
Scène VI
(il se passe tellement rien dans cette partie mdrrr je suis désolée !)
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Scène VI - Le Carnivore
Royaume d'Oren, Palais Royal
00h36
Jisung n'en pouvait plus. Déjà qu'il n'avait pas été particulièrement enclin à jouer la bête de foire, voilà que ses nerfs échauffés menaçaient de craquer. Bientôt une heure qu'ils étaient enfermés dans ce bureau. Les grandes fenêtres avaient été recouvertes par les lourds rideaux pourpres, mais Jisung savait la lune bleue haute et brillante dans le ciel à peine nuageux.
Une heure, et ils n'avaient toujours pas réussi à arriver à un compromis.
Ce que lui demandait le roi d'Oren lui paraissait impensable. Il n'osait même pas imaginer les conséquences qu'il y aurait sur le peuple de Kerlagan s'il consentait à établir un traiter de libre-échange avec Oren. Abaisser les taxes à ce point ne servirait qu'à les ruiner, et Kerlagan ne tirerait aucun profit de ce décret.
Il ne comprenait pas à quoi jouait Oren, c'était évident qu'il refuserait une telle proposition. Pourtant, le roi n'en démordait pas. Impossible de le faire changer d'avis. Alors la tête haute et le dos droit, Jisung s'exprima d'une voix glaciale et puissante :
- Écoutez Votre Majesté, je ne doute pas que l'idée puisse nous être réciproquement bénéfiques. Cependant, dans les termes dont est instauré ce décret, je persiste à imposer mon refus catégorique, et ce en dernier ordre. A moins bien sûr, que vous n'acceptiez de revoir le traité pour qu'il soit aussi bénéfique à mon royaume.
Installé sur un imposant siège, le roi Kim fronçait les sourcils. Deux soldats étaient placés près de la porte, et à la droite du porteur de couronne, se tenait un conseiller gringalet, lunettes au bout du nez, et à la peau flasque. Jisung avait passé une bonne demi-heure à l'observer du coin de l'oeil. Il avait un air pincé qui lui déplaisait beaucoup, et son regard de fouine semblait le disséquer vivant. Il avait cet air dédaigneux, comme s'il savait que le prince Han allait finir par plier. Comme s'il savait que dès l'instant où Jisung avait pénétré la pièce, cette conversation était déjà finie.
Et le blond détestait ça.
Il détestait la manière dont il manipulait le roi Kim, le guidant sur quoi répondre et quoi penser. Dans son dos, il tirait les ficelles, et l'homme bouffi ne semblait même pas s'en rendre compte. Cependant, Jisung se garda bien d'exposer ses pensées au grand public.
- Je vous entends bien Prince Han, et je vous comprends. Néanmoins comprenez qu'il n'est pas possible pour Oren d'espérer moins de votre part. L'alliance qui lie nos deux royaumes prône l'entraide, alors à la vue de la crise que traverse Oren, il est de votre devoir de nous aider.
Inconsciemment, Jisung serra les dents, contractant sa mâchoire et faisant pulser les veines de son cou jusqu'à sa joue gauche. Jamais on ne lui avait fait part d'une crise pareille. Oren était certes une terre rocheuse, serties de chaînes de montagne au Sud, mais les plaines étaient arides, et les terres cultivables. L'agriculture y était florissante, et la capitale restait une des plus importantes villes portuaires du continent.
Quelque chose ne tournait pas rond dans cette histoire, et il détestait ça.
On ne se jouait pas d'Han Jisung comme cela. Pas quand, plus que celle d'un prince, il revêtait la couronne d'un roi.
Finalement, il soupira. Baissant les yeux pour analyser une énième fois les cartes de leurs deux royaumes qui avaient été étalées sur le bureau clair.
- Je ne prendrai aucune décision sans en avoir informé Sa Majesté mon père et son conseiller. Je vous propose de Nous revoir dans deux semaines pour en revoir les termes. Comprenez néanmoins qu'en pareils termes, il faudra à Kerlagan offrir une contrepartie florissante.
Jisung se leva de son siège, secouant la tête pour repousser sa queue de cheval en arrière et détendre les muscles de son cou.
- Sur ce, si vous le permettez, je vais prendre congé. Cette soirée est bien trop délicieuse pour qu'on ne profite pas plus du bal, qu'en pensez-vous ?
Non, on ne traitait pas la royauté de cette manière. On ne prenait jamais congé du roi sans qu'il ne l'autorise en premier ; mais Jisung n'en avait que faire.
Son inquiétude dépassait toutes les normes de la bienséance. Savoir Changbin enfermé dans les sous-sols. Savoir Minho il ne savait où en train de faire il ne savait quoi avec le prince Kim.
Décidément, cette soirée ne se passait pas du tout comme il l'avait espéré.
- Permettez prince Han que l'on vous soumette une dernière proposition. Nous comprenons votre position, mais acceptez au moins d'en prendre connaissance, je vous en prie.
Cette fois-ci, ce fut le conseiller qui s'exprima. On ne lui autorisa pas plus la parole que ça, et bien qu'on pourrait imaginer un ton suppliant, ces airs désinvoltes dans sa voix coupaient toute imagination.
Par politesse, Jisung accepta. Il s'inclina un peu, mais ne se rassit pas. Il se tint juste là, poids sur ses deux pieds, face au bureau.
- Faites-le venir, ordonna le roi d'un signe de main abstrait.
Jisung observa d'un oeil incompréhensif l'un des gardes se diriger vers un mur habillé d'un tableau, où une seule bougie brulait tranquillement sur son portant. Il toqua trois fois sous ce dernier avant d'abaisser la bougie, tirant la branche de fer jusqu'à ce qu'elle s'incline à l'horizontale.
Jisung ne fut pas si surpris de voir le mur s'ouvrir pour créer un passage. Après tout, il n'était pas impressionnant de savoir les vieux châteaux truffés de galeries et de passages secrets. Son palais le premier était muni de ces endroits cachés parmi lesquels il aimait se réfugier lorsqu'il était enfant. Pourtant, ça n'avait jamais empêché Minho et Hyunjin de le trouver. Il s'était cependant bien moqué de Changbin quand il avait crié après l'avoir vu apparaître dans un des salons.
Jisung papillonna des paupières, ce n'était pas le moment de se laisser distraire. Cet homme à la face de rat ne lui inspirait rien de bon.
- En espérant pouvoir vous faire changer d'avis, commenta celui-là en désignant la nouvelle entrée.
Non, Jisung n'a pas été surpris du passage creusé dans le mur. En revanche, c'est le visage de celui qui fut trainé par un garde jusqu'au centre du bureau qui le fit trembler. D'effroi, d'inquiétude, de manque. Trembler, parce qu'il se sentait coupable.
L'homme que l'on amena était presque nu. Son torse dévêtu était sali, tellement qu'il en était noir sur les côtes et épaules, et son pantalon de toile était râpé jusqu'à sa peau par endroit. On avait lié ses pieds et ses mains à l'aide d'une épaisse corde et un large collier de fer entourait son cou aux trapèzes épais. Là, on avait accroché une chaine à des anneaux, et on s'en servait de laisse pour le tirer sur le sol. Ses cheveux foncés étaient sales, poussiéreux, et son visage, bien qu'aux traits particuliers, était marqué de coups proche de la mâchoire. Une de ses arcades suintait de sang, ouverte par une coupure nette, et sa lèvre inférieure avait éclaté, saignant elle-aussi sur son menton. Pourtant, ses yeux obsidiennes étaient décorés de cette rage habituelle, et ses lèvres arquées d'un sourire dépeignaient cette folie quotidienne qui animait sa grandeur.
- Changbin...
Sa voix n'était qu'un murmure mais elle en disait déjà trop.
Oh Changbin, mon amour. Qu'ont-ils bien pu te faire ?
« Acceptez le traité, et il aura la vie sauve. »
Plissant ses paupières très fort, il se retourna vers le roi, lui adressant un regard vide et froid. Pire, il était volontairement moqueur. Ce n'était qu'une façade, tous le savaient, mais cela n'empêcha pas le roi de flancher légèrement. Il eut un moment de recul.
Jisung pouffa.
- Et vous croyez m'atteindre en apportant un de mes sous-fifres à mes pieds ? Revoyez vos manières de persuasion Votre Majesté... sans vouloir vous offenser bien sûr.
Son ton était si dédaigneux qu'il en crachait ses mots avec froideur. Jamais Han Jisung ne montrera la moindre faiblesse à son ennemi. Et si malgré lui, il se devait de cracher sur son amant, alors il allait le faire. Changbin serait même le premier à l'en inciter. Lui ne laissera jamais quiconque blesser l'honneur de son prince.
Personne. Personne ne manquera jamais de respect à Son roi !
Sans se détacher de son dédain, Jisung observa le conseiller se pencher à l'oreille du roi Kim pour y murmurer quelque chose qu'il ne comprit pas. Des instructions certainement. Néanmoins, le peu qu'il entendit entre les dents serrés du gringalet ne le déçut pas :
« Putain de pisse-verglas ! »
Joignant ses mains pour y poser son multiple menton, le roi hocha la tête une dizaine de fois avant de tourner son attention vers le blond.
- Je vous avoue Votre Altesse que j'aurai préféré éviter d'en arriver jusque là, mais puisque vous ne nous êtes pas coopératif, je n'ai d'autre choix que d'employer la manière forte.
Il agita ses doigts et un cri de douleur retentit dans le bureau. Avec effroi, Jisung resta figé quand le soldat attrapa son amant par les cheveux, relevant son cou dans un tintement de ferrailles. Un poignard à la main, il le glissa sous le cou gracile. Oh ce qu'il aurait aimé jubiler de la peur du prisonnier, il l'aurait aimé se tortillant pour s'éloigner de lui, il aurait aimé qu'il se débatte pour avoir à lui entailler le cou. Il se serait vengé de toutes les infâmes remarques qu'il avait du subir du noiraud.
Mais Seo Changbin était un musicien fou, qui avait peur d'une seule chose, mais ce n'était pas de la mort.
- Vas-y mon salaud. Je sais que tu n'attends que ça, susurra-t-il au garde, sourire satisfait aux lèvres. Tranche-moi la gorge puisque tu en rêves, et montre à ton roi à quel point tu lui es fidèle.
Un coup d'oeil noir en coin du conseiller, et le soldat se raidit. Quand bien même il en rêvait, il n'était pas question que leur prisonnier rende l'âme avant que le prince Han n'ait consenti à signer leur accord. Celui-là d'ailleurs, leva les yeux au ciel à la tirade de son amant. Il savait Changbin inconvenant dans ses paroles, et imprévisible d'actions, mais il l'aurait pas douté capable de jouer à ce point avec le feu.
- Oh oui, tu ne peux pas, hm ? C'est un bon chien-chien à son roi ça !
En fin de compte, il n'en était pas si surpris. C'était totalement... Changbin d'agir ainsi. Il n'était pas du genre à s'alourdir de responsabilités ; si ça lui traversait l'esprit, il le disait. Ce n'était pas autrement.
Parce que Changbin aussi, au fond, c'était un bon chien-chien.
Mais il était le plus fier, et le plus fou de tous.
D'une injure puissante, on lui ordonna de se taire, frappant son visage encore une fois et caressant sa pomme d'Adam de la lame du couteau.
- Vous êtes-vous réellement abaissé à un chantage aussi mesquin ? Vous menacez de tuer un de mes espions en échange de votre fichu traité ? Si tiens je m'attendais à tant de bassesse de votre part...
Ces mots, ces insultes de lèse, Jisung ne les regrettait pas. Il était en colère. Il avait beau faire semblant que rien ne l'atteignait, il aurait pu faire exploser le palais royal entier si ça avait pu protéger les amours de sa vie.
Jisung avait l'âme d'un enfant, mais il avait la rage d'un roi.
- Si cela peut servir à vous incliner, Oren ne se privera de rien pour regagner sa grandeur d'antan. Celle que vous lui avez volé en vous octroyant les terres minières qui nous appartenaient !
Balayant l'histoire d'un mouvement de bras, Jisung manqua de crier, ses nerfs à la dérive.
- Votre chantage de gargote ne vaut rien pour moi. Allez-y ! Tuez-le ! Je vous en prie, mais n'espérez pas de moi que j'ôte ma couronne pour obtenir vos faveurs. J'assiérai mon trône sur les cadavres de mes sous-fifres si cela doit permettre à Kerlagan de rester debout !
- Tuez-moi ! ria Changbin. Son Altesse le prince Han ne touchera jamais le sol de ses genoux !
Un élan de panique parcourut le roi et son conseiller.
- Ils bluffent, s'empressa de commenter ce dernier.
- Le rapport ne nous avait-il pas certifié qu'ils entretenaient une des ces odieuses liaisons que même Dieu lui-même a banni des cieux ?
- Je puis vous l'assurer Majesté. Je vous avoue que je suis aussi surpris que vous. Une telle réaction n'aurait jamais pu être prévue !
Malgré les soit-disants messes basses, tout le monde était en mesure de les entendre.
- Vous n'avez pas tord vous savez... rétorqua Jisung.
- Pardon ?
D'un pas plutôt léger mais qui faisait craquer le parquet ciré, Jisung s'approcha du noiraud. Le cou tordu en arrière, le noiraud avait le libre loisir de l'observer d'en bas. Ce que la prestance de Jisung pouvait être effroyablement écrasante quand il le souhaitait.
Face à tous, Jisung plia ses genoux sans les poser, et lentement, il amena son visage à quelques centimètres de celui du prisonnier. Juste avant que leurs lèvres ne s'effleurent, Jisung s'arrêta, et le noiraud sourit de plus belle.
- Donnez-moi votre poignard, pressa-t-il soudainement d'un ton impératif.
Les yeux de Changbin s'affolèrent d'une lueur funèbre mais désespérément amoureuse.
- Allez-y, tuez-moi. Je n'aurai plus belle mort que de mourir des mains de mon roi.
Le noiraud s'agita, ondulant si bien et soudainement si fort que le soldat ne put le retenir. Il s'échappa de son emprise et il perdit l'équilibre, manquant de s'écraser sur le sol. Jisung s'était levé, dague volée au poing. Vulgaire tour de passe-passe qui pourtant, laissa la garde et la royauté sans voix.
- Ce n'était pas mal tenté. Après tout, n'importe qui aurait pu se laisser déstabiliser par un chantage aussi honteusement grotesque. Retenez en revanche, que Han Jisung n'est pas n'importe qui !
Ça y était, voilà que le blond commençait à parler de lui-même à la troisième personne en plus de ça.
- Comédie ! Ah ça quelle comédie ! s'énerva le conseiller.
Changbin se traina jusqu'aux pieds de son prince, celui-la empêchant les gardes de l'approcher. On ne touchait pas à la noblesse.
- Mascarade ! continua le conseiller dans sa grande éloquence. Voyou ! Vaurien ! Vous ne l'aurez pas tué. Gamin !
- Détrompez-vous. C'est moi qui intenterait à sa vie le jour venu. Et ce jour-là, plus que la mort, je lui briserai les doigts.
Telle était la plus grand peur de Changbin.
A vos risques et périls, n'intentez pas à la vie d'un homme libre. Changbin était peut-être fou, mais il fallait l'être bien plus encore pour pouvoir l'aimer. Et Jisung ? Il en était éperdu.
Pourtant, il n'était pas le plus fou, ça non. Après tout, Jisung n'était pas le seul à être amoureux de cet éberlué d'amphion.
- Majesté !
Allant contre l'ordre de ne pas être dérangé, un mousquetaire accourut dans le bureau, frappant les portes battantes.
- Des invités commettent du grabuge dans la salle de bal. On m'a signalé trois individus armés, et le prince Kim s'est retiré dans ses appartements. Nous attendons vos ordres !
- Allons-bon ! s'écria le roi d'Oren. Qui sont donc ces envahisseurs et coupeurs de temps ?
- ... On m'a rapporté la présence d'un homme et... d-de deux femmes Majesté.
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