Chapitre 2
Adylin
1er août
Je suis avachie dans mon canapé, pas encore réveillée quand mon téléphone se met à sonner. Ce doit sûrement être ma mère vu l'heure qu'il est, il n'y a qu'elle pour m'appeler aussi tôt le matin.
– Allô ?
– Bonjour, ma fille, tu as une petite voix, je te réveille ? me demande-t-elle, l'air désolé.
– Non, je viens juste de me lever, mais tu es au courant qu'il n'est que huit heures et demie chez moi ?
– Oups ! Je n'arrive pas à me faire à ce décalage horaire ! En même temps...
Et c'est reparti, j'en ai pour trois heures et j'ai même pas encore bu mon thé !
Au bout d'une heure et trente minutes, elle m'a raconté ses six derniers jours en détail, s'est plainte de mon père qui passe sa vie au travail, m'a demandé quinze fois si j'étais bien installée dans mon appartement et si mon travail se passait bien.
Elle ne travaille plus depuis plusieurs années et, de ce fait, trouve le temps long depuis que je suis partie. Avant mon départ, nous nous voyions trois fois par semaine et les jours où ce n'était pas le cas, nous nous appelions. Donc, évidemment, j'ai laissé un grand vide dans sa vie. Moi aussi parfois, je trouve le temps long sans elle, mais heureusement je travaille beaucoup et je sors avec mes collègues.
D'ailleurs, Colleen ne devrait plus tarder, nous avons prévu d'aller faire les magasins pour la soirée de Zack. Nous n'avons pas pu avoir notre jour de repos étant donné que le barman a pris sa journée pour préparer sa fête. Mais Colleen, dans sa grande bonté, s'est portée volontaire pour faire la fermeture pour que je puisse profiter de la fête. Comme ils se connaissent depuis quelques années, elle connaît très bien les fiestas de Zack. Elle aurait même piqué un potentiel coup d'un soir à Samuel, qui était fou de rage et vexé, selon elle. Et apparemment, chaque année un concours les oppose pour savoir qui va ramener la plus belle femme.
***
Je sors tout juste de la douche quand l'interphone sonne. Je me dépêche de lui ouvrir la porte du bas, entrouvre le battant de l'entrée et retourne dans la salle de bains enfiler des vêtements. Avec mes cheveux humides et mon visage dépourvu de maquillage, je peux dire que je suis franchement en retard.
Merci, maman !
– Ouah ! s'exclame ma collègue en se plantant à l'entrée de la salle de bains. Je savais pas que tu avais un tatouage comme ça dans le dos ! Il est magnifique !
– Merci, et très douloureux à certains endroits ! dis-je en riant.
Un arbre mort prend racine au niveau de mes reins et remonte jusqu'à mes omoplates. J'ai sauté le pas il y a deux ans. J'ai économisé dès que j'ai commencé à travailler, j'avais ce projet en tête depuis plusieurs années déjà, mais il me manquait le financement pour un tel travail. Une fois que j'ai eu l'argent, il m'a fallu trouver le bon tatoueur. Le résultat est absolument parfait et ça c'est le plus important.
Très fière du dessin qui recouvre mon dos, je ne le montre pourtant que rarement. Même si le but d'un tatouage est en partie d'être exposé, comme tout art, je l'ai fait pour moi en premier lieu et non pour l'exhiber au premier venu. À vrai dire, ma pudeur y est certainement pour quelque chose aussi.
Je finis de me préparer, et nous partons faire les boutiques.
***
Je rentre en fin de journée, fauchée. J'ai dépensé tout mon budget réservé pour les sorties de ce mois-ci, mais je ne le regrette pas, j'ai trouvé la tenue parfaite pour samedi soir, un top dos nu noir à col bénitier accompagné d'un jean skinny en denim et une paire d'escarpins noirs. Je n'avais pas prévu de mettre mon dos à découvert, mais Colleen ne m'a pas laissé le choix après avoir découvert mon tatouage.
– Tu vas tout déchirer samedi avec ta tenue. Tu vas voir, les mecs vont tous baver devant toi ! lance-t-elle en riant.
– Tu as raison, c'est peut-être trop, je vais mettre un petit pull en cachemire à la place...
– Mais ça va pas non ! T'es sublime et super sexy avec cette tenue ! Je suis sûre que tu vas taper dans l'œil de Sam, mais ne te laisse pas avoir par sa gueule d'ange, me prévient-elle.
– Je m'en fiche du cousin de Zack, je ne vais pas là-bas pour draguer, Colleen, j'y vais pour m'amuser !
– L'un n'empêche pas l'autre, réplique-t-elle en faisant un clin d'œil.
Nous sortons boire un café et fumer une cigarette sur ma terrasse avant que Colleen ne se sauve pour aller travailler. Je passe ma soirée à regarder des tutoriels sur internet pour me faire une tresse en épi, mais le résultat n'est pas très concluant, je me contenterai d'une queue haute pour tenir ma tignasse frisée. Oui, parce qu'en plus d'avoir la chance d'être rousse, j'ai les cheveux frisés et, bien sûr, j'ai aussi des taches de rousseur. La panoplie complète de la vraie rouquine !
À un moment donné, j'en viens à me dire qu'il serait intéressant de regarder une vidéo du groupe du cousin de Zack, mais impossible d'en retrouver le nom.
Mémoire de poisson rouge, bonjour !
Tant pis, je vais patienter jusqu'à samedi, je ne suis plus à quelques jours près de toute façon.
Une question tourne en boucle dans ma tête depuis la conversation avec Colleen. Je me demande si les deux cousins se ressemblent, parce qu'il faut dire que Zack est vraiment beau gosse. Je me rappelle qu'au début, il a essayé ardemment de me mettre dans son lit, mais sans résultat. Je ne suis pas prude, loin de là, mais pour des relations intimes, j'ai besoin d'un certain feeling. Secrètement, je rêve aussi de ressentir cette petite étincelle et ces petits papillons dans le ventre quand je regarde un homme. Enfin, si ce mythe existe vraiment... Et c'est mon collègue de travail, c'est surtout pour cette raison que j'ai refusé. Je me suis tout de suite sentie bien dans ce bar, je ne voulais surtout pas que ça gâche notre relation. Après cette déconvenue, d'un commun accord, nous avons décidé de rester amis. Cela me convient très bien, et puis, en plus, il a de quoi s'occuper avec toutes les filles qui lui tournent autour. Il faut dire qu'être beau et en plus barman fait toujours de l'effet !
À vingt-trois heures trente, après avoir fait la loque devant des émissions de télé-réalité débiles puis devant des séries policières, je vais me coucher.
Cette nuit-là, je fais pour la première fois ce rêve étrange. Je suis dans une impasse, entourée de murs et plus je m'enfonce dans l'impasse, plus ils se referment sur moi. Quand enfin j'atteins le fond, je me trouve face à un mur sur lequel un texte est peint. Un mur qui me paraît singulièrement familier...
***
3 août
Le Styx est blindé ce samedi soir : depuis plus de trois heures, je cours partout et n'ai pas une minute d'arrêt. Même Jax, le boss, est venu nous prêter main-forte, il remplace Zack au bar. En général, il n'est là que la journée. Tous les matins, il vient deux heures avant l'ouverture mettre en place les tables et la terrasse extérieure et il reste jusqu'aux environs de dix-huit heures pour que nous prenions le relais avec Zack. En semaine, Colleen prend son service autour de midi pour aider Jax et finit en début de soirée. Le vendredi et le samedi, elle finit un peu plus tard pour faire face aux clients assoiffés. Exceptionnellement, ce soir, nous avons inversé nos services afin que je puisse aller à la soirée de Zack.
Nous nous rejoignons au bar pour vider nos plateaux et les remplir avec les nouvelles commandes.
– Eh ben, ils sont excités ce soir ! me dit-elle en s'accoudant au zinc.
– Oui, je les ai rarement vus aussi assoiffés, réponds-je en riant.
– Hey p'tite, tu vas dépasser ton quota d'heures, là ! File de là, je ne veux plus te voir avant lundi ! m'interpelle Jax.
Jackson est un mec un peu bourru, grand, costaud, tout en muscle avec des cheveux mi-longs noirs et une barbe de plusieurs semaines. Il me fait penser à un de ces personnages qu'on voit dans les séries télé sur les loups-garous. Si Jax était un personnage de ces séries, il serait le mâle alpha. Celui qui a les yeux noirs et durs et qui impose le respect d'un simple regard. Il m'impressionnait au départ, j'avais tendance à déguerpir dès qu'il entrait dans la pièce jusqu'à ce qu'un jour il me demande de venir avec lui dans son bureau pour faire un briefing. Il m'a demandé de m'asseoir dans le siège face à son bureau (je n'en menais vraiment pas large à ce moment-là), m'a fixée une longue, très longue minute avant de me demander quel était mon problème et pourquoi je me « cachais » quand il arrivait dans la pièce. J'ai senti le rouge me monter aux joues. Tête baissée, me triturant les mains comme une enfant prise en faute, j'ai répondu qu'il m'impressionnait. Là-dessus, il a éclaté de rire. Une fois qu'il a eu repris son souffle et son sérieux, il m'a dit qu'il n'allait pas me manger avec un grand sourire et un petit regard vicieux (disait le grand méchant loup au Petit Chaperon !). Puis plus sérieusement, il m'a annoncé : « Je veux une super entente dans l'équipe, les clients ressentent l'ambiance qui règne entre nous et je veux qu'ils se sentent bien dans mon bar. Alors arrête de t'enfuir dès que tu me vois, je suis sympa malgré mon physique de bûcheron. Si tu fais l'effort de ne plus te sauver comme une souris devant un chat, je ferai l'effort d'être moins... bourru. » Nous nous sommes serré la main en guise d'accord, et depuis j'ai appris à le connaître et me sens plus détendue à ses côtés, nous nous entendons plutôt bien, même.
– OK boss, merci et bon courage pour la fin !
Je ne me fais pas prier et déguerpis à toute vitesse de mon poste de travail.
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