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𝑪𝒉𝒂𝒑𝒊𝒕𝒓𝒆 𝟒 : 𝑻𝒆𝒎𝒑𝒆̂𝒕𝒆

Le vent soufflait sur la capitale coréenne et des nuages noirs s'amassaient à l'horizon. Les volets claquaient alors que les rares personnes encore dehors se hâtaient vers chez elles, pressées de retrouver leur foyer et de se mettre au chaud en prévision de la tempête qui s'approchait.

Dans un quartier plutôt calme se trouvait un immeuble tout aussi calme qui abritait un appartement qui était, lui, tout sauf calme.

Les membres de Stray Kids avaient profité de la tempête et de leur interdiction de sortie pour se retrouver tous ensemble dans l'appartement de Minho, Seungmin, Félix et Jeongin, en souvenir d'une époque désormais finie. Félix avait fait plus de Brownie que pour un régiment entier, Changbin et Han avaient acheté des dizaines de bougies parce qu'ils s'étaient trompés dans la commande et avaient tout commandé en dix exemplaires, et Minho était aux fourneaux depuis le milieu de l'après-midi, assisté d'un Chan beaucoup trop excité et d'un Seungmin beaucoup trop blasé. Le reste avait monté un véritable fort dans le salon, utilisant le prétexte de la tempête pour revenir en enfance (un stade que certains n'avaient jamais réellement quitté).

C'était trois jours après la révélation de Han à Minho et à leur baiser (et à la dizaine qui avait suivi). Ayant enchaîné les interviews, ils n'avaient pas réellement eu l'occasion d'en reparler et avaient décidé d'un commun accord de ne pas s'en préoccuper pour l'instant afin de pouvoir se pencher réellement sur la question dès qu'ils auraient du temps.

Chris et Félix étaient les seuls à être au courant, ayant eu le rôle de psychologue pour les deux compagnons, et à tour de rôle puisque que Minho avait bien entendu fini par aller voir son Hyung, et Han son compagnon de toujours, Félix. En attendant de pouvoir en parler, Han et Minho faisaient comme si de rien n'était et leur relation n'avait en réalité pas vraiment bougé. Ils continuaient de se chercher, de s'engueuler pour rire et de faire des alliances contre les autres. Ils avaient aussi validé la date pour le tournage du clip qui aurait lieu deux jours après. Et puis parfois, ils se jetaient des regards, lourds de sens. De temps en temps, lorsque leurs mains se frôlaient des picotements se faisaient ressentir sur leurs peaux. Il arrivait même que leurs doigts se croisent, à peine quelques instants, juste pour se rassurer sur la présence de l'autre, avant de revenir sur la terre ferme.

« Ça va Han ? T'es dans la lune ? »

Le brun sourit à Hyunjin alors que ce dernier s'asseyait à ses côtés.

« Je suis crevé, j'arrête pas depuis ce matin, soupire-t-il.

- Tu devrais arrêter de bosser jusqu'à je sais pas quelle heure. Tu restes toujours plus tard que nous dans les locaux.

- Chan aussi.

- Lui c'est une cause perdue.

- Vous parlez de moi ? »

Le leader était apparu comme par magie, du chocolat sur la joue et les cheveux en bordel.

« Et donc c'est ça notre leader » ricana Jisung.

La main de Chan fusa vers le crâne du brun qui grimaça et se mit à râler que "de toute façon personne ne m'aimes ici, je ferais mieux de quitter ce groupe remplie de personne violente".

Il fut cependant coupé sans sa tirade par un oreiller plaqué sur son visage par Minho qui venait de sortir de la cuisine pour voir la cause de tous ces cris.

« Blblblbl je meuuurs, glouglouta Jisung en se roulant sur les couvertures sous les rires de Chan et Hyunjin et le regard désabusé de Minho.

- Arrête de faire ta drama queen. Laisse ce job à Hyunjin.

- Je ne suis pas une drama queen, marmonna le concerné.

- On t'aime comme ça sweety, assura le leader en serrant l'épaule du blond.

- Au moins toi on t'aime, cria Han. Moi on me martyrise !

- Moi je t'aime baby. »

Han s'étrangla alors que Chan se retenait de rire et que Minho plaquait une main sur sa bouche. Le regard de Hyunjin passa de Han à Minho, puis de Minho à Han, et finit par aller rencontrer celui de Chan. Ce qui était bizarre n'était pas la réponse de Minho, il avait l'habitude de jouer le dragueur avec eux, surtout avec Han, non, c'étaient plutôt leurs réactions.

« J'ai loupé quelque chose ?

- Des cours de beauté, répondit Jisung du tac au tac. Ta laideur m'aveugle.

- Je te déteste Han Jisung, je vais voir Félix, lui au moins il m'aime pour ce que je suis. »

Les trois compères regardèrent Hyunjin disparaître derrière une porte avant que Bang Chan se tourne vers eux, un léger sourire goguenard sur les lèvres.

« C'était moins une, dit-il.

- C'est la faute de Minho.

- Oh ça va... Va bien falloir qu'on leur dise un jour au l'autre. On s'en sortira pas sinon.

- Qu'est-ce que tu veux qu'on leur dise ? »

Le visage de Han s'était froissé et Minho sentit son cœur se serrer. Alors il posa sa main sur celle de Jisung, essayant tant bien que mal de lui communiquer sa force.

« Ne vous prenez pas la tête, dit Chan en leur adressant un sourire qu'il voulait rassurant. Vous leur direz quand vous voudrez. Et quand vous aurez vous-même décidé ce que vous voulez faire. »

Ils hochèrent la tête. C'était tout ce qu'ils pouvaient faire pour le moment.

_____

La nuit était tombée depuis longtemps, la tempête s'était calmée dans les alentours de minuit et les membres de Stray Kids avaient fini par tous s'écrouler dans le salon, les uns après les autres. Ils dormaient paisiblement après avoir bien joué et fait n'importe quoi pendant la soirée, ou presque tous puisqu'il y en avait un qui ne dormait pas encore.

Sous ses cheveux roux, Minho regardait Jisung dormir. Dans la pénombre ambiante il pouvait à peine le voir, mais ça lui rappelait l'Australie, la plage, les étoiles... et son envie de l'embrasser.

« Hannie, murmura-t-il en posant sa main sur sa joue. Tu dors ?

- Non, lui répondit l'autre en ouvrant les yeux.

- Viens. »

Il l'aida à se lever et entrelaça ses doigts aux siens pour l'entraîner vers sa chambre. Han se figea sur le palier. C'était débile, il était venu dans cette pièce des centaines de fois auparavant.

« T'as faim ? lui demanda Minho sans se rendre compte de son malaise.

- Toujours.

- Et après tu te plains de tes grosses joues.

- Je croyais que tu les aimais bien mes grosses joues.

- C'est le cas. »

Il lui pinça affectueusement avant d'aller chercher les brownies qu'il restait – Félix en avait réellement fait pour tout un régiment.

Jisung resta au milieu de la pièce, les bras serrés autour de son torse. La chambre de Minho était la même qu'il l'avait toujours connue. Le lit qui trônait dans un coin était le même, le livre qui était posé sur la table de nuit depuis des mois en attente d'être lu était toujours le même, les armoires de bois blancs étaient toujours les mêmes, le mur au-dessus du bureau était toujours remplie de photos, le tableau qu'avait fait Hyunjin pour son anniversaire était toujours accroché au mur. Tout était pareil, et pourtant quelque chose avait changé.

« Hannie ? »

Il sursauta et se retourna pour trouver Minho sur le pas de la porte qui le regardait, une lueur d'inquiétude dans les yeux.

« Tu t'assois pas ? »

Han ne sut quoi répondre. Quelque chose le dérangeait, mais il n'arrivait pas à mettre le doigt dessus. Alors Minho lui prit doucement la main et l'entraîna vers le tapis au pied du lit sur lequel ils s'assirent en silence.

« Désolé mais je veux pas-

- Pas de miette sur le lit, termina Han. Je sais. »

Minho eut un sourire penaud et ouvrit le tupperware. Par la fenêtre on pouvait voir la Lune pointer entre les derniers nuages survivant de la tempête qui avait sévi sur la capitale coréenne.

Han prit un brownie tandis que Minho posait négligemment son bras sur un de ses genoux et l'autre autour des épaules du plus jeune.

« Minho ?

- Hum ?

- Faut qu'on discute là.

- Je sais.

- C'est quasiment que moi qui aie parlé la dernière fois. À ton tour. »

Minho poussa un long soupir et laissa tomber sa tête sur le lit contre lequel ils s'étaient appuyés.

« Hannie, finit-il par murmurer. Tu ne peux pas savoir ce que tu me fais... »

Han eut un léger sourire qu'il tenta vainement de réfréner. Savoir qu'il avait un effet sur Minho, quel qu'il soit, lui faisait bien trop plaisir...

« Développe » finit-il par dire, un sourire dans la voix.

Minho releva la tête et plaqua sa main sur la bouche de Jisung en levant les yeux au ciel.

« Enlève ce sourire de vainqueur, j'ai encore rien dit que tu simp déjà.

- Parce que toi non peut-être ?

- Moi je ne l'ai jamais caché, t'es juste aveugle.

- Hein ?

- Deux.

- Trois.

- Soleil.

- C'est pas le moment pour ça Minho.

- Pourquoi tu me suis alors ?

- Ça suffit ! rigola Jisung. Parle ! »

Et il parla. Son regard fixé sur celui de Jisung qui ne faisait que l'éviter, il lui raconta comment depuis toujours il l'avait toujours trouvé incroyable, talentueux, beau, mais qu'il avait relégué son crush au fond de son esprit dans l'espoir de rester un minimum professionnel. Il lui raconta qu'il détestait ce sentiment d'impuissance qui l'étreignait quand l'anxiété de Jisung prenait le dessus. Il lui raconta que malgré tout ça, il s'était persuadé qu'il n'y avait rien, et que toute façon Jisung était trop bien pour lui.

Sauf que là, Jisung n'était pas d'accord.

« Ah non, dit-il en se tournant vers lui et en plantant enfin son regard dans celui du roux. S'il y en a un qui est trop bien pour être avec l'autre, c'est toi !

- Pfff n'importe quoi. T'es bien trop incroyable pour être avec quelqu'un comme moi. »

Cette fois-ci, ce fut Minho qui détourna le regard.

« Tu mérites quelqu'un qui puisse te donner 100 % de son attention, dit-il doucement. Quelqu'un qui puisse te faire te sentir aimé et qui te rende tout ce que tu lui donnes. Pas quelqu'un qui serait juste un poids, pas quelqu'un comme moi qui fuit dès qu'il faut avoir des responsabilités, et qui déteste-

- C'est tellement n'importe quoi ce que tu racontes Minho. »

Han se leva pour se poster devant la fenêtre, les bras croisés. Ici, les étoiles n'étaient pas visibles, évidemment, il y avait trop de lumière, mais leurs souvenirs étaient imprimés dans son esprit. Il se retourna pour regarder Minho qui n'avait pas bougé.

« Rien qu'en disant ça tu prouves que tu es bien trop bon pour moi. Tu dis que j'ai besoin de quelqu'un qui me donne 100 % de son attention ? Mais Minho jamais je ne pourrais faire ça moi. J'ai beaucoup trop de trucs à faire, tout le temps, comment veux tu que j'attende de quelqu'un quelque chose que je ne suis pas moi-même en mesure de fournir. »

Minho fronça ses sourcils mais n'eut rien le temps de dire que Jisung continuait.

« T'as parlé de mon anxiété tout à l'heure. Honnêtement, tu es celui qui en a le plus vu les conséquences. Tu sais très bien que ça me bouffe et que j'ignore juste le problème. En réalité, j'arrive pas du tout à gérer. »

Les larmes lui montèrent aux yeux alors que ceux de Minho s'ouvraient en grand.

« Et ensuite tu viens me dire que toi, tu serais un poids ?

- Jisung, murmura Minho en se levant doucement. Je t'assure que tu n'es pas un poids à mes yeux. »

Il se tenait devant lui maintenant, ses mains sur ses joues et ses pouces essuyant doucement les larmes qui coulaient le long des joues du brun devant lui.

« Toi non plus, sanglota Jisung. T'es la seule chose qui me permet de tenir. »

Leur baiser avait le goût des larmes de Jisung et du baume à lèvre à la cerise de Minho. Il avait le goût des aveux, de la complicité, et peut-être même de l'amour. Les bras de Jisung étaient passés derrière le cou de Minho alors que ce dernier avait posé ses mains dans le bas de son dos, le tenant contre lui comme si sa vie en dépendait. Les lèvres de Minho dérivèrent vers le cou de Jisung qui souriait à travers ses larmes. Ils s'accrochaient littéralement l'un à l'autre, comme si leurs vies en dépendaient, et au final c'était peut-être le cas.

La main de Jisung descendit le long du torse de Minho pour le repousser légèrement et entrelacer leurs doigts. Il lui sourit doucement, provoquant une myriade de sentiments dans le ventre de Minho qui lui sourit à son tour, repoussant du bout des doigts les cheveux qui étaient tombés sur le front du brun. Il l'entraîna alors vers le lit et l'attira entre ses bras avant de lui embrasser le front.

« Et les autres ? murmura Jisung. Qu'est-ce qu'ils diront s'ils voient qu'on a dormi ensemble ?

- On les emmerde les autres, répondit Minho. T'es le seul qui importe. »

La Lune à des milliers de kilomètres de là se mit à briller un peu plus. Leur cheminement sera très sûrement semé d'embûches, mais si c'est le prix à payer pour que leur amour persiste, alors elle savait qu'ils étaient prêts à subir les conséquences, leurs mains liées, et leurs regards rivés l'un sur l'autre.

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