Boris ~ 1
- Prend ton médicament fils, fit père d'une voix sans contradiction possible.
Avec lenteur, j'avalais la pilule rouge. Je manquais de vomir mais me retins. Père voulait que je la prenne tous les jours, alors je le ferais, même si cela me faisait mal. Plus j'en ingurgitais, moins je me sentais bien. Mon loup au fond de moi en souffrait aussi, comme si un parasite s'accrochait à lui. Thelos semblait le supporter plus que moi alors que Kenyan lui n'en était même pas affecté et heureusement pour lui, il était encore si jeune.
- C'est bien, maintenant va prendre tes leçons, me congédia-t-il.
Je m'exécutais un poids dans le ventre. Je ne voulais pas de ces pilules, je ne voulais plus de tout ça.
Je n'étais qu'un enfant...
Son fantôme me hantait, jour et nuit. Sa voix me revenait à toutes heures. Mon père avait été mon cauchemar et bien qu'il soit mort, cela ne changeait rien.
Il y avait des souffrances, des actes qu'on n'oubliait pas, malgré le temps qui passe et les événements qui arrivaient avec. Mais le savoir six pieds sous terre me réconfortait un peu...juste un peu. J'étais assis sur ce trône dont il avait tant salit de mauvaises décisions.
Un garde m'annonça la venue d'une dame, j'acceptais et laissais les portes s'ouvrir sur une femme. Son carré blond bougeait sur sa peau pâle au rythme de ses pas.
Détermination était inscrite dans son regard bleuté.
Son nom me revint de suite, après des années sans nouvelles, Tiphaine Minydis. Mon loup grogna en devinant pourquoi elle était ici. Après avoir décliné toutes les invitations de son nom, elle venait en personne me faire part de ce qu'elles contenaient.
- Votre altesse, commença-t-elle en faisant une révérence. Comment vous portez-vous ?
Mon loup voulut répliquer qu'on allait bien jusqu'à ce qu'elle arrive mais je le muselais. J'étais le roi maintenant, je ne pouvais pas me laisser aller à cette réaction puérile. Je me levais et descendis pour venir lui baiser la main.
- Bonjour Tiphaine, que me voulez-vous ? dis-je en évitant de répondre à sa question précédente.
Elle m'offrit un sourire bien trop gros pour être sincère et débuta son discours, qui je le savais, était pénible.
- Comme vous vous en doutez, les invitations sans réponses que ma famille vous a envoyées les ont peinés. Ainsi, me voici en personne pour vous annoncer que cette dernière aimerait que je devienne votre compagne. Qu'en dis-tu Boris ? finit-elle sur un autre ton.
Tiphaine avait été une amie d'enfance de la famille, et je savais que ses intentions à mon égard n'étaient pas sans espérances de plus. Voyant que je ne disais rien, elle explosa de rire.
- Vraiment ? Ma famille a exagéré je l'avoue...Mais est-ce que tu m'autorises au moins à t'épauler ? redevint-elle naturelle.
Je soupirais, je ne pouvais pas repousser une fois de plus cette famille qui avait tourné le dos à leur loyauté envers mon père pour nous aider. J'avais peu d'alliés ici et encore beaucoup qui doutaient, je devais m'entourer de personnes influentes pour espérer gagner la confiance de mon peuple. Bien qu'ils m'étaient tous liés de part mon trône, la foi était ce qui manquait pour une réelle dévotion. Et c'était cette dernière qui faisait qu'un loup se sacrifie pour son roi ou non.
Bien que je le méprisais, mon père avait su user de sa place pour manipuler et envoyer directement de bonnes influences dans sa poche. Il les avait appâtés avec de l'argent et moi j'espérais remporter leur cœur avec des projets d'avenir, des libertés, à croire que c'était utopique et que seul l'argent comptait.
- D'accord, tu peux rester Tiphaine, finissai-je par dire avant de demander à une domestique de lui préparer une chambre.
Elle me remercia et partit. Quant à moi, je me rendais dans les grands jardins.
Assise, sur l'un des bancs, plongée dans sa lecture, Miella ne me vit pas approcher. Si bien qu'elle sursauta lorsque je posais ma tête sur son épaule.
- Qu'est-ce que tu lis ?
Elle referma le livre et se décala pour me laisser m'asseoir à ses côtés.
- Une histoire de chevalière... Tu n'aimerais pas, les hommes ne sont pas assez costauds là-dedans, me taquina-t-elle avant de se prendre mon poing dans ses cheveux que je fis chauffer.
- Hé ! Continue comme ça et je t'envoie aux cachots, la menaçai-je.
Elle rigola et j'augmentais mes menaces en venant la chatouiller aux côtes. Elle s'allongea de tout son long sur le banc de marbre en pleurant de rire.
- D'accord ! Pardon ! Arrête ça, je t'en supplie, céda-t-elle.
C'était facile mais la voir de nouveau souriante me réchauffais le cœur. Je savais qu'elle ressentait ce vide constamment en elle, maintenant que Dany avait péri. Mais elle remontait la pente, elle apprenait à vivre avec et pour ça, je l'admirais.
Déjà qu'être loin de celle que mon loup convoitait était dur, vivre en tant que veuf me paraissait insurmontable.
Je me changeais en loup et vint fourrer mon museau sur les chevilles de ma sœur. Sa louve monta et bientôt ce furent deux loups qui dévalèrent les champs.
Nous rentrâmes tard. J'allais m'assoupir sur mon lit quand une présence se fit dans ma chambre. Tiphaine s'allongea à mes côtés, vêtu d'un simple tissu. J'aurais aimé bander et la faire jouir tout le reste de la nuit, me fondre en elle et me libérer des tensions. Mais je n'y arrivais pas, à vrai dire depuis qu'une certaine dragonnière était rentrée dans ma vie, aussi bien sexuelle que personnelle, je ne bandais plus qu'à son simple souvenir. Alors, je fis semblant de dormir, j'étais très bon à ça, à cacher mes émotions qui n'en étaient pas moins souvent explosives.
Je finis par m'endormir et lorsque je me réveillais de nouveau le lendemain, Tiphaine était toujours là. Je m'extirpais des draps et partis prendre une douche, fermant bien à clé la salle d'eau. Qu'elle s'invite dans mon lit passait encore mais qu'elle essaye d'aller plus loin, jamais.
Je pris mon temps, et me branlais repensant au magnifique corps de Syfia. J'avais besoin de sexe et ça faisait cinq mois que je ne me contentais que de mes mains, ça devenait critique. Je devenais pitoyable. Jamais une femme ne m'avait fait un tel effet, ça n'avait été que du sexe entre nous, et pourtant elle s'était déjà fait sa place sur tout mon épiderme, me marquant de ses ongles. Alors que je m'étais toujours retenu de la mordre, car si je le faisais rien qu'une fois, s'en était fini de moi. Et je doutais qu'elle veuille devenir ma compagne, elle était bien trop libre pour rester dans une vie de château. Je ne voulais pas la priver de sa liberté à cause d'un accident.
Une fois mon éjaculation faite, je me séchais et repassais par ma chambre m'habiller, pour ensuite rejoindre la salle de conseil. Du moins, c'était ce que je comptais faire avant que Tiphaine ne m'enlace, je ne lui rendis pas son étreinte. Elle était habillée, tant mieux.
Elle s'éloigna et voulut poser sa main sur ma joue, mais mon loup la rattrapa au vol.
- Non, gronda-t-il. Je ne veux pas de toi.
Je ne l'avais pas empêché de réagir, car elle devait le comprendre tôt. Nous ne ferions jamais d'elle plus que notre amie. Elle se recula et devint sérieuse.
- J'ai une idée pour toi. La fuite de ton frère a attisé les rumeurs, elles disent qu'il s'est enfuit ou bien qu'il a préféré te laisser car tu n'es qu'un bon à rien. Tu le sais bien, ton frère était le plus aimé de la fratrie, alors qu'il soit maintenant à moitié dragonnier n'empêche pas la population de continuer à l'aduler. Pour prouver que vous êtes encore solidaires, quoi de mieux qu'une sorte d'alliance ? proposa-t-elle.
Je croisais mes bras sur mon torse, intrigué.
- Continue.
Elle ne se formalisa pas de mon rejet précédent et redevint confiante.
- Il suffit de montrer au peuple que les dragonniers et les loups sont maintenant alliés. Laisse ton frère t'envoyer l'un de ses dragonniers ici, ainsi il sera vu par tous que ni l'un ni l'autre ne se hait. Pour plus d'impact, je te conseille de faire le tour d'Homus, accompagné par le dragonnier, m'expliqua-t-elle avec de grands gestes.
J'admirais sa façon de pensée, elle était rapide et concise, elle avait toujours été d'une grande intelligence et aujourd'hui cela était à mon avantage.
- Faire le tour me permettra aussi de régler les problèmes internes en personne. Si je veux être respecté et accepté, il faut que je donne de moi-même, finissai-je avant qu'elle ne le fasse.
- Tu as tout compris, me sourit-elle.
Je la remerciai et lui proposai de venir déjeuner avec Miella et moi. Elle accepta et cela se fit dans une ambiance détendue. Je savais que j'avais blessé sa louve, mais l'humaine était plus forte.
Tiphaine était belle et dotée d'intelligence, elle trouverait chaussure à son pied. Ce ne serait juste pas moi. Je n'avais pas montré que je savais déjà qui j'allais demander à Kenyan de m'envoyer, et mon loup se faisait impatient en moi. Je n'eus pas le temps de prévenir mon frère de la journée, je le laissais se reposer pendant que je m'occupais encore et encore des problèmes qu'avaient laissés, ci et là, mon abruti de père. Je revoyais les prisonniers et en libérais la plupart qui n'avait comme crime que d'être humain, je passais mes journées dans les prisons. J'avais gracié un père de famille sous la demande de Kenyan et l'avait envoyé sur Iré. Je n'avais pas cherché à comprendre pourquoi, si ça avait été important pour lui, alors tant mieux.
Lorsque je revins en fin d'après midi, je me décidais enfin à passer un appel à mon frère. J'allais dans la salle de communication et demandais au miroir d'émettre en direction de mon frère. Il décrocha en quelques secondes. J'étais sûr qu'il m'avait répondu avec le bout de verre à son chevet.
Il avait les cheveux en bataille, signe qu'il venait tout juste de se lever. Je ris et me moquais ouvertement. Devant lui ou devant Miella, je n'avais pas besoin d'être le roi, juste être le frère suffisait. La mort de Thelos ne m'avait pas affecté plus que ça, j'avais perdu mon frère au moment où celui-ci s'était perdu.
À sa mort, je m'étais souvenu de choses et d'autres, comme si sa seule existence avait permis à mon cerveau d'annihiler certains souvenirs. Après tout, le fond de son pouvoir m'avait toujours été flou, je comprenais mieux pourquoi maintenant. Le pire était sûrement celui où j'avais aidé père et lui à dépecer de ses ailes Kenyan. J'avais participé à cette atrocité, mais si je m'étais souvenu alors mon frère aussi. Et il avait préféré ne rien dire, alors je n'engagerais pas cette conversation houleuse. Ni même d'autres concernant ma condition de prêcheur et de prêtresse pour Miella.
- Arrête un peu de te moquer, frère stupide ! C'est de ta faute si j'ai cette tête, quelques minutes plus tard et j'aurais été aussi frais qu'une rose, se plaint-il.
- Mais bien sûr ! Je ne vais pas croire ton mensonge. Plus sérieusement Kenyan, j'ai à te parler. Elya est avec toi ? demandai-je sachant qu'il ne prenait jamais de décision seul.
Je comprenais son choix, mais personnellement ça n'aurait pas été le mien.
- Non, elle est sûrement partie se changer les idées. Je t'écoute, fit-il.
Je lui exposais le plan et le voyais acquiescer du regard au fil de mes mots.
- C'est ingénieux, tu remercieras la personne qui t'a soufflé cette idée pour moi, se moqua-t-il.
- Est-ce si évident que l'idée n'est pas mienne ? demandai-je tel un enfant qui se faisait réprimander.
- Disons que tu ne serais pas aller aussi loin dans ton imagination. Mais passons... Aurais-tu une quelconque préférence quant au dragonnier que je t'envoie ? nuança-t-il sachant très bien qui j'avais en tête.
Pourquoi lui avais-je fait part de mes interrogations vis-à-vis de Syfia pendant une nuit ?
Je soupirais, ne n'empêchant pas de sourire.
- Je pense bien que la conseillère d'Elya fera l'affaire. Elle est à un bon poste et digne de confiance.
- Je te rappelle lorsque que la décision est prise, rigola-t-il alors que je peinais à garder mon sérieux et ma courtoisie.
Je n'allais pas non plus ordonner qu'elle revienne. Non, il fallait que je me montre patient. Mon loup tourna dans mon bas-ventre.
Celui-là aussi il faudrait qu'il se calme, on n'allait pas lui sauter dessus dès qu'elle mettra un pied ici. Si déjà elle acceptait notre invitation, c'était l'essentiel.
Je ne dormis quasiment pas de la nuit, à tourner et tourner dans mon lit. Kenyan ne m'avait pas appelé, il le devait dans tous les cas possibles.
Elle voulait. Elle ne voulait pas. C'était tout ce que je souhaitais entendre, alors quand mon miroir sonna enfin je décrochais dans la seconde.
- Tu es bien pressé..., remarqua mon frère un sourire dans la voix.
Il était beaucoup plus présentable que la veille et Elya se tenait à côté de lui.
- Bonjours Kenyan, bonjour Elya. Alors ? n'y allai-je pas par quatre chemins.
De plus, je ne me cachais pas à Elya, étant la meilleure amie de Syfia, j'imaginais...j'espérais ? Que cette dernière lui avait parlé de moi.
- Elle arrive dans trois heures, cela te convint-il ? me répondit Elya voyant que son compagnon se prenait d'un rire incontrôlable.
- C'est parfait...
J'allais raccrocher mais Elya prit le miroir des mains de Kenyan et fit quelques pas en s'éloignant de lui.
- Je te préviens Boris, si tu te joues d'elle, je viendrais moi-même réenclencher les hostilités entre nos deux espèces, me menaça-t-elle.
Clair comme de l'eau de roche, si limpide que mon loup monta pour lui répondre.
- On ne lui fera jamais de mal.
- Tu pourrais lui en faire sans même t'en rendre compte... Au revoir Boris, raccrocha-t-elle ne me laissant pas le temps de répliquer.
Cette femme était bien trop intelligente et forte pour un imbécile comme mon frère.
Je sautais de mon lit en vitesse, ne sentant pas ma nuit blanche sur mon organisme et fis tourner le palais aux préparations. J'annonçais la venue officielle d'une dragonnière, conseillère également de la dirigeante d'Iré au balcon royal.
Aujourd'hui, on allait recevoir une invitée de grande valeur.
* * *
Hey !
Mais dites-moi, c'est qu'il ne serait pas un peu accro à Syfia le petit Boris ? *0*
D'ailleurs, si vous avez bien lu, on apprend qu'il est lui-aussi, avec Miella, un prêcheur ! •0• À vos hypothèses sur ce qu'il maîtrise ^-^
Et petit changement ! Kholon devient Khalen ! Voilà voilà
Des bisous ♡
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