𝙲𝚑𝚊𝚙𝚒𝚝𝚛𝚎 𝚝𝚛𝚎𝚗𝚝𝚎-𝚝𝚛𝚘𝚒𝚜
Bonne lecture !
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Peter observe son visage dans le miroir des toilettes avec une grimace.
Tout le côté droit de sa mâchoire est à présent d'une teinte jaunâtre légèrement hideuse : la veille au soir, quand il a enlevé son masque en rentrant de patrouille, il n'a pas été étonné de découvrir un immense bleu au dessus de sa gorge. Son bras, plus fort mais toujours moins que le reste de son corps, l'a lâché pendant une ou deux secondes à peine alors qu'il le tendait vers un bâtiment pour se réceptionner. Résultat, il s'est pris une grue en plein dans la figure et s'est écrasé entre deux bennes à ordure au coin d'une rue.
Son torse aussi est couvert de marques colorées, mais ça ne fait plus vraiment mal. Sa capacité de récupération avancée est revenue presque complètement : un bon repas et une sieste, et Peter voit déjà n'importe quelle blessure se résorber d'elle-même.
Peut-être n'aurait-il pas dû aller patrouiller la veille de sa rentrée.
Même Tony a grimacé en l'appelant par Skype, la veille au soir (et Peter a été sincèrement étonné de voir que Tony se souvenait de la date de sa rentrée scolaire). Ils ont parlé pendant presque deux heures avant que Morgan ne vienne pousser son père hors de l'écran pour raconter à Peter ses nouvelles découvertes de jeune fille qui a enfin le droit de faire des activités en dehors de sa maison.
C'est au moment où Peter replace sa veste correctement avant de plonger ses mains sous l'eau pour humidifier un peu son visage que la porte s'ouvre.
En tournant la tête, son corps se fige légèrement. Sa bouche s'entrouvre, et son regard croise des yeux qui s'écarquillent lentement. Le silence l'entoure une seconde, suivit d'un léger bourdonnement qui résonne dans son oreille.
Peter se redresse, et l'eau s'arrête de couler.
— Parker.
Le visage de Flash Thompson paraît complètement défait. Ses bras ballants ne retiennent même pas la porte qui se referme dans son dos. Il reste immobile, à deux mètres de Peter, les sourcils haussés et le corps tendu.
Peter se retourne doucement.
Il s'est préparé pour ce jour, a eu peur pendant des nuits et des nuits en imaginant son retour. Peter n'a pas été en cours depuis ce jour-là, quand il est arrivé en retard au bus et qu'un immense vaisseau est descendu de l'espace. Il a hésité, a voulu revenir puis a pris peur.
Ned l'attend depuis des mois. Il aurait voulu qu'il revienne bien avant.
Mais l'école, c'est une étape au-dessus. Des camarades qui le croient disparu, qui le croient blessé, qui le croient mort. Il a été avec ces gens presque tous les jours depuis qu'il a décroché sa bourse.
— Flash, répond Peter en hochant la tête.
Il ne sait pas quoi dire, alors finit par cligner des yeux pour tout faire disparaître et se reprendre. Il est arrivé en avance, s'est rendu dans les toilettes les plus éloignés, a découvert que son casier avait été réattribué.
Peter n'aurait pas cru croiser Flash ici.
Flash, qui a grandi en taille, qui a coupé ses cheveux, et qui porte un t-shirt Spider-Man.
— T'es pas...
Peter fronce les sourcils. Il sait exactement ce qui a manqué de sortir de la bouche de son camarade. Il n'est pas mort. Il ne l'est plus en tout cas.
Distraitement, Peter touche son bras couvert du gant noir qui remonte du bout de ses doigts jusqu'à son biceps. Il peut se mettre en t-shirt, s'il veut : personne ne verra rien à part une mode un peu étrange. Mais le mois de janvier est très froid, et Peter peine réellement à se débarrasser de son sweat-shirt, même chez lui.
Flash ne bouge pas. À une époque, il n'aurait même pas attendu une minute avant de trouver quelque chose à lui dire. Pénis Parker, Péteur Parker, insultes, moqueries. Flash lui-même ne l'a jamais poussé contre les casiers ou enfermé dans les vestiaires ; d'autres s'en occupaient, d'autres plus grand, plus musclés. Après la morsure, Peter a réussi à utiliser son sixième sens pour les éviter, mais Flash est dans sa classe.
Parfois, il avait pitié : Flash Thompson, qui vit seul chez lui avec son majordome car ses parents ne sont jamais là. Jamais là, et pas vraiment intéressés non plus. Un fils unique, qu'ils n'ont jamais pris le temps de connaître. Peter était peut-être orphelin, mais lui au moins avait May et, pendant une période, oncle Ben.
Flash n'avait, et n'a sûrement toujours, absolument personne.
Ce n'est pas une excuse. Mais c'est une explication.
— Tu... reviens en cours ?
Flash le demande comme s'il ne le croyait pas vraiment. Sourcils froncés, poids sur une jambe ; il penche la tête légèrement.
— Ouais. Je reprends aujourd'hui.
— En quelle année ?
— La même que toi.
Ça l'étonne pendant un instant, Peter le voit, mais il semble trouver l'explication tout seul rapidement.
— Ouais, bien sûr. Qui oserait faire redoubler le petit génie ?
Il hausse les épaules, puis soupire. Peter attend, car dans le fond il ne sait même pas pourquoi il reste là. Il pourrait attraper son sac et sortir, sans écouter un mot de plus.
— Il paraît que t'as été blessé. Tu sais, en réapparaissant. La moitié de notre classe a disparu pendant le Blip.
— Ouais. Ouais, j'ai été blessé.
Il ne dit rien, pour le reste de la classe, car Ned lui avait déjà raconté ça. Peter ne peut s'empêcher de baisser à nouveau les yeux sur le t-shirt de Flash, qui apparaît derrière ses deux épaisseurs de veste.
— Il paraît que je suis pas le seul à être revenu, dit-il sans trop savoir pourquoi.
Le visage de Flash change, d'un coup. Il suit le regard de Peter, voit l'insigne de Spider-Man sur son t-shirt, et laisse un sourire réellement content s'afficher sur ses lèvres.
— Ils ont dit qu'il était mort, aux infos, mais j'avais vraiment espéré qu'il... enfin, tu vois. Il était génial, avant : il nous a sauvé la vie, à Washington, et il s'occupe des gens, vraiment des gens. Parfois je m'imagine ce que j'aurais fait si jamais j'avais eu des pouvoirs comme ça, et je sais très bien que j'aurais jamais... fait comme lui. Faut être quand même un peu fou pour pas en profiter.
Flash se dandine légèrement, et serre sa main autour de la lanière de son sac.
— Il nous a sauvé la vie une deuxième fois. Y'avait tellement de héros pendant la bataille, ça aurait pu être n'importe qui. On a pas su ce qui c'était vraiment passé. Et je me demandais... T'avais dit à un moment que... que tu le connaissais. Tu peux me dire honnetement si c'était.. vrai ?
Peter hésite. Il aimerait dit non, dire « j'ai menti » et Flash ne dira sûrement rien là dessus.
— C'est toujours vrai, Flash.
— Oh.
Il observe Peter avec gêne et acquiesce doucement.
— D'accord. Ouais, ok. Il est de retour pour de bon, alors ?
— Ouais. Pour de bon.
— Ses blessures étaient si graves ?
Un simple hochement de tête, avec un air sombre. Flash palit légèrement. Puis comprend, et baisse les yeux.
Le silence est affreusement gênant.
— Tu sais Parker, pour avant, je suis...
— C'est bon, Flash. Laisse tomber. Si tu dois dire ça, dis-le à quelqu'un pour qui ça aura de l'importance. Après tout ça... c'est bon.
Avant, il aurait tout donné pour que Flash Thompson le laisse un peu tranquille. Quand sa vie tournait autour du lycée. Quand le seul endroit pour Peter d'être vraiment Peter était l'école. Quand il sentait fier de sa tête pleine de calculs.
À présent, c'est bientôt fini. À présent, Peter a vécu chez Tony Stark, est presque mort, est allé dans l'espace, a vu des gens mourir.
Flash Thompson est le dernier de ses soucis.
— Oh, euh. Ouais, je vois. Je comprends.
Peter grimace, car Flash n'a pas compris ce qu'il voulait dire.
— Nan, Flash. Je veux dire... t'es pardonné, si c'est ce que tu veux.
C'est un peu facile, de pardonner comme ça. Peter ne le fait que car il a vu pire, car à présent ça ne le touche plus. S'il était resté Peter Parker pour le reste de sa vie, aurait-il pu faire la même chose ? Peut-être pas.
— On va être en retard.
Il s'avance, attrape son sac, et marche jusqu'à l'endroit où son camarade est encore debout et immobile. Peter doit hausser un sourcil pour qu'il se pousse. Il fait un mouvement de la main, et les yeux de Flash flotte un instant sur ses doigts gantés.
Il le voit froncer les sourcils.
Puis il se pousse.
Au moment où Peter est prêt à sortir, la main appuyée sur la porte, il entend :
— Et toi, Parker ? Tes blessures ?
Le silence dure une, deux, trois secondes ; Peter sort des toilettes sans répondre.
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