Welcome to Ohio
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Exténuée. J'étais totalement exténuée et je n'arrivais plus à réfléchir convenablement. J'avais commandé un taxi et il m'avait mené directement vers l'hôpital. Quand mon père me vit arriver, il m'ouvrit les bras et je m'y fourrais directement.
-Alors ? Ce dernier jour d'examen ?
-Je propose qu'on en reparle plus jamais. Je suis dead. Je ne veux plus jamais réfléchir. Jamais. Tu finis quand ?
-Dans deux heures.
-Je vais aller dormir au service pédiatrique, ils ont un super fauteuil là-bas. Tu viendras me rechercher en partant, d'accord ? J'ai abandonné tout le monde pour venir te faire un câlin. Tu m'as trop manqué ces derniers jours. On s'est pas trop vu, c'était pourri. Heureusement que j'ai raté mes examens, comme ça je partirai pas.
-Sarah, tu te déprécies toujours. Va te reposer dans mon bureau. Je n'en ai pas l'utilité pour les deux prochaines heures, je dois surveiller un de mes résidents au bloc pour une opération de routine... à moins que tu ne veuilles venir ? Tu t'installes dans un coin et on passe un peu de temps ensemble ?
-Vendu. Tu vas faire ton sadique ?
-Non ! Je ne veux pas trop le stresser et tu m'as manqué. Tu m'as vachement manqué.
Je lui souris et je partis me préparer avec lui. J'observai chacun de ses gestes et je les reproduisais avant de passer dans le bloc stérile. Mon père salua tout le monde personnellement et se tourna vers moi.
-Ma fille Sarah va rester avec nous un moment afin de se familiariser avec l'intérieur de mon bloc. Dans quelques années, elle tiendra un bistouri après tout. Gideon, vous êtes prêt, rendez-moi fier de vous. Si vous avez besoin de moi, je suis là et si ça peut vous aider, détaillez la procédure à voix haute.
Mon père nous installa sur deux tabourets et m'expliqua comment interpréter les moniteurs. Ce dernier s'affola et mon père leva un peu les yeux.
-Dr McAllister ?
-Concentrez-vous Gideon. Vous pouvez y arriver sans moi.
Mon père finit par se lever et observer le travail de son collègue. Il avait l'air de paniquer et mon père leva les yeux au ciel.
-Vous permettez ?
J'observai sur l'écran la retransmission de ce que mon père faisait. Il suturait et je l'entendis fredonner. Il ne paniquait pas, il s'amusait. Il expliquait son erreur à son résident et il le laissa continuer seul. Il s'écarta. J'observai les mains de mon père, dégoulinante du sang de cet inconnu et cela me renvoya à ma propre opération. C'était la dernière fois que j'étais rentrée dans un bloc. Luis devait avoir mon sang sur les mains, littéralement.
-Sarah, tout va bien ? Tu n'as pas l'air d'aller très bien.
-Je me disais que la dernière fois que je suis rentrée dans un bloc, c'était moi sur la table, c'est tout. Je trouve que vous vous débrouillez très bien monsieur.
Il me remercia et continua son opération. Je me calmai au son des moniteurs et je me mis à parler avec l'anesthésiste jusqu'à ce que l'opération soit terminée et que mon père retire ses gants. Il me releva la tête.
-Ça te va très bien d'être comme ça, tu sais ? Tu ressembles à Elena. Viens, on va se laver les mains.
-Tu te souviens du Noël où j'ai eu Dr Maboul ? fis-je alors que nous nous lavions les mains. J'avais lavé mes mains comme tu m'avais montré.
-Je m'en souviens comme si c'était hier. Je me souviens de tous les moments importants. Je vais avoir besoin de toi les prochains jours. Je vais vraiment avoir besoin de toi pour m'empêcher de devenir trop...
-Con ? Arrogant ?
-Les deux sûrement.
-Papa. T'es un mec bien. Ta Grand-Mère va le voir et elle verra à quel point on est cool. Au pire, l'Ohio c'est juste à côté de la Pennsylvanie. On a juste à prendre l'avion et on ira voir Amélia chez elle. Duncan nous rejoint à l'aéroport là-bas, il a insisté pour venir. Il voit ça comme une expérience de vie à la campagne je crois.
-Ses Grands-Parents étant des magnats du pétrole, c'est certain que la vie à la campagne, il ne connait pas.
-D'ailleurs, tu trouves pas que Valentina est un peu trop écolo pour une fille de pétroliers ?
-C'est vrai, mais elle est intelligente.
-Tu penses que lorsqu'on est pas écolo, on est pas intelligent ?
-Je pense que c'est notre devoir en tant qu'espèce dominante sur cette planète de la protéger. Il faudrait être un fou pour ne pas se soucier de la mort progressive de notre habitat commun. Donc oui, clairement je pense que lorsqu'on vit sans se soucier de son impact sur le monde, on est stupide. Mais y'a beaucoup de gens que je trouve stupide, tu le sais bien.
-Ceux qui ne laissent pas leur place dans les transports en commun, les hommes qui s'occupent pas de leurs enfants, ceux qui laissent des détritus sur la plage...
-Eux, je les hais. C'est totalement différent.
Je le fixai une seconde et nous nous mîmes à rire. Il retira son calot et le posa sur mon crâne.
-Je propose un truc. Si quelqu'un dit Dr McAllister, tu réponds à ma place. Ça va tellement les perturber qu'ils oublieront ce qu'ils voulaient me dire et on pourra rentrer plus vite.
-Vendu.
Nous étions à peine sortis qu'un membre du personnel appela mon père. Je me retournai et je répondis d'un ton un peu froid un « Oui ? J'espère que c'est urgent, j'ai un patient à aller préparer pour le bloc ». Visiblement, c'était un interne parce qu'il perdit tous ses moyens.
-Alors ? Vous comptez rester ici à ne rien dire ?
J'entendis un immense éclat de rire derrière moi et je vis Wolf se tordre de rire avec mon père.
-Elle le fait trop bien. Je te jure. C'est une urgence ?
-C'est à propos de la patiente en 326-4...
-J'arrive. Sarah ! Va te changer, démarre la voiture, on va faire un remake de James Bond dans quelques minutes.
Je l'embrassai sur la joue doucement et je fis ce qu'il me demandait. J'entrai dans sa voiture et je l'attendis pratiquement devant la porte de l'hôpital. Mon père s'engouffra dans la voiture.
-Tu peux démarrer, c'est bon.
Je lui obéis et une fois à la maison. je m'affalai sur le canapé juste à côté de Brian. Paul et Sophie étaient également là. Brian étendit son bras et je m'installais tout contre lui.
-Vous ne sortez pas pour fêter vos SAT ?
-Nan. On regarde une série à la con jusque demain matin !
-Au fait John, j'ai demandé à mes parents et ils sont d'accord pour qu'on vous dépose à l'aéroport demain. Comme ça on vous ramène vos voitures chez vous pendant votre séjour dans l'Ohio.
-Ce serait super, je vais les remercier Paul. Vous restez ce soir de toute façon.
Mes amis acquiescèrent et nous retournâmes à la sitcom qu'ils avaient enclenché avant mon arrivée. Après le dîner et le coucher du Tom, nous enchainâmes sur un film d'action. Je tournai les yeux vers Sophie et elle était à deux doigts de s'endormir sur Paul contre qui elle était totalement avachie. Elle finit par fermer les yeux et totalement s'assoupir. Lorsque Paul s'en rendit compte, il demanda à mon père de lui passer une des couvertures près de lui et il en recouvrit Sophie. J'étais presqu'aussi fatiguée que ma meilleure amie mais pas suffisamment pour m'endormir sur Brian ! Elle se réveilla à la fin du film.
-Je suis totalement défoncée, marmonna-t-elle. Je me suis levée aux aurores ce matin. Si ça vous dérange pas, je vais aller me coucher.
-Vous l'êtes tous, sourit Mary. Allez vous coucher les enfants, John et moi allons ranger.
Mon père acquiesça et nous montâmes tous dans nos chambres. Je redescendis après m'être déshabillée pour chercher une petite bouteille d'eau et je vis Mary et mon père s'embrasser dans le salon comme deux ados en chaleur. Je pris ce dont j'avais besoin et je remontai dans ma chambre. Je croisai Brian dans le couloir devant ma porte.
-Tu as besoin d'un truc ?
Il sursauta et il me fit un sourire en coin.
-Je voulais juste vous souhaiter une bonne nuit et j'ai hâte de repartir en road trip avec toi. J'ai demandé à John et il a dit qu'il nous prendrait une voiture pour Duncan, toi et moi. On lui laissera Tom et on aura l'impression d'être en vacances, pas vrai ?
-Oui, exact. Passe une bonne nuit Brian.
Je l'embrassai sur la joue et je partis me reposer quelque peu. Le lendemain serait un jour de voyage et je devais être en forme. Je me réveillai en pleine nuit. J'avais rêvé de Wyatt et j'avais dû aller vomir. Je sentis une main tenant mes cheveux.
-Tu vas bien ? Tu veux que j'aille chercher ton père ?
-J'ai juste cauchemardé, ça va aller Sophie.
Je me rinçai avec le bain de bouche qu'elle me tendit et nous retournâmes dans la chambre.
-Tu sais... Cameron va partir dans un mois. Je ne sais pas ce que je vais devenir sans lui. Enfin je veux dire, si je sais ce que je vais faire, mais ne plus le voir tous les jours, ça va me faire tellement bizarre. Tu crois que si je supplie Papa, je pourrais aller en Angleterre pour Pâques ? Je sais qu'il ne rentrera pas et sera seul là-bas.
-Je crois que ton père ferait beaucoup pour toi. Tu es sa princesse chérie après tout.
Nous continuâmes à parler jusqu'à ce que mon père vienne nous réveiller. Il ouvrit la porte et nous fit un sourire.
-Je pensais vous réveiller. Je vais aller faire le petit déjeuner, Mary est partie aider Tom à se préparer.
-On arrive Papa. Je peux prendre votre salle de bain pour aller plus vite ?
Il acquiesça, m'embrassa sur la tempe et je filai me laver. Nous avions préparé nos bagages mardi soir pour être tranquille. Je sentais l'excitation me prendre la gorge. J'allais partir à l'aventure et rencontrer une partie de ma famille dont, six mois auparavant, je ne soupçonnais pas l'existence. Les McDust et Sophie nous accompagnèrent à l'aéroport et Paul me serra dans ses bras en murmurant « La mission Sauvons le soldat Harper commence ». Il me fit un clin d'œil et je m'éloignai pour rejoindre Tom. Ce dernier était excité comme tout à l'idée de manquer l'école et il était presque intenable dans l'avion qui devait nous mener dans l'Ohio. L'aéroport où nous devions arriver était à Colombus et nous avions un peu moins de deux heures de route à la suite pour aller à Dresden où les Grands-Parents de mon père vivaient. Je n'étais pas fatiguée et je profitai du voyage pour lire sur la tablette de Brian qu'il m'avait gentiment prêté. Il était assis près de moi et dessinait au fusain. Lorsque je cessai de rire, je vis qu'il m'avait représenté.
-Wow, Brian c'est super bien fait.
-Je ne suis pas satisfait. Ce n'est pas vraiment toi. Ce n'est pas assez ressemblant.
-Mes yeux ne sont pas aussi rieurs et mes lèvres pas aussi pulpeuses.
-Au contraire, c'est sûrement la seule chose qui te ressemble. Tu as la bouche de ta Maman. Je l'ai vue sur une photo de vous deux.
-Je trouve que je lui ressemble de plus en plus en vieillissant, même si étrangement.. plus le temps passe, plus son visage me devient flou. Je me suis fait la réflexion tout à l'heure que si je n'avais pas d'enfant, alors, elle disparaitrait avec moi. Elle n'aurait pas de descendant. Je suis le seul espoir pour qu'elle vive encore un peu et.. ça me terrifie Brian.
-Tu as peur d'être une mauvaise mère Sarah ?
-Je le serai. Je n'ai aucun instinct maternel et je suis devenue un peu sauvage le temps où il n'y a pas eu de femme à la maison.
-Quand on aura l'âge d'avoir des enfants, je te remettrai sur le bon chemin.
-On ? Séparément ou ensemble ?
-Séparément, qu'est-ce que tu crois ?!
Il se mit à rire et il reprit une autre feuille pour dessiner. Je repris mon livre et je faillis m'étouffer de rire. Je posai ma tête sur Brian pour continuer de lire jusqu'à ce que Tom se retourne sur son siège.
-Sarah, ça te dit de faire une partie de carte avec moi ? Je m'ennuie.
Je me levai pour aller contre lui et nous jouâmes jusqu'à l'atterrissage où Tom serra ma main pour ne pas que j'ai peur. À l'aéroport, je fus la première à repérer Duncan, nonchalamment adossé à un mur en train de flirter avec une fille. Duncan s'était coupé les cheveux et quand je passai une main dedans après avoir couru vers lui, il sourit.
-Je me suis dit que si je me présentai devant nos Grands-Parents de secours avec des cheveux mi-longs et ma face de bisexuel semi-latino, j'allais me prendre des cailloux de la populasse de l'Ohio.
-Tu n'es pas un peu pessimiste toi ?
-On va dans la campagne profonde, alors non. J'espère juste que les parents de Grand-Mère Maddie ne sont pas racistes, sinon je te jure, je pars dans la minute. Tooom !
Il réceptionna Thomas dans ses bras et l'embrassa. Je n'avais jamais pensé à ça... que certaines personnes ne voyaient que le métissage de Duncan. À demi-mots, j'en parlais à mon père qui s'approcha de Duncan.
-Dun', j'ai promis à ton père de prendre soin de toi. Si j'entends la moindre remarque à ton égard, je collerai moi-même mon poing dans la figure de la personne. N'aie pas peur pour ça et mes Grands-Parents ne sont pas aussi stupides.
Il l'embrassa sur la tempe et il nous laissa les clefs de la voiture. Dresden était à un peu plus d'une heure de route et je les passai à rire avec Brian et Duncan. Il y avait tellement de larmes qui sortaient de mes yeux que je faillis en avoir mal à la tête. Mon père nous appela pour nous dire que nous allions nous arrêter pour déjeuner dans la ville avant de rejoindre la maison de ses Grands-Parents. Je vis un panneau annonçant l'entrée de la ville de Dresden. C'était vraiment un coin perdu. Nous nous arrêtâmes dans un petit restaurant traditionnel et je vis au regard de mon père qu'il était ému d'être ici. Je m'assis à côté de lui à table.
-Ça va bien se passer et puis au pire, ça nous fait un week-end en famille.
-Tu as raison.
-D'ailleurs John, honey, à quelle heure devons-nous aller chez tes Grands-Parents ?
-Aucune idée Mary.
-Ils ne t'ont pas donné d'horaire ?
-Je ne les ai pas appelés ?
Mary écarquilla les yeux.
-Tu n'as pas prévenu tes grands-parents que nous arrivions chez eux ?
-Je me suis dit que l'effet de surprise serait du meilleur effet. Par contre, nous devons prendre les clefs de notre location dans quinze minutes. Je vais y aller, ce n'est pas très loin d'ici.
-Je viens avec toi Papa, fis-je en me levant à mon tour.
Il me tendit son bras et je le saisis pour lui donner de la force. Il avait besoin de ça. Il était stressé comme ce n'était pas possible. Il était emmitouflé dans son écharpe et ne parlait pas beaucoup. Il releva les yeux et il se figea, blême.
-Papa ? Qu'est-ce qu'il y a ?
Il attrapa ma main et traversa en plein milieu de la route. Il marchait assez vite et me tenait fortement. Il frappa à la vitre d'une camionnette et je vis un homme tourner la tête vers lui. J'eus un choc en voyant les yeux de ma Grand-Mère. Il eut lui aussi un mouvement de surprise et ouvrit la portière.
-Joe ?
-Salut Grandpa.
Le vieil homme sortit totalement et je vis qu'il était grand comme mon père avec une carrure similaire. Il le regarda un instant, interdit, avant de le serrer dans ses bras avec une émotion très grande. Je vis presque des larmes dans ses yeux et je me reculai un peu sur le trottoir.
-Mon garçon. Mon grand garçon. Je..
Il chercha ses mots et ses yeux croisèrent les miens. Il tendit la main vers moi.
-Tu dois être Sarah, murmura-t-il en posant sa main sur mon épaule.
-Oui Monsieur.
-Appelle-moi Grandpa. J'ai eu beaucoup de peine en apprenant le décès de ta Maman. Elle était gentille.
-Oui Mon.. Grandpa.
Je jetai un coup d'œil à mon père et je vis son émotion à lui aussi. Il ressemblait presqu'à un enfant ainsi. C'était très perturbant. Son Grand-Père tourna les yeux vers lui.
-Je suis... je suis désolé de ne pas être venu à ton mariage mon petit Joe, ma santé n'est plus ce qu'elle était et je...
-Il n'y a pas de souci, l'interrompit mon père avec une grande gentillesse. Je suis venu avec toute ma famille et Duncan, le fils aîné de James.
-Je suis tellement content de te revoir. Tu m'as manqué fiston. Mandy sera très contente aussi. Va chercher ta famille, nous allons à la maison.
-Nous devons récupérer les clefs de notre location dans quelques minutes Grand-Pa.
-Une location ? Non. Vous logerez le temps de votre séjour à la maison. Il y a suffisamment de place. Je dois.. je dois chercher quelque chose chez mon ami Dave.
-Dave Reuters ? C'est lui qui nous a loué une maison. Je vais venir avec toi. Sarah ? Tu peux retourner auprès des garçons et de ta belle-mère ? Je reviendrai vous chercher.
-Bien sûr Papa.
Je les laissai seule avec une sensation étrange au ventre. Grand-Mère ressemblait beaucoup à son propre père et j'avais reconnu Duncan en lui également. Je repassai la porte du dinner et je me laissai tomber à ma place.
-Je viens de croiser Lloyd Booth avec Papa. Ils sont partis ensemble. Apparemment, on va loger directement là-bas.
-Alors ? s'exclama Duncan. Il est comment ?
-Comme toi. Tu lui ressembles et... ça m'a fait vraiment bizarre. On lui ressemble tous un peu je crois. Il a un regard très doux. Je comprends pourquoi Papa l'aimait tellement. Il a dit qu'il reviendrait nous chercher. Je pense que je vais prendre de la tourte aux pommes, je me sens vraiment bizarre.
-C'est l'émotion ma chérie. Comment a réagi ton père ?
-Il...je l'ai rarement vu comme ça, je crois qu'une part de lui s'est reconnectée. Je suis contente qu'on fasse ça pour lui.
Ma tourte arriva, je l'avalai en quelques bouchées. Je reposai ma fourchette au moment où mon père revint dans le restaurant.
-Vous avez fini ?
-Papa, tu n'as rien avaler.
-Je n'avais pas faim. Je vais prendre un café à emporter et régler la note, vous m'attendez dans la voiture ?
Mary nous fit signe d'y aller et je la vis glisser sa main dans celle de mon père. Je laissai Tom monter avec Duncan et Brian et j'attendis mon père et son épouse. Ils s'embrassèrent en sortant du restaurant et nous montâmes en voiture. Mon père avait un beignet en main qu'il avala tout en conduisant.
-La dernière fois que je suis venu ici, je venais tout juste d'avoir mon permis. Ça me fait vraiment bizarre. Sarah, tu te souviens de ta promesse ? Il faut que tu la tiennes maintenant.
J'hochai la tête et mon radar à réflexion de connard s'alluma. Nous conduisîmes une dizaine de minutes sur des chemins un peu escarpé et nous passâmes par un portail en bois ouvert. Je pouvais sentir l'excitation de mon père et toute sa fébrilité. Je posai ma main sur son épaule tandis que Mary frôlait sa joue.
-Je n'avais jamais entendu mon Grand-Père parler autant que tout à l'heure. Jamais. C'était peut-être une erreur de revenir. J'aurais dû appeler.
-Ça va bien se passer avec ta Grand-Mère. J'en suis certaine. Je suis là, John. Si tu veux qu'on parte juste après que tu aies parlé à ta Grand-Mère, on le fera.
Il roula jusque devant une maison assez mignonne avec un porche en bois.
-Vous pouvez m'attendre ici une minute ?
Il sortit sans attendre la réponse, claqua la portière et je me rapprochai de Mary tout en répondant au téléphone.
-On ne sort pas ?
-Papa tente une approche et... je la vois.
Une petite dame sortit sur le perron au moment où mon père le grimpait. Ils se figèrent tous les deux et la dame fit tomber le tissu qu'elle avait en main. Il se pencha pour le ramasser et quelques secondes plus tard, il serrait la dame contre lui. Il lui prit la main et tourna un visage rempli d'espoir vers nous.
-On peut descendre, murmurai-je en ouvrant la portière.
J'entendis celles des garçons derrière moi et Brian s'avança pour aider sa mère à descendre. La femme que je voyais arriver vers nous ressemblait tellement à la mère de mon père que cela me choqua presque. Elle avait un regard d'aigle, comme les sœurs de Duncan. Elle posa son regard sur moi et je restai un peu interdite.
-C'est un réel plaisir de vous rencontrer, Grandma, fit Duncan pour me sauver.
Il lui saisit les mains et eut un sourire apaisé.
-Mes petites sœurs vous ressemblent beaucoup. Quand je vous vois, je me sens à la maison.
Duncan lui fit son sourire de McAllister et Miranda Booth tomba sous son charme. Je le vis tout de suite. Duncan lui proposa son bras et ils rentrèrent tous les deux. Mon père avait perdu sa voix, j'en avais bien l'impression. Tout comme moi. Lloyd était assis dans un fauteuil près d'une grande cheminée et il se leva en nous voyant tous. Il sourit avec gentillesse et nous invita à nous asseoir. Duncan avait serré sa main avec enthousiasme et le Grand-Pa avait ri.
-Je trouve que tu ressembles beaucoup à ton arrière Grand-Père, Aonghas. C'était un homme bien.
-C'est un honneur, monsieur.
Mon père avait disparu et il finit par m'interpeller pour que je vienne. Je suivis sa voix jusqu'à une cuisine tout en bois. Elle avait un côté suranné tout à fait charmant.
-Sarah, peux-tu emmener ce plateau dans la cuisine ?
-Oui, Papa. Je.. je suis contente de vous rencontrer, madame. Papa m'a dit que vous lui aviez appris à se servir d'une aiguille et qu'il ne serait pas le chirurgien qu'il est aujourd'hui sans vous.
-Tu lui as dit ça, John ?
-Oui. Sarah ?
Je pris le plateau et je l'emmenai dans le salon. Je revins pour reprendre le second mais je m'arrêtais en les entendant parler.
-Merci. J'ai fait ce que j'ai pu en tout cas. Ce n'était pas forcément facile après le décès de ma femme mais, maintenant que j'ai Mary, Sarah a de nouveau une femme à la maison, ça va lui faire du bien. Tu n'as pas l'air surprise de me voir.
-Ta mère m'a appelé il y a deux jours pour me prévenir de ton projet. Je n'ai pas prévenu ton Grand-Père, je ne savais pas réellement si tu allais venir ou pas. Je ne voulais pas lui faire une fausse joie.
-Je devais venir. Ma femme est enceinte, je vais adopter son petit dernier et... ça remet certaines choses en perspective. Je ne serai pas devenu l'homme que je suis sans le temps que j'ai passé avec vous deux. Je ne veux pas que mes enfants deviennent des cons arrogants. Et je suis tellement désolé de t'avoir parlé comme ça. Je sais que si Maman l'avait su, je me serai fait tirer les oreilles, pourquoi tu ne lui as rien dit ?
-Cela aurait changé quoi John ? répondit-elle avec un ton acerbe. Tu pensais parfaitement ce que tu disais et je le pensais aussi.
-Et maintenant tu penses quoi Grandma ?
-Je suis contente d'avoir vu au moins une fois certains de mes arrières petits-enfants avant de mourir. Nous devrions emmener le café.
Je me montrai à ce moment là et j'emmenais la suite dans le salon. Tom avait les yeux brillants.
-Est-ce que je pourrais aller les nourrir ? s'exclama-t-il. Papa ! Tu m'avais pas dit qu'il y avait des chevaux.
-Je n'étais pas au courant Thomas.
-J'ai agrandi mon exploitation et j'ai trois employés désormais. Ils ne sont pas là jusqu'à la fin de la semaine.
-Blé et chevaux du coup. Tu as eu raison Grand-Pa. Attends quoi ? Ils ne sont pas là ?
-Bien sûr que non, tu sais bien qu'à cette période de l'année, avec la fête de la ville, ce n'est plus un moment pour travailler.
Mon père semblait perplexe et mon cousin sauta sur l'occasion pour s'exprimer.
-La fête de la ville ?
Tandis que Grandpa expliquait à Duncan en quoi cela consistait, je vis mon père prendre la main de sa femme pour se donner de la force. Il rongeait son frein. Je savais qu'il avait envie d'appeler sa mère pour lui demander des comptes. Le téléphone de Duncan sonna et il s'éloigna pour répondre.
-Papa ?
Mon propre père se leva et j'entendis la porte s'ouvrir. Duncan revint en souriant et sans son téléphone. Grandma nous fixa tous un instant en portant sa tasse à café vers sa bouche. Je ne pouvais détacher mon regard de cette femme aux cheveux gris noués à la va-vite. Elle avait une sagesse au fond de ses yeux verts que seules les personnes n'ayant pas eu une vie toute lisse pouvait arborer.
-Je ne sais pas si Papa te l'a dit, Mary, mais Grandma brode à la perfection.
-Il a dit cela ?
-C'est un fait. À chaque fois que ma mère voit la couverture que vous avez brodé pour mon baptême, elle fait vos louanges et ce n'est pas une façon de parler, répondit Duncan avec un sourire en coin.
-J'ai un excellent souvenir de ta mère.
-Mes parents auraient bien voulu venir, mais Papa avait une réunion très importante au Canada et mon petit frère était fiévreux. D'ailleurs, elle m'a donné quelque chose pour vous, dans mes valises, je vous le donnerai tout à l'heure.
-En parlant de bagages, allez les chercher, je vais vous montrer vos chambres, fit Grandpa en se levant de son siège.
Mary fit mine de se lever mais se rassit face au regard de Lloyd. Elle continua de faire la conversation avec Miranda jusqu'à ce que mon père arrive. Il se plaça devant la cheminée.
-Tu vois cette cheminée Sarah ? Grandpa l'a ajouté lui-même un été où nous étions en vacances avec James. Cette pierre là, je l'ai posé moi-même et celle-ci, c'est celle de James.
-Celle d'en dessous est celle de ton père, fit remarquer Miranda.
-Je pense qu'on devrait la réattribuer, sinon le capital connard sera dépassé sur cette cheminée.
-Papa.
-Tu as raison le vocabulaire est inapproprié, il sera complètement explosé. Sarah, je pense que ça devrait devenir la tienne, tu aurais la plus grosse comme ça.
-Tu dis ça parce que je me suis fait tirer dessus et que ça pourrait permettre de compenser ?
Mon père me fit un clin d'œil et se mit à rire.
-Exactement.
-Est-ce que je peux l'avoir ? demandai-je à Miranda.
Elle hocha la tête et je lui fis un grand sourire. Elle venait de prendre sa broderie et je la fixai avec de grands yeux ébahis tandis qu'elle parlait avec Mary.
-Californie ? Non pas du tout, je suis texane madame, rit Mary.
-Dallas ?
-Une petite ville à quelques kilomètres. Crowell. C'est le fief de notre famille. Mes parents possèdent quelques terres.
J'avais envie de bouger un peu et je me levai pour sortir. Je n'étais jamais venue ici et pourtant... en voyant mon père comme chez lui, j'avais la sensation étrange d'être à la maison. Je m'assis sur un siège en bois devant un foyer en pierre et je contemplai le paysage autour de moi. Il y avait de hauts arbres au loin. J'avais l'impression de pouvoir respirer.
-Est-ce que tu veux une couverture ?
Je sursautai en entendant la voix douce et basse de Lloyd.
-Non, je vous remercie. C'est très gentil.
Il s'assit près de moi et alluma sa pipe. Il tourna les yeux vers moi et se mit à sourire.
-Pourquoi tu me regardes comme ça ?
-Grand-Mère a le même sourire que vous.
-Ma petite Maddie.
-Elle vous manque, n'est-ce pas ?
Il hocha la tête et tira une bouffée de tabac. Je n'avais pas envie de parler, pas vraiment et je savais qu'il n'était pas homme à s'épancher beaucoup. Il tendit sa main et la posa sur mon bras sans dire un mot de plus. Je finis par lui parler de mon père et de notre vie en Californie. Il ne m'interrompait pas, fumant juste et tapotant sur mon bras.
-Je suis heureux, finit-il par dire, que John soit devenu un homme bien. Et je suis heureux aussi parce que tu es une fille saine. Tu ressembles à ma petite Maddie à ton âge. Elle était douce et avait de l'ambition.
-J'en ai aussi. Est-ce que je pourrais revenir vous voir ? Même si Papa n'est pas avec moi ?
-Notre maison est ta maison.
Il retira son chapeau, le posa sur ma tête et se leva pour rejoindre l'intérieur. J'en profitai pour appeler ma Grand-Mère en Facetime. Elle me répondit et je vis Valentina derrière elle.
-Salut ! Je voulais vous dire que nous étions bien arrivés. Et ton père est adorable Grand-Mère.
-Tu portes son chapeau, dit-elle surprise. J'étais la seule à avoir le droit de porter son chapeau.
-Il m'a dit que je te ressemblais. Tu devrais venir le voir de temps en temps, tu lui manques, tu sais ? Je ne sais pas vraiment ce qui a fait que tu ne viens plus, mais c'est un vieil homme et il est très gentil.
-Sarah, ça fait quelques heures que tu es là. Attends de voir ma mère pendant quelques jours, et nous en reparlerons, veux-tu ? Dis-leur quand même bonjour de ma part.
-Je le ferai. Bonjour à Roger et aux filles, Valentina.
Ma tante m'envoya des bisous et je coupai la communication. Elle m'énervait et mon instant de félicité venait de passer aussi vite qu'il était arrivé.
-Sarah ?
Je tournai les yeux et je vis Brian. Il sourit en me voyant et s'assit à la place laissée par Grandpa.
-Ça te va bien le chapeau comme ça. Je connais une boutique à Crowell qui en vend de beaux.
-Tu as vu qu'il y avait une boutique tenue par des Millers en ville ? On ira la voir demain. Tu as peut-être des cousins dans le coin !
-Miller c'est un nom assez courant tu sais. Je crois que John est soulagé d'être là et de ne pas s'être pris une baffe de sa Grand-Mère.
-Je crois aussi. J'ai envie d'aller faire un tour, tu viens avec moi ?
-Ton grand-père voulait qu'on l'aide à s'occuper des bêtes. Tu n'as qu'à venir avec nous.
Je me levai et Brian me tendit son écharpe. Je le suivis jusqu'à une grange. Il y avait quatre, cinq chevaux. Tom était déjà juché sur la porte d'un des box et il parlait à l'une des bêtes. Grandpa était derrière lui et il lui demanda de se décaler le temps qu'il sorte l'animal.
-Tout doux...
Il fallait entièrement le brosser et Brian s'y colla d'une main experte.
-Tu comptes rester là à me regarder faire ?
-Je trouve ça assez sexy le côté farmboy, du coup, oui je pense que je vais rester à te regarder.
Il me jeta une brosse dessus que j'évitai en riant avant de m'approcher de l'animal. Ce dernier me regarda droit dans les yeux, comme s'il voulait établir une connexion avec moi. Il avait une réelle lueur d'intelligence dans les yeux et quand j'approchai mes mains près de ses naseaux, il s'avança vers moi. Je le grattai derrière les oreilles et je ris.
-Est-ce que je peux essayer ?
Brian se plaça juste derrière moi et me montra comment faire, sa main posée sur la mienne. Cela me replongea à ces moments dans la maison de ses grand-parents. Je me tournai vers lui et nos deux regards s'accrochèrent.
-Au lieu de vous regarder comme si vous aviez envie de rouler à poils dans le foin, vous pourriez peut-être avancer un peu ?
Je me tournai un peu plus vers Duncan qui venait d'arriver. Il avait revêtu une chemise de bucheron et je faillis rire.
-T'es con, pas besoin du foin pour se rouler à poils. Brian, tu devrais aller aider mon cousin. Il y connait encore moins de trucs sur la campagne que moi.
-Véridique. Mais j'ai lu un livre une fois.
Il se mit à rire à son tour avant de sortir un autre animal. Il plaisantait avec Brian et moi je les écoutai sans vraiment parler, trop occupée avec mon animal. Je finis par le détacher pour le remettre dans son box. C'était une belle bête. Je finis par retourner dans la maison et quand mon père me vit alors qu'il était assis dans la cuisine, il sourit.
-Pose le chapeau dans l'entrée, ma chérie.
-Tu es tout seul ?
-Elles sont à l'étage pour.. faire les lits ou je ne sais quoi. Merci de m'avoir forcé à venir. J'ai beaucoup à me faire pardonner et c'est sur la bonne voie.
-Je suis fière de toi. Tu veux bien aller faire un tour avec moi pendant que les garçons sont occupés.
Il hocha la tête, écrivit un post-it qu'il installa sur la table et il attrapa sa veste. Il connaissait les lieux et ça se sentait. Je lui parlais de mes SAT pendant ce temps et de ma conversation avec sa mère. Il leva les yeux au ciel.
-Non mais ma mère me fait honte parfois. Surtout qu'elle a pris son téléphone pour appeler sa propre mère, alors ça me fait bien rire.
-Je crois que ta Grand-Mère est sous le charme de Duncan.
-Oh que oui, c'est une évidence. Désolé Sarah, je crois qu'elle a son nouveau chouchou. James était son chouchou, m'expliqua-t-il.
-Laisse moi deviner : Le pauvre petit sous l'influence néfaste de son aîné arrogant et con.
-C'est l'idée, se mit à rire mon père. Et puis Duncan ressemble à mon Grand-Père, tu trouves pas ? y'a de ça aussi. J'avais totalement oublié que c'était la fête au village ces jours-ci. Demain, il y a des jeux, samedi la parade et dimanche, un repas avec la paroisse. Tout un programme. Tu voulais être immergée ? Tu vas l'être de gré ou de force.
-Papa ? Ça me fait des vacances. Et puis la semaine prochaine, tu accompagnes Brian à Harvard et moi je vais à Princeton.
-Il m'a dit qu'il prendrait soin de toi. Je ne me fais pas de souci.
-Pardon? Charles. Il t'a dit ça. Quand ?!
-Il m'a appelé il y a quelques jours, mais ce n'est pas le plus important.
-Ben voyons. Je vais lui tirer les vers du nez. Et d'où vous parlez de moi comme ça derrière mon dos ?
-Je lui ai demandé de garder mon numéro en réserve dans le cas où il t'arriverait quelque chose à Princeton alors que tu es loin de moi. Je vois que tu as envie de l'appeler sur le champs. Fais-le. Je vais marcher un peu, tu n'auras qu'à me rejoindre une fois ta conversation terminée.
-Ça peut attendre tu sais, répondis-je un peu gênée.
-Je te connais comme si je t'avais fait. Je vais aller sur ta droite, près de la rivière, il y a un ponton. Tu me rejoins là-bas quand tu as fini.
Il me serra l'épaule et s'éloigna de moi le temps que je dégaine mon téléphone. Chuck me répondit immédiatement en Facetime. Voir son visage me procura beaucoup de joie et son sourire était très doux.
-Je pensais à toi justement, j'étais en train de lister les bâtiments incontournables que tu devais voir et pour une fois tu m'appelles à une heure décente ! Il n'est que 17h23 !
-Je suis sur le même fuseau horaire que toi en fait. Tu as appelé mon père, Chuck ?
-Le même.. tu es près de chez moi ? Je dois ranger ma chambre c'est ça ? Parce que c'est un bordel monstre, mais tu es toujours la bienvenue.
-Non pas du tout, je suis dans l'Ohio, mais... tu as appelé mon père ?
-Oui, exactement. Je l'ai appelé, ça te pose un problème peut-être ? Je n'ai pas le droit d'appeler le médecin de mon Grand-Père ?
-Est-ce qu'il va mal ? demandai-je un peu inquiète. Je suis désolée de t'avoir parlé comme ça, j'avais oublié qu'il...
-Il va très bien, m'interrompit-il. Je ne l'ai pas appelé pour lui, mais pour moi. J'avais besoin d'un spécialiste du système cardio-vasculaire et j'ai pensé à ton père.
Je ne m'y attendais pas du tout et je me tus. J'étais figée en réalité.
-Charles. Tu es malade ? Je sais que je suis juste Sarah, mais tu peux m'en parler. Parle-moi.
-J'ai eu des palpitations l'autre matin, c'est pour ça. C'était assez impressionnant et vu les médocs que je prends... j'avais juste besoin d'un avis médical pour savoir si c'était un problème artério-veineux ou autre chose. Sarah. Je vais bien d'accord et je tiens à préciser quelque chose. Tu n'es pas juste Sarah. Tu as de l'importance. L'Ohio du coup ? Tu es sûre que tu ne veux pas que je vienne ?
-Certaine, gardons nos retrouvailles pour la semaine prochaine. On part vendredi après nos cours, on dort chez Grand-Mère Amélia et on se sépare.
-J'ai vraiment hâte de te voir en personne, je commence à en avoir marre des conversations par téléphone.
-On peut s'envoyer des pigeons mais je ne suis pas certaine qu'ils arrivent à destination.
-Si ce n'est que ça, je ferai construire un pigeonnier sur le toit du penthouse de mes parents. Il reviendra toujours à moi comme ça. Un pigeon voyageur retourne toujours à son pigeonnier.
-Chuck, comment tu peux savoir des trucs comme ça, sérieux ? Je suis sûre que tu serais capable de me sortir la race des pigeons...
-Columba Livia. Je le sais parce que mon père a demandé ma mère en mariage avec un pigeon voyageur. Il a glissé un message dans sa bague de fiançailles, il a accroché le tout à un pigeon.
-Ça devait être romantique.
-Le pigeon s'est juste écrasé sur la baie vitrée, mais oui, l'intention était bonne. L'animal a eu une aile abimée, il lui a fallut de la rééducation. Ça fait toujours rire ma mère mais je m'y connais un peu.
-J'aime trop l'idée, je pense que si un gars m'invite par pigeon voyageur ou me demande en mariage, j'accepte direct. Il y a un côté féérique là-dedans. J'aime trop.
-Je tâcherai de m'en souvenir alors. Je dois aller à une répétition aujourd'hui, je te rappelle ce soir ?
-Volontiers ! À tout à l'heure, bisous aux garçons !
Il me fit un clin d'œil et je rejoignis mon père. Il ne me dit rien du tout, il se contenta de me prendre dans ses bras, comme s'il savait au fond de lui ce que je ressentais. Je n'avais pas besoin de parler, il savait.
-J'aimerais que tu me fasses une promesse Sarah.
-Tout dépend ce que tu me demanderas.
-J'ai l'impression que tu fais passer beaucoup les autres avant toi depuis la fusillade. Mais parfois, tu dois te faire passer en premier Sarah ? Faire passer tes sentiments en premier, faire passer tes envies, ton bonheur. Je sais qu'il est lié à celui de ton entourage, mais il ne doit pas être exclusivement en dépendre, tu vois ce que je veux dire ?
-Je vais essayer, je te le promets. James t'a dit quoi tout à l'heure ?
-Qu'il allait faire un crochet par ici s'il a le temps en rentrant dimanche. Comme ça, il repart avec son fils.
Mon père m'attira à lui et m'embrassa tendrement sur la tempe. Il finit par me trainer sur le chemin du retour afin de ne pas laisser sa femme toute seule. Nous les trouvâmes sur le perron à parler vivement. Elles se mirent à rire et Mary se décala de la balancelle pour permettre à mon père de s'installer.
-Tu as épousé une fille bien, John.
-Merci Grandma. Je me dis la même chose tous les matins.
-Sarah, si tu as envie d'aller dans ta chambre, c'est celle à l'étage tout au fond du couloir.
-Merci beaucoup.
Je rentrai dans la maison et je me rendis dans la chambre désignée. Les garçons avaient monté ma valise dedans. J'avais une vue imprenable sur les terres depuis la fenêtre. Je déballai un peu mes affaires et je m'assis sur le lit. J'appelai Sophie en vidéoconférence pour lui dire que nous étions bien arrivés et j'eus la surprise de la voir préparer ses bagages.
-Tu vas où ?
-On va avec les McDust sur la côte. Cameron part à Dallas quelques jours chez ses Grands-Parents. Ça fera du bien à tout le monde.
Je lui racontai un peu la rencontre et quand mon père arriva dans la chambre pour venir me chercher pour dîner, je raccrochai. J'allais passer trois jours ici et j'espérais vraiment que tout irait bien. Au fond de moi, je n'avais pas la sensation que ce serait un mauvais séjour mais seul le temps me le dirait...
***
Prochain chapitre...
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