Deux jours.

Le temps qui s'était écoulé depuis que je m'étais réveillé aux portes de cette ville qu'est Watford. Une ville plus qu'étrange. Annazie avait à son sens tenu parole en m'expliquant certaine chose, mais j'étais partagé entre le fait que soit elle ne me disait pas tout, soit elle me mentait sur toute la ligne. En fait, ça pourrait fortement être les deux combinés.

Elle m'avait avoué qu'elle n'était pas vraiment le maire de la ville, mais c'était tout comme. Elle avait un fort pouvoir sur cette petite ville qui ne comptait même pas 400 habitants. Edwina était loin d'être une psychologue et plus proche d'être un cas social. Je pouvais l'affirmer, cela faisait deux jours que je vivais avec elle. Lors de mon réveil après ma première nuit, son visage était à moins de cinq centimètres du mien, autant dire que j'avais bien flippé.

Enfin bref, Annazie m'avait avoué que je n'étais pas une drogué mais que personne ne m'avait vu arrivé ici. Pourquoi avait-elle menti? Car elle ne voulait pas que j'angoisse. On peut dire que c'est raté.

Annazie est elle-même allé voir si ma voiture était garé en dehors de la ville, cependant il n'eut aucune trace de cette dernière. J'ai voulu de suite contacté quelqu'un que je connaissais mais je n'avais pas mon téléphone. Ne connaissant aucun numéros et ne me souvenant d'aucun proche, j'ai vite abandonné cette idée.

J'ai passé la journée d'hier assise dans le canapé sous le regard insistant d'Edwina. Je réfléchissais uniquement à la manière dont j'avais pu me retrouver ici. Kidnapping, fugue, sortie arrosé, randonnée, cache-cache... Rien ne collait.

J'avais pris la décision de partir mais Annazie me l'avait interdit prétextant qu'un car passait toutes les semaines pour aller à la ville voisine beaucoup plus grande qui disposait de moyen de transport qui me seront utile pour retourner à Los Angeles. Je lui ai demandé de me prendre en covoiturage, mais elle a refusé. La phrase de l'autre abruti me trottait dans la tête. Tu ne devrais pas aller par là si tu tiens à la vie, stupide chose.

Annazie tentait-elle de me retenir ou disait-elle la vérité ?

Quant à mon tatouage, pour ne rien changer, je ne me souvenais de rien. Edwina m'avait conduit au seul docteur de la ville, Thad Glagrim. Ce dernier a décrété que j'avais une amnésie globale transitoire. Avec des mots simples, j'avais une perte de mémoire temporaire. D'ici quelques jours, je pourrais la retrouver. Ce qui me préoccupait, était que cette anomalie ne devait normalement pas toucher des individus de ma tranche d'âge.

En ce moment même, j'étais dans la seule et petite bibliothèque de la ville. Il n'y avait que deux ou trois personnes autour de moi. J'exploitais depuis une dizaine de minutes un livre de géographie pour regarder où Watford pouvait bien se trouver. Je le remis sur l'étagère, et me dirigeait vers un des postes d'ordinateur. Je mis un moment avant de pouvoir l'allumer.

-Fait chier, pestais-je en attirant l'attention du peu de monde.

Je n'avais ni identifiant, ni mot de passe. En entrant ici, je n'avais pas vu de bibliothécaire.

-Quelqu'un pourrait me connecter à sa session ?

Sur les trois personnes, deux m'ignorèrent complètement, une me disant qu'elle n'avait aucun identifiant.

-Dans ce cas, est-ce que vous pourriez juste me dire dans quel état nous nous trouvons ?

La seule qui avaiteu le respect de me répondre vînt s'asseoir sur le tabouret à ma gauche, tandis que les autres quittèrent les lieux.

-Dans l'Iowa.

Mes yeux s'écarquillèrent de stupéfaction. J'étais tellement loin de la Californie ! Comment est-ce possible ? On ne peut pas traverser autant d'états sans se souvenir ! Apparemment oui...

-Es-tu sûr, demandais-je à la jeune adolescente.

Elle n'avait pas plus de 15 ans à vue d'oeil. Ses longs cheveux blond foncés semblaient très doux. Son regard innocent était d'un marron assez foncés. Elle était très mignonne avec son nez en trompette, plus tard elle ferait un malheur auprès de la gente masculine.

-Oui, dit-elle d'une toute petite voix.

Je me pris la tête dans les mains et me mis à me tirer les cheveux. L'incompréhension était vraiment horrible.

-Au fait, je m'appelle Eibhlin mais l'on m'appelle le plus souvent Lin. Toi, tu dois être Astrée.

-Comment le sais-tu Lin ?

-C'est une petite ville, on est vite au courant quand il y a un nouvel habitant.

-Nouvel habitant,répétais-je. Eh bien on t'a mentis, je pars la semaine prochaine.

Et moi aussi je venais de mentir, je comptais partir dès ce soir. Je ne savais pas à combien de miles se trouvait la ville voisine, mais je ne resterai à coup sûr pas ici.

-Ah... Déjà...

Je ne serais interpréter son ton. On aurait dit qu'elle était mal à l'aise et qu'elle ne me croyait pas, alors qu'il n'y avait rien à croire.

-Dis moi, rebondis-je. Tu ne devrais pas être à l'école à cette heure-ci ?

Elle rougit légèrement et je souris.

-Disons que je pense m'instruire mieux seule, dit-elle en faisant un vague signe de main pour désigner la bibliothèque.

-Je te comprends,cris-je. Sauf que moi à ta place, je serais sûrement entrain de dormir quelque part dans l'école.

-Cela m'arrive, admit-elle. Le toit est un bon lit.

En fin d''après-midi, je me trouvais dans un des rares pub de la ville, le plus animé paraît-il. Assise au bar depuis un bon moment, je faisais connaissance entre deux commandes avec Caolan, le barman.

-Je suis né dans la bière, ma jolie, ce n'est pas toi qui va m'apprendre à remplir une pinte.

-Je dis juste qu'elle avait l'air d'être rempli seulement à moitié, le charriais-je.

Comme si le temps était au ralenti, Caolan replaça le torchon sur son épaule et prit un verre. Il aborda un air à la fois sérieux et comique.

-Je rince le verre, je penche le verre à quarante-cinq degrés, j'incline le levier, au trois quart je fais mousser... chantonne-t-il.

Je ne peux m'empêcher de rire durant son tutoriel, il se déhanche en même temps sur une musique sensuel.

-Voilà, dit-il en donnant la bière à un client.

-Pas très rempli, le taquinais-je.

-Alors tu devrais aller voir Celthar, notre lunetier.

-Il n'y en a qu'un ?Maintenant que j'y pense Watford ne serait pas un village ?

-Nous avons les ressources d'une ville donc c'en est une. Euh... il faudrait que j'ailles chercher des bouteilles à l'arrière, à plus...

Avant que je n'eus le temps de dire quoi que ce soit, il filait. Pourquoi à chaque fois que j'abordais pour sujet Watford avec un habitant, ce dernier prenait la fuite ? Lin, Annazie, Edwina, Caolan, et toutes les personnes que j'avais abordés en me promenant plus tôt. Cette ville et ses habitants cachaient définitivement quelque chose. Quelque chose que je ne serais jamais car j'allais partir.

Après un faible soupir et un regard en direction d'une fenêtre pour constater un ciel sombre, je quittais le pub. Je le contournais pour rejoindre l'endroit où j'avais préalablement planqué un sac de voyage contenant quelques vêtements et des vivres. Je devrais pouvoir tenir plus d'une bonne semaine si je ne me goinfres pas.

Je longeais les murs, jusqu'à me retrouver derrière le bâtiment de briques. Repérant le rocher à l'arrière duquel était dissimulé mon sac, j'allais en sa direction mais m'arrêtais en plein milieu en entendant des bruits étranges...

Comme des gémissements.

Au lieu de récupérer ce pour quoi j'étais venu, je tournais la tête et mon regard s'accrocha aux silhouettes du couple qui s'embrassaient contre le mur.

-Arzell...

Merde ! Le temps que l'information me montait au cerveau, la femme croisa mon regard et arrêta de se dandiner comme un ver de terre. Un ange passa, l'homme continua de butiner le cou de la femme jusqu'à ce qu'elle le repousse lentement. Il leva alors la tête et me lança un regard plus sombre que le Vantablack. Pourquoi ne prenais-je pas mes jambes à mon cou ?

-La chatte aux griffes de Freddy Krueger est-elle devenue une fouine aux oreilles de Dumbo, lança Arzell en s'appuyant d'un bras contre le mur.

C'était le signal de départ. Je ne voulais guère gâcher mon énergie à lui répondre alors je fais la chose que j'aurais dû faire en les apercevant: me diriger vers le rocher.

-Clio, casse-toi. Je viendrai peut-être te sauter plus tard.

Quel connard ! Le plus choquant, est cette Clio qui émets un son appréciateur. C'est dégueulasse, comment peut-on se laisser parler ainsi ?

Chargeant mon sac sur mon épaule, je manquais de tomber sous son poids et d'un pas rapide m'éloignais d'eux. Quelques minutes plus tard, j'apercevais l'entrée de Watford, je pressais alors le pas.

-Je ne ferais pas ça, si j'étais toi.

Je me figeais net, il m'avait suivi.

-Et pourquoi donc, soufflais-je en me tournant.

Le connard de service mit une cigarette entre ses lèvres, l'alluma à l'aide d'un briquet et prit une première taffe. Il s'avança ensuite pour arriver à ma hauteur.

-Ne le fais pas c'est tout, dit-il plus durement.

Je reculais de quelques pas.

-Qui es-tu pour me donner des ordres. Pourquoi ne devrais-je pas partir ? Je n'ai rien à faire ici. Vous êtes tous plus déjantés les uns que les autres ! Et vous cachez sans doute quelque chose ! Alors pourquoi ?

-Pour ça.

Je suivis le mouvement de son bras. Il venait de lancer son briquet en direction de la sortie dont nous étions proches. Au lieu de retomber sur le sol, l'objet percuta comme un mur invisible et se dissout à cause de courants électriques. Je passais une main sur mon visage comme si je venais de me réveiller d'un mauvais rêve.

-Qu'est-ce que...

Des éclairs bleus parcourait tout le mur translucide qui s'étendaient même au-dessus de nos têtes. Je fis un tour sur moi-même, la ville était maintenant éclairée par les courants électriques.

-Un dôme, un mur, une barrière, il prit une nouvelle bouffée. Appelle ça comme tu veux mais si tu tentes de franchir la limite, tu meurs électrifié. À toi de choisir.

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