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15 - Greensleeves


~ Wyer ~


Hélas, mon amour, vous me faites mal.

Anonyme, Greensleves


Les premiers rayons du soleil percèrent à travers la fenêtre, et se posèrent sur moi, me réveillant avec douceur. Bien que j'eusse un peu froid, je me sentais bien... Lentement, je m'éveillai.

Quand je pris soudain conscience des conditions dans lesquelles j'avais dormi, je sentis une profonde gêne s'immiscer en moi. Ezilly était presque entièrement affalée sur moi, plongée dans un lourd sommeil... Après notre longue journée d'hier, je pouvais comprendre sa fatigue.

Je n'osai pas bouger, de peur de la réveiller. Je restai donc ainsi, à moitié allongé, observant silencieusement les pâles rayons de lumière dorés jouer dans ses boucles ébène, créant des reflets de cuivre dans sa chevelure. Elle était mignonne, endormie... Enfin, comme toujours.

Je redoutai qu'elle se réveille, et qu'elle me surprenne en train de la regarder. Pour autant, je ne parvenais pas à détacher le regard de son visage.

Je ne me reconnaissais plus. Qu'était donc devenu le Wyer sombre, qui détestait le monde entier ? Je m'étais laissé attendrir par une fille sortie de nulle part... C'était comme si, sa chaleur, ses yeux si bleus qui me transperçaient jusqu'à mon âme avaient fait fondre l'armure de fer qui protégeait mon cœur... Cela me terrifiait. Avec elle, je me laissais aller à être gentil...

Comme une personne normale.

Oui, c'était cela. Si elle avait brisé ma carapace, c'était pour laisser sortir celui que j'étais réellement. Avec elle, je n'étais plus le prince héritier du royaume : j'étais juste moi.

Hier, j'avais été heureux de passer du temps avec elle. Elle avait même réussi l'exploit de me faire rire, ce qui m'avait moi-même surpris... Je ne riais pas souvent.

La veille, je m'étais endormi dans le fauteuil du salon alors que je lisais, et des petits pas m'avaient réveillé. Ezilly avait rejoint la fenêtre sans même me remarquer.

Puis elle s'était mise à pleurer, et s'était laissée glisser au sol. Mon cœur s'était serré de douleur à la vision de ce visage en larmes. J'avais l'impression que depuis que je la connaissais, je la voyais souvent pleurer. Et je me doutais de la cause de son chagrin : ceux qu'elle aimait, avec qui elle avait vécu, lui manquaient... Et j'étais la première personne coupable.

Témoin silencieux de sa souffrance, je m'étais forcé à ne pas bouger. Puis, brusquement, j'avais craqué.

Je m'étais levé, saisissant la couverture en laine qui me recouvrait, et l'avait délicatement posée sur les frêles épaules d'Ezilly. Je m'étais excusé d'avoir signé le contrat, puis, bouleversé par ses yeux bleus remplis de larmes, l'avais serrée contre moi. J'y avais mis toute ma tendresse refoulée, tout mon manque d'amour, tout ce que j'étais capable d'offrir. À cet instant, elle n'était plus mon épouse, plus la princesse de Weldriss, ni même une jeune fille de quatorze ans... Elle était simplement tout pour moi.

Je secouai légèrement la tête, gêné de mes pensées. Je baissai le regard sur le doux visage endormi qui reposait sur mon ventre. Dire que je l'avais tant haïe...

Un bruit me fit soudain sursauter : quelqu'un descendait les escaliers.

Ni une ni deux, je me dégageai doucement mais fermement d'Ezilly, et reposai sa tête sur le tapis avant de filer me dissimuler derrière un rideau. Je vis Freya apparaître en bas de l'escalier, un tablier blanc autour de la taille. J'attendis qu'elle eût disparu dans la cuisine pour me faufiler à l'étage, soupirant de soulagement dès que je fus arrivé dans ma chambre. Cette fois, j'avais évité le pire, de justesse...

Je me laissai tomber sur le lit, les mains sur le visage. Je faisais n'importe quoi...

J'attendis quelques dizaines de minutes, puis je décidai de me « lever ». Le soleil brillait fort derrière la fenêtre, et le ciel était d'un bleu pur, contrastant avec la neige immaculée tombée pendant la nuit. Aujourd'hui allait être une belle journée...

Je me changeai rapidement, puis après m'être lavé le visage, j'ouvris la porte et rejoignis Freya, qui s'affairait déjà aux fourneaux.

- La jeune maîtresse était endormie sur le tapis du salon, lorsque je suis arrivée, m'annonça-t-elle après m'avoir salué. Elle a dû se lever durant la nuit...

- Sûrement, répondis-je d'un ton évasif, essayant tant bien que mal de masquer ma gêne.

Nous parlâmes quelques instants, puis je déjeunai dans le calme, l'esprit ailleurs. Je m'apprêtais à sortir de table quand une petite silhouette apparut à l'entrée de la pièce.

- Bon... Bonjour, dit Ezilly, l'air un peu perdu, comme si elle ne savait plus vraiment où elle était.

Je hochai la tête sans pouvoir retenir un sourire. Son regard plein d'interrogations semblait me demander ce qui s'était passé. Je me sentais coupable de l'avoir laissée ainsi, allongée sur le tapis, mais le temps m'avait manqué... Si j'avais pu, je l'aurais déposée dans un fauteuil.

- Avez-vous passé une agréable nuit, mademoiselle Ezilly ?

Depuis qu'elle avait invité Freya, Caralee et Ridge à manger avec nous, sous l'insistance de ma compagne, la cuisinière avait cessé de s'adresser à nous avec ce respect cérémonieux qu'elle avait au départ. Désormais, plus « d'Altesse » qui tienne...

- Cela faisait longtemps que je n'avais pas aussi bien dormi, murmura-t-elle timidement.

Mon cœur accéléra un peu sa cadence en entendant sa réponse. Je dérivai mon regard sur le sol, à la fois gêné et étrangement heureux. Elle avait bien dormi...

Elle s'assit en face de moi sans rien dire, les joues rouges. Je la revis hier, lorsqu'en larmes, elle s'accrochait désespérément à moi... Elle gardait toujours cette trace de tristesse dans les yeux.

- Comment vas-tu, depuis hier ? demandai-je d'une voix qui me surprit par sa douceur.

Elle releva la tête, surprise, avant de la rebaisser tout aussi vite quand elle croisa mon regard.

- Bien...

En voyant ses yeux résolument fixés sur la table et son visage empourpré, je me mis à sourire. Décidément, cette fille était vraiment mignonne...

La matinée se passa tranquillement. Caralee nous apprit à jouer à un jeu de plateau typique de la région, le Goucki : c'était un jeu de stratégie avec dix pions ronds, le but étant de tous les récupérer en gagnant des territoires. Ezilly était une adversaire redoutable... Mais à ma grande fierté, je l'étais encore plus.

Nous jouâmes longtemps, puis je me calai dans un fauteuil près de la chaude cheminée pour lire. Je me sentais un peu prisonnier : la neige était si épaisse dehors qu'on ne pouvait pas faire un pas sans s'enfoncer de trente centimètres. La promenade n'était pas pour aujourd'hui...

Las, je déambulais dans les couloirs de l'étage, en quête de quelque chose à faire, quand une porte que je n'avais jamais remarquée m'interpella. Je la poussai doucement, et ce que je découvris m'ébahit :

Au centre de la pièce, un magnifique piano blanc à queue m'attendait.

Aussitôt, les souvenirs ressurgirent à l'orée de ma mémoire.

La mélodie résonnait dans tous les couloirs du palais. Caché derrière la porte, cela faisait des heures que j'observai ma mère jouer, sans bouger. Elle était si belle... Ses longs cheveux noirs lâchés dans son dos volaient dès qu'elle remuait doucement la tête. Assise bien droite sur le petit siège en velours rouge, elle se balançait d'avant en arrière, comme si elle dansait, emportée par la musique.

Ébloui par la beauté du son, je vibrais de tout mon corps, depuis mes oreilles jusqu'au bout de mes doigts. Il me semblait être dans un de ces instants hors du temps, comme si le monde s'était figé pour écouter ma mère jouer. Ma mère... À ce moment, je ne m'étais jamais senti aussi proche d'elle.

Alors que je n'avais que quatre ans, ma mère jouait du piano. À chaque fois, je me cachais pour l'écouter, sachant qu'il aurait suffi qu'elle me découvre pour que ces instants magiques se brisent. Dès que je venais vers elle, elle me repoussait aussitôt...

Cela était malheureusement arrivé. Je m'étais endormi, bercé par sa musique... Je ne le savais pas, mais c'était la dernière fois que j'avais pu l'écouter. Après m'avoir surpris, elle avait définitivement cessé de jouer. Et quelques mois plus tard, sa santé avait chuté pour de bon... C'était la fin. Elle n'avait plus jamais touché à un piano.

À force de l'observer, j'avais appris par cœur les mélodies, et avais mémorisé l'ordre des touches sur lesquelles elle posait ses doigts. Chaque fois qu'elle avait fini, après qu'elle soit retournée dans sa chambre, je m'asseyais à sa place et l'imitais. Du haut de mes quatre ans, j'avais ainsi appris à jouer du piano... C'était le seul lien que j'avais avec ma mère, bien qu'elle l'ignorât. Quand je jouais ses mélodies, j'avais l'impression qu'elle était avec moi. J'oubliais qu'elle ne m'aimait pas, que j'étais sa déception, que j'étais celui qui avait brisé sa santé...

Lentement, le regard figé sur le piano, je m'avançai. Je tirai le siège, m'assis et posai mes doigts tremblants sur les touches. Puis, je fermai les yeux.

Et commençai à jouer.

Aussitôt, la musique m'emporta, et j'oubliai tout. Dès que je jouais une note, la suivante me revenait en mémoire, et la mélodie se formait, aussi belle et fluide que celle que créait ma mère. J'étais enivré de musique, plongé dans mes souvenirs. Au fil du morceau, un sentiment brûlant de nostalgie grandit dans mon cœur : comme je l'avais toujours fait lorsque je jouais du piano, je m'imaginai que ma mère était derrière moi, et que, ses mains posées sur les miennes, elle m'entraînait sur les touches du piano.

Je n'entendis pas les dernières notes du morceau arriver. Soudain, ce fut le vide. La mélodie était finie, le souvenir de ma mère partit, et j'étais seul, perdu devant ce magnifique piano.

Je baissai lentement la tête, et mes mains glissèrent des touches, pour retomber sur mes genoux.

Une infinie tristesse s'empara de moi.

- C'était magnifique, murmura alors une petite voix derrière moi. Greensleeves ?

Je me retournai, et mon regard tomba alors sur Ezilly, debout à côté de la porte, qui me regardait avec admiration.

- Tu... Tu connais le titre de cette musique ? balbutiai-je.

- Bien sûr, fit-elle avec un sourire. Ma tante me la fredonnait pour me bercer, quand je n'arrivais pas à dormir. C'est une vieille chanson du nom de Greensleeves, qui parle d'un homme riche, profondément amoureux d'une dame aux manches vertes. Celle-ci, malgré tous les cadeaux que lui offrait son prétendant, ne l'aurait jamais aimé...

Elle avança doucement, le regard rivé sur le piano, impressionnée par l'instrument.

- Délia me disait toujours, après avoir chanté cette chanson, que l'amour ne pouvait pas s'acheter... Que nul trésor ou bijou n'ouvre de cœur.

Je n'osai rien répondre. La fillette paraissait plongée dans ses souvenirs, les yeux perdus dans le vague. Puis, elle ferma les yeux.

- Wyer... Tu veux bien jouer encore une fois ?

Cela était une étrange coïncidence : cette musique représentait pour nous deux le souvenir de quelqu'un de cher. Pour Ezilly, c'était sa tante qui l'avait élevée... Et pour moi, ma mère.

Je reposai mes mains sur les touches du piano, et me mis à jouer. C'était comme si à nouveau, le monde s'était figé...

La voix d'Ezilly, claire comme du cristal, s'éleva alors pour se mêler à la mélodie du piano. Sans cesser de jouer, je tournai un regard surpris vers elle. Ses paupières étaient toujours baissées, mais elle chantait, et j'avais l'impression que sans même qu'elle fasse un pas, son corps entier était emporté par la musique. Comme ma mère...

Ce moment magique s'acheva avant même que j'eus le temps de me rendre compte qu'il avait commencé. Quand je plaquai le dernier accord, Ezilly ouvrit les yeux, et je croisai son regard. Elle me fit un grand sourire, heureuse.

Mon cœur battit si fort à cet instant que je crus qu'il allait s'arrêter. Il fallait vraiment qu'elle cesse de me regarder ainsi, ou je n'allais pas survivre...

- Je n'avais jamais entendu la mélodie au piano, déclara-t-elle. Tu joues vraiment bien...

Si elle savait comment j'avais appris...

J'eus soudain une idée lumineuse. Je me levai d'un mouvement vif du siège, et le montrai à Ezilly.

- Assieds-toi.

Elle me dévisagea d'un regard étonné.

- Tu veux vraiment que je...

Sans attendre qu'elle se décide, je lui pris la main, et la tirai délicatement devant le siège, avant de l'asseoir d'une petite pression sur ses épaules. Je me mis debout derrière elle, et saisis chacune de ses mains dans les miennes.

- Laisse-toi faire, lui soufflai-je. Ce n'est pas bien compliqué...

Je plaçai ses doigts sur les touches, tandis que je la sentais se raidir entre mes bras. Elle était gênée. C'était la première fois que nous étions aussi proches.

Sans prêter attention à ses joues rouges, j'appuyai doucement sur ses doigts, et nous commençâmes à jouer, lentement. Je déplaçais ses mains, lui montrais les bonnes touches, et petit à petit, elle réussit à jouer seule la mélodie. Lorsqu'elle eut fini, elle bondit hors du siège et se tourna vers moi, les yeux brillants de joie.

- Wyer, j'ai réussi ! s'exclama-t-elle, ravie. Je n'aurais jamais pensé pouvoir un jour jouer du piano... Tout ça, c'est grâce à toi !

Elle paraissait vraiment émue. Cela me rendait heureux d'avoir fait naître ce grand sourire si lumineux... Elle était si rayonnante, que je me sentais presque ébloui en la regardant. Une beauté à l'état pur...

Je tendis ma main et la posai avec tendresse sur le côté de son visage, avant de la laisser glisser doucement jusqu'à son cou.

Elle me dévisageait de ses deux grands yeux bleus étonnés, figée.

Je compris alors ce que je venais de faire.

Je retirai aussitôt ma main, presque brutalement, et reculai d'un pas. Ezilly paraissait aussi abasourdie que moi par mon geste. J'avais envie de me donner mille claques, tant je me sentais idiot... Je n'avais pas réfléchi une seule seconde. Je m'étais juste laissé aller...

Je lui avais caressé le visage.

Fuyant son regard, je baissai la tête et laissai mes mèches brunes masquer mes yeux. Je me passai la main dans la nuque, tout en lâchant d'une voix sourde :

- Excuse-moi, je... Je ne sais pas ce qui m'a pris.

Je ne comprenais plus rien. Pourquoi est-ce que tout était si différent avec Ezilly ? Quel était ce doux sentiment apaisant, qui me donnait, pour la première fois de ma vie, l'impression d'avoir enfin trouvé ma place ? Comme si, lorsque j'étais avec elle, tout devenait plus simple... Nul besoin de masque, de méchancetés ou de mensonges, mais seulement de moi-même. Et cela me rendait si... heureux...

Sans savoir vraiment pourquoi, je fis un pas vers elle. Puis, tout se passa très vite.

Elle recula et se cogna contre le piano, ce qui la fit trébucher et s'écrouler au sol. Paniqué, je me précipitai vers elle. Elle était tombée sur le côté, et son visage était masqué par sa chevelure sombre. Avant même que j'aie pu l'aider, elle tenta de se redresser, mais laissa échapper un gémissement. Soudain, mon cœur s'arrêta.

Sur son dos, dépassant légèrement de sa robe, se trouvait une étrange boursouflure sanguinolente. Complètement effaré, je posai ma paume dessus pour essayer d'arrêter l'hémorragie.

Elle sursauta violemment tout en poussant un cri de douleur. Je retirai aussitôt ma main et m'écartai, affolé. Lorsqu'elle se retourna vers moi, et que je croisai son regard bleu animé d'une pure terreur, je compris que je n'aurais jamais dû faire ça.

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