La Cible
-Mais qu'est-ce que tu fais là ?
-J'ai pas le droit de rendre visite à Sarah quand vous n'êtes pas là ?
Mon père embrassa Candice et me fit un clin d'œil.
-Si bien sûr. Tu es là depuis longtemps ?
-Samedi. On a squatté chez Eric hier et aujourd'hui.. plage ! Maintenant que vous êtes rentrés, je vais partir.
-Quoi ? m'exclamai-je en me redressant.
-Candice, tu peux rester si tu en as envie, ce ne sont pas les chambres qui manquent !
-J'ai promis à Eric de venir m'occuper de la petite, John ! Il y a une soirée avec quelques anciens élèves de notre année et...
-Tu n'y vas pas, demanda Mary en enlevant son manteau.
-Certainement pas ! J'ai volontairement oublié cette invitation et je préfère pouponner Lia toute la soirée plutôt que de voir les vieilles biques du lycée me faire des remarques sur mon mariage. Ewwww. Rien que d'y penser ça me donne envie de vomir. Ça m'a fait très plaisir de passer du temps seule avec toi ma petite Sarah. Vous avez une fille super bien élevée. J'espère que vous êtes fiers tous les deux. John tu as fait un super taff.
Il la remercia gentiment et Candice m'embrassa sur le front avant de partir. Mon père ne m'avait pas lâché. Il respira l'odeur de mes cheveux et je fermai les yeux. Je ne voulais pas qu'il voit mon désarroi. Je fus arraché de l'étreinte paternelle par Tom qui me sauta dessus.
-OH MAIS LÂCHE SARAH, JOHN ! T'ES PAS TOUT SEUL.
Il poussa allègrement mon père et se fourra dans mes bras.
-Tu nous as trop manqués à Brian et moi. Faut plus jamais qu'on parte sans toi Sarah.
-Parle pour toi, grogna Brian. Moi j'ai passé un excellent week-end sans toi !
-C'est faux !
-Bah... non ? sourit Brian en s'installant dans un fauteuil, les pieds sur la table.
-Si ! Tu as même dit que ça aurait été cool si Sarah avait été là ! Hein c'est vrai Maman ?
-C'est exactement ce qu'il a dit ! Tu nous as manqué ma chérie. Tu as bien avancé dans tes révisions ?
-Pas tellement. J'ai profité de ces quelques jours pour apprendre à connaître Candice et trainer avec Lia. C'est tout. Et on a fait du shopping, je me suis achetée une nouvelle robe avec la carte de secours Papa. Je vais te la montrer tout de suite Mary, je reviens.
J'avais besoin de partir. Trop de bonheur me faisait du mal. Je me rendis dans la buanderie et je pris ma robe sur le tas de linge sale. Je remontai avant et Mary s'extasia devant la couleur et sur la coupe. Brian y jeta un coup d'œil et sourit.
-Celle que je t'ai offerte était plus jolie.
-Tu offres des robes à ma fille toi ? lui demanda mon père.
-Ouais quand j'ai pas envie qu'elle me colle la honte avec son uniforme et ses chaussettes chat.
Je ne lui répondis pas et Brian leva le sourcil.
-J'ai un truc pour toi Sarah.
Il déverrouilla son téléphone et il me le montra. C'était une photo de mon père avec des frites dans le nez. Il avait l'air ridicule. Je levai les yeux et je sentis des larmes arriver à mes yeux. Ils s'étaient tellement amusés sans moi. Ma bouche fit une grimace et j'eus un éclat de rire.
-Papa, tu as perdu toute crédibilité avec cette photo. Je me l'envoie pour te la ressortir jusqu'à ta mort. Merci Brian.
-Hein, quelle... Sérieux ??? s'exclama mon père en prenant le téléphone de Brian. L'abus.
-Tu parles un peu trop comme moi maintenant John. J'aime bien l'idée de déteindre sur toi, répondit le fils de Mary.
Je m'étirai et je poussai Brian pour me mettre entre mon père et lui sur le canapé. J'entendais Mary et Tom dans la cuisine. Ma maison m'avait parue vide sans eux et je ne pus m'empêcher de le dire. Mon père me fit basculer sur lui et je sentis la main de Brian faire une pression sur la mienne, comme pour me dire qu'il comprenait ma solitude durant le week-end.
-Tu as mangé quoi ce soir Sarah ? me demanda ma belle-mère.
-Rien. J'avais pas faim. Et puis j'ai grignoté avec Giulia.
-Je peux te préparer un petit quelque chose si tu veux ! Nous avons dîner en chemin. Je pense même que mon ventre sur patte de fils t'accompagnerait.
-Ouais, répondit Brian. Alors ? On grignote ?
-Non, vraiment pas. Je suis fatiguée, j'ai pas beaucoup dormi.
-Tu me parais pâle Choupi. Tu devrais aller au lit si tu es fatiguée.
-Je suis bien là Papa.
Je m'endormis contre lui alors qu'ils étaient entrain de parler de leur week-end et je me réveillai encore une fois en pleine nuit sans la possibilité de me rendormir. Je me mis à ma fenêtre avec mes écouteurs pour écouter de la musique, mais je n'avais plus de batterie sur mon baladeur. Je levai les yeux au ciel et je descendis les escaliers pour me faire un sandwich au poulet. J'en étais à la fin de mon repas nocturne lorsque j'entendis du bruit dans les escaliers. Brian apparut en se frottant les yeux. Il me regarda sans me voir et il se gratta la tête.
-Tu veux du lait ?
Je lui tendis la bouteille et il but directement au goulot avant de la jeter dans la poubelle.
-Pourquoi tu es debout ?
-Je n'arrive pas à dormir.
-Ah. Okay.
Il tourna les talons et s'arrêta soudainement.
-Viens avec moi.
Il me tendit la main sans pour autant me regarder. Je décidai de lui faire confiance. Il m'attrapa fermement par la main et me ramena dans ma chambre. Il me laissa quelques minutes et il revint avec un appareil étrange dans ma chambre.
-C'est quoi ?
-Tu vas comprendre rapidement.
Il le brancha et une petite lumière se diffusa. C'était un diffuseur, il était dans sa chambre normalement. Il mit certaines huiles essentielles dedans et une bonne odeur se diffusa dans la pièce.
-Remonte le haut de ton pyjama et allonge-toi. Ma mère me faisait ça quand j'étais petit. L'insomnie je connais tu sais.
Je sentis des gouttes sur mon dos et il me massa. Il me fit frissonner avec ses mains froides mais le mouvement circulaire qu'il faisait me tonifiait. Quand il eut terminé, je le retins par le bras.
-Reste avec moi.
-J'ai l'impression que tu as besoin d'un câlin, se moqua-t-il.
-Oui, c'est vrai.
Je me décalai dans mon lit et je sentis son corps puis ses bras autour de moi. Brian finit par s'endormir mais moi je restais désespérément éveillée. Le petit matin ne me surprit même pas. Je n'arrivais plus à trouver le sommeil, mais je me sentais un peu plus sereine. Je me retournai pour observer Brian entrain de dormir. Nous commencions tous les deux tard ce matin là et il était profondément endormi. J'essayai de chercher ce qui pouvait appartenir aux Miller et aux Teobaldo chez lui. De manière purement objective, Brian était un beau garçon au visage symétrique et je savais que Thomas le serait encore plus. Je me détournais pour regarder dehors. J'étais déjà fatiguée et déprimée de devoir aller en cours et faire semblant que tout allait bien. Brian remua et je me retrouvais un peu plus contre lui. Je repensais à Marc et une totale incompréhension m'envahit. Ça ne collait pas avec sa personnalité de me tromper, lui qui avait tellement la haine contre son père d'avoir été infidèle. Pourquoi le serait-il ? Ou alors c'était une ruse pour savoir ce que j'en pensais ? Je ne voulais plus pleurer, aussi je ravalais mes larmes, mais je me blottis un peu plus contre Brian, comme s'il était au courant et qu'il m'apportait juste du réconfort. Je fermai les yeux et j'eus l'impression d'être protégée contre moi-même. Je ne voyais plus Marc et sa copine. Je voyais l'horizon à perte de vue depuis le sommet d'une montagne. Je voyais la tranquillité, le réconfort... et le réveil fut très difficile. J'avais dormi trois heures et j'avais l'impression que le monde entier m'en voulait. Je filai dans la salle de bain des parents avant que Brian ne voit ma tête et après une rapide douche, je me maquillai avec les affaires de Mary. Je l'avais vu faire des centaines de fois. Quand je rejoignis Brian dans la cuisine, Paul était déjà là. Je devais sourire. Souris, vas-y.
-Tu te maquilles toi maintenant ?
-Bonjour à toi aussi Paul. Sophie n'est pas encore arrivée ? Je vais l'attendre dehors alors.
-Tu as l'air grognon McAllister.
-J'ai pas bien dormi.
Paul fronça les sourcils et il me fit tellement penser à son frère que cela me fit du mal. Je pris une banane et j'attendis Sophie dehors. Cette dernière était contente de me voir. Elle me parla de son week-end et arriva le moment fatidique du : « et toi ? Quoi de neuf ? ».
-Candice est venue à la maison et j'ai passé du temps avec Giulia. Et je me suis dit que tu ne devrais jamais épouser mon père.
-Heu... oui, jusque là on est d'accord. J'aime John hein, comme un Papa ours bis.
Je la fixai un faux sourire plaqué sur mon visage. Un congé après déconvenue amoureuse devrait être obligatoire. Je ne comprenais pas que personne n'y ait jamais songé. Le brouhaha du lycée m'empêcha néanmoins de réfléchir ce qui était excellent. Plus j'étais concentrée sur les cours et moins je pensais à ma vie autrement. Tara finit par m'attraper par le bras.
-Tu vas bien ? On t'a pas beaucoup entendu aujourd'hui.. Non pas que tu l'ouvres souvent, mais...
-Ça va. Je suis juste crevée.
-Tu n'as pas mangé ce midi non plus, ajouta-t-elle.
-Je n'avais pas faim. En fait je suis un peu malade mais comme je ne voulais inquiéter personne, je ne suis pas restée chez moi ce matin.
Elle ne me croyait pas, je le voyais, mais elle hocha la tête, l'air de dire qu'elle finirait par me percer à jour. Sophie devait partir plus tôt pour la danse et je l'observais avec ses cheveux désormais d'un roux flamboyant s'éloigner. J'avais cruellement besoin d'une distraction. Mon téléphone me sortit de mes pensées.
-Salut Grand-Père.
-Salut ma chérie. J'ai une bonne nouvelle pour toi !
-Ah ?
-Tu vas enfin pouvoir passer ton permis tir !
-Sérieusement ? m'exclamai-je. Papa a enfin dit oui ?
-Plus ou moins. J'ai un ami qui accepte de te recevoir mercredi après tes cours. J'espère vraiment que tu feras honneur à la famille Evans.
-Pas de soucis. J'ai un grand besoin de me défouler, tu as pas idée. Tirer sur une cible, ce sera parfait. Merci encore grand-père.
-Je t'en prie mon petit. Il parait que tu as passé du temps avec Candice. Je voulais te remercier. Elle est un peu seule en ce moment et je ne savais pas vraiment comment la faire sortir de chez nous. Il faut que j'y aille parce que mon rendez-vous est arrivé mais merci ma chérie. Je t'aime.
-Moi aussi je t'aime Grand-Père.
C'était tout ce qu'il me fallait pour me détendre. Tirer sur une cible.
Respirer, une fois, deux fois. Prendre son temps. Garder les jambes légèrement écartées, le dos et les épaules droits. Relever la tête, les bras. Il ne fallait pas que le coup parte trop rapidement. Je sentais le stress monter. Est-ce que j'allais réussir à tirer ? La cible était verrouillée. Je me décalai légèrement et je retirai le cran de sécurité. La détonation me fit un peu reculer et je sentis le coup partir dans l'ensemble de mon bras. C'était douloureux, personne ne m'avait prévenu que ça ferait aussi mal. Je baissai mon arme encore fumante avec un sourire de satisfaction, le premier depuis un petit moment. Je n'avais qu'une chose à faire maintenant... déterminer s'il était mort ou vif...
J'appuyai sur le bouton du stand et la cible arriva vers moi. J'avais tiré trois coups au niveau des jambes.
-Pas mal pour une première fois, me dit mon professeur. T'es bien une fille Evans. J'ai appris à tirer à toute ta famille. Ton grand-père ne dira pas le contraire, se mit-il à rire.
C'était un homme de l'âge de Grand-Père Daniel, ventripotent avec une moustache. Il était gentil comme tout.
-On va recommencer. Tu es prête ?
-Oui monsieur.
J'avais attendu ça toute la journée du mardi et du mercredi. Ce premier cours de tir. Je ne l'avais même pas dit à mon père. Il aurait trouvé un prétexte pour refuser que j'y aille. Ça me faisait du bien de décharger ma colère et ma culpabilité s'envola. Je sus ce que je devais faire.
Je devais parler à Marc, lui dire que j'étais au courant pour tout ça et qu'il me faudrait du temps pour lui pardonner mais que je le ferai, pour le bien de notre Famiglia. Selon son explication, je verrai bien ce qu'il faudrait faire après tout. En tout cas, nous ferions un break. C'était certain. Je levai mon arme, fit craquer mon cou et je continuai à tirer. Un sourire étira mes lèvres. J'avais fait mieux que la dernière fois. Je regardai l'arme que j'avais en main. J'allais peut-être ressortir celle de ma mère quand j'aurais mon permis. Je pourrais la faire enregistrer à mon nom.
Lorsque je rentrai chez moi, j'étais fourbue. Je n'en pouvais plus. J'avais des fourmis dans les bras, mais j'étais heureuse. Je le fus nettement moins quand mon père m'apprit que nous allions chez les McDust ce week-end.
-Pourquoi ?
-Leur anniversaire de mariage enfin. Tu vas bien Sarah ? Tu as choisi toi-même leur cadeau !
-Je ne vois pas le temps passer c'est tout. Il va falloir que j'aille faire du shopping. Je n'ai pas de robe.
Mon père me coula un regard étrange et je lui souris.
-Grand-Mère Amélia dirait que je ne peux pas porter deux fois la même robe dans un évènement mondain et j'ai porté toutes les miennes déjà. Je suis certaine que si je l'appelai, elle te dirait la même chose.
-N'appelle pas Grand-Mère pour si peu. Tu vas l'avoir ta nouvelle tenue.
-Pourquoi tu te la payes pas avec ton argent de poche ? demanda Brian. Tu es déjà à court ?
-Je n'aurais pas assez pour m'acheter une robe comme je le veux. Et puis il va me falloir une paire de chaussures pour aller avec. Ils n'ont pas fait un dress code cette année j'espère ? La dernière fois, c'était tout le monde en blanc et rose, dis-je aux Millers.
-Malheureusement pour toi, le thème est « champêtre chic ».
-T'es pas sérieux ? hoquetai-je. Faut vraiment qu'elle arrête de fumer Line. J'avais déjà une idée de chaussures, ça va pas être possible du coup. De toute façon, j'ai un contrôle lundi, je vais juste y faire un saut pour les embrasser mais je ne resterai pas.
-Sarah, tu travailles comme une dingue toute la semaine, parfois, je vais me coucher et tu es toujours entrain d'étudier ! répondit Mary. Détends-toi un peu, tu travailleras samedi !
-Mary, je veux étudier dans une grande université l'an prochain. Si je ne me mets pas à travailler maintenant, je vais finir dans une fac de seconde zone, j'aurais un métier de seconde zone et je trouverai un mari de seconde zone alors... non merci. Je vais travailler comme je l'ai prévu. Les McDust je les vois tout le temps, ils ne vont pas m'en vouloir.
Brian se mit à rire.
-Oh putain, tu lui fais vraiment la gueule à ton mec pour ne pas vouloir passer une journée avec lui.
-C'est pas certain qu'il revienne, il a du boulot lui aussi.
-Vu que Paul va le chercher vendredi soir et le ramène samedi, je peux t'affirmer qu'il va être là. T'es louche comme fille de ne pas vouloir passer ton temps libre avec ton mec.
-Si par passer ton temps libre, tu veux dire, baiser, non, je suis pas ce genre de filles.
-Sarah ! me réprimanda mon père en regardant Brian sévèrement aussi.
-Non mais Papa, c'est ce qu'il voulait dire, appelons un chat un chat. Je ne suis pas le genre de meufs qui sucent dans les toilettes du lycée, je ne me résume pas à mon vagin comme ta copine, Brian. Alors tu me laisses tranquille.
-Je ne te permets pas d'insulter ma petite amie. C'est petit de s'en prendre à quelqu'un d'autre au lieu de trouver les arguments pour se défendre. Et puis soyons honnête, si tu avais une réputation de suceuse...
-C'est quoi sucer ? l'interrompit Tom. Je comprends rien.
-Moi non plus, fit Mary. Mais tu sais Tom les ados ont un vocabulaire bien à eux. C'est pour ça qu'on les comprend pas toujours.
-J'ai pas envie d'être un ado, rétorqua Tom. Parce que j'ai pas envie de dire des trucs bêtes. Est-ce que je peux sortir de table ? J'ai un livre à finir.
Mon père lui ouvrit les bras tout en nous fusillant du regard.
-Passe une bonne nuit mon chéri. Vous pouvez arrêter de faire des allusions sexuelles devant Thomas ou c'est trop demander ? siffla-t-il une fois Thomas hors de portée. C'est un enfant, il n'a pas besoin d'être perverti par vous deux.
-On parle de Thomas, Papa. Je te signale que Brian lui a appris comment embrasser une fille l'année dernière.
-Ce que j'apprends à mon frère ne te regarde pas, je te signale. Et puis c'est toi qui a commencé à parler de fellation.
-Vous êtes insupportable, lâcha Mary.
-De la part d'un mec qui passe son temps à me dire d'aller me masturber, je trouve que t'es vachement impertinent, dis-je sans même l'écouter.
-Visiblement tu le fais pas assez ma petite, tu serais vachement moins coincée du cul.
-ÇA SUFFIT ! rugit mon père. Stop. Tu resteras le temps qu'il faut chez les McDust Sarah, ce n'est négociable. Brian ne fais plus de remarques sur Sarah. C'est pas possible, vous voulez être puni pour la quinzaine à venir ou quoi ?
Je me levai de table sans répondre en attrapant un plat. Mon père me retint par le bras.
-Je t'ai posé une question.
-Punis-moi si tu en as envie, je ne suis pas maître de mon destin. Je resterai dans mon coin chez les McDust puisque que maintenant les mondanités ont plus d'importance que les études. Je vais aller étudier sauf si ça aussi ça m'est interdit ?
Je ne savais pas pourquoi je passais mes nerfs sur lui. Il ne le méritait pas le pauvre. D'ailleurs, Brian vint me le faire comprendre en se jetant sur mon lit comme un malpropre.
-Pourquoi t'es chiante comme ça ? Je suis sûr que j'ai touché un point sensible avec McDust, non ?
-Tout va bien. Tu m'écrases Brian.
Il se redressa, posa mon livre sur le côté et s'allongea sur moi en posant ses mains sous son menton. J'étais coincée sous lui.
-Alors ? J'ai touché un point sensible ? Ça fait longtemps que tu m'as pas demandé de conseils intimes, alors je me demande...
-Tu sais Brian, je fais des tas de choses sans que tu le saches. Je n'ai plus autant besoin de toi que tu sembles le penser.
-Alors pourquoi tu viens dormir contre moi toutes les nuits ?
-C'est faux.
-Non Sarah. En pleine nuit, tu me réveilles et tu t'installes juste à côté de moi. Tu crois que je ne le remarque pas ? Tu crois que je ne reconnais pas ton odeur sur l'oreiller que tu délaisses le matin ? Tu crois que je ne me réveille pas lorsque tu te faufiles dans mes draps ? alors ? Tu m'as demandé d'être comme un frère, c'est ce que j'essaye de faire si tu ne l'as pas remarqué !
-Je... j'ai pas envie d'en parler maintenant. Et puis demain, j'ai rendez-vous avec ma psy alors.. ça va aller mieux.
-Donc tu admets que ça va mal. Je suis sûr que c'est à cause de Marc.
Je ne voulais pas le regarder droit dans les yeux. Son regard m'aurait pétrifié et je lui aurai tout raconté, je le savais.
-J'ai commencé le tir et je pense que tu devrais venir avec moi la semaine prochaine. On s'amuserait bien je crois.
-J'essaye d'avoir une conversation sérieuse avec toi. Mais visiblement tu refuses. Bonne nuit.
Il se leva et quand il posa sa main sur la porte, ma bouche s'ouvrit toute seule.
-J'ai pas envie d'aller chez les McDust et de croiser Marc. J'ai pas envie de le voir en ce moment. J'ai pas la force pour ça. Je suis fâchée contre lui et j'ai pas envie de lui pardonner, pas tout de suite. Je suis en colère et si je ne le suis plus, il me restera quoi Brian ?
-La sérénité et une nouvelle vision de la vie. Tu lui pardonneras et tout repartira comme avant.
-Et si je n'ai pas envie ?
Brian se retourna et je vis ses yeux briller.
-Tu le regarderas droit dans les yeux et tu lui diras que tu veux faire un break pour te retrouver. Et il durera autant de temps que tu le veux.
-Et si j'ai pas la force de le faire ? dis-je d'une voix chargée d'émotion.
-Tu me le diras, et je le ferai à ta place. Tu veux que je reste avec toi ce soir ?
Pour seule réponse je me décalai dans mon lit. Il ouvrit la porte, sortit et il revint quelques minutes plus tard avec son livre et son iPad. Il était à deux doigts de retirer son T-shirt mais il ne le fit pas finalement. Il s'installa à côté de moi et enclencha un épisode de série. Je me penchai pour regarder avec lui et Brian finit par passer son bras autour de moi. Je n'étais pas dans mon assiette, c'était clair.
-Brian.. ?
-Je ne dirai rien à personne tant que tu diras pas que je regarde Gilmore Girls.
-Croix de bois, croix de fer.
Je passai la première nuit de ma semaine sans me réveiller à 2h du matin. Brian était parti quand je me réveillais et je le retrouvais dans la cuisine entrain de prendre son petit-déjeuner. Il était tout seul. Je me laissai tomber à côté de lui et il me servit du thé sans même me regarder. Je pris une pomme et j'entendis un son désapprobateur venir de lui.
-Tu manges que ça ?
-Je n'ai pas très faim.
Il poussa son assiette de pancakes vers moi.
-Mange et discute pas. Ils sont déjà tous partis. On va en cours ensemble. Par rapport à hier...
-Oublie ce que je t'ai dit d'accord ? Tout ce que j'ai dit. Je ne sais pas ce qu'il m'a pris.
-Moi je le sais, mais comme je n'ai pas le droit d'en parler, tu ne sauras pas ce que je pense de tout ça. Mange tes pancakes. Je suis sérieux. Sinon, je te choppe et je te les fais avaler de force.
-Je n'en veux pas.
-Tu crois que j'ai pas remarqué que tu mangeais pas le midi ? Que le repas du soir était ton seul repas. Tu veux devenir un squelette pour redraguer ton mec ? Bravo. Tu en prends le chemin.
-Tu sais quoi ? Va te faire foutre. Merde. Je fais ce que je veux. Si j'ai envie de faire une détox, ça ne te regarde pas, compris ? Si j'ai envie de me trancher les veines dans mon bain, ça ne te regarde pas non plus. Oublie ce que je t'ai dit tout court. Je veux pas que tu sois mon frère, ça te donne trop d'emprise sur moi. Tu es personne.
-Oh putain, tu recommences. Tu sais quoi Sarah ? hurla-t-il. Tu m'emmerdes. J'essaye vraiment de m'améliorer mais toi tu débloques tellement parfois que... que...
-Que quoi Brian ?
-J'ai juste envie de te balancer une grosse baffe dans ta gueule ! ET JE FAIS PAS CE GENRE DE CHOSES, PARCE QUE JE NE FRAPPE PAS LES FEMMES.
-Je te hais !
Je me mis à le frapper une fois, deux fois, trois fois. Je ne savais pas ce que j'avais. J'avais envie de frapper quelqu'un. C'était tout. Frapper encore et encore, jusqu'à ce que mes bras me fassent mal. Je me mis à pleurer, petit à petit et je m'écrasais contre lui.
-Je suis désolée, je suis tellement désolée.
Il finit par m'immobiliser et il me serra contre lui avec force.
-J'ai compris Sarah. Tu peux me frapper autant que tu veux, comme tu ne peux pas le taper, lui. Je ne sais pas ce qu'il a fait exactement pour que tu sois aussi en colère mais si tu as besoin d'un punching ball humain, j'encaisserai. Mais là, on doit aller en cours, alors sèche tes larmes, plaque un sourire sur ton visage et fais comme si tout allait bien. Tu peux pas montrer ce que tu ressens au lycée, tu comprends ? Agis comme la Miller que tu es.
-Je ne suis pas une Miller.
Il me força à le regarder et il essuya mes larmes.
-Tu as voulu devenir ma sœur, tu me prends moi, ma famille et notre manière de vivre. Tu seras une Miller aussi longtemps que je veux que tu le sois. Aussi longtemps que je serai près de toi. On y va.
Il m'entraina dans la Batmobile et me tendit les affaires de maquillage d'Alex pour que je cache mes yeux rougis et mes cernes. Il attendit que je m'arrange pour démarrer la voiture.
-Il a fait quoi ?
-Il m'a trompé avec une fille, je crois que c'est une de ses ex.
Brian ne dit rien mais je vis ses poings blanchir sur son volant.
-J'ai été à Stanford vendredi soir et je l'ai vu avec cette fille. C'est pour ça que Candice est venue ce week-end. C'est pour ça que je n'arrive plus à dormir, que j'ai piqué des anxiolytiques à mon père et que j'en prends pour tenir la journée. C'est pour ça que je viens dans ton lit, parce que je me sens tellement seule que je donnerai n'importe quoi pour me sentir encore un peu vivante. Je n'arrive plus à rire, je n'arrive plus à manger, je n'arrive plus à parler, je n'arrive plus respirer. J'ai une douleur lancinante dans la poitrine. Je préfèrerai qu'Alexandra et Chris me martyrisent encore plutôt que de ressentir ça. Je.. préfèrerai que tu me dises que je ne suis rien, que je suis une sale gosse nombriliste plutôt que de ressentir ça. Je préfèrerai mourir que de ressentir ça et d'entendre cette voix au fond de mon crâne qui me répète inlassablement que je ne suis pas assez bien, que je n'ai pas fait assez, que je ne me suis pas battue pour l'amour, pour mon amour.
Brian s'arrêta brusquement sur le bord de la route. Ses bras tremblaient et je n'arrivais pas à voir son visage. Il prit son téléphone et tapa un numéro.
-Bonjour Candice, c'est Brian Miller. Désolé de vous déranger. J'ai besoin d'un service. Vous pourriez appeler le lycée en vous faisant passer pour ma mère pour les prévenir qu'on a eu une indigestion et qu'on ne pourra pas venir de la journée ? Oui c'est ça. Oui je suis sérieux. Sarah a besoin d'une opération commando anti-connard. Oui.. oui.. Ça me va. On passe vous prendre. Merci beaucoup Candice.
-Une opération commando anti-connard ? dis-je alors qu'il raccrochait.
Il acquiesça et passa chez Eric. Candice était là et elle monta à l'arrière de la Batmobile. Il y eut un grand silence dans la voiture pendant que Brian roulait vers Santa Monica.
-Brian. Calme-toi. Je connais suffisamment les hommes pour savoir que tu as envie de tuer quelqu'un, remarqua Candice en posant une main sur son épaule alors qu'il se garait sur un parking.
-Pas quelqu'un. Marc McDust. Putain. Je l'avais prévenu en plus, grogna-t-il.
-Comment ça ? demandai-je.
Brian tourna son regard vers moi. Il était furieux.
-Tu crois vraiment que tu aurais pu sortir avec cet enculé sans que je lui donne ma permission alors que je l'avais foutu dehors pour toi ? Je l'ai prévenu que s'il te brisait le cœur, je lui pèterai méthodiquement la gueule.
-Pourquoi ?
-Parce que c'était mon devoir de le faire. Parce que j'ai toujours veillé sur toi, même quand tu pensais que je m'en foutais royalement de toi. Je suis comme ça et je tiens parole. La prochaine fois que je le vois, je vais devoir lui exploser la gueule pour toi et ça m'énerve t'as pas idée.
-Non Brian. Tu le feras pas. Je.. je ne suis pas sûre de le quitter.
J'observai sa réaction et il me jeta un regard si noir que j'en frémis.
-Mais t'es conne ou tu le fais exprès ? T'es complètement pétée de la caisse ma pauvre. Non Candice, pas la peine de faire cette tête. Il est pas question que tu te remettes avec lui.
-Je te demande pardon ?
-Va falloir que je t'explique un truc, pauvre débile. Quand on trompe sa meuf ou son mec, ça veut dire qu'on se considère comme libre. Sinon on ne le fait pas. Et tu crois que pendant qu'on couche avec sa moitié officielle, on ne pense pas à l'officieuse ou à celle qu'on a eu ou qu'on pourra avoir après ? Tu te fais des illusions. Il a baisé avec une autre fille. Non vu que c'est son ex, il a fait l'amour avec une autre. Tu crois qu'il va penser à qui maintenant hein ? Quand il va sentir tes cheveux, qu'il va baiser ton cou, qu'il va fermer les yeux. Autant te le dire, il verra la plus douée de vous deux. Je suis pas sûr que ce soit toi.
-Brian. Ça suffit. Elle a compris, je crois, le réprimanda Candice.
Oui, j'avais compris. Parfaitement compris. J'ouvris la portière et je la claquai derrière-moi. Tu crois qu'il va penser à qui maintenant hein ? Quand il va sentir tes cheveux, qu'il va baiser ton cou, qu'il va fermer les yeux. Autant te le dire, il verra la plus douée de vous deux. Je suis pas sûr que ce soit toi. Crétin de Miller. J'aurais préféré aller en cours. Je me rendis sur la plage et je m'assis directement sur le sable.
-Il ne voulait pas dire ça Sarah, me dit Candice en s'asseyant juste à côté de moi.
-Tu ne connais pas Brian. Il dit toujours ce qu'il pense.
-C'est vrai, me répondit ce dernier en s'asseyant de l'autre côté. Mais je crois que tu le savais déjà. Tu feras ce que tu veux. Mais sache que le fait que je lui casse la gueule est une possibilité.
Je me levai sans rien dire et je retirai mon uniforme, couche par couche, jusqu'à ce que je me retrouve en sous-vêtement. Je me mis à courir vers l'eau et je me jetai dedans. C'était froid mais revigorant. Je nageai encore et encore et quand je revins, je vis que Candice avait disposé une serviette là où je me trouvais. Brian avait disparu.
-Il est parti chercher des habits, me dit-elle. C'est un garçon bien. Tu ne devrais pas être aussi dure avec lui. Il veut vraiment faire bien, ton bonheur lui importe tu sais.
-Je sais tout ça, mais.. c'est le seul de mes amis capable d'encaisser ce que je lui dis, quand je l'insulte aussi ou quand je le tape parce que j'ai besoin d'extérioriser. Il m'a promis de m'aider et de me sauver de moi-même. Je me repose trop sur lui ou sur toi. Tu aurais dû refuser pour aujourd'hui. Nos parents vont nous tuer.
-John va me tuer et me dire que j'ai une mauvaise influence sur toi mais je m'en fous. S'il me saoule, j'enverrai Daniel lui remonter les bretelles. Daniel me dit toujours qu'il a eu quatre enfants. Trois de son « ex-femme tarée » et un autre par alliance. Je serai une mauvaise femme, plus que je ne le suis déjà, si je ne te venais pas en aide Sarah. T'es de ma famille, pas seulement parce que je suis la femme de Daniel mais aussi parce que j'ai été amie avec les tiens. Je n'aurais jamais d'enfants à moi et si j'avais eu une fille, j'aurais aimé qu'elle soit comme toi.
De l'amertume, c'était ce que j'entendais dans sa voix. Elle n'aurait jamais d'enfants et ça la rendait malheureuse.
-Je te promets de toujours me tourner vers toi en cas de soucis. Je me partagerai entre Mary et toi, y'a pas beaucoup de femmes dans la famille, faut qu'on se serre les coudes. Et quand je me marierai, tu seras là aussi. Je te jure.
J'étais dans ses bras quand Brian revint avec des affaires à nous. Nous restâmes à la plage toute la journée. Je pouvais regarder l'océan et vider mon esprit. J'avais l'impression de voir des éclaircies dans mon brouillard intérieur.
-Candice, tu te souviens de la proposition de mes oncles ?
-Laquelle ?
Brian était entrain de se baigner et nous nous promenions au bord de l'eau.
-Tu sais... pour que tu aies un bébé.
-Tu ne vas pas t'y mettre toi aussi ! Je ne me rappelle pas sans honte de cette journée. Je.. j'aurais aimé avoir des enfants. Mais je me suis fait une raison. Dans la vie, il ne faut rien regretter. La vie est trop courte pour avoir des regrets. D'ailleurs, je vais rester ici encore une bonne semaine, si tu veux qu'on se fasse un ciné.
-Avec plaisir.
Je ne voulais plus avoir de regrets, mais quand Marc m'appela alors que nous étions dans la voiture du retour, je ne pus lui répondre. Brian jeta un coup d'œil à mon téléphone et il raccrocha à ma place, mais ce ne fut pas le cas quand Sophie m'appela. Je remarquai qu'elle avait essayé de me joindre plusieurs fois sans que je ne l'entende.
-Je suis devant chez toi, tu es où ?
-J'ai fait l'école buissonnière.
-Ah. Okay.
Elle paraissait vexée et elle me le confirma quand nous arrivâmes. Ma meilleure amie vit Brian et elle le salua à peine.
-Tiens tes cours.
-Sophie.
-Je dois rentrer chez moi. Mon père m'attend.
-Ne sois pas vexée, lui dis-je en l'attrapant par le bras.
-Sarah. J'ai cru que tu étais malade alors que tu es partie faire je ne sais quoi avec Brian. Vous ne m'avez même pas proposé de venir avec vous.
-On avait des choses à faire tous les deux.
-Ah oui, il y a un vous deux maintenant. T'es pas croyable. Tu avais toute la journée pour me prévenir, mais tu attends que je poireaute devant chez toi pour le faire. Mais vu que tu as Brian pour faire toutes tes conneries maintenant, je suis sûre que tout va bien aller pour toi. Allez bye.
-So !
Elle démarra dans sa voiture, me laissant seule devant chez moi. Je rentrai rapidement et je filai dans ma chambre. Elle m'en voulait.
-Je peux entrer ?
-Tu es déjà là de toute façon.
-Qu'est-ce que tu as ? me demanda Brian. Marc t'a envoyé un message ?
-Non. Sophie me fait la gueule parce qu'on ne l'a pas emmené avec nous. On s'était toujours dit qu'un jour on irait pas au lycée pour faire l'école buissonnière. Et maintenant elle croit que c'est notre truc à nous deux de partir sur les routes.
-Je confirme, c'est notre truc.
Je me tournai vers lui et il paraissait saoulé d'être là, à m'écouter me plaindre. Je m'excusai et je me redressai.
-C'est juste... qu'on a été toutes les deux longtemps et maintenant y'a toi et moi. Elle a peur que tu la remplaces, sûrement.
-Y'a un toi et moi depuis qu'on se connait Sarah. Je pense qu'il y a autre chose. Appelle-la. Je pense qu'elle voulait te parler de Punette et elle.
-Écoute, je connais Sophie, elle va s'en vouloir et me rappeler. Je n'ai rien fait de mal que je sache.
-Appelle-la. Je suis sérieux. Elle a besoin de toi, c'est clair, sinon elle aurait envoyé tes cours par mail ou elle aurait attendu demain pour te les donner.
Il avait raison, j'appelai Sophie mais elle était sur répondeur. Je ne lui laissai pas de message. Elle me rappela deux bonnes heures plus tard, alors que Mary venait de rentrer. Je m'isolai dans le jardin.
-Tu voulais un truc Sarah ?
-Savoir ce que tu avais.
-Rien.
-Sophie. Tu me mens mal.
-J'avais besoin de te parler, mais comme tu préfères trainer avec Brian maintenant, je présume que je vais devoir me trouver une autre personne à qui me confier.
-Je comprends pas le délire.
-Tu crois que j'ai pas vu que tu allais mal cette semaine ? J'ai attendu que tu m'en parles mais non, tu as préféré faire un petit road trip avec Brian, comme la dernière fois. Je ne vois pas à quoi je sers du coup, vu que tu ne me parles plus de tes problèmes.
-T'es jalouse de Brian ?
-Évidemment que je suis jalouse. T'es ma meilleure amie mais tu ne me dis plus rien ! Tu préfères te confier à un mec qui d'après tes dires, est le roi des connards.
-J'ai presque l'impression que tu préférais quand Brian et moi on se faisait la gueule tout le temps et je te trouve injuste. J'ai le droit de bien m'entendre avec lui si j'en ai envie. En plus c'est lui qui m'a enlevé avec Candice aujourd'hui. J'ai pas donné mon avis. C'est juste arrivé. Tu n'as pas à me reprocher de vouloir être bien dans ma tête et avec ma famille. C'est l'hôpital qui se moque de la charité là !
-Mais tu es entrain de me délaisser Sarah. Tu l'as pas compris ? À chaque fois que tu préfères quelqu'un d'autre pour te confier, c'est ça que tu ne me dis pas. Mais moi j'ai personne d'autres que toi. Je suis toute seule. Hank est à des milliers de kilomètres de chez moi. Je...
J'entendis Sophie craquer au bout du fil.
-Mon frère me manque. Et comme il va avoir un bébé, il aura encore moins de temps à m'accorder et j'ai l'impression d'être une grosse égoïste de merde, parce que d'un autre côté je suis hyper contente que la famille s'agrandisse. Désolée, dit-elle en reniflant. Je vais te laisser, on se voit demain au lycée.
Elle raccrocha. C'était dur d'entendre Sophie, mon roc, avec autant d'émotions dans la voix. Je rentrai dans la maison et j'eus la surprise de voir Nicholas.
-Salut ! Je suis venu déposer ça pour ton père. Qu'est-ce que tu as ?
-Je vais venir avec vous, Sophie a pas l'air d'aller bien.
-Ah ?
L'inquiétude paternelle revint et il accepta de m'emmener. Je montai directement dans son boudoir. Sophie était allongée sur ton tapis, face au mur, la tête posée sur son énorme ours en peluche que son oncle lui avait offert quand elle était petite.
-Tu n'étais pas obligée de venir Sarah.
-Si. Tu ne vas pas bien.
-Si.
Elle n'avait pas bougé d'un millimètre et je m'installais près d'elle.
-Je suis désolée Sophie. Je ne voulais pas que tu te sentes toute seule aujourd'hui. Mais Brian et moi, on a décidé d'agir comme une vraie fratrie. Ça ne changera jamais ce qu'il y a entre toi et moi ma chérie. Jamais. J'avais juste besoin de temps pour...
-Pour ?
-Pour digérer le fait qu'entre Marc et moi c'est fini.
-Quoi ?
Elle se redressa comme une pile et me fixa avec ses grands yeux bleus.
-Il a couché avec une autre fille et ça fait près d'une semaine que j'essaye à me faire à cette idée que lui et moi... c'est terminé, mais je n'y arrive pas. J'arrive pas à penser à autres choses, j'arrive pas à tourner la page comme ça.
Elle me serra contre elle avec une force insoupçonnée.
-Et moi j'ai fait ma grosse conne alors que tu traversais ça. Je suis désolée Sarah. Comment tu l'as su ?
-J'ai été à sa fac vendredi et je l'ai vu. Je sais pas comment réagir. J'ai mis Brian au courant tout à l'heure parce qu'il a insisté alors que je voulais juste ne rien dire. C'est pour ça qu'on est parti.
-Je vais faire une expédition commando avec Brian pour lui arracher les couilles.
-Non, je crois que je vais laisser couler. Je veux pas détruire la famiglia. Mais je cherche un moyen, j'essaye de prendre sur moi pour continuer à faire comme si tout allait bien alors que je tombe dans un puits depuis des jours et que je ne vois pas le fond. Le seul truc où j'ai eu du réconfort c'est le stand de tir hier et ma journée aujourd'hui. J'ai envie de voir les gens autour de moi heureux. Pas leur retirer leur bonheur. C'est pour ça que je suis là So. Parce que je t'aime et que j'aurais dû te le dire dès le début mais... c'était bloqué dans le fond de ma gorge. J'arrivais pas à en parler et...
Elle me serra encore un peu plus fort.
-T'as rien à te faire pardonner. C'est toi la victime. Et en plus on a ce truc chez les McDust... si tu ne veux pas y aller, je me fais porter pâle.
-Mon père veut que j'y aille. Je vais... arranger les choses avec lui. Tu as pas un truc réjouissant à me raconter pour me changer les idées ?
-J'ai couché avec Cameron.
J'ouvris grand les yeux et Sophie grimaça.
-Punette est mort. Vive Cameron, lâchai-je.
-Hey ! Fais pas ta Brian.
Elle me tapa sur la tête et je me mis à rire. Nous nous rallongeâmes sur son tapis.
-Alors ? Je veux des détails. Où ? Quand ? Comment ? Pourquoi ???
-Hum, chez lui... ce midi ?
-NAAAAAAAN.
-On a été déjeuner chez lui et... c'est parti en..
-Couilles, c'est le moment de le dire.
Elle rougit tellement qu'elle me fit encore plus rire.
-Et c'est comment ? de faire l'amour avec un garçon qu'on aime après avoir attendu si longtemps ?
-C'est... magique. Splendide même. Bon, c'était pas.. je veux dire que je suis contente d'avoir fait ça avec lui, pour le mettre en confiance et tout. Ce sera encore plus cool les prochaines fois.
Nous gloussâmes et j'eus soudain la confirmation que ça irait mieux, un jour. Je ne savais pas quand, je ne savais pas comment mais Sophie aussi avait eu une rupture amoureuse l'an dernier, et elle s'en était remise, était retombée amoureuse et vivait des instants magiques. Ça m'arriverait aussi un jour, mais en attendant... je devais parler à Marc et ensuite... commencer mon deuil.
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