Evaline avait passé la nuit à la rédaction. Se nourrissant principalement de café, de thé et de toutes sortes de boissons pouvant la tenir éveillée, la jeune femme avait passé la nuit sur cet article qui lui semblait toujours trop long ou pas assez détaillé. Rien n'était trop beau pour avoir le journal parfait qu'elle s'attendait toujours à publié en fin de mois. Mais celui-ci semblait, pour le moment, compromis.

A la suite d'une énième faute de frappe et d'une centième tasse de café, Evaline se décida finalement à rentrer chez elle. Elle envoya un message à son subalterne pour le prévenir qu'elle serait absente pour la journée, mais que le travail devrait être effectué dans les temps. Et ceci, juste avant de partir du bâtiment de la rédaction, en éteignant son ordinateur. Sur la route, elle croisa un homme en panne sur le bord de la route.

Peu habituée à prendre des auto-stoppeurs, la jeune femme ne fit pas grand cas des signes que lui faisait l'homme et passa sans s'arrêter devant ce dernier. Elle arriva ensuite chez elle et Clark vint aussitôt se frotter contre ses jambes. Souriant franchement cette fois, la brune posa ses clés sur la petite table de l'entrée avant de se baisser pour caresser son chat. Refermant la porte à clé derrière elle, Evaline se dirigea ensuite vers la cuisine pour se faire un semblant de repas.

Elle terminait son yaourt aux framboises lorsqu'on sonna à sa porte. Elle n'attendait pourtant personne. Enfin...personne ne venait jamais la voir, à vrai dire. Intriguée, la jeune femme se leva de sa chaise en bois, mais manqua de se prendre les pieds dans son chat qui tenait absolument à se faufiler entre ses jambes à ce moment précis. Aussi fit-elle tomber un bol en bois ainsi que plusieurs autres souvenirs de leurs étagères lorsqu'elle voulut se rattraper au mur pour éviter de tomber face contre terre.

La personne derrière la porte devait s'impatienter, car elle sonna une seconde fois et Evaline maudit intérieurement Clark et ses mauvaises manières. Elle détestait être en retard, même pour ouvrir une porte. Elle finit donc par arriver à la porte et regarda d'abord par l'œil de bœuf avant d'ouvrir. De ce qu'elle entrevoyait par la minuscule vitre, il s'agissait d'un homme aux cheveux et aux yeux bruns avec un air à la fois sûr de lui et moqueur. Il ne devait pas être beaucoup plus grand ni plus âgé qu'elle.

« Bonjour, la salua aussitôt l'homme avec un grand sourire.

- Bonjour, répondit Evaline sans sourire en regardant le brun d'un air interrogatif.

- Je suis votre nouveau voisin, expliqua ce dernier en trépignant sur place tant il faisait froid, vous m'avez royalement ignoré alors que j'étais en panne sur la route !

- Oh..., fit la jeune femme en écarquillant un peu les yeux d'une fausse horreur, pardonnez moi de ne pas prendre en stop tous les gugusses qui passent. »

Totalement ahuri, l'homme finit par éclater de rire et Evaline se surprit à sourire légèrement. Elle vit alors passer Clark qui alla se frotter aux jambes de l'homme qui calmait peu à peu son rire. La jeune femme hésita à récupérer son chat tout de suite, mais il semblait décider à faire des papouilles au nouveau voisin. Celui-ci baissa les yeux vers le félin avec le même sourire qu'il avait eu en arrivant.

« Clark, grommela la brunette à l'attention du matou, espèce d'infidèle...

- Clark ?répéta l'homme à la barbe de quelques jours, comme Clark Kent ?

- Je pensais plus à Mary Higgins Clark ou Arthur Charles Clarke, ricana gentiment Evaline en regardant toujours le félin qui s'assommait presque contre les jambes de l'inconnu, mais Clark Kent fonctionne aussi. »

Interloqué par tant de noms qu'il ne semblait pas connaître, l'homme ne dit mot et finit par relever les yeux du chat pour les poser sur Evaline. Il lui tendit soudainement la main avec un grand sourire.

« Mon nom secret est Clark Kent, pouffa-t-il légèrement, mais vous pouvez m'appeler Eoin Macken.

- Quand à moi, sourit poliment Evaline tandis que Clark rentrait à l'intérieur de la maison, mon nom est Evaline Mac Dougle. Ravie de vous rencontrer. »

Ils se serrèrent la main brièvement, puis Evaline se redressa contre sa porte d'entrée en regardant Eoin d'un air toujours inquisiteur. Pourquoi ne partait-il pas maintenant qu'ils avaient fait connaissance ?

« Au revoir Evaline, la salua-t-il finalement avec un grand sourire.

- Au revoir monsieur Macken, répondit la jeune femme en inclinant la tête pour le saluer. »

Il ouvrit la bouche en se rendant compte qu'elle ne l'avait pas appelé par son prénom, mais la referma très vite en la voyant clore sa porte. Evaline referma la porte à clé et se tourna vers son chat qui trônait dans l'entrée. Le regardant fixement avec un léger sourire, elle le morigéna intérieurement comme s'il s'agissait d'un enfant qui aurait voulu faire connaissance avec un parfait inconnu. Puis, elle repartit dans la cuisine et termina son yaourt aux framboises.

Très physionomiste de nature, la jeune femme aux cheveux d'ébène essaya aussitôt de se rappeler du plus de détails possibles concernant son interlocuteur inattendu. Il avait un nez assez proéminent, des yeux assez petits et un visage plutôt en longueur. Une barbe de quelques jours avec des cheveux bruns mi-longs. Sous sa veste, elle avait pu discerner une musculature correcte sans être trop voyante. Une fois ceci fait, elle pouvait passer à autre chose.

Elle passa son après-midi à continuer son travail avec Clark qui ronronnait de temps à autre en s'étirant avec un air épuisé. Elle tenait absolument à terminer cet article avant de revenir aux bureaux le lendemain. Et quand elle voulait quelque chose, elle trouvait toujours un moyen d'y arriver. Aussi passa-t-elle par des sites plus ou moins légaux pour trouver les informations dont elle avait besoin pour finaliser son article en milieu de soirée.

La jeune femme finit néanmoins par laisser son ordinateur de côté pour faire une sieste de plusieurs heures. Elle savait pertinemment qu'elle ne dormirait pas beaucoup durant cette nuit...Ni durant les autres nuits d'ailleurs. Le mois de décembre était, sans aucun doute, le mois qu'elle détestait le plus.

Dormir mal réussissait rarement à Evaline. Et en général, cela ne sentait pas très bon pour les gens qui se trouvaient autour d'elle. Même pour son chat. Et ça n'allait, très probablement, pas aller mieux au fur et à mesure que les jours passeraient.