-Bon, du coup on dit ce soir, à 19h au Cavern Club ? demandé-je à Hope au téléphone.

-Oui ! Tu vois où c'est, au moins ? répond-elle.

-C'est entre nos deux facs, non ? Je regarderai sur Internet si je ne trouve pas. dis-je, tout en tapant déjà le nom du bar sur l'ordinateur.

-Oui, c'est bien ça ! Au pire si tu préfères je pourrai demander à Cole de venir te chercher?

-Non, non je vais me débrouiller, ne t'inquiète pas pour moi ! dis-je, n'ayant pas très envie de le déranger encore une fois.

-Bon, OK, parfait ! Tu me raconteras tes partiels ? Je dois y aller, là, justement !

-Oui, je te dirais tout ce soir. À tout à l'heure, et merde ! répondis-je avant de raccrocher.

En regardant l'heure, je me rends compte que j'ai encore toute l'après-midi devant moi, et absolument rien à faire. J'ai passé mon dernier partiel ce matin, à 10h, et depuis je suis avachie tel un déchet sur mon canapé. Cette semaine à réviser m'a terriblement déprimée, comme toutes les semaines d'examens, si j'y réfléchit bien. Je soupire, et continue de regarder où se trouve exactement ce bar. Il me semble l'avoir déjà vu, mais j'en suis pas certaine. En tout cas, une chose est sûre : j'y suis jamais allée.

Hime attire mon attention à gauche de la télévision, en bayant bruyamment dans sa couche. Elle lève la tête vers moi, sentant que je la regarde, et je fond littéralement devant sa beauté. Je suis complètement gaga de cette bête. Hime est une Shiba, une race de chien Japonais, qui me vient d'une amie à ma mère. Ça va faire quatre ans maintenant que je l'ai adoptée, et je l'aime énormément. Je sais pas ce que j'aurais fait sans elle quand je suis partie. Disons que tout aurait été beaucoup plus compliqué, et surtout plus dur. Elle est assez petite pour son age, mais ses parents aussi n'étaient pas bien grands. Mais quand un jour le l'ai vue chez Julie, ce fut le coup de foudre. Elle me l'a donné gratuitement, et je me suis retrouvée à 15 ans, propriétaire de cet être adorable.

Je m'étire, me disant qu'il faudrait que j'aille promener Hime avant de me préparer. Je lui demande ce qu'elle en pense en prenant une voix niaise, et vu comme elle remue la queue et se tortille dans tous les sens, je prend ça pour un oui. Je monte m'habiller plus chaudement, puisque la météo m'apprend qu'il fait 5° dehors, puis attache la laisse au harnais de Hime avant de partir.

Quand j'ouvre la porte de l'immeuble, l'air frais me fouette le visage, et un petit nuage de fumé sors de ma bouche. Des flocons tombent du ciel, et je contente de m'être habillée aussi chaudement. Je ne sais pas vraiment où aller, étant donné que j'ai deux parcs à proximité. Je finis par décider de rejoindre le square Mortholon, que je trouve beaucoup plus agréable. À cette heure-ci, la rue est presque déserte, mis à part quelques voitures qui passent. La neige tombe drue au-dessus de moi, et Hime s'amuse avec la neige qui tient à peine sur le goudron.

En à peine 13 minutes je suis au parc, et bien que je doive garder Hime attachée, elle à l'air de s'éclater. Même si je la lâchais, elle ne s'enfuirait pas, mais c'est généralement obligatoire d'avoir son chien attaché, dans ce genre de parc. En plus, il y a des enfants pas loin, et j'ai peur qu'ils soient effrayés si elle va vers eux, ce qu'elle va faire dans tous les cas. Je la laisse donc gamberger dans un périmètre assez restreint, qui n'a pas l'air de la gêner plus que ça.

Je la regarde renifler le sol avidement, sa truffe dans le petit centimètre de neige. Deux enfants jouent à ma droite dans les constructions, et ça me rappelle lorsque j'allais jouer avec mes frères, petite. Je secoue la tête, sachant que ces souvenirs vont me déprimer, et commence à marcher dans les allées du parc. Je ne dois pas penser à ce genre de chose.

Je me dirige vers la statue qui trône dans ce parc, et je ne peux m'empêcher de la détailler à chaque fois que je viens. Elle est vraiment belle. Cinq femmes, le visage souriant et en robes du XIXe siècles y sont représentées. Je ne sais pas pourquoi, mais je pense à mes amies à chaque fois que je la vois, et ça me rend heureuse.

Je décide de rentrer à la maison au bout d'un long moment, pratiquement frigorifiée. De toute façon, étant donné que je sors ce soir, il va bien falloir que je rentre pour me préparer. Pourtant, j'ai vraiment pas envie d'y aller. Je me force néanmoins m'habiller plus ou moins convenablement, et à me maquiller. Je laisse mes cheveux lâchés, n'ayant pas envie de me casser la tête, passant simplement un peu d'eau par-dessus pour redonner du volume et des formes à mes boucles. Je me retrouve en jean taille haute, pull et baskets à plates-formes, maquillée comme d'habitude et pas du tout motivée.

Je me regarde une dernière fois dans le miroir, me demandant un instant si ça ira comme ça. Mais bon, je vois vraiment pas où est le soucis. Je donne à manger à Hime avant de partir, puis j'y vais. Je dois rejoindre Hope, Cole et Loucas devant le bar, et j'ai décidé d'y aller en métro. Il y a un peu moins de monde à cette heure-ci que d'habitude.

Dans la rame, je me concentre sur la musique qui bat dans mes écouteurs, histoire de ne pas paniquer. L'application Siquy me tient aussi compagnie sur le chemin, puisque je réponds aux commentaires sur mon dernier article. Je traîne aussi un peu sur ma page d'actualité, et lis les petits textes que d'autres écrivent.

Siquy est un réseau social, entre Facebook, Twitter et Instagram. Je dis souvent que cette application me fait penser à Tumblr, mais en même temps ce n'est pas tout à fait ça. Tout le monde peut se créer un Siquy, et peut partager ce que bon lui semble : photographies personnelles, images tirées du web, dessins, articles intellectuels, textes, fictions, fanfictions, musiques, et j'en passe. Il y a beaucoup de stars inscrites sur ce site, ainsi que des youtubeurs ou des personnalités politiques. C'est un support assez intéressant, que beaucoup utilisent et qui est en fait devenu LE réseau social à la mode en 2018, et qui semble toujours rester n°1 en 2019.

Quand enfin j'arrive à mon arrêt, je me dépêche de sortir de la bouche de métro. Je vérifie en même temps une dernière fois où se trouve le Cavern Club, histoire de pas me perdre. La nuit est déjà tombée depuis un moment, et il fait bien plus froid que quelques heures auparavant, quand je suis sortie. Je me demande pourquoi j'ai pas remis mon bonnet ni mes gants, avec mon portable dans la main, j'ai vraiment l'impression qu'elle est gelée.

Tous les passants sont emmitouflés dans des couches de vêtements, il fait vraiment froid. Je finis par ranger mon portable, puis glisse mes mains dans les poches, et la tête dans mon écharpe. Je regarde défiler des immeubles haussmanniens, tous plus beaux les uns que les autres.