Le petit chalet
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À force de lui parler, j'avais réussi à convaincre Sophie que parler avec un adulte, ça pouvait être bénéfique. Mary avait raison, elle s'était mise en tête qu'elle allait perdre Cameron et toute cette histoire l'angoissait énormément. Lorsque son petit-ami l'apprit, je vis du trouble dans ses yeux, mais c'était tout. Cameron n'était pas le gars le plus démonstratif du monde et pourtant, c'était ce qu'il aurait fallu à Sophie à ce moment précis. Son état m'apportait une source d'inquiétude supplémentaire dont je me serai bien passée. Avec les SAT approchant, nos profs nous mettaient une pression d'enfer sur les épaules, comme si nous n'en avions pas suffisamment chez nous et en nous-même. Si nous rations cet examen, nous pouvions dire adieu à nos chances d'aller dans les facs de nos choix. Tout le monde était affreusement sérieux, même les cheerleaders qui d'ordinaire étaient plus fun.
-Sarah, détends toi ! me lança mon père alors que nous nous rendions au show des cheerleaders dont les fonds seraient reversés à la famille de notre défunt gardien. Je sais que c'est stressant, mais c'est juste une soirée pour vous remettre tous.
-Papa, je sais que tu es fan des cheerleaders, mais pas moi. J'ai l'impression que j'avance pas dans mes révisions et ça me stresse.
-Je pensais qu'avec ton tuteur, c'était sur la bonne voie.
-C'est un excellent tuteur, mais c'est le premier grand examen de ma vie. Je compte pulvériser le score de Duncan en plus.
-Sarah. Fais de ton mieux, c'est tout ce qu'on te demande. Ne pense pas aux autres, juste à toi. Et ce conseil vaut pour toi aussi Brian.
-Ouais ouais.
Brian se faisait tellement discret ces temps-ci qu'il m'arrivait d'oublier sa présence. Dès qu'il était en famille ou avec ses amis, il était charmant et l'instant d'après, il se murait dans un silence impénétrable. J'avais même l'impression qu'il n'écoutait plus de musique, lui qui adorait ça. Je n'avais pas eu l'occasion de retourner voir Tara mais lui, il y allait toutes les semaines et à chaque fois, j'avais la sensation qu'on le perdait un peu plus. Par contre, personne ne semblait le voir.
-Je suis pas du genre à stresser des semaines en avance John. Je suis plus du genre à.. cueillir le jour. John j'ai une question à te poser, est-ce que tu verrais un inconvénient à ce que je parte en week-end avec Alexandra ? Ou juste une nuit ? Elle va pas très bien en ce moment.
-Pas du tout. Je veux juste savoir où tu vas en cas de problème. Ça ne s'est pas arrangé avec sa mère ?
-Sa mère ? Il se passe quoi ? hoquetai-je.
-La mère d'Alexandra refuse de lui adresser la parole depuis qu'elle vit chez son père. Elle ne lui a rien dit suite à la fusillade et elle lui a envoyé un kit minceur à Noël.
-T'es pas sérieux ? Quelle connasse ! Comme si Alex avait besoin de changer quoi que ce soit sur son physique et puis ça m'agace bordel ! Les parents ne peuvent pas juste nous aimer sans nous faire des remarques acerbes sur notre physique. On est comme on est. C'est hallucinant. Je te jure j'ai envie de la taper.
-Être une déception pour ses parents, y'a rien de pire. On est arrivé, je vais les saluer pendant que vous trouvez une place pour vous garer.
Il partit de la voiture et je le suivis du regard.
-Tu ne trouves pas qu'il est bizarre ?
-Pas plus que d'habitude, répondit mon père. C'est pas... Line là ?
Mon père les klaxonna et le couple de ses amis sursauta.
-Arrêtez de vous bécoter comme des adolescents ?!
Il se gara et Line le frappa derrière la tête.
-Mary vient avec nous ? Par pitié, je ne veux pas être seule face à vos remarques de débilos.
-Elle arrive avec Nicholas et Sophie. Elle travaillait un peu plus tard et elle voulait déposer Tom chez son amie Michaela. Alors ? Quoi de neuf ?
-Sarah, bouche-toi les oreilles, je vais dire quelque chose d'obscène.
Line leva les yeux au ciel et me prit par le bras. Quelques secondes plus tard, j'entendis le rire de mon père. Mary arriva en compagnie de Nicholas et de sa fille, toujours seuls à la maison.
-Ça me rappelle ma jeunesse, j'ai adoré être une cheerleader, perso, s'exclama Mary. C'était vraiment super. Crevant mais super.
-Tu devais être adorable dans ton uniforme. J'ai un faible pour les cheerleaders, tu sais ?
-Je sais, minauda presque Mary.
Elle murmura quelque chose à l'oreille de mon père et ils eurent ce petit regard de connivence.
-Vous pourriez garder les enfants ce week-end ? demanda brusquement mon père à ses amis. Mary et moi avons besoin d'être un peu seul.
-Je ne suis pas là, ce week-end, répondit Nicholas, mais si tu veux Sarah, tu peux rester à la maison avec Sophie, vous serez surveillée par la Gouvernante.
-On prendra les garçons John, répondit Benjamin. Comme ça on sera en force dans la maison, ce sera plus amusant pour la partie de basket.
-Je meurs d'envie d'aller me faire masser et de faire du shopping. On fera ça Sarah.
Je coulai un regard vers ma meilleure amie. Elle venait de dire quoi ? Elle voulait faire du... shopping ? Même son père leva un sourcil.
-Ta mère te manque, tu veux que je lui demande de revenir ? Ça fait plusieurs semaines qu'elle aide ton frère mais il va falloir qu'elle les laisse.
-Papa ! Maman adore Andrew, et Emmanuelle m'a dit que ça l'aidait beaucoup qu'elle se promène un peu avec le bébé. Elle peut dormir pendant ce temps là. On va pas leur enlever une aide précieuse.
-Mais c'est toi son bébé.
-Henry, Andrew et Moi sommes ses bébés. Et puis, j'aimerai bien une petite sœur alors il vaut mieux lui mettre un bébé dans les pattes pendant un petit moment pour qu'elle finisse par accepter.
-Tu es dans ma team ?
-Bah... oui.
-Je te le promets tu as une petite sœur avant la fin de l'année.
Line soupira et essaya de lui expliquer la génétique. Mon père était en train de se marrer dans son coin en les écoutant et il finit par faire signe à Brian pour qu'il nous rejoigne en compagnie de Paul... ce dernier avait une fille à son bras. Elle minaudait et Line leur jeta un regard furtif. Je me retournai pour la regarder. La fille prit son téléphone à son oreille et s'éloigna un peu.
-Tu sors avec une Sophomore ? Une Freshman ? Je l'ai jamais vue !
-Elle est à la fac. Elle est canon non ! J'ai pris une nouvelle résolution, désormais je ne me tape que des filles majeures.
-Bonne résolution, fit son père en riant. J'en connais qui aurait dû la prendre, pas vrai Mc...
-Ta gueule, lâcha mon père avant de rire face au soupir de sa femme.
-Je suis déjà au courant personnellement. Alors la mission choppe une étudiante est arrivée à terme... ?
-Pas pour toi.
-Je te l'ai dit, j'arrête les mecs.
-Sarah, Sarah, Sarah. Tu me déprimes. Moi je serai une fille comme toi, je changerai de mecs tous les soirs... déjà je coucherai avec moi-même mais bon je peux comprendre que ce soit gênant héhé.
Brian le tapa derrière la tête alors que j'éclatai de rire. Le spectacle commença et je devais bien avouer que c'était impressionnant. Apparemment notre équipe de cheerleading avait convié des équipes adverses pour un show amical et c'était absolument dingue. Il y avait beaucoup de monde. J'avais toujours pris les cheerleaders pour des pouffiasses qui se la pétaient mais en voyant les figures, je sus avec précision que j'en aurais été incapable et qu'elles étaient des sportives de très haut niveau, peut être plus que les équipes qu'elles supportaient. Je me tournai vers ma sœur de cœur et je remarquai qu'elle ne suivait pas du tout. Elle était légèrement tournée vers Paul. Elle finit par me voir et se pencha vers moi.
-Je peux te dire un secret ? Quand j'étais petite, je voulais faire partie de l'équipe de cheerleading, mais en arrivant au lycée, quand j'ai vu les filles qui voulaient entrer, j'ai renoncé.
-Et la vraie raison de ton regard triste ?
-Cameron n'est pas venu alors qu'il aurait dû être là.
-J'imagine que ça n'a rien à voir avec Paul et sa nouvelle copine pas vrai ?
-Si un peu. Je veux dire, quand je vois quelqu'un en couple ça me rappelle que lui n'est pas là avec moi et qu'il n'a pas prévenu.
-Toi et moi, on est un couple, alors pas de souci de ce point de vue là. Mais Cameron, je vais l'appeler tout de suite.
-Non. Je te l'interdis.
Je ne l'écoutai pas et je lui envoyai un message.
« Alors je vais pas être longue, ramène ton boule immédiatement au lycée, Cameron. »
« Je ne peux pas. »
« Écoute, je t'adore mais là, prends tes couilles, tu dis à tes parents que tu viens, et tu viens. »
« Sarah. Je ne peux pas, je suis pas un mec brave capable de braver l'interdit okay et j'ai pas d'argent à dépenser, même pour une bonne cause. Je vais paraitre pour un ingrat, je le sais... »
« Je te l'ai pas dit mais Sophie ne va pas bien en ce moment, mais elle est trop fière pour te dire qu'elle a besoin de toi. Elle s'attend à ce que tu le vois, mais elle le cache très bien. Elle a besoin que tu manifestes un peu plus ton amour. Je suis pas dans votre couple mais elle a vraiment peur d'une rupture entre vous. »
Il ne dit rien pendant un moment et je fixai mon écran.
« J'arrive. Je vais filer, je suis là dans 10 minutes. »
Douze minutes plus tard, je vis Cameron débarquer près de nous. Il s'installa de l'autre côté de Sophie.
-Désolé de ne pas avoir envoyé un message. Mes parents m'ont saoulé, ajouta-t-il après l'avoir embrassé tendrement.
Sophie se fourra contre lui et il me remercia du bout des lèvres. Après le spectacle nous nous rendîmes tous dans un restaurant de la ville. Cameron était de la partie et quand il sortit son portefeuille, le père de Sophie lui fit comprendre qu'il ne laissait jamais les plus jeunes payer quand il était là. Sophie était vraiment heureuse et je vis le regard de Paul posé sur le couple. J'avais tellement mal pour lui. Mon téléphone sonna, c'était Chuck. Je me levai pour répondre et je vis Brian me suivre des yeux.
-Salut beau gosse.
-Écoute, je viens de penser à un truc vraiment vraiment dingue. Vous avez un peu de temps pour vous remettre après les SAT et .. ça te dit qu'on se rejoigne quelque part ? N'importe où dans le monde. Tu pourrais venir à Princeton et je te montrerai ma fac ? Je... J'ai pris conscience d'une chose importante grâce à toi. Je dois revenir à la maison. Bon, je serai pas au top de ma forme mais... je veux t'emmener sur mon campus. Oui, je veux vraiment. Je veux que ce soit une option pour toi de venir à Princeton. Alors ?
-Oui. Oui bien sûr. J'ai trop trop hâte. Je vais le dire à Papa et on prévoit ça.
-C'est tout ce que je voulais entendre... à bientôt du coup.
-J'ai vraiment hâte.
Je raccrochai et mon cœur était joyeux. Je rejoignis les autres et je souris à mon père.
-Papa, après le SAT, je vais à Princeton pour visiter.
-Et tu as pris cette décision...
-À l'instant.
-Après l'appel de ton nouveau mec je présume, lâcha Brian avec une pointe de rire. Tu veilleras à ne pas consommer de cannabis avec lui contrairement à tes deux autres relations.
Je ne savais pas s'il était sérieux ou pas mais je pris le parti d'en rire, contrairement à sa mère.
-En fait j'ai deux mecs qui m'attendent sur la côte Est.
Mon père toussa et leva les yeux vers moi un peu paniqué.
-Oui, et personne ne pourra jamais rivaliser avec eux. Ils sont beaux comme des cœurs. Et ils ont à peu près le même âge en plus. Aonghas et Aaron. Ce sont leurs prénoms et ils sont à croquer. Oh d'ailleurs, vous avez remarqué ? Andrew, Aonghas, Aaron. En vrai, la Famiglia a l'intention d'appeler tous ses bébés en A en 2015 ? Du coup les autres ce sera en B ?
-Choupi, on n'appelle pas des enfants selon l'année comme des chiens.
-C'est dommage. Ce serait beaucoup plus amusant.
Sophie était sur un petit nuage et mon cœur d'entremetteuse était ravi. Puisque le problème Sophie était désormais en voie de guérison, je devais m'atteler à mon prochain chantier : Brian. Je sentais qu'il n'allait pas bien mais il se refermait sur lui-même. J'avais vraiment peur pour lui. Ce fut en allant à l'hôpital après les cours le lendemain pour voir comment allait Tara, que la solution me sauta aux yeux. Il lui fallait parler à un ami, à son meilleur ami. J'allais devoir aiguiller Jay sur la piste Miller. Je connaissais le chemin par cœur vers la chambre de Tara. Elle était toute seule et je frappai à la porte.
-Oh, salut.. Sarah, c'est ça ?
-Oui, c'est ça.
-Tu es la demi-sœur du gars qui s'appelle Brian.
-Oui voilà, on peut dire ça comme ça. Tu as passé une bonne journée ?
-Toutes les journées se ressemblent, j'imagine que ce sera différent après.
-Après... tu vas sortir ?
-Oh.. pas tout de suite non. Je crois qu'il y a un spécialiste à New York ou à Washington DC je ne sais plus, en tout cas, il est prêt à me prendre et on va partir là-bas.
-Attends, tu vas... partir ? Oh Ta.. Abigail.
-Je suis obligée. C'est... tu n'imagines pas ce que ça fait de vivre comme ça. Je sais des choses. Je sais combien de temps il faut faire cuire un œuf, mais je ne me souviens pas du visage de ma petite sœur. De ma petite sœur. Quand je dors et que je sens une main sur moi, je sursaute et il me faut un temps pour me rappeler que ces étrangers sont ma famille, que ces étrangers ne me veulent pas de mal. J'ai beau les appeler Papa et Maman, ça sonne creux. Je suis vivante mais je ne sais pas qui je suis, je ne sais même pas si Abigail Byrd est mon nom. Je n'en sais rien du tout.
-Y'a un spécialiste sur la côte Est qui pourrait te permettre de t'apaiser ? C'est bien alors. Il ne faut pas que tu hésites deux secondes. Toi et moi on se connaissait pas vraiment, mais j'aimerai bien apprendre à connaitre la nouvelle toi si ça te dit. Je sais que ça va paraitre bizarre mais tu as peut-être une chance d'avoir une nouvelle vie, d'être qui tu as envie. J'imagine que c'est terrible ce que tu vis, mais si tu n'arrives pas à recouvrer toute ta mémoire ou même partiellement... invente toi une nouvelle vie, prends le comme une chance.
Tara se tut et me sourit.
-Tu es la première qui me dit ça, comme si c'était pas une catastrophe.
-Ce qui était une catastrophe, c'était quand tu étais dans le coma. Mais là, tu es en vie, et tu es en bonne santé si on omet ce petit problème de caboche, non ? Tu as 17 ans et on t'offre l'opportunité de faire table rase. Au lieu d'absolument vouloir récupérer tes souvenirs essaye de t'en créer de nouveau.
-Tu es une fille gentille, je suis sûre que je t'aimais beaucoup. Oh salut toi !
Je me retournai et je vis Brian. Il eut l'air surpris de me voir et il me fit comprendre d'un geste que je devais partir. J'étais venue en taxi et je m'asseyais sur la Batmobile. Brian n'allait pas tarder à revenir sûrement. Je le vis arriver avec son pas raide et il monta en voiture sans me dire un mot.
-Paul vient de se faire larguer par son étudiante et je crois que j'ai jamais vu un mec qui s'en moquait autant.
-Sérieux ? Avant ou après avoir...
-Ils ont rien fait. Je vais aller voir comment il va. Je te dépose à la maison ?
Je le remerciai et il ne parla pas de Tara une seule seconde, il était enthousiaste à l'idée d'aller voir le match de hockey mais Tara ? Rien du tout. Il me déposa à la maison et repartit aussi vite. Tom était en train de crier dans le jardin et quand j'arrivai, je le vis avec sa nouvelle amie Michaela et un autre garçon de leur classe. Je montai les escaliers et je vis des habits dans le couloir. Oh Seigneur. Je frappai à la porte de mon père.
-Dégage Sarah. Je reconnais ton frappé !
-Je voulais juste savoir si je pouvais vous rebalancer vos habits avant que Tom et ses potes tombent dessus.
-Envoie tout dans le bureau de John ! rit Mary.
Elle gloussa et j'entendis des rires derrière la porte. Ils étaient vraiment des gamins. Je partis dans notre salle de jeu et je mis de la musique. J'avais envie de me détendre. De vraiment me détendre. J'appelai Candice et je lui dis de venir pour qu'on danse toutes les deux. Une demie-heure plus tard, elle était là avec moi et nous dansâmes. C'était le bonheur absolu, j'étais moi et j'aimais tellement ça !
-Dan et moi avons trouvé un appartement à mi-chemin entre la maison d'Eric et la tienne. Je pense que c'est le bon, tu veux aller le voir avec moi ?
-Volontiers, je...
Tom passa sa tête dans la salle et il me demanda si je pouvais ramener ses amis chez eux. Candice acquiesça et après avoir déposé tout le monde, nous filâmes toutes les deux. Elle était en train de grogner contre Eric et je lui étais reconnaissante de ne pas me demander comment j'allais d'un ton rempli de pitié. L'appartement était assez beau, dans un quartier cossu. Il était assez bien agencé et j'imaginais bien mon Grand-Père dedans.
-Vous l'avez... c'est fou. Je pensais que c'était presque un rêve.
-Pourtant, ce sera mieux que de squatter chez Eric, il est gentil, mais bon, il a grand besoin d'avoir une relation stable et il ne l'aura pas si je suis dans ses pattes avec son père.
-Dis-moi est-ce que tu as déjà eu une relation à distance avec quelqu'un ?
-Non, pas du tout. Quand je suis partie à New York, je n'avais personne et j'ai foiré toutes mes relations amoureuses. Je ne suis pas un modèle. Dès que ça devenait sérieux, je fuyais. J'ai appris ce qu'était le romantisme avec Daniel.
-J'ai l'impression que tu as beaucoup souffert dans ta vie, ma pauvre Candice et je suis contente que tu sois bien maintenant. Que tu aies trouvé ton équilibre.
Elle me sourit et elle me redéposa chez moi. Mary était dans la maison, en peignoir en soie.
-On a déposé Tom chez Eric, il l'emmènera demain chez les McDust et moi je vais faire mes valises pour aller chez Sophie ! Ne me regarde pas comme ça, vous avez raison de profiter d'un week-end en amoureux. Je te jure. Moi si j'avais un chéri, je lui aurais demandé de m'emmener aussi. Vous avez le droit à votre petit oasis de félicité de temps en temps.
Ma belle-mère m'embrassa et je filai prendre quelques habits pour me rendre chez Sophie. J'étais à peine arrivée devant chez elle qu'elle sortit.
-Écoute, je sais que tu vas m'en vouloir mais tu peux pas rester ce week-end. Cam a floué ses parents pour rester ici avec moi et tu vas te sentir très seule, alors il vaut peut-être mieux que tu ailles chez les McDust, non ?
-Non, je vais aller chez Eric, t'inquiète, ça arrive à tout le monde. Passe un bon week-end So.
En réalité, j'étais vraiment dégoûtée. J'avais attendu ce moment avec impatience et là, c'était foutu. Je ne savais pas quoi faire et je savais d'avance que j'allais m'ennuyer toute seule. Je m'étais assise dans le parc sur un banc quand j'entendis quelqu'un m'appeler. C'était Kylie. Elle me serra contre elle et me demanda la raison de ma présence à cette heure dans le parc.
-Papa et Mary veulent jouer les jeunes mariés et j'ai pas le droit de retourner à la maison avant dimanche soir.
-Viens à l'appartement. Elijah n'y verra pas d'inconvénient et tu pourrais passer la journée avec moi à l'Atelier.
-Je ne veux pas vous déranger.
Elle sourit et je la ramenai en voiture devant l'immeuble de mon oncle. Ce dernier était là, à travailler. Il souleva son nez quand j'arrivai, il me salua et replongea dans l'étude de son magazine. Kylie n'avait pas défait ses bagages.
-Je suis là que temporairement alors... je vais me prendre un appartement dès que j'aurais vendu quelques pièces. Je... j'ai besoin d'être un peu plus indépendante. Elijah n'est pas énervant, pas du tout, mais bon. Tu me vois ramener un type sous le nez de mon nouveau parent ? C'est impossible !
J'acquiesçai et je passai un agréable moment avec eux en soirée. Ils avaient ouvert une petite bouteille et prirent un verre de rouge. Est-ce que lorsque j'aurais l'âge de boire, je ferai ça avec mon père ? Une petite soirée vin rouge et pizzas, affalés comme des andouilles sur le canapé moelleux ? J'avais la sensation de beaucoup observer ces derniers temps, comme si je cherchais à définir ma place dans ce monde avant de m'y lancer corps et âme. Je cherchais à comprendre chaque partie de mon être comme pour déterminer que j'étais bien normale, que j'étais bien humaine et rattachée à cet univers. Et la vérité c'était que j'étais définitivement normale. Le lendemain matin, je passai du temps avec ma nouvelle cousine à son atelier. Elle peignait et j'étais absorbée par sa toile.
-Dis-moi, tu pourrais me faire une toile pour la fac ? Pour ma chambre d'étudiante ou pour mon petit appartement ? Je serai avec Sophie et je trouverai ça tellement stylé. Je te paierai bien sûr.
-Avec plaisir. Je m'y attellerai cet été comme ça tu l'auras juste avant de déménager.
Je secouai la tête avec plaisir et elle reprit son travail. Je finis par la laisser après le déjeuner et je filai en voiture sur les routes. Je n'étais jamais partie toute seule pour un week-end et je voulais le faire. Juste moi, mon sac et du temps. Je m'arrêtai à une station service pour faire le plein et je me fis interpeller. C'était Paul et Brian.
-Salut ! Qu'est-ce que vous faites ici ?
-Mon père a eu un dossier de dernière minute et.. mes parents ont dit qu'ils nous rejoindraient peut-être durant le week-end dès que tout serait fini. Je pense qu'ils vont en profiter pour être tous les deux alors, on sera tranquille, sauf s'ils nous rejoignent demain... Eric s'est proposé pour garder Tom. Où est Sophie ?
-Elle est avec Cameron, je suis toute seule. Je voulais me prendre une chambre quelque part et profiter d'être toute seule.
-Ou alors... tu viens avec nous ? On avait l'intention d'aller au petit chalet, pêcher un peu, faire des balades. Y'a des chambres, on te gênera pas si tu veux juste rester toute seule dans ton coin.
-Tu sais quoi ? Ça marche. Je vous cuisinerai un plat...
Brian me coula un regard intrigué et je me mis à rire. Je les suivis en voiture tout en les appelant en même temps pour continuer de parler avec eux. Le petit chalet appartenait à la famille de Line et se trouvait au bord d'un lac. Nous ne mîmes pas longtemps à nous y rendre. Je n'étais pas venue depuis tellement longtemps que je ne me souvenais plus de la route.. pourtant le chalet...si, lui je m'en souvenais. Il était vraiment beau et chaleureux. Il y avait un ponton et un bateau.
-Marc est venu y'a deux jours, il m'a dit qu'il avait laissé la barque, c'est cool. Bienvenue au Petit Chalet, vous êtes chez vous.
-Je ne suis pas venue ici depuis des années.
Je passai la porte d'entrée et je vis une photo de Paul avec moi. Je me souvenais de cette journée, la dernière passée ici, nous avions tellement ri tous les deux. Paul m'ébouriffa les cheveux.
-Par contre Sarah... j'ai demandé à des gars de passer ce soir, des gars du Wickham's notamment et il est probable qu'ils soient un peu lourdingues. Ils le sont déjà avec Brian alors avec toi qui a frôlé la mort...
-Je vais gérer, ne t'inquiète pas. Alors petite fête ce soir au Chalet ?
Je vis arriver le fût de bière et je me mis à rire. Ils avaient manifestement prévu une grande fête.
-Tu crois que l'eau est trop froide pour aller plonger dedans.
-On est en hiver, mais si tu veux être frigorifiée, je t'en prie ! Brian ? Tu peux t'occuper du feu à l'intérieur, je vais ranger les courses. On a prévu de se faire griller des trucs auprès du feu ce soir.
-Qui est invité ?
Paul me fit la liste et je me rendis compte que je les connaissais tous, ils étaient tous dans le cours de Tyler avec moi. Paul s'arrêta et prit son téléphone. La notification que je reçus de Tala de sa part était ainsi formulée : Oyez, oyez, première W.Party de l'année 2016 ! Vous êtes les bienvenus au Petit Chalet près du Lac Matthews ! Il est indiqué par un panneau. Au programme : du rire, de la bière à flot et un hommage à Mister Ty. Merci de décliner pour les courses avant 17h !
Trois heures plus tard, il y avait pas mal de monde près du chalet, nous avions fait un feu dans le jardin et nous avions allumé des torches un peu partout. Paul monta sur un rondin de bois et demanda un peu de silence.
-Bienvenue à la première W. Paaaaaarttttyyyyy
Tout le monde se mit à hurler. Je sentis une main derrière moi, c'était Jer'. Nous avions tous une boisson en main distribuée par des types du Wickham's.
-L'année dernière...a été difficile, mais quand je vous vois, je me dis qu'on peut réussir à faire beaucoup et qu'on surmontera les épreuves. Alors ce soir, on prend une bonne résolution. On s'amuse et on ne pense pas à demain ! Ce soir, on profite à fond, on donne le ton d'une année extraordinaire ! Mais avant de commencer, je vais vous demander de tous me suivre.
Il sauta de son rondin de bois et se dirigea vers le lac. Un mec que je ne connaissais pas me tendit une lanterne et je sus ce qu'il allait se passer. Nous les allumâmes et je vis Paul poser sa lanterne et faire une petite impulsion pour la faire avancer. Chacun notre tour, nous mîmes notre petite lanterne à l'eau et je ne pus m'empêcher de laisser une larme couler de ma joue. Brian la posa près de moi et nous retournâmes à notre place. Nous étions les derniers. C'était magnifique. Le lac reflétait les lumières, nos dernières pensées vers notre prof, vers Tara, vers toute l'innocence que nous avions perdu suite à quelques balles déchirant l'air. J'entendis la voix de Paul entonner « I see Fire » a capella. Elle fut reprise par tout le monde en chœur. C'était trop pour moi, mais je sentis la main de Brian glisser dans la mienne. La dernière note vibra dans l'air.
-Mister Ty, on ne vous oubliera jamais et chaque jour qui passera on se rappellera votre gentillesse et votre mode de vie décontracté et cool sera désormais le nôtre.
Paul se retourna et la véritable fête put débuter. Je pris mon smartphone et je m'avançai sur le ponton pour prendre un film. Je le postai sur les réseaux sociaux avec juste cette légende « Good Bye, T. ». Je m'assis sur le bord et je ramenai mes genoux sous moi. Sophie et Cam n'avaient pas voulu se déplacer et finalement j'en étais contente. Paul ne serait pas triste ce soir là de les voir se bécoter. Et pour une fois, moi non plus je ne serai pas en retrait.
-Sarah ? Tu devrais rentrer, il va faire froid.
Je me retournai et je vis Alexandra. Elle s'assit près de moi et posa sa main sur mon épaule quand elle remarqua que je n'allais pas bouger. Chris avait décommandé, elle était en week-end avec son nouveau mec, nous l'avions tous vue sur les réseaux sociaux.
-Alexandra, je peux te poser une question ? Tu ne trouves pas que Brian est différent ?
-J'allais te poser la même question. Il est vachement différent. Il... il m'a demandé de ne plus parler de ce qu'il s'était passé en décembre. Tu vois... quand je suis passée le voir à l'hôpital, il était traumatisé, mais là, on a l'impression qu'il ne s'est rien passé du tout. Moi je me suis pas prise de balle mais je suis toujours choquée. Après ce qu'il est arrivé à son amie, à toi... son comportement n'a aucun sens. Il est joyeux, il est heureux. Il pète la forme vraiment et je sais pas si c'est normal ça.
-Je pensais que j'étais folle.
-Je sais pas quoi faire pour l'aider alors je fais comme si tout allait bien.
-Moi aussi. J'espère que ça va lui passer. Au cas où tu ne le saurais pas, Tara va partir à New York. Toute sa famille va déménager. Et ça ne l'affecte pas.
-On se dirait limite dans Vampire Diaries, c'est flippant.
Elle leva la main et fit un signe à quelqu'un qui l'interpellait.
-Alexandra... j'ai une autre question à te poser. Tu penses quoi des sororités ?
-Je rêve d'aller à la fac pour en faire partie. C'est trop cool. Pourquoi ?
-Je voulais créer une sororité au lycée. Si ça se fait...
-Attends, tu me demandes si je voudrais en faire partie ? Évidemment !!! J'ai des milliers d'idées ! On en reparle lundi si tu veux ?
-O..okay.
Alexandra repartit dans les bras de Brian et je restai toute seule. J'appelai Jay dans la foulée. Il ne me répondit pas et je m'en voulus de le réveiller.
-Huuuum.
-C'est Sarah. Sarah McAllister.
-J'ai reconnu ta voix. Avant que tu dises quoi que ce soit, je te souhaite une excellente année, meilleure que la précédente.
-Merci à toi aussi Jay, j'espère que tu pourras accomplir tout ce que tu veux dans ta vie. Tu es l'un des gars les plus méritants que je connaisse et j'aimerai que tu accomplisses tes rêves.
-Que puis-je pour toi en beau milieu de ma nuit ?
-Brian.
-Tu pourrais lui dire de répondre à mes messages à ce troufion ? Il les lit mais il ne répond pas ou il répond totalement à côté de la plaque.
Je soupirai et Jay se tut.
-Il se passe quoi ? finit-il par dire.
-Tara part à New York. Elle est amnésique et ils vont consulter un grand ponte. Elle part et Brian rit à gorge déployée. Il fait la fête comme si de rien était, même Alex l'a remarqué.
-Je vais m'en occuper, je vais l'appeler et ça va tout arranger, t'inquiète pas bellissima. Toi, tu dois juste penser à ton bien-être et... j'ai une question à te poser, ça va te paraitre vraiment bizarre, mais, je sors avec une fille, enfin plus ou moins, et...
-Tu as besoin de conseil sur des filles ?
-Pas du tout, rit-il. On dirait pas mais j'ai un père bourreau des cœurs, enfin bref. Elle est fan des Atlas Wild Child et j'ai vu un de leur concert avec elle. Y'a un truc qui m'a un peu perturbé. Le rouquin, il a dédié une chanson à une certaine Choupi. J'ai trouvé ça bizarre, j'ai demandé à ma blonde, et tu sais ce qu'elle m'a dit ? Personne ne sait qui c'est mais y'a une théorie comme quoi ce serait sa meuf secrète. Et tu sais à quoi ça m'a fait penser ? À deux choses : d'abord, ton père t'appelle Choupi et ensuite, y'a un des gars qui était venu chanter avec Tom, alors je me demande Sarah. Ce ne serait pas toi, Choupi ?
Je sentis le sang quitter mon visage et je ne sus pas quoi répondre. Ma gorge était sèche, comme si je n'avais rien bu après une longue balade sous le soleil ardent de Californie.
-Tu es toujours là ?
-Oui.
-Désolé, c'était dingue de te demander ça et je...
-C'est moi. Choupi, c'est moi.
-Tu me vannes ?
-Pas du tout. Mais s'il-te-plaît, ne le dis à personne. J'ai pas envie que toute ma vie soit étalée dans les journaux ou qu'on sache que c'est moi. S'il-te-plaît. Ne dis rien et surtout pas à Brian.
Ce fut à son tour de ne rien dire.
-Wow, je suis.. wow. Je connais une fille qui connait un groupe mondialement connu. Bordel. Ils sont comment ?
-Adorable. Ils sont a-do-rables. Ray c'est... Ray c'est mon « esprit frère », ajoutai-je en reprenant le terme que Jay avait employé pour parler de Brian et lui l'année d'avant.
-Oh, carrément. Et bien... wow. Pour une fois que je devine un truc et pas Brian, je pense que je devrais l'écrire quelque part pour m'en rappeler. Je vais m'occuper de Brian okay, par contre si toi tu pouvais obtenir un autographe pour Iphigénie, ou Iffy ce serait.. vraiment super.
-Je vais leur demander de t'en envoyer un, promis. Merci encore pour Brian, je ne sais pas ce qu'on ferait sans toi.
-C'est normal. Je dois me lever tôt demain pour aider mon père, je te tiens au courant, Sarah.
Cette conversation était loin d'être celle que j'avais imaginé. Jay était sûrement le plus perspicace de tous mes amis. Je me redressai frigorifiée et je vis Alexandra suspendue aux lèvres de Brian. Le couple phare du lycée était là, à s'embrasser dans le froid au beau milieu de la forêt et pourtant, j'aurais adoré être à leur place !
-On danse ?
Je souris à Jer' et j'acceptai. Il me fit tourner plusieurs fois et finit par me parler de Tara. Son cœur était totalement brisé, je pouvais le sentir dans les mots qu'il employait.
-Tu sais Jer, je crois au Grand Amour et tu devrais y croire toi aussi. Si Tara et toi êtes faits pour être ensemble, alors... rien ne pourra aller à l'encontre de cette prédestination. Vous vous retrouverez, j'en suis certaine. Elle a besoin de temps pour se remettre mais elle n'a pas pu oublier l'amour qu'elle a pour toi. Il est là, quelque part.
-Tu es optimiste Sarah, murmura-t-il.
-Comment ne pas l'être alors que j'ai survécu ? Ne plus être optimiste, ce serait une insulte à la chance qu'il m'a été donné. Alors, fais ta vie Jer et un jour, Tara sera de nouveau avec toi.
Il referma un peu plus ses bras sur moi et je fermai les yeux une minute. J'étais fatiguée en réalité et quand Paul m'attrapa par les épaules, il le vit très clairement.
-Tu as pris tes médicaments ? John m'en voudrait si tu..
-C'est okay de ce point de vue là. Je vais juste me réchauffer un peu, j'ai froid.
Paul acquiesça et je rentrai dans la maison. Aucune de mes amies n'avait pu se déplacer et les gens me regardaient assez bizarrement, aussi. Je m'assis sur l'un des fauteuils devant la cheminée et je contemplai le feu. Je fus dérangée par Paul qui s'assit près de moi, du moins, il me souleva, s'installa et me rassit sur lui.
-J'en veux à Sophie de ne pas être venue. Elle aurait pu faire un effort je crois.
-Je suis d'accord Paul, mais.. So va pas très bien en ce moment. Je crois que ça l'a plus bouleversée qu'autre chose ce qu'il nous est arrivé en décembre. Alors... si elle peut trouver du réconfort entre les bras de Punette, pas de souci pour moi.
-Sarah. Tu l'as appelé Punette.
-Ce soir, je suis ton amie à toi. Pas celle de Sophie. Enfin un peu moins en tout cas. Est-ce que ça te fait du mal de voir que Chris a déjà un copain ? Sincèrement Paul.
-Ma vie amoureuse est un champs de bataille au petit matin. Il ne reste rien, que des cendres et des cadavres de relations. Alors est-ce que ça me fait du mal que la fille avec qui je suis sortie le plus longtemps sorte avec un mec ? Oui, ça me fait du mal. Je sais qu'elle s'est très mal comportée mais... j'avais vraiment de l'affection pour elle. Et.. je m'étais dit quelque part que si Chris et moi c'était terminé, alors, je pourrais compter sur.. et finalement non. J'aurais préféré avoir des sentiments pour toi Sarah. Au moins, j'aurais pas été autant déçu. Je te connais par cœur.
-Écoute, si j'ai pas d'enfant à 35 ans, j'accepterai d'être ta mère porteuse.
-Tu sais le soir où.. le soir où vous vous êtes faits tirés dessus, on est rentré chez moi parce que ton père nous a poussé à partir. Sophie et Alex ont pris un somnifère mais pas moi et.. j'ai songé à un monde sans toi et j'ai fini par ce que je serai devenu si tu ne m'avais pas fait comprendre certaines choses sur moi. Je te dois beaucoup. Alors si dans 17 ans, tu n'as toujours pas de bébé et que tu en veux un, je te filerai mon sperme en espérant que ma descendance soit moins faible que moi.
-Ta descendance sera vigoureuse et merci d'avance pour ce don.
-Ta descendance sera vigoureuse ? On se dirait dans une cérémonie à la GOT sérieusement avec une bénédiction d'un prêtre en peau de bête.
Je me mis à rire et je me fourrai un peu plus dans ses bras. J'entendis des exclamations et nous nous levâmes pour aller voir dehors. J'eus la surprise de voir Brian en train de se déshabiller sur le ponton. Il retira ses bandages et finit par son caleçon avant de plonger, totalement nu dans le lac. Il remonta et se mit à hurler qu'il se gelait les couilles. Cela fit rire tout le monde et Paul le suivit dans son délire, tout comme plusieurs mecs. J'eus alors une illumination et je commençai à me déshabiller aussi jusqu'à être en body et je sautai à mon tour. L'eau était givrée. Je nageai loin du bord et je fis la planche. J'allais sûrement chopper une pneumonie, et mourir de froid, mais cette sensation d'être vivante était plus que grisante. Je replongeai et j'observai les rayons de la lune. Je restai immergée jusqu'à ne plus avoir d'air dans mes poumons et je remontai. Je vis des bras venir vers moi et Brian se redresser.
-Approche pas mini-Brian de moi.
-Micro Brian là pour le coup, sourit-il, il est tellement congelé que c'est devenu un knacki.
Je me mis à rire et lui aussi dans la foulée. Nous nageâmes jusqu'au bord où on nous attendait avec des serviettes. Un des membres de l'équipe de basket m'attrapa dans ses bras et me ramena près du feu. J'étais hilare, vraiment. Paul était déjà là, une bière à la main, quelques groupies de chaque côté de lui. Il fit un grand geste et je volai sa bière. J'en avalais une gorgée. Je n'avais pas bu depuis des lustres et l'amertume de la bière me fit presque grimacer. Je filai à l'intérieur pour me changer, la musique pulsait dans les enceintes et je me mis à danser avant de m'écrouler sur le lit. Je restai un instant les yeux parfaitement ouvert et je filai dans les toilettes pour me faire vomir. Je ne pouvais pas me permettre de rester avec de l'alcool en moi. La facilité avec laquelle j'y arrivais me décontenança une minute. Je me regardai dans un miroir, en tirant sur ma peau. Depuis que j'avais décidé de m'aimer, jamais je n'avais songé à me faire vomir. Qu'est-ce que ça voulait dire de moi ? Est-ce que je retombais inlassablement dans mes travers les plus déviants et noirs ? Je me rinçai la bouche et je redescendis à la fête. Elle continua encore longtemps et je me réveillai sur le canapé du petit chalet en milieu de matinée. J'avais une couverture sur moi et j'entendais les garçons s'activer pour tout ranger et nettoyer. L'odeur de café me frôla les narines et je vis une tasse près de moi. Paul avisa de mon réveil et en profita pour aspirer le sol. Ses parents ne tardèrent pas à arriver et ils eurent l'air surpris de me voir. Line me serra contre elle et alors que les garçons s'occupaient du repas, elle monta avec moi dans le grenier.
-Je venais souvent ici avec ta Maman. C'était notre refuge durant la dernière année et dès qu'un garçon nous brisait le cœur. Tiens, j'ai ça pour toi, ajouta-t-elle en me tendant un carnet. Je sais que tu n'es pas ma fille, mais c'est un peu comme si tu l'étais. J'espère que tu apprendras qui était ta mère avec. Et si tu as des questions, n'hésite pas une seule seconde à me les poser.
-C'est... un journal intime ?
-En quelque sorte, tu le découvriras par toi-même, Sarah.
Elle me laissa et je ne sus pas quoi en faire. Devais-je l'ouvrir immédiatement ? J'en fus tentée mais je me préférai attendre un peu plus. Je redescendis avec tout le monde et je vis Brian éternuer.
-Non non ne vous inquiétez pas, j'ai été me baigner hier soir pour répondre à un pari.
-C'est juste que tu es faible, Brian Miller, répondis-je. Moi aussi j'ai été me baigner et pourtant, j'ai pas de rhume !
-Tout le monde n'a pas la force d'esprit de Sarah McAllister, il faut dire, ironisa Brian.
-J'ai noté l'ironie mais plus rien ne me touche, je suis la Reine des Glaces.
-Sans déconner, marmonna-t-il.
On frappa à la porte du chalet et je vis Marc arriver avec sa petite amie.
-Papa ! Maman ! Qu'est-ce que vous faites là ?
-Je suis encore chez moi, il me semble, répliqua Line en l'embrassant et en saluant sa petite amie.
Marc me vit et m'ouvrit ses bras pour me serrer.
-Tu vas bien ?
-Tu es littéralement en train de m'étouffer entre tes bras, mais ça va Moyen McDust. Ne me regarde pas comme ça... Y'a Petit, dis-je en désignant Paul, y'a Grand, ajoutai-je en désignant son père... Toi tu es le moyen.
Benjamin éclata de rire, Paul me lança un regard noir, Marc se mit à rire. Je voyais que sa copine n'appréciait pas tellement qu'il ne m'ait toujours pas lâché. Je me dégageai doucement et je passai un agréable moment avec les McDust. Pendant un court instant, j'oubliai la mission que j'avais confiée à Jay, j'oubliais qu'il avait éventré mon secret, et j'oubliais que j'étais l'une des survivantes. J'étais juste une fille comme une autre. Du moins, je le pensais jusqu'à ce que j'entende les parents de mon ami parler de Brian et moi dans la cuisine.
-Je suis tellement soulagée qu'ils aillent bien tous les deux. Ils ont l'air de prendre la vie du bon côté. J'ai cru en voyant la photo postée par Sarah hier qu'on allait les retrouver limite en larme mais.. ils vont bien.
-Je suis un peu plus perplexe en ce qui concerne Brian. Je crois qu'il feint d'aller bien. J'ai essayé de le faire comprendre à John mais.. il est tellement soulagé de les voir vivant et en bonne santé qu'il ne semble pas comprendre.
-Il faut réessayer, Benjamin, répondis-je les faisant sursauter. Je suis à peu près certaine que Brian nous cache un truc et il ne veut en parler à personne. J'ai essayé de le dire à Papa mais il n'a rien vu du tout. Ou alors il faut le dire à Mary. Elle est un peu moins à la maison en ce moment, mais... si vous la choppez ce sera pas mal.
Benjamin me promit de réessayer et je ne tardai pas à filer sur le bitume direction la maison d'Eric. Ce fut Candice qui m'ouvrit la porte.
-Salut toi ! Rentre ! On se demandait justement où tu étais passée. Ta cousine et Eli sont là.
Elle m'embrassa et je rejoignis ma famille en m'affalant sur le canapé à côté de Grand-Père Dan.
-J'étais au Petit Chalet de Line. On a fait une jolie fête hier soir et ça m'a fait du bien. Où sont les gosses ?
-Dans la chambre de Lia, me répondit Eric. Tiens, on a fait du chocolat chaud et on expliquait à Kylie, comment faire un Chocolat chaud qui vaille le coup.
J'attrapai une des tasses et je me fourrai dans les bras de mon Grand-Père. Candice, Eli et son frère étaient encore en train de se chamailler. Je me redressai pour prendre le carnet que m'avait donné Line. L'écriture de ma mère était fine et soignée et son propos pris en plein milieu me fit rire.
« Je HAIS ce petit con arrogant de John McAllister. Pour qui il se prend au juste avec ses grands yeux et son sourire ? Pour un Dieu ? Il est en train d'emmener Eli dans ces conneries en plus. Je ne comprendrai jamais les garçons. Pourquoi sont-ils aussi... obsédés et grossiers ? Pourquoi ne peuvent-ils pas comprendre qu'on a pas envie de se laisser séduire, même un peu, pour rire ? Il prend un malin plaisir à me voir frissonner dès qu'il me frôle. Je le déteste. Je le déteste. Je le déteste. » Je tournai les pages de la première moitié. « Il est des fois où je me sens en décalage avec le monde, Line est à fond sur l'ami de mon frère, Ston, les autres filles de l'équipe sont avec des mecs et moi... j'ai l'impression de mentir à Todd. Je ne sais pas pourquoi il sort avec moi, quel trait de ma personnalité lui a plu alors que j'ai l'impression d'être moi-même uniquement quand je suis avec Eli et Line ? Est-ce que je lui mens à ne pas lui montrer qui je suis vraiment ? ». Je ne pensais pas que ma mère était ainsi, qu'elle avait l'impression de ne pas savoir qui elle était alors qu'elle était si sûre d'elle dans mon souvenir. Cela me rassura, si elle était aussi indécise que moi sur sa propre personnalité, ça ne voulait dire qu'une chose. J'allais finir par découvrir qui j'étais vraiment et ce jour là, je serai sûre de moi et rien ne pourrait m'arrêter.
***
Prochain chapitre : Bring me to life
Et aujourd'hui, sortie numérique de Brooken de YoungAndWild_ chez Evidence Editions ! Longue vie à toi et à tes œuvres :)
Et Joyeux anniversaire à Mamba314
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