassin pouvant contenir facilement trois pandarens, suivit par d'autres petits bassins qui n'étaient sûrement pas là par hasard.
- Je vous laisse vous déshabiller et prendre votre bain, messieurs! le déclara Cho, avant de s'éclipser et de laisser seul Bhohort et Idill face à la source d'eau chaude.
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