24. Pleine lune - V
CINQUIEME ANNEE, mars 1975
Les examens approchaient à grands pas. Mars arrivait sur ses derniers jours et Avril pointait le bout de son nez. Il commençait à faire grand soleil sur le parc, permettant aux Maraudeurs de réviser au bord du lac, sous un magnifique hêtre qui les abritait des rayons traîtres du soleil. Tout allait pour le mieux dans la bande d'amis et ceux-ci s'étaient même trouvés un nouveau projet sur lequel se pencher : améliorer la carte de Poudlard. Après que James et Sirius eussent pardonné à Emmeline, le jeune Black avait eu une merveilleuse idée :
— Quand je cherchais Vance, je me suis fait la réflexion que cette carte était inutile pour trouver quelqu'un dans Poudlard. Alors pourquoi ne pas créer une carte qui indiquerait où se trouve chaque élève et chaque professeur, afin de savoir où ils sont à tout moment.
— Ça nous empêcherait deux fois plus de nous faire choper ! s'était extasié James.
— Et on devrait trouver un moyen de la cacher aussi, avait suggéré Emmeline. Pour que personne d'autre que nous ne puisse la lire et ce, même si on nous la vole.
Ils avaient tous acquiescé et chacun d'entre eux se penchait sur la question depuis. James et Sirius avaient envoyé des lettres à des oncles et tantes lointaines qui connaissaient peut-être le genre de sortilèges qu'ils recherchaient, tandis qu'Emmeline et Remus passaient la bibliothèque au peigne fin. Cela allait demander de la magie complexe et beaucoup de concentration. Durant cette dernière semaine, ils avaient brûlé tous les parchemins qu'ils avaient tenté d'ensorceler. L'un d'entre eux lui avait hurlé des insultes et le dernier faisait couler l'encre, effaçant toute trace du château de Poudlard.
— Rendre vivante une carte, c'est pas de la tarte, fit remarquer Peter.
Il avait encore brûlé le parchemin qu'il tenait entre les mains. Emmeline jeta un sort d'Aguamenti pour tarir les braises et soupira en s'adossant au tronc de l'arbre.
— On ne doit pas lâcher. Je ramènerai la carte pendant les vacances, mon cousin reviendra de Pologne, il aura peut-être une idée.
— Celui qui tient une boutique de farces et attrapes ? demanda Peter.
Emmeline acquiesça. Malgré les temps qui couraient, son cousin Patrick de Pologne avait accepté de leur rendre visite cet été. Emmeline aimait discuter des dernières inventions saugrenues qui lui traversaient l'esprit et qu'il mettait toujours en pratique avec brio. Il devait bien avoir une idée sur la démarche à suivre pour ensorceler une carte intelligente.
Ce soir-là, Emmeline n'arrivait pas à dormir. Elle feuilletait un énorme volume contenant de vieilles formules qui lui permettraient, soi-disant, d'animer des objets inanimés. Mais elle ne trouvait rien sur le façon de doter une carte de mémoire et d'intelligence suffisante pour qu'elle disparût d'elle-même à l'entente d'une formule. Aux alentours de minuit, elle sortit de sous son drap et contempla la lune par la fenêtre. Elle était pleine et ronde, éclairant le parc. Soudain, des petits points attirèrent son attention. Elle se pencha sur le rebord pour tenter de mieux distinguer les silhouettes qui trottinaient dans l'herbe. Les deux de devant se dirigeaient vers le Saule Cogneur tandis que le troisième, plus en retrait, soutenait le quatrième. Ce dernier semblait mal en point, comme sur le point de vomir. Emmeline reconnut alors ses amis. Que faisaient-ils en pleine nuit, sans elle qui plus est ? Et pourquoi diable ne se cachaient-ils pas sous la cape ? Soudain, elle se souvint que la cape d'invisibilité de James était planquée sous son oreiller, puisqu'elle s'en était servie la nuit dernière pour piquer des ouvrages plus avancés dans la réserve.
La jeune Gryffondor n'hésita pas longuement. Elle devait donner cette cape à ses amis et par la même occasion, découvrir ce qu'ils mijotaient. Son anniversaire était dans deux semaines, ce n'était donc pas une fête organisée pour elle. De quel projet funeste avait-elle été écartée ?
Emmeline enfila une veste par-dessus son pyjama aux couleurs de sa maison et s'enroula dans la cape d'invisibilité avant de dévaler les escaliers menant à la salle commune. Ses baskets glissèrent dans les couloirs de Poudlard et la menèrent jusqu'au parc, où elles s'enfoncèrent dans l'herbe humide. Avec dextérité, Emmeline fit voler une branche qui retomba sur le nœud qui permettait d'arrêter les mouvements incessants du Saule Cogneur et se glissa par le trou, toujours invisible. À peine atterrit-elle dans le hall de la Cabane Hurlante qu'elle entendit des éclats de voix.
— Protego ! James, à droite !
— Lashlabask ! Il est déchainé ce soir !
— On a vraiment besoin de cette potion, couina Peter. Vous en êtes où ?
— Sans Vance, on ne peut rien faire.
— N'insiste pas Sirius, on ne peut pas l'impliquer là-dedans.
— M'impliquer dans quoi ?
Emmeline, agacée, releva la cape d'invisibilité tout en apparaissant dans le salon délabré de la Cabane. Tous les yeux convergèrent sur elle, remplis d'effroi. Soudain, elle l'aperçut. Avant même qu'elle ne pût réagir, une sorte d'homme-loup se jeta sur elle et menaça de la déchiqueter. James eut un réflexe époustouflant et stupéfixa la bête qui retomba sur le côté en couinant.
— On a une minute ! s'écria Sirius. Peter, les chaînes !
Celui-ci fouilla dans une armoire et dégota des chaînes d'acier qu'il accrocha à des attaches déjà présentes dans les poutres solides de la maison. Emmeline se releva en suffoquant.
— Qu'est-ce que..., dit-elle.
— Qu'est-ce que tu fous là Em' ? s'exclama James en l'aidant à se relever.
Il récupéra sa cape et la fourra dans les mains de son amie.
— Repars au château. On s'en occupe.
— Où est Remus ? Je l'ai vu partir avec vous. C'est cette chose qui lui a fait du mal ?
Le coeur battant, elle tenta de se concentrer sur la disparition de son ami plutôt que sur le fait qu'elle avait vu la mort de près. Sirius baissa le regard. Seule la lune éclairait la pièce. Emmeline sursauta en entendant la bête grogner. James aida Peter à terminer d'attacher les chaînes, tandis que Sirius restait auprès d'Emmeline, sa baguette brandie.
— Retourne te coucher, Vance.
— Pas avant d'avoir des explications. Il se passe quoi ici ? Et ça, c'est quoi ?
James et Peter traînaient maintenant l'homme-loup, sur leurs gardes au cas où il se réveillerait, et attachèrent ses quatre membres aux chaînes.
— On devrait être tranquille pour un moment, dit le jeune Potter. Ecoute Em' (il s'approcha d'elle). On s'occupe de ça, on t'expliquera tout en temps et en heure, mais en attendant...
— Dites-moi où est Remus !
Le ton de sa voix fit remuer la bête et elle recula d'un pas. Ce n'était pas son genre d'être effrayée face aux créatures magiques. Le professeur Brûlopot était plutôt satisfait de son travail dans son cours, cependant ce n'était pas ce genre de créatures qu'ils étudiaient.
— Il est là, Remus, dit Peter en pointant la bête du doigt.
Emmeline le dévisagea, atterrée. Que lui racontait-il ? Elle tenta de trouver du soutien auprès de Sirius et James, mais ceux-ci baissèrent le regard.
— Attendez...
Rapidement, les pièces du puzzle s'assemblaient. Sa nervosité les jours de pleine lune, les balafres toujours plus nombreuses, la façon dont les créatures magiques le reniflaient en cours, les escapades secrètes des garçons.
— Remus est un loup-garou.
Elle releva un regard horrifié sur ses amis et son souffle se bloqua dans sa poitrine. Au vu de leurs têtes, elle avait visé juste.
— Je veux tout savoir.
— Pas ce soir, demain, dit James en entendant Remus grogner. Je t'en prie Em'.
La jeune fille hésita. Elle ne pouvait pas retourner dormir maintenant qu'elle avait vu cela. Or, ils avaient raison : ce n'était pas le moment de discuter. Remus se réveilla et elle put l'observer plus facilement grâce à la lune qui se reflétait sur sa peau couverte de poils gris. Il se tenait sur deux pattes puissantes et on décelait l'humain derrière. Son squelette était modifié et elle ne pouvait imaginer la douleur qu'il devait ressentir lors de la transformation. Son museau était allongé et pourvu de crocs acérés qui servaient sûrement à déchiqueter ses proies. Elle s'approcha lentement et, tandis qu'il aboyait dans l'optique de la mettre en morceaux et que Sirius et James tentaient de la tirer en arrière, elle croisa son regard. Ce regard chocolat qui l'apaisait tant, qui se posait sur elle avec délicatesse et dans lequel elle reconnaissait son meilleur ami. Elle se mit à sourire, imperceptiblement, puis brandit sa propre baguette et fit apparaître une peluche qu'elle lança au loup-garou. Celui-ci se jeta immédiatement dessus pour s'amuser à lui dévisser la tête.
— Emmeline ? demanda doucement Peter.
Elle rejoignit ses amis et jeta un regard empli de bienveillance à James.
— Je reste avec vous pour aider Remus.
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CINQUIEME ANNEE, mars 1975
— Je suis tellement désolé.
Emmeline enroula son bras autour des épaules de son ami. Il venait de reprendre forme humaine, à l'aurore, tandis que le soleil perçait les nuages. James lui avait fait un rapide rapport de la nuit, lui expliquant comment le jouet avait détourné son attention et comment Emmeline avait veillé à ce qu'il ne se blessât pas avec les chaînes. Cependant, il avait également dû lui expliquer qu'il avait failli la tailler en pièces quand elle était entrée par surprise dans la Cabane Hurlante.
— Je ne t'en veux pas Remus, dit-elle. En fait si, je t'en veux énormément, mais pas pour avoir manqué de m'égorger.
Ses yeux brillants de larmes laissèrent échapper quelques gouttes qu'il s'empressa de sécher avec la couverture de laquelle il s'était enveloppé. Les garçons en gardaient toujours une à disposition pour les matins de détransformation.
— Je t'en veux de ne rien m'avoir dit.
— Je ne pouvais pas t'infliger cela, dit-il.
Emmeline grommela. Elle comptait toujours sur ses explications.
— On va rentrer au château, t'habiller, prendre un petit-déjeuner et ensuite, je veux tout savoir.
Remus acquiesça et elle l'aida à se relever. Durant le trajet, cachés sous la cape, les Maraudeurs restèrent silencieux. Cependant, Remus ne détacha pas son regard du visage rayonnant d'Emmeline. Elle l'avait accepté sans souci, elle n'avait pas une seule fois jugé ce qu'il était. Comme James, elle avait été remarquable et avait pris en main les choses sans rechigner. Cela avait été plus difficile pour Sirius et Peter, mais depuis, ils l'accompagnaient à chaque pleine lune. Il était plus que surpris par la réaction de la jeune fille. Elle avait pris soin de lui et était même parvenue à détourner son attention, et à le protéger contre d'autres blessures, même s'il avait manqué de la tuer. Elle ne semblait même pas effrayée, mais admirative. Ces constatations réchauffèrent son coeur qui battait un peu plus vite.
Comme promis, Remus donna ses explications après le petit-déjeuner. Ils rejoignirent un de leurs nombreux passages secrets et s'installèrent sur le sol pour que Remus pût entamer son récit. Emmeline passa une main sur la coupure qui était apparue sous son oeil et avant même qu'il ne prononçât un mot, dit :
— Il faut trouver un moyen pour que tu ne te blesses pas.
— On travaille dessus depuis des années, ricana Sirius.
— Mais maintenant, je suis là.
Les garçons sourirent et n'ajoutèrent pas un mot. Elle fit un signe de tête à Remus pour qu'il parlât.
— Fenrir Greyback m'a mordu alors que je n'avais pas cinq ans. Mon père et lui avaient un différend et il s'est vengé sur moi. Pendant des années, nous avons changé de ville pour m'éviter toute relation sociale et protéger ma condition. Mes parents ont tenté de me contenir tous les mois, mais quand j'ai eu dix ans, j'avais une telle force une fois transformé qu'il était compliqué de me maîtriser. Un jour, Albus Dumbledore a frappé à ma porte et a convaincu mes parents de m'envoyer à Poudlard. Il a aménagé la Cabane Hurlante pour que je puisse m'y transformer une fois par mois. Elle est pourvue de sortilèges qui m'empêchent d'en sortir.
— On a découvert le pot aux roses lors de notre deuxième année, poursuivit Sirius. Peter a été le premier à remarquer que Remus quittait son lit de temps en temps. Un soir, on l'a tous les trois suivis et on a découvert sa nature. Durant presque un an, on est resté à l'entrée de la Cabane à le regarder se déchaîner contre les murs pour tenter de s'échapper.
— Puis, on a décidé d'agir, de rendre ses transformations plus agréables ou du moins, moins dangereuses pour sa santé. En l'enchaînant et avec quelques sorts en plus, il tentait moins de s'enfuir, ajouta James.
— Et pourquoi ne rien m'avoir dit ?
— Je m'en suis toujours voulu d'avoir impliqué les garçons dans cette sombre histoire, alors je leur ai fait promettre de ne rien te dire, avoua Remus.
— Mais j'aurais pu aider ! Trouver d'autres solutions. Si tu crois que tu vas te débarrasser de moi maintenant que je le sais...
— Il avait honte.
Tout le monde se tourna vers Peter, sidéré par ses paroles.
— Quoi ? Tu nous as toujours dit avoir honte d'avoir été mordu. Tu ne voulais pas qu'elle aussi te voit différemment.
Remus baissa le regard. Peter avait en tout point raison. Le coeur d'Emmeline se fendit.
— Je m'en fous que tu sois un loup-garou Remus. Tu es toujours le même. Je ne te jugerai jamais sur une chose comme celle-là. Tu peux me faire confiance. Tu es un garçon vraiment courageux.
James sourit, heureux de voir une réaction si positive, mais ce n'était rien en comparaison à Remus, de nouveau au bord des larmes. Il se redressa pour serrer Emmeline contre lui. Sa réaction ne pouvait pas plus lui réchauffer le coeur. Il avait été bête de la mettre ainsi de côté.
Dorénavant, il avait une nouvelle alliée et il était sûr qu'elle rendrait les pleines lunes plus douces.
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Hello tout le monde ! Désolée pour ce post tardif, j'ai été à Amsterdam pendant une semaine, donc impossible pour moi de publier le chapitre ! L'attente en a valu la peine puisque Emy découvre enfin le grand secret de Remus ! QU'avez-vous penser de sa réaction ??? ^^
Ecrit le 10 Septembre 2021, corrigé le 24 Novembre 2021 et publié le 11 Mai 2022.
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