Opération M.A.S *1*
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-Tu veux déménager ? Mais pourquoi ?
J'avais quitté des yeux Nora pour fixer Chuck. Il soupira et je vis distinctement le moment où il se referma sur lui-même. Il quitta sa mère des yeux et me sourit, les yeux dans le vide. Il venait d'enfiler un masque.
-Personne ne sait ! s'exclama Nora en roulant des yeux.
-Ce n'est ni le lieu, ni le moment de discuter de ce que ton fils majeur veut faire de sa vie. Tu as envie de gâcher un peu plus ma soirée ou ça va aller pour cette fois Mère ? ajouta-t-il froidement.
-Tu es insupportable Charles. Mais ce qui me rassure c'est que si tu n'en as pas parlé à tes amis, ça veut dire que ton projet est en phase d'avorter.
-J'en ai assez entendu, je vais rentrer à l'hôtel.
-Ne le prends pas comme ça.
Chuck tourna les talons et Nora semblait désespérée. Je lui fis un petit signe et je le récupérai alors qu'il allait vers la sortie.
-Attends, s'il-te-plaît.
Je lui attrapai le bras et je l'emmenai vers l'un des balcons. Il était furieux. Je pouvais reconnaître ce sentiment à sa manière de se tenir, il était extrêmement raide. Il posa ses mains sur la rambarde et regarda l'horizon. Son air me fit penser à Brian. Je savais comment l'atteindre.
-Regarde-moi. S'il-te-plaît.
Je décalai sa main et je me mis entre la rambarde et lui. Je frôlai son visage de ma main droite.
-Regarde-moi, vraiment.
Il posa ses yeux vers moi et je vis une mare de chagrin et de rancune. Il baissa les yeux et j'avançai mes lèvres sur son front pour y déposer un baiser. Je posai ma tête près de son épaule et mes mains vinrent naturellement se placer sous sa veste défaite. Je sentis sa joue sur mon crâne et sa main joua avec mes cheveux détachés.
-Je suis là, Chuck. Je suis à ta disposition pendant 24h. Ne l'oublie pas.
-J'ai besoin de prendre le large. Je me sens déconnecté de ma vie et ma mère me tape royalement sur le système.
-Pourquoi tu ne prends pas un appartement ?
-Je ne suis pas fait pour vivre seul. J'ai été seul très souvent dans ma vie, c'est pas pour ça que je n'aime pas ça. J'ai besoin de me retrouver, tu comprends ? Et je n'y arrive pas en étant enfermé chez moi parce que des paparazzis campent devant ma porte.
-Je vais être égoïste. Je ne veux pas que tu partes pour toujours. Je t'interdis de partir dans un pays où je pourrais pas sur un coup de tête venir te voir en quelques heures d'avion. Où le décalage horaire sera tel que je ne pourrais pas te réveiller en pleine nuit. Je te l'interdis, répétai-je en le regardant droit dans les yeux. Voilà, maintenant que c'est dit, serre-moi plus fort mon ami.
Il se tut et il me serra un peu plus fort contre lui.
-Pour moi, c'était juste l'histoire de quelques semaines, le temps d'un semestre grand max. Je ne partirai pas pour toujours. J'ai dit ça à ma mère pour la faire chier et lui faire comprendre que je faisais ce que je voulais. Je veux passer un peu plus de temps avec ma famille et ils sont pratiquement tous sur le vieux continent. Je vais m'acheter un appartement ou une maison en France. Je veux un second refuge, tu vois ? Je suis autant chez moi là-bas qu'ici et.. j'ai besoin de ma famille. De mes cousins, de... de tout le monde.
-Pas définitivement alors ?
-Je ferai des aller-retours pour le groupe de toute façon. En plus ça me fera du bien j'aurais du temps pour écrire.
-Et Princeton ? Juilliard ? Tu repousses ta rentrée d'un semestre partout ?
-Oui.
Nous restâmes silencieux un long moment, jusqu'à ce qu'il retire sa veste pour la passer sur mes épaules. J'avais laissé le châle dans la limousine.
-Tu peux aussi venir ici, sur la côte Ouest. On est sympa aussi de ce côté du pays ?!
Il caressa mon visage et sourit pour la première fois depuis que nous étions sortis sur le petit balcon.
-Ça aurait été avec plaisir, mais j'ai déjà pris ma décision. J'ai besoin de me retrouver dans le cocon familial, de me faire chouchouter par mon arrière grand-mère et me prendre des cuites avec mes cousins. J'ai besoin de me remettre d'aplomb et je n'y arrive pas ici. J'ai besoin de prendre l'air. J'ai l'impression de manquer d'oxygène et de devenir un homme à l'opposé de tout ce que j'ai voulu être. C'est pour ça que je fais mes bagages le plus vite possible et que j'essaye de partir la semaine prochaine.
La semaine prochaine ? Déjà ?
-Je te comprends. Il te faut du temps rien qu'à toi où on ne te dit pas quoi faire et à quel moment. J'aimerai aussi avoir ta chance et pouvoir partir loin. Alors fais-le et quand tu nous reviendras, je veux que tu pètes la forme, parce que ce sera très dur de savoir que tu ne seras plus là.
-Ne t'inquiète pas. Je te reviendrai. Je te le promets.
-J'imagine que je n'aurais pas la chance de te voir au premier novembre à New York ?
-Si je serai là. On a un concert caritatif peu de temps avant Halloween. Ça me ferait plaisir de te voir dans ma ville.
-Que serait New York sans Charles Grasset ?
-Elle serait aussi insipide que Los Angeles, sans Sarah McAllister.
Je levai les yeux au ciel et je me mis à souffler.
-Tu n'as pas vu la référence hein ??
Il fronça les sourcils de manière comique et leva les yeux au ciel à son tour.
-C'est bon je l'ai. Ton film préféré. Hook.
-Merci. J'ai cru que j'allais devoir te filer une fessée et une séance de rattrapage de Hook.
-Je te signale que je l'ai vu alors que tu étais pas encore née... D'ailleurs pourquoi c'est ton film favori ?
-On le regardait tous les ans au moment de Noël avec Maman. Elle faisait du lait de poule, des gâteaux et on regardait Hook tous les trois avec mon père qui le connaissait par cœur et qui faisait les répliques en même temps que les acteurs. Pour moi ce film, c'est de l'humour béton, des scènes mythiques, une musique fabuleuse et du bonheur à l'état pur. Même après le décès de ma mère, on a continué à le regarder avec Papa. Sauf l'an dernier. Mais j'ai plein de films préférés. C'est quoi ton Spielberg favori ? lui demandai-je alors que nous retournions vers l'intérieur.
-Je n'en ai pas, je les aime tous. J'ai jamais été déçu par un Spielberg. Ne me demande pas de choisir entre La Couleur Pourpre et la Liste de Schindler, les deux m'ont fait pleurer.
Je croisais le regard de Nora Stington et je lui fis signe que tout allait bien. Elle était entrain de parler avec Mary et mon père. Nous allions vers eux lorsque Chuck se fit arrêter par une fille plus jeune que moi qui voulait prendre un selfie avec lui. Je me proposai pour prendre la photo, c'était la moindre des choses. Chuck avait une prestance folle sur la photo que je pris avec le téléphone de sa fan. C'était assez impressionnant de voir ça. Il me reproposa son bras et il se retrouva pratiquement à côté de sa mère. J'avais l'impression qu'il préférait ne pas avoir sa veste sur les épaules. Il avait remonté ses manches et défait le petit gilet de costume qu'il portait. Il embrassa sa mère sur la joue.
-Je me suis emporté, excuse-moi, M'man. J'aimerai bien jouer un morceau avec toi... si tu me le permets.
Ils se ressemblaient peut-être trop ces deux-là, c'était peut-être pour ça qu'ils faisaient des étincelles quand ils se confrontaient l'un l'autre. Il prit la main de sa mère et l'entraina vers le piano alors que je me fourrais dans les bras de mon propre père. Ils n'avaient pas besoin de se parler pour savoir comment jouer. Ils n'eurent pas un regard l'un pour l'autre pendant tout le temps du morceau, ils fermèrent les yeux quasiment en même temps et un sourire similaire s'afficha sur leurs visages. C'était tellement émouvant que j'en eus presque les larmes aux yeux. J'entendis le père de Chuck derrière moi et je me retournai légèrement.
-Il joue merveilleusement bien, peut-être mieux que sa mère au même âge, mais que voulez-vous, il est jeune. Dans quelques années, je pense qu'il retournera vers son premier amour.
Un second regard vers mon ami me confirma qu'il aimait profondément ça, la musique classique. Il ouvrit les yeux, me fit un clin d'œil et le morceau s'arrêta.
-Rappelle-moi depuis quand tu fais du piano ?
-Mes 3 ans. Tu veux faire un morceau avec moi ?
-Non ! Certainement pas ! Je ne joue pas si bien que ça et en plus, jouer après ta mère ? No waaaaaay.
Il se mit à rire et demanda à sa mère si elle accepterait de jouer un autre morceau rien que pour moi. Je le frappai derrière la tête pour qu'il arrête de dire n'importe quoi. Cela fit rire Nora qui me joua tout de même un autre morceau. C'était splendide. Chuck regardait sa mère avec une grande fierté et les yeux pétillants. Il l'aimait tellement... j'étais désolée de voir qu'ils avaient une relation tendue en ce moment. Je n'aimais pas vraiment voir mes amis en froid avec leurs parents. Mon téléphone sonna. C'était Ray. Je trouvais ça étrange qu'il m'appelle un samedi soir aussi tard. Je fis un sourire à Chuck et je me dégageai vers le balcon.
-Sarah, c'est quoi la boisson préférée de Duncan ?
-Heu.. pardon ?
-Je t'explique, il m'a dit qu'il allait m'aider pour mes cours de management et... enfin pour d'autres trucs pour faire court et il m'a dit : ramène de quoi faire ma boisson favorite. MAIS JE NE SAIS PAS CE QUE C'EST ET J'AI QUELQUES HEURES POUR TROUVER.
-Irish coffee mais avec un whisky écossais, McAllister oblige. Je t'enverrai ma recette plus tard, je suis hors de chez moi.
-Ah oui, le concert de Nathan Grasset, c'est pas terminé ?
-Je suis à la soirée, Chuck est avec moi !
Il y eut un silence au bout du fil.
-Je pensais qu'il était occupé ce week-end. Je comprends mieux pourquoi. Tu lui as demandé de venir pour qu'il te change les idées après ta rupture...
-Pas du tout. Si j'avais voulu quelqu'un pour me distraire, ça n'aurait pas pu être une autre personne que toi Ray. Je ne lui avais pas dit pour ma rupture tu sais. Peut-être qu'il l'a vu sur les réseaux sociaux mais je ne crois pas que ce soit son genre. Il est venu pour ses parents, parce que c'était important pour son père qu'il soit là.
-Tu as raison, je ne voulais pas te froisser ou prétendre quoi que ce soit.
-Tu ne m'as pas froissée. Je te dis juste les choses comme elles sont. Je te cache rien. Par contre, tu devrais parler à Chuck. Je crois qu'il aurait besoin de tes conseils avisés.
Ray hurla de rire, littéralement.
-T'es trop drôle. Je sais pas lancer une machine à laver et je donnerai des conseils avisés. Oh je t'ai pas dit ! Je vais avoir un chat !
-Tu as pas déjà un chien ?
-Si mais chez mes parents, là je te parle du campus ! Je voulais acheter un tigre, mais parait qu'on peut pas les domestiquer convenablement.
Je me mis à rire et quand je me retournai je vis que Chuck n'était pas loin et regardait dans ma direction. Je mis fin à ma conversation rapidement et je rentrai. Mon père m'intercepta et me demanda d'aller saluer mon ami parce que nous allions rentrer. Je n'étais pas fatiguée, mais quand il ajouta que Tom était malade et que Brian venait d'appeler pour que tout le monde rentre.
-Tu me laisses une seconde ?
Je retirai la veste de Chuck de mes épaules et j'allais vers lui pour lui rendre. Il avait l'air déçu que je parte aussi vite mais il ne m'en fit pas le reproche, pas plus qu'il ne me proposa de me ramener chez moi pour que je puisse rentrer plus tard. J'avais un peu l'impression de me faire des films. Je pensais comme me l'avait dit Ray que Chuck était venu pour moi mais à la réflexion, j'avais pris mon rêve pour une réalité. Je rejoignis Candice qui était crevée, et nous allions refermer la portière de la voiture lorsque j'entendis une voix m'appeler. C'était Chuck. Il pressa le pas et il se pencha dans l'habitacle.
-Monsieur McAllister, est-ce que vous voyez un inconvénient à ce que je kidnappe Sarah demain après-midi pour aller à la plage ?
-Absolument pas Charles, venez la chercher à la maison quand vous voulez par contre, elle est à la maison à 20h30. Elle a cours demain matin.
-Oui monsieur, passez une bonne soirée. À demain Sarah !
-Salut Chuck.
Je souris largement et je rejetai ma tête en arrière. C'était décidément une très bonne soirée et j'avais hâte d'être au lendemain. La route était barrée et nous dûmes faire un détour pendant lequel Candice s'endormit sur l'épaule de mon père assis juste à côté d'elle.
-Elle est vraiment crevée, elle dort vraiment, dis-je en la poussant un peu.
-Giulia fait des cauchemars en ce moment et elle s'est réveillée toutes les nuits pour s'en occuper, en plus de l'emmener à l'école. Quand tu auras des enfants Sarah, tu comprendras que le sommeil est une denrée rare. On est bientôt arrivé chez vous.
-Tu veux qu'on la pose dans la chambre d'ami Eric ? Demanda Mary.
J'observai ma belle-mère, elle avait l'air fatiguée elle aussi et elle aurait donné n'importe quoi pour dormir aussi mais comme Tom était malade, c'était pas gagné. Une fois à la maison, elle jeta ses talons et monta les escaliers. Je me tournai vers mon père pour le remercier d'avoir accepté de venir avec moi. Il embrassa tendrement le front.
-Charles est un très gentil garçon. Je suis content que tu aies passé du temps avec ton ami. Je suis désolé mais je travaille demain, il faut que je dorme un peu. Passe une bonne nuit mon petit amour.
J'étais trop excitée pour dormir, aussi je me rendis dans la chambre de Brian pour voir s'il voulait regarder un film avec moi. Il était dans sa douche apparemment et je l'attendis sur son lit. Quand il sortit de là en serviette, il me regarda bizarrement.
-Oui ?
-Un film sous la couette ça te dit ?
-Non. Enfin, pas le genre de film qu'on peut regarder à plusieurs en tout cas.
-Je regarde des films d'horreur tu sais !
Brian eut un sourire légèrement méprisant.
-Je ne pensais pas à ça. Mais de toute façon, je vais dormir. Bonne nuit Sarah.
-Honnêtement, je te comprends pas. Pourquoi tu es froid comme ça ? C'est à cause de Tara encore ? C'est bon j'ai compris tout à l'heure ce que tu m'as dit, pas besoin de me faire la gueule à cause de ça.
-Sarah, tu as vu l'heure ? J'ai pas envie de mater un film, mais de dormir. Je ne suis pas plus froid que d'ordinaire, mais par contre, je vais attraper froid, alors sors de ma chambre.
-Je suis sûre que tu as un problème et je te lâcherai pas avec ça, dis-je en sortant de sa chambre.
J'entendais Tom pleurer parce qu'il se sentait mal. Je ne pouvais pas faire grand chose pour lui malheureusement. Le lendemain, il était toujours malade. Mary avait l'air encore plus crevée et mon père était parti. Elle portait une longue chemise à carreaux bleus et un jean.
-Mary, je peux reculer avec Charles si tu as besoin de moi.
-Mais non, amuse-toi ! J'ai signé pour les nuits blanches en devenant une Maman.
J'allais lui répondre mais je vis que Brian arrivait et il me n'adressa même pas un bonjour. Il était très grognon. Il salua à peine sa mère et cette dernière leva les yeux au ciel.
-Qu'est-ce que tu as toi encore ?
-J'ai mal dormi. Je suis crevé. Tom est entrain de dormir, j'ai vérifié dans sa chambre. Va te reposer Maman, je vais lui préparer une tisane. Tu as bossé comme une malade cette semaine, tu mérites de te reposer un peu. Sarah et moi on va s'occuper de Tom.
-Je ne suis pas là aujourd'hui alors tu seras tout seul.
Brian me contempla une seconde et fit une remarque sur les rats qui quittaient le navire quand ils sentaient le naufrage. Je n'appréciais pas du tout sa façon de parler mais je voulais passer au dessus de tout ça.
-Je vais déjeuner ailleurs. Ne prévoyez rien pour moi. Je vais prendre mon sac, je rentrerai pas trop tard.
Je n'avais pas envie de lui expliquer ce que j'allais faire et j'appelai Chuck sur le champs pour qu'il vienne me chercher. Il arriva dans sa voiture un bon quart d'heure après. Je m'installai près de lui et il démarra au quart de tour. J'allais passer une bonne journée, je le savais d'avance. Nous allâmes jusqu'à Malibu. Chuck avait prévu une casquette et de grandes lunettes. Nous installâmes sa voiture dans le garage de la maison pour être tranquille. Il l'observa avec attention.
-C'est donc la fameuse maison ? Elle est magnifique.
-Elle l'est. Tu veux voir ma chambre ?
Je l'entrainai et il resta à l'extérieur. J'avais l'impression qu'il ne voulait pas violer mon sanctuaire.
-Elle te ressemble énormément. Douce, avec une pointe de mystère.
-Je suis sûre que ta chambre aussi est comme toi ? Un endroit où l'on se sent chez soi après quelques minutes. Tu veux aller à la plage maintenant où on déjeune avant ?
Nous étions passé au petit marché pour acheter de quoi cuisiner et vu que Chuck savait faire assez peu de choses en cuisine, ça risquait d'être terrible pour notre repas. J'entrepris de couper les légumes tandis que Chuck s'occupait de la cuisson. J'étais un peu choquée en réalité des sentiments qui me traversaient. J'étais à la fois ravie d'être avec lui mais j'avais aussi l'impression de faire une infidélité à Brian avec qui je prenais du plaisir à cuisiner, mais aussi à Ray avec qui je n'avais pas vraiment eu l'occasion de partager des moments comme ceux-ci. J'étais tellement distraite que je me coupais avec le couteau. Je le lâchai dans un bruit sourd et la seconde d'après, mon doigt se retrouva dans la bouche.. de Chuck. Il le retira et me fixa avec sérieux.
-Tu as mal ?
-Heu.. non ? Mais c'est ton côté vampire qui fait ça ou ça t'arrive souvent de mettre les doigts des gens dans ta bouche ?
-C'est peut-être parce que tu as une saveur particulière.
Il avait dit ça avec une voix un ton plus grave, comme s'il était entrain de flirter avec moi. Nos visages se rapprochèrent l'un de l'autre, nos souffles se mêlèrent et il m'embrassa. Son pouce caressa ma joue et pendant quelques secondes, j'oubliai tout. Seul Chuck comptait. Et soudainement, l'image de Marc se superposa à lui et je le repoussai. C'était plus fort que moi. C'était trop tôt, trop intense. Je me sentais coupable et je ne savais pas pourquoi. Chuck eut un sourire un peu désappointé.
-Excuse-moi. Je t'ai mis mal à l'aise.
-Non Charles, c'est pas de ta faute. C'est juste que c'est un peu trop tôt, je ne suis pas prête et...
-Tu te souviens de ce que je t'ai dit la première fois ? Si un jour tu es prête.. fais-moi signe. En attendant, je me souviendrai du goût de tes lèvres et de ton sourire. Ça me suffira.
Il se détourna pour continuer de couper les légumes à ma place et il les jeta dans le wok. Il finit de préparer le repas et je me sentais un peu gênée. J'avais besoin d'une relation pansement et ça ne pouvait pas être Chuck. J'allais sûrement me détester et détester la personne avec qui j'allais faire ça et je ne voulais pas avoir de sentiments négatifs à son encontre. Pendant la cuisson, nous nous installâmes dans le jardin. J'observai sa façon de parler, sa peau parfaite et la couleur sombre de ses cheveux. C'était un très beau jeune homme, c'était indéniable. C'était quoi exactement mon problème ? J'avais l'impression que Marc m'avait déglinguée. Je n'avais plus confiance en moi-même et en ma capacité de discernement. Je ne voulais plus perdre pied et Chuck avait cette capacité de me désorienter. Je le voyais comme un danger pour mon cœur brisé et pourtant... une pulsion m'emmena à l'attraper par le col et presser mes lèvres contre les siennes. Je me redressai et je m'installai près de lui. Je lui embrassai la mâchoire et il posa une main au creux de mes hanches pour me rapprocher encore d'un cran. Il déposa de petits baisers dans mon cou. J'avais l'impression qu'il était un baume pour mon cœur. Jusqu'à ce qu'il s'arrête.
-Ça ne sent pas le brûlé ?
-Noooon.
Je me redressai et je courus jusqu'à la cuisine ou de la fumée se dégageait du wok. Je pris un torchon pour retirer la fumée et Chuck ouvrit la fenêtre. Non seulement, notre repas était parti en fumée, mais ça puait dans toute la maison et nous allions mourir de faim. Il dégaina son téléphone pour commander un repas à livrer et prit le wok avant d'aller le jeter dans la poubelle extérieure tant il avait l'air irrécupérable.
-Je vous en rachèterai un. Je connais cette marque.
Nous finîmes par bouger des chaises du jardin sur la plage et manger une pizza. Chuck me parla de la France et de Concarneau où il adorait passer ses vacances avec sa grand-mère. Il me parla de l'histoire de son pays et de ses yeux pétillants la première fois qu'il avait été à Versailles. Il avait un tel amour de la France que j'aurais pu douter de sa nationalité américaine.
-Est-ce que si tu devais choisir, tu garderais ta nationalité française ? Tu as bien la double nationalité pas vrai ?
-Je suis né à Paris. Je suis venu ici, aux USA, que quelques mois plus tard. Mais je ne pourrais pas choisir. Je ne pourrais pas non plus choisir entre ma main droite et ma main gauche. J'ai deux pays, j'ai deux patries, j'ai.. cette chance extraordinaire d'appartenir à deux cultures. Je suis pas seulement un citoyen américain, ou français. Je suis un citoyen de ce monde. C'est pour ça que j'aime autant aller en concert. J'adore voyager parce que tout ce monde est le nôtre. Les frontières sont là, dit-il en tapotant mon crâne, elles sont dans nos têtes, elles sont invisibles.
-Tu dis ça parce que tu as le bon nom et le bon passeport.
Il fronça les sourcils et me demanda de continuer.
-On a tous les deux les bons passeports. Ceux qui nous permettront d'aller partout dans le monde, dans le monde occidental du moins. Pour certains ce sera plus difficile. Si demain j'ai envie d'aller en Allemagne, on m'ouvrira les bras. Si je venais d'Iran, j'en suis moins certaine tout de suite.
-Je vois... Tu dois me trouver utopique, pas vrai ?
-Non au contraire, j'aime ta façon de penser parce que tu as raison. Ce monde est le nôtre. C'est à nous de le forger à notre image, c'est à nous d'en définir les règles, de le rendre meilleur, plus tolérant, plus juste. Sois le changement que tu veux voir dans le monde pas vrai ?
-C'est exactement ça.
-Ça pourrait faire un super titre de chanson tu sais ? Citizen of the world.
-On l'écrit quand tu veux ?
-C'est vrai ?
Il hocha la tête et rentra dans la maison pour prendre son sac. Il y avait un carnet usé dedans, remplis de ses rêves, de ses espoirs et de futurs chansons au succès retentissant. Il attrapa son crayon et ferma les yeux. C'était impressionnant de voir un génie musical travailler. Il rouvrit les yeux et écrivit la première phrase avant de me la faire lire. J'écris la seconde et il écrivit la troisième et ainsi de suite jusqu'à la fin. À la fin, nous reprîmes l'intégralité des paroles respecter un nombre particulier de pieds.
-Tu as un synthé chez toi ? Ou un instrument quelconque ?
-Je dois avoir ça. Suis-moi.
Nous nous installâmes dans le jardin, au soleil. Je ne voyais pas le temps passer alors qu'il composait une mélodie, qu'il grimaçait et me demandait mon avis.
-Et si on terminait par.. Ce monde est le nôtre, trois fois et..
-On finit par : alors défend-le. Et la chanson s'arrête.
-Ouais ouais OUAISSS. Ça marche bien ! J'adore ça ! Je comprends pourquoi Ray dit que tu es sa muse ! T'es géniale.
Il se redressa sur son siège, m'embrassa sur le front et se rassit, pris d'une soudaine inspiration. J'étais contente de le voir comme ça. Il était revigoré. Il se repoussa dans son siège, se redressa et retira son T-shirt.
-Prête pour une baignade ?
Je me mis à courir et je me débarrassai de mes vêtements sur la plage, je faillis tomber en retirant mon short et je plongeais directement dans l'eau. Elle était froide comparée à l'extérieur et je poussai un cri quand je reçus une quantité non négligeable d'eau sur le crâne. Il me souleva et me lança dans l'eau. J'aurais bien aimé me venger, mais je ne pouvais pas faire la même chose, aussi j'essayai tant bien que mal de le couler mais je ne réussis pas, par contre, il trouva le moyen d'entraver tous mes mouvements. J'étais tellement proche de lui que j'arrivais à distinguer des reflets bleutés dans ses cheveux noirs.
-Qu'est-ce que tu es belle, Sarah McAllister.
-T'es trop vieux pour moi, répondis-je avant d'éclater de rire et de plonger.
Il plongea lui aussi et j'arrivai presque à le voir. Nos bouches se joignirent et j'eus l'impression d'être dans une autre dimension. Je restai sur un petit nuage toute la fin de journée jusqu'à ce qu'il me ramène chez moi d'ailleurs. Il s'arrêta devant ma maison à 20h18 exactement.
-Merci pour cette journée. C'était parfait.
-Merci à toi de m'avoir supporté, je ne suis pas d'une très bonne compagnie en ce moment malheureusement.
-Profite bien de ta famille en France. On se revoit pour la Toussaint !
Je l'embrassai sur le coin des lèvres et je sortis de la voiture qui fila sur le bitume aussi vite qu'elle était arrivée Je ne m'attendais pas à tomber sur Alexandra Pilgrim avec mon quasi-frère. Ils étaient juste devant moi et Brian avait les yeux écarquillés.
-Bonne pioche, rit Alexandra. Un mec en Ferrari, c'est vraiment la classe. Je suis contente que tu aies pris mes conseils en considération. Bonne soirée.
Elle embrassa Brian et je passai à côté d'eux pour rentrer chez moi. Thomas était dans les bras de sa Maman dans le salon. Ils étaient enroulés dans une couverture.
-Je peux venir squatter moi aussi ?
Comme réponse, Tom me tendit un morceau de sa couverture. Je m'étais lavée avant de partir de Malibu et il respira l'odeur de mes cheveux. Brian s'installa aussi près de moi et je finis par abandonner le plaid de Tom pour récupérer celui près de Brian et nous recouvrir tous les deux.
-Qu'est-ce que tu fais ?
-Je...
-Je me suis assis deux minutes, j'ai des devoirs à faire.
Il se releva brusquement et je levai les yeux avant de le suivre.
-J'ai fait un truc de mal ?
-Non.
Je passai devant lui dans sa chambre et je m'installai sur son lit. Quand il comprit qu'il ne pourrait pas m'en déloger, il attrapa son livre de maths et s'installa dans son pouf. Il remplissait son bloc rapidement. J'allais commencer à parler mais il m'arrêta d'un geste de la main
-Tais-toi, j'ai besoin d'un silence complet pour me concentrer. Au lieu de servir à rien comme ça, tu peux me passer mon livre de physique ?
Je lui lançai dessus avant d'attraper son casque et d'écouter sa dernière playlist. Quand j'entendis une chanson de Britney Spears, Toxic, je le regardai bizarrement. Il écoutait ça ? Vraiment ? À la fin de la chanson, j'entendis la voix de Tara. J'espère que vous êtes toujours avec nous sur Radio Tara, où en exclusivité, vous avez le plaisir d'entendre le meilleur des artistes de pop, nous enchaînons maintenant sur Baby one more time. Sa voix était plus jeune que maintenant et je regardais sur son iPod la date de création de la playlist, elle datait d'y a plusieurs années. Je relevai les yeux et je vis Brian devant moi le sourcil levé.
-Tu veux pas non plus lire mon journal intime ?
-Tu as un... journal intime ?
-C'était une façon de parler, idiote.
-Gimmmmmeeee a siiiign. Hit me baby one more tiiiiime. Tu considères toujours que c'est un journal intime ?
Il se jeta sur moi pour récupérer son baladeur, je commençais à me débattre en riant mais il réussit à me plaquer sur son lit. Je glissai le petit appareil dans mon soutien-gorge.
-Tu n'oseras jamais...
-Tu crois ça ?
Il avait plaqué mes bras en croix sur son lit et ses yeux riaient. Je lui proposai quelque chose. Une partie de Just dance. S'il gagnait, je lui rendais son appareil, si je gagnais, il serait obligé de m'aider à trouver l'admirateur secret.
-Ça marche.
Nous allâmes dans le bureau de mon père après avoir récupéré le jeu.
-Tu es prête à te faire exploser ? Je suis un dieu de la danse.
-C'est marrant, c'est moi qui ait eu le titre cette année.
Nous commençâmes la partie et quand mon père arriva dans son bureau, nous étions à la finale. Nous avions gagné chacun une partie.
-Mais qu'est-ce que... entendis-je derrière moi.
Je me concentrai pour gagner la guerre qui m'opposait à Brian. À la fin du morceau, j'étais essoufflée comme si j'avais couru un marathon mais on me déclara comme étant la grande gagnante.
-OUUUI.
Je fis une petite danse de la victoire et je vis la tête bizarre de mon père.
-Qu'est-ce que tu voulais ?
-Que vous veniez dîner. Tom est déjà couché.
Je sortis l'iPod de Brian de mon soutien-gorge et je lui lançais dessus avant de rejoindre la salle à manger. J'allais avoir Brian pour m'aider, c'était un gros plus. Nous avions déterminé dans la semaine que le MAS - mystérieux admirateur secret- n'intervenait que le matin peu de temps avant la pause du matin. J'avais cours toute la semaine à cette heure là mais pas Brian. Je lui expliquai le plan alors qu'il m'emmenait au lycée le lendemain.
-Pourquoi tu veux absolument savoir qui c'est ? Tu peux pas profiter du moment présent ?
-J'ai envie de connaître l'amour de nouveau. Et parfois, il faut le provoquer tu vois ?
-Je vois mais je comprends pas. Va sur Tinder si tu veux pécho.
Il accepta néanmoins de chercher mon MAS à ma place. Je ne le trouvais pas en sortant de cours, pas plus que je ne trouvais une boîte de chocolat dans mon casier. J'appelai Brian et il me répondit d'un air essoufflé.
-Putain je l'ai loupé.
-Qui ?
-Ton MAS. Je l'ai loupé, il m'a vu et il s'est mis à courir comme un dératé putain. Il avait un bonnet sur la tête, j'ai pas réussi à l'attraper. Désolé Sarah. Je crois que je l'ai fait fuir.
-C'est pas grave. On se rappelle... Brian a fait fuir mon MAS, avouai-je à Sophie qui était juste à côté de moi.
-C'est peut-être lui. Ce qui explique qu'il l'a fait « fuir ».
-Impossible. C'est pas grave. S'il n'est pas capable de faire face à Brian, il est pas digne de moi.
J'étais très déçue en réalité. Dans les séries ou les films d'amour, le MAS devenait l'amour de la vie de la fille... quand ce n'était pas un stalker de la pire espèce. Je voulais rencontrer de nouvelles personnes. À la fin du cours de littérature, je me rendis à mon casier. Ce n'était pas une boîte de chocolat qu'il y avait, mais un petit livre de poèmes dont un était écorné sur une page. Il n'avait pas si froid aux yeux apparemment. J'aimais ça. Je pris le livre avec moi en main et je me rendis au réfectoire. Sophie m'avait gardé une place dans la file. Elle regarda le livre sans rien dire avant que nous ayons trouvé une place.
-Un livre de poème en français. C'est.. pourquoi ?
-Cadeau du MAS.
Sophie le feuilleta jusqu'à la page écornée. Elle le lut, et me demanda si je voulais qu'elle me le traduise. J'hochai la tête.
-À deux beaux yeux, Théophile Gauthier.
Vous avez un regard singulier et charmant ;
Comme la lune au fond du lac qui la reflète,
Votre prunelle, où brille une humide paillette,
Au coin de vos doux yeux roule languissamment ;
Ils semblent avoir pris ses feux au diamant ;
Ils sont de plus belle eau qu'une perle parfaite,
Et vos grands cils émus, de leur aile inquiète,
Ne voilent qu'à demi leur vif rayonnement.
Mille petits amours, à leur miroir de flamme,
Se viennent regarder et s'y trouvent plus beaux,
Et les désirs y vont rallumer leurs flambeaux.
Ils sont si transparents, qu'ils laissent voir votre âme,
Comme une fleur céleste au calice idéal
Que l'on apercevrait à travers un cristal.
C'était un très beau poème pour moi qui n'était pas très fan d'ordinaire de poésie. Sophie le relut une fois dans sa seconde langue maternelle.
-Je tombe amoureuse de ton MAS là, c'est mal, pas vrai ? Il est charmant et il sait parler français. Tu es sûre que ce n'est pas Brian ?
-Impossible, je te dis, il avait cours de sport là. Il n'aurait jamais loupé une minute pour ça. On peut peut-être regarder avec les garçons qui sont avec nous en cours de français.
Sophie se frappa la tête avec la main.
-J'ai trouvé !!! Qu'est-ce qu'on est bête ! Un garçon qui t'apprécie de longue date mais qui ne peut pas le dire en public et qui fait du français avec nous ?
Je secouai la tête et elle se redressa pour me secouer comme un prunier.
-Frederic.
-Fred ?? Nooon ! Enfin... non ! C'est pas possible. Il a une copine.
-Je suis sûre que c'est lui. Je propose qu'on lui demande. Tiens il arrive justement. Hey Fred ! l'interpella-t-elle. Sarah a pris un crème brûlée mais finalement, elle n'en veut pas, tu veux bien échanger ton brownie avec elle ?
-Ouais bien sûr. Tiens.
Il échangea avec moi avec un sourire en coin. Il regarda le petit livre de poème et tourna les yeux vers Sophie.
-Tu lis de la poésie française ?
-De temps en temps mais c'est le livre de Sarah. Elle aime beaucoup Théophile Gauthier, tu sais ?
-Capitaine Fracasse ! J'aime bien aussi. J'y vais, on se voit en cours.
Sophie me jeta un regard victorieux et elle se mit à comploter et à fangirler sur Fred et moi. Je lui jetai un coup d'œil à la dérobée. Est-ce que Fred était mon style de garçon ? Il était gentil, il était drôle et plus grand que moi. J'aimais bien son humour et le fait qu'il tenait tête à Brian. Mais il sortait avec l'une des Alexandrinettes. Je n'avais pas envie de revivre tout ce qu'il s'était passé l'an dernier.
-Hey ? Sarah ? Tu m'écoutes ? Arrête de mater ton futur mec et préoccupe-toi de ce que je dis ! Papa a dit qu'il pouvait nous emmener Paul, Brian et toi pour le camping, c'est sur sa route. Il m'a dit qu'on s'amusera comme des folles.
-Ce n'est pas mon futur mec.
Ma meilleure amie me coula un regard amusé.
-En amour, je me trompe rarement... enfin pour les autres je me trompe rarement. Pour moi c'est autre chose, je l'admets.
Et si c'était Fred ? Je ne pus m'enlever cette idée de la tête de la journée. Je l'observai pendant le cours de français. Il n'avait pas l'air aussi sûr de lui et il avait un air assez touchant sur le visage. Il tourna les yeux vers l'extérieur et il semblait parti dans un autre monde.
-Mademoiselle McAllister.
-Pardonnez-moi Madame, je n'ai pas compris votre question, pourriez-vous répéter ?
Ma prof de français répéta mot pour mot ce qu'elle avait dit et je lui répondis immédiatement avec un sourire. Je remerciai intérieurement Tom et je retournai dans mes pensées. Il fallait que je trouve le MAS et que je le prenne à son propre jeu.
J'eus une illumination alors que j'étais entrain de faire mes devoirs dans le jardin. J'allais mettre une petite caméra et voir qui était la personne en question. Il m'en fallait une petite, comme une... Nanny Cam. J'abandonnai mes affaires sur la chaise longue et j'appelai mon oncle avec le téléphone fixe.
-Éric, tu sais que je t'aime ?
-Qu'est-ce que tu veux, mini Evans ?
-Tu n'aurais pas une Nanny Cam par hasard ?
-Une quoi ?
Je levai les yeux au ciel.
-Une caméra espion pour surveiller la Nanny de ta fille.
-Heu... non ? C'est très intrusif tu sais ? J'ai pas besoin de tout savoir non plus. Par contre, si tu veux une micro caméra, j'en ai une dans mon bureau à la maison. C'est pour faire quoi ?
-Découvrir qui est mon admirateur secret qui me dépose tous les jours des trucs dans mon casier.
Il y eut un silence au bout du fil.
-Ton père est au courant que tu as un stalker ?
-Tu vois le mal partout ! Je veux savoir qui est cette personne et selon sa tête, je verrai si c'est un stalker ou pas.
-Hum. Tiroir du haut dans mon bureau. Ton père a une clef de chez moi. Je te laisse, j'ai un client qui arrive. Je t'aime petite.
Je le remerciai et je filai chez Eric. Il n'y avait personne chez lui, et je me rendis directement dans son bureau. Le bureau était chaleureux et je trouvais rapidement la caméra dans un bordel sans nom. Une phrase sur un dossier de son bureau attira mon regard. liste ALPP. Cela me rappela celle qui était sur le bureau de la directrice. Mon téléphone sonna, c'était mon oncle.
-Salut chérie, tu es toujours chez moi ? Tu peux m'apporter le dossier bleu sur mon bureau ? Et le jaune qui est dans le tiroir à gauche.
-ALLP et Glasgow ?
-C'est ça ?
-Juste pour savoir c'est quoi ALPP ?
-Avocats les plus prometteurs. C'est la liste officieuse de quelques amis qui sont dans les universités.
-C'est une pratique courante ? Une liste officieuse ?
Mon oncle se mit à rire et il m'affirma que c'était extrêmement courant et qu'il arrivait que les lycées aussi fournissent de telles listes.
-Mais on se base sur quoi ?
-Les notes, l'attitude, la capacité à être un bon élément. Enfin ce genre de trucs. Ça se bâtit le temps d'une scolarité ou d'une année, ça dépend. Personnellement, j'ai des demandes spécifiques pour mes collaborateurs.
-Tu es pire que dans Suits en vrai.
-C'est exactement ça.
Je me rendis au cabinet de mon oncle et je pus passer l'entrée sans souci. Je me dirigeai directement vers le bureau de mon oncle. Il était au téléphone et j'attendis avec sa secrétaire particulière. Je la trouvais très mignonne, elle était à peu près dans ses âges et n'avait pas d'alliance. Je lui fis un grand sourire.
-Il vous fait travailler tard, vous voulez que je lui en fasse la remarque.
-C'est gentil, mais ça va aller, il ne me fait pas peur depuis le temps que je travaille avec lui.
-Oui mais bon, j'imagine que votre famille ne doit pas forcément penser à ça.
-Si j'avais quelqu'un ce serait... Je sais à quoi vous penser, et non, je n'ai pas cette relation avec votre oncle.
-Je n'ai rien dit ! m'exclamai-je en rosissant.
-Pas besoin, vous lui ressemblez suffisamment. Eric ? Dit-elle en prenant son téléphone, votre nièce vient d'arriver. Il va vous recevoir Sarah.
Mon oncle ouvrit la porte et me fit signe de rentrer. Il se servit un verre de brandy. Il avait l'air crevé et il autorisa sa secrétaire à rentrer chez elle.
-Dure journée oncle Eric ?
-Longue journée en effet. Giulia est avec Elijah, Candice avec mon père et je suis tout seul pour la première fois depuis un moment. Je vais en profiter pour faire des trucs virils.
-Tu vas te mijoter un petit plat dans ton tablier rose que Giulia t'a offert à la fête des pères ?
-Exactement. Je vais me faire des burgers avec de la barbaque saignante.
-Je crois que Benjamin est tout seul avec Paul et ils se font un match de foot, tu devrais aller avec eux si tu n'as pas envie de rester tout seul.
-Sarah. Regarde-moi bien attentivement. Quand Giulia dort chez vous, chez mon frère ou est avec sa mère, je ne suis pas seul pour autant.
Je me mis à rougir.
-Tu devrais te trouver une vraie compagne Eric. Une approuvée par Giulia.
-L'idéal de femme de Giulia c'est soit ta belle-mère, soit ma belle-mère.
-Ah. C'est fâcheux.
Mon oncle se mit à rire et me demanda si je pouvais le ramener chez lui, il travaillerait de là-bas. Une fois devant sa porte, il me demanda sérieusement de rester dîner avec lui. Comme je le pensais, Eric n'était pas fait pour être seul, il détestait ça. Était-ce pour cette raison qu'il avait tant développé son activité et que je ne le voyais plus qu'une ou deux fois par an avant qu'Elijah revienne ?
-À quoi tu penses ? me demanda-t-il alors qu'il faisait cuire des steaks et qu'il coupait des rondelles d'oignons rouges.
-Tu m'as manqué pendant toutes ces années où tu... créais ton cabinet. Avant le retour d'Elijah. On se voyait pas très souvent et je me rends compte maintenant que tu m'as manqué énormément.
-Tu m'as manqué mais pour être honnête, c'était assez délibéré de ma part. Tu ressembles tellement aux Jumeaux. Dès que je te voyais, en rentrant chez moi, je me rappelais que mon frère avait fui le pays pour éviter de croiser notre mère et pour faire son deuil, et que je ne pourrais pas revoir ma petite sœur que j'avais tenu dans mes bras quelques heures après sa naissance avant un très très long moment.
-Tu crois qu'elle nous attend quelque part ? demandai-je d'une petite voix.
-Je préfère penser ça plutôt que de me dire qu'elle est dans le néant et que plus rien ne subsiste d'elle hormis toi.
-Et maintenant ? Ça te fait toujours mal ?
-Non. Parce que j'ai grandi. J'étais adulte, mais... voilà quoi. Je me rends compte que tu as beau avoir beaucoup de ses traits, tu n'es pas elle et que ce n'est pas juste de te faire payer ma tristesse. Tu m'apportes tellement de joie et de fierté, tu n'as pas idée.
-De la.. fierté ?
-Tabatha m'a dit que tu faisais partie de la liste, dit-il les yeux brillants.
-Quelle liste ? La liste... LPP ?
-Continue comme ça et tu auras un avenir encore plus brillant que tu ne l'auras imaginé, dit-il en acquiesçant. Toute ta famille a fait partie de cette liste tu sais. Par contre, rappelle-toi une chose. On peut y entrer facilement mais on peut y être retiré tout aussi facilement. Ne fais pas la conne.
J'acquiesçai et je me fis la réflexion que ce système était horrible. La directrice avait décrété que certains élèves valaient mieux que d'autres. Peut-être que c'était vrai dans les faits mais cela revenait à rompre l'égalité des chances d'entrer dans une bonne université. En plus de ça.. je ne me rappelai pas d'avoir vu le nom de tous mes amis dessus... comme Cameron...
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