Normal.
Bonjour ou bonsoiiiir,
Juste pour m'excuser de mon manque de poste la semaine dernière, comme je l'avais signalé j'ai été malade comme pas possible, je pensais au moins pouvoir poster dimanche mais malheureusement je n'ai pas pu finir le chapitre à temps T_T Je tâcherai de me rattraper cette semaine, mais en tout cas, voilà je suis désolée de vous avoir fait attendre ! TOT En vous souhaitant une bonne lecture et comme toujours : merci de toujours me suivre ! ^///^
- Il fait trop chaud, gémit Devon en éventant son T-shirt dans des mouvements amples.
- En venant ici, tu aurais pu le prévoir, rétorqua Andréa platement.
- Quelque chose te tracasse ?
La voix de Cyriel me fit réagir alors que je restais impassible aux chamailleries de Devon et d'Andréa qui discutaient bruyamment. Je posai mes yeux vers le visage calme de l'elfe dont le regard se dirigeait sur le paysage incroyable qui nous faisait face, un certain plaisir presque décelable dans ses iris. Je me détournai, fixant à mon tour cet endroit si incroyable. J'avais de long frisson et mon cœur se gonflait sans que je ne parvienne à comprendre pourquoi. Peut-être parce que c'était une terre préservée. Une terre où seule les marqués venaient. Un refuge. Un espace de liberté. De pureté. De sérénité.
Si on m'avait dit, il y a quelques années, que j'aurai la chance de me trouver dans une cité inca, j'aurai hallucinée. Non, pour être franche j'aurai sans doute trouvée ça barbant comme idée. Qu'elle était pouvait-on avoir à visiter de vieille ruine ? Mais aujourd'hui je me rendais compte à quel point cette pensée était stupide, à quel point j'aurai eu tord. Le Machu Picchu n'avait rien à envier de l'image qu'on en faisait. C'était plus encore que tout ce que j'avais pu entendre à son sujet. Cette cité, où la vie semblait avoir disparut, resplendissait pourtant d'une histoire si riche, si forte que j'avais l'impression de la ressentir. Plus encore. Ce n'était pas une impression. Les incas avaient eut de nombreux marqués dans leurs seins et ils avaient laissés une trace indélébile dans ce sol, dans la pierre de leurs maisons, dans les collines. Partout. Chacun des pas, qui nous avaient conduis jusqu'ici, avaient intensifier cette sensation. Leurs âmes. Leurs émotions. Leurs vies. Leurs espoirs. Tout était encore enfermé dans ce lieu et j'étais incapable de contrôler le sentiment qui ne cessait d'envahir ma poitrine.
- Tu perçois quelque chose ? Me questionna Kenan en venant glisser sa main dans le bas de mon dos, avec familiarité.
- C'est difficile à dire, avouai-je sans détourner les yeux vers lui. Cet endroit est gorgé d'énergie et il m'est impossible de déterminer si l'énergie est récente ou ancienne.
- Je ne perçois aucun esprit, ajouta Mikaël dont la peau pâle semblait ne pas apprécier le soleil qui tapait au-dessus de nous, tirant sur le rouge.
- ça va ? Questionnai-je.
- ça va, gronda-t-il aussitôt agacé. J'ai juste plus l'habitude de me tenir dans les zones sombres où on ne me remarque pas, que sous un foutu soleil écrasant.
J'acquiesçai, n'insistant pas quand il était évident que Mikaël n'appréciait pas que je m'inquiète pour lui. Il aimait se débrouiller seul. Soit disant. Il me lança un regard froid mais je m'étais déjà détournée. Je n'arrivai pas à cesser de contempler cet endroit avec une fascination étrange et inexplicable. C'était tellement incroyable. Tellement frappant. Je fouillais ce lieu de fond en comble, tâchant de me consacrer à la principale tâche qui nous avait amener ici : trouver des marqués.
Pourquoi venir ici ? Sincèrement, je n'en avais aucune idée. C'était juste une intuition. Quand Mikaël m'avait parlé d'un territoire où les marqués régnaient en seul maître, j'avais voulu m'y rendre. Peu m'importait où cela se trouvait. Je ressentais le besoin de venir ici et je commençai à comprendre pourquoi. On se trouvait probablement devant le dernier lieu préserver de l'homme. Préservé par les marqués. Et j'avais le sentiment, qu'un jour, cette ville renaîtrait. Un léger sourire se glissa sur mes lèvres et Kenan tiqua aussitôt.
- A quoi tu penses ?
- Rien de particulier, affirmai-je énigmatique dans un large sourire. On y va ?
- Fatiguéééé, gémit Devon en se laissant lourdement tomber sur une roche. Cela fait des heures qu'on monte cette foutue colline, on peut pas faire une pause ?
- Tu vieilli mal, rétorquai-je avant de faire tomber mon sac au sol dans un signe d'approbation. Mais nous ne sommes pas presser après tout.
Devon grogna de satisfaction avant de se retirer son T-shirt collant de sueur et se laissa tomber en arrière. Je le fixai, sans gêne, habitué à le voir se déshabiller à la moindre occasion. Déjà lorsque nous nous entraînions ensemble, son T-shirt habillait plus souvent le sol que son torse. Moins démonstratif, Cyriel s'installa sur le sol herbeux, repliant l'une de ses jambes et basculant la tête vers l'immense ciel bleu qui nous couvrait de toute sa splendeur. Son sourire fut si naturelle que je fus un peu plus convaincu de ma pensée. Je devais faire de cet espace, un lieu où chaque marqué trouverait son refuge.
Attirant mon attention, Andréa s'écarta, s'avançant un peu en direction des premières ruines. Je fixai son dos, calmement. Il ne m'adressait toujours pas la parole. Pendant huit longues heures nous avions tous été enfermé dans le petit habitacle d'un avion et c'était à peine s'il avait voulu croiser mon regard. Je soupirai, sortant machinalement une gourde de mon sac.
- Tu devrais aller lui parler.
J'avalais de travers. De justesse, je me retenais de cracher tout ce que j'avais dans la bouche, préférant ne pas me ridiculiser une nouvelle fois. Des yeux ahuris se posèrent sur un Kenan dont l'indifférence morne tranchait avec ses yeux noirs. Ce démon égocentrique, râleur et légèrement macho sur les bords, me disait d'aller parler à un autre homme ? Non. D'aller parler à quelqu'un qui avait des sentiments pour moi. Et qui avait déjà dérapé.
- Quoi que je dise et quoi que je fasse, il restera ton lié, expliqua-t-il sobrement. Pas la peine d'en faire une montagne.
- Venant de toi, si c'est une montagne, désapprouvai-je avant de me rembrunir. Il n'acceptera pas de me parler, cela ne serre à rien.
- Tu es sa marquée, tu peux bien l'obliger à te parler, rétorqua Kenan avec indifférence.
- Je n'ai pas envie de le faire, soupirai-je. Ce n'est pas comme ça que j'aimerai résoudre le problème. Je tiens à lui... et je ne ferai que le perdre un peu plus en choisissant de me comporter comme telle.
- Alors va simplement lui parler. Tu as prouvée que tu étais apte à faire changer les choses, non ? Habituellement, ce n'est pas parce qu'on te dit non que tu renonce.
Je ne répondais pas. Il avait raison, j'en étais consciente. Mais ce que je ne savais pas, c'était si cette solution était la bonne. Andréa était probablement bien plus têtu que je ne l'étais et je n'avais aucune envie de le braquer plus encore. Ni envie d'intensifier sa souffrance. Ni même de la raviver d'une quelconque façon. Je soupirai. Je jugeai qu'il avait besoin de temps et j'aurai été très mal placée pour l'en priver. Je secouai donc négativement la tête, me laissant tomber sur une roche pâle en triturant mon médaillon, machinalement.
- Il viendra me parler quand il en aura l'envie, affirmai-je. Cela viendra. Mais en attendant, je respecte sa décision.
- Votre distante est dangereuse, riposta-t-il sans se démonter. Si on se fait attaquer et qu'il ne te défend pas cel...
- Il me défendra, coupai-je un peu plus durement. Ce n'est pas parce qu'il souffre, qu'il faut remettre en question le moindre de ses agissements. Je sais que tu ne l'apprécie pas, mais moi si. Alors je ferai attention à ses sentiments.
- Comme tu le souhaite, affirma Kenan en se détournant. Je vais faire un tour.
J'allais l'arrêter mais il déployait déjà ses ailes pour s'envoler et empêcher toute communication. Je soupirai encore une fois. L'accalmie que j'avais cru réelle entre nous, venait de voler en éclat. Mais en réalité, je doutai que notre relation soit calme un jour. Il fallait se faire une raison, je l'aimai ainsi. Je me laissai à nouveau retomber et croisai les yeux empli d'espièglerie de Devon. Je fronçai les sourcils, méfiante. Et je faisais bien, il enchaînait joyeusement devant mon scepticisme :
- Je crois qu'il faut repasser à la casserole, princesse. Kenan est très tendu encore.
Mes joues s'empourprèrent légèrement et je lui balançai ma gourde dans la figure. Il la réceptionna aisément, riant aux éclats. Je ne tardai pas à sourire. Devon semblait aller mieux. Il y avait toujours des moments où ses yeux se perdaient dans le vide et où son visage perdait toute once de bonheur, mais je savais qu'il ne faisait pas semblant lorsqu'il riait de cette façon si naturelle. Il semblait apte à se tenir debout, apte à avancer à nouveau. Je le surveillai toujours étroitement, incapable de ne pas m'inquiéter pour lui, mais je commençai à comprendre qu'il n'avait plus besoin que je le couve autant. Il trouvait d'autres appuies. D'autres soutiens. Avant notre départ de Dacer, la veille, je n'avais pu que voir Devon se rapprocher de la meute, mêlant sa tristesse à celle de ceux qui connaissait le mieux Nathan.
Moi ? Je ne savais pas trop où j'en étais. Souffrance. Peine. Crainte. Ses trois sentiments m'avaient serrés la poitrine à chaque seconde passé à Dacer sans rien entreprendre et me la serrait encore aujourd'hui. J'avais peur que Geoffrey survienne à tout moment. J'avais peur de perdre quelqu'un d'autre. Le temps allait jouer contre nous et je n'avais pas une seule seconde à perdre si je voulais protéger les miens. Protéger ma famille. Ma grande famille. Alors j'avais un peu précipitée le voyage, forçant Andrew à s'organiser plus rapidement que prévu. J'étais même allée plus loin. J'avais fait le choix de ne mettre personne au courant de notre départ, hormis ceux concernés. Ma mère n'était pas au courant. Et je me sentais coupable d'être ainsi partie mais c'était une simple question de prudence. Moins de personne serait au courant, moins il y aurait de risque que Geoffrey découvre que nous étions parti. Mais je me doutai qu'a notre retour, je passerai un sacré mauvais quart d'heure. Si j'en sortais vivante, et connaissant ma mère j'en doutai un peu.
- Qu'espère-tu faire une fois que nous aurons trouvé les marqués ? Questionna Cyriel en redressant son visage vers moi.
- Discuter avec eux, répondis-je vaguement.
- Et tu penses que cela sera suffisant ? Interrogea-t-il sans que sa voix ne trahisse ni agacement, ni mépris. Ces marqués vivent en retrait de tous les mondes possibles. Ils vivent dans leurs mondes. Pourquoi le quitterait-il ? Parce que tu leurs demandes ?
- Je ne suis pas naïve, soufflai-je en fouillant dans mon sac. Je sais que la tâche que je me suis donnée sera véritablement compliquée, néanmoins je veux essayer.
- J'ai du mal à comprendre, avoua Mikaël. Pourquoi choisir spécialement les marqués qu'on a le moins de chance de convaincre ? Je connais plus d'une personne ne portant pas Geoffrey dans leurs cœur, ce sont nos meilleurs espoirs.
- Et nous irons les voir, approuvai-je. Mais je ne veux pas choisir mes alliés aux hasards, juste parce que j'en ai besoin.
- C'est idiot, désapprouva-t-il platement. Tu as besoin de guerrier, pas d'une bande de copain.
- J'ai besoin de gens en qui je pourrais avoir confiance.
Cette fois, Mikaël ne trouva rien à redire. Il savait que ma pensée était fondée, ce n'était pas un caprice. Je ne pouvais pas me fier à des personnes en qui je n'aurai aucune confiance et qui me trahirait à la première occasion. Cela expliquait ma réticence à contacter ceux que Mikaël qualifiait comme « ennemi de Geoffrey ». Être l'ennemi de ce type ne signifiait pas forcément être un marqué de confiance, bien au contraire. J'avais l'étrange sentiment qu'ils n'étaient pas mieux que celui qu'il détestait.
- Il y a du mouvement.
Kenan atterrit brusquement à côté de moi, sa main attrapant mon poignet pour me faire me relever. Je ne me vexai pas à ce geste vif, acceptant même qu'il me dissimule derrière son dos. C'était ce qui avait été convenue. Révéler qui j'étais, nous aurait mis en danger immédiatement. Il était possible que Geoffrey est encore des alliés éparpiller dans ce monde et je préférai éviter le conflit sur un territoire où les marqués sont unique maître. Autant ce faire discrète jusqu'à ce que nous soyons certains d'être en territoire neutre. Même si je devais admettre ne pas du tout apprécier ce sentiment. Je n'avais plus envie qu'on me considère comme une petite chose inoffensive que l'on doit protéger.
Mais un esprit familier rencontra le mien en faisant aussitôt affaisser mes épaules tendues. J'eus un gémissement plaintif très discret, du moins assez pour que Kenan ne me fusille pas du regard. Cependant, Mikaël fronça les sourcils, son esprit venant fouiller le mien avec curiosité et je remarquai aisément ses yeux se lever en direction du ciel. Oui. J'étais totalement d'accord. Sobrement, je m'avançai, me dégageant du dos d'un Kenan qui me regarda avec froideur, très peu satisfait que je n'agisse pas comme nous l'avions convenue. Je haussai les épaules. Ce n'était pas un ennemi, je n'avais donc aucunement besoin de faire ce genre de chose et il ne tarda pas à comprendre mon changement de comportement. Un soupir franchit même ses lèvres alors que notre visiteur apparaissait dans notre champ de vision, se mouvant sur le sentier que nous venions d'arpenter. Au loin on ne distinguait encore qu'un unique détail plus que suffisant : de grandes ailes blanches.
- Tu lui a demandé de venir ? Questionna Kenan, une once de rancœur s'immisçant dans sa voix rauque. Je pensais que tu ne voulais pas qu'il nous accompagne, je me trompe ?
- Non, répondis-je platement en tirant mes cheveux en arrière, fatiguée d'avance. Il est venu de sa propre initiative.
- Je peux le comprendre, tenta Devon en cherchant à apaiser son marqué qui fulminait déjà. Tu aurais fait pareil à sa place. Si tu t'étais retrouvé exclu, tu serais venu quand même par tes propres moyens.
Kenan le fusilla du regard et Devon leva les mains en l'air, comme pour dire qu'il était innocent. Kenan resta cependant silencieux, ne prononçant ni injure ni ses habituels rengaine désagréable alors que nous attendions patiemment l'arriver de Maël. Sa démarche lente laissant deviner qu'il ne s'attendait pas à un accueil dès plus chaleureux. Je fixai Kenan, nerveuse. Ma main passa dans ma nuque et je triturai mon médaillon, les yeux un peu dans le vague. Voilà pourquoi je n'avais pas voulu qu'ils soient ensemble. Voilà pourquoi j'avais demandé à Maël de rester à Dacer. Ils n'étaient pas capable de se tenir l'un en face de l'autre sans que cela ne dérape. Je soupirai lourdement en fermant les yeux. J'avais été stupide. Comme si l'un ou l'autre allaient obéir à un truc pareil, c'était absurde d'y avoir cru ne serais-ce qu'une seconde.
- Salut.
Je rouvris les yeux et contemplai Maël, pas réellement énervée après lui. Simplement anxieuse. Il posa d'abord ses yeux dans les miens, doux et rassurant, mais je ne parvenais pas à m'apaiser simplement parce qu'il semblait serein. Et il ne fallait pas compter sur son frère pour aider. Il avait cessé de s'agiter mais son agacement résonnait dans mon esprit comme si c'était mon sentiment. Ma seule et unique question était aisée : quand est-ce que tout allait exploser entre eux ? Je me laissai retomber sur une roche, lasse. Kenan, sans me surprendre, ne tarda pas à prendre la parole, confirmant mes craintes :
- C'est tout ce que tu as à nous dire ? Salut ? Qu'est-ce que tu fiche ici ?
- La même chose que toi, affirma Maël dans un haussement d'épaule désinvolte. Je suis venue protéger Keyli.
- Elle n'a pas besoin de ta protection, rétorqua Kenan, froidement. Nous nous occupons déjà très bien de veiller sur elle.
- Une personne de plus ne peut-être que bénéfique, souligna l'ange en affrontant son frère sans sourciller. Qu'est-ce qui t'effraie ? Tu as réalisé ce que tu m'as dit, non ? Tu as couchée avec elle, alors de quoi as-tu encore peur ?
Je me crispai. Bien évidemment il l'avait dit haut et fort, comme ça si jamais j'avais le moindre espoir que la terre entière ne soit pas impliqué dans ma vie sexuelle, je pouvais l'oublier. Après tout qu'elle intérêt à éviter que Cyriel ou Mikaël est l'immense plaisir d'avoir ce genre de détail ? Aucun voyons. Je soupirai lourdement et ils se tournèrent, d'un même mouvement, dans ma direction. Je les fixais, sans émotion. Il me tapait sur les nerfs. Et je n'avais aucune intention de rentrer dans leur petite guerre fraternel. Qu'ils se débrouillent. J'avais d'autre chat à fouetter que ces deux matous en quête de marquage de territoire. Je me redressai en attrapant mon sac au sol.
- Je continue, annonçai-je platement. Avec ou sans vous. Mais si vous voulez vraiment me protéger, vous allez devoir arrêter vos disputes. J'ai pas besoin de ça actuellement.
Aucun ne chercha à me retenir alors que je descendais aisément le petit terre-plein qui nous avait offert cette vue incroyable. Je ne tardai pas à entrer dans les ruines, mes doigts parcourant la roche brûlante qu'était les murs d'ancienne bâtisse. Mon regard se perdit dans le vide, le cœur serré. Pourquoi ? La peur qu'ils se disputent encore ? Que Maël explose a nouveau ? Oui, sans aucun doute. En réalité, mes yeux ne cessaient de chercher à les apercevoir bien que je me forçai aussi à garder ma tête dans la direction opposée. Mais il y avait aussi autre chose. Maël semblait tellement indifférent. Il avait balancé ça a son frère comme si ce n'avait été qu'un fait, qu'une simple chose qui n'avait pas d'importance. Était-ce la réalité ? Et si c'était le cas, qu'est-ce que pouvait faire ? Cela aurait été le mieux pour lui. Alors pourquoi est-ce que ma poitrine se serrait aussi durement ? Je secouai la tête. Tu es stupide Keylinda, c'est tout simplement parce que tu tiens à lui. Parce que tu as encore des sentiments pour lui. Et que tu les auras probablement toujours. Cependant, c'était avec Kenan que j'avais décidée d'avancer. Maël avait raison. Son frère n'avait plus rien à craindre, je ne retournerai pas en arrière.
Me rassurant, une ombre se glissa au-dessus de moi et je redressai le visage pour contempler Kenan dont les grandes ailes étaient toujours aussi impressionnante. Il m'adressa un bref regard, entre colère et excuse. Enfin. Je crois. Il était difficile de déterminé la part de l'un et de l'autre. Mais j'étais réellement soulagé qu'il ait choisi de me suivre plutôt que de s'étriper sur place avec Maël. En parlant du loup. Sa main se plaça sur mon épaule et je dû détourner mon attention du démon qui s'envolait plus en hauteur, cherchant à prévoir une quelconque menace.
- Désolé, me souffla Maël aussitôt, me laissant à peine l'occasion d'ouvrir la bouche. Autant pour ma présence ici que pour ce que j'ai balancé. C'était pas très malin de ma part.
- C'est sûr, approuvai-je en me détournant, écartant sa main de ma peau. Mais pas la peine de faire semblant. Je sais très bien que tu n'es pas désolé d'être venu.
- Désolé, répéta-t-il dans une grimace devant ma froideur. Je pense juste que ma place est ici. Si je t'en avais parlé, tu aurais tout fait pour me dissuader.
- Parce que je savais très bien que vous alliez finir par vous entre-tuez et que je n'ai vraiment pas besoin de ce genre de stress, soupirai-je lourdement.
- On sera des anges, affirma-t-il. Tu n'auras pas à t'en faire, on se tiendra à carreau.
- J'ai déjà entendu ça de la bouche de Kenan et j'attends toujours, rétorquai-je platement.
- Je ne suis pas Kenan.
Je me stoppai un instant et il passa à côté de moi sans se stopper, m'offrant son dos. Ses paroles avaient été prononcé de manière extrêmement froide. Mon cœur se serra plus durement en le contemplant. Que ressentait réellement Maël ? Je n'étais plus certaine d'être capable de le comprendre, il soufflait le chaud et le froid tour à tour, me perdant dans les méandres de ses sentiments. Je reprenais ma route, le laissant marcher en avant sans chercher à reprendre la conversation.
Est-ce que les choses allait finir par se calmer ? J'en doutai sincèrement. Entre Maël et Andréa, je ne savais plus où donner de la tête et je craignais, à chaque instant, de perdre l'un ou l'autre. J'aurai tellement voulu que cela soit plus simple. N'avoir à blesser personnes. Je détournai le regard, cessant de le fixer. Ce n'était pas le moment de me torturer l'esprit à la recherche d'une solution que je ne trouverai pas.
- On peut le forcer à rentrer si sa présence t'indispose à ce point, souffla Mikaël en venant se positionner à côté de moi.
- Ce n'est pas ça, avouai-je à mi mot. Il ne me gêne pas... au contraire. C'est juste que je ne pense pas être capable de les gérer tous les trois à la fois.
- C'est pour ça que je prône le libertinage.
Je ne pu m'empêcher de pouffer alors que Mikaël débordait d'un sérieux total. Je secouai vaguement la tête, levant les yeux au ciel. Je doutai sincèrement que ce soit la solution à tout nos problèmes, mais ça avait le mérite de me rendre le sourire. Il me regarda en coin, une lueur de satisfaction presque visible dans ses yeux. Ce type était vraiment bizarre. Mais je l'appréciai. Énormément. Je n'avais aucun mal à comprendre pourquoi Eleonora avait eu confiance en lui. C'était quelqu'un de bien, même s'il ne voulait pas le reconnaître.
- Plus sérieusement, si tu as besoin d'en parler, j'écouterai.
- C'est gentil, murmurai-je plus platement. Mais je ne vois pas trop ce que j'aurai à en dire.
- Commençons par le début : est-ce que tu aimes Kenan ?
Surprise, je le regardai incrédule. N'était-ce pas évident ? Mikaël me toisa avec calme, comme si sa question avait tout son fondement. Je fronçai les sourcils. Pourquoi me poser ce genre de question ? Il était évident que j'aimais Kenan, c'était une évidence pour la terre entière et si quelqu'un ne l'avait pas encore compris, Kenan se chargerait de lui crier à la figure. Je me détournai, plus pensive. Mikaël ne choisissait rien aux hasards. Alors pourquoi cette question ? Que devais-je comprendre ? Je marchais plus lentement, mes yeux posés sur mes pieds. Était-ce une manière de me demander si j'avais des doutes ? Comment ne pas en avoir ? C'était la première fois. La première fois que j'aimais quelqu'un de cette façon. Mais la situation était tellement compliqué. Je ne savais même pas si nous étions réellement un couple, nous n'en avions même pas parlé. Je passai ma main dans ma nuque dans un soupir. En réalité, je crois que rien n'avait été fait de manière très orthodoxe mais cela rentrait bien dans le cadre de l'univers entier que j'avais découvert il y a deux ans.
Mais je n'avais pas besoin de réfléchir à cette question, j'en connaissais la réponse. Il est vrai que j'avais des doutes. Je n'avais même pas la certitude que Kenan nous envisageait comme un couple et je n'arrivai pas réellement à me projeter dans le futur. Je ne savais pas s'il y en aurait. C'était peut-être pessimiste de penser ainsi, mais c'était simplement parce que je n'avais pas envie de me projeter dans un quelconque futur quand le présent réclamait toute mon attention. Si je voulais un futur, il fallait que je m'occupe du présent. Cela n'empêchait pourtant pas que je savais ce que je ressentais.
- Oui, affirmai-je sans l'ombre d'une hésitation. Je l'aime.
- Bien. Alors l'affaire est close. Le démon prendra soin de toi.
Je le regardai en coin. C'était tout ? Mikaël n'attendit pas mon approbation et pressa le pas, se déportant sur la gauche afin d'arpenter un autre chemin. Je soufflai longuement. Il fallait croire que sa limite d'écoute avait été atteinte bien plus tôt qu'il ne le pensait. Où peut-être qu'il avait simplement raison. Je soupirai encore une fois. Il avait raison. Kenan prendrait soin de moi. Maladroitement. Parfois en m'agaçant le plus au point. Et nous allions nous menacer de mort imminente plus que souvent. Mais il ferait toujours de son mieux pour veiller sur moi et c'était suffisant.
- Il y a un truc bizarre par ici !
La voix de Devon braillait de façon sonore et je me tournai légèrement, surprise d'avoir dépassé le point où il s'était stoppé. Je grognai, maugréant après moi et mon incapacité à me concentrer. Je m'avançai rapidement vers Devon, Maël me suivant de prêt. Plissant les yeux une fois à sa hauteur alors qu'il se tenait devant une grosse roche grise, identique à toutes les autres. Septique, je me redressai vers le loup-garou, sans comprendre ce qu'il avait pu voir dans ce gros cailloux où je ne percevais pas la moindre énergie marqué.
- Regarde, insista-t-il en venant glisser ses doigts sur la roche rugueuse. Il y a des traces de griffure comme si quelqu'un s'était acharner dessus. Et la terre a été retournée récemment.
Son pied frotta le sol, l'herbe ce détachant aisément alors qu'il avait raison. Quelqu'un avait déplacé cette énorme pierre peu de temps auparavant. Je fronçai les sourcils et laissait courir mes doigts sur l'objet de toute notre attention. Kenan venait d'atterrir dans mon dos, près à me faire reculer à la moindre anomalie. Cyriel se tenait en hauteur, préférant assurer nos arrières. Mikaël s'approchait mollement, sans grande conviction puisqu'il était lui-même passer devant sans s'alarmer. Il ne manquait qu'Andréa. Vacant dans les environs en laissant, tout de même, son esprit concentré sur le mien par simple prudence.
Je frissonnai au contact rêche. Il n'y avait aucune trace de magie, mais il y avait autre chose. C'était si infime que je parvenais à peine à le déceler. Une sensation étrange qui me poussait à croire que Devon avait visé plus que juste. Je fis écarter le petit groupe d'un vague geste de la main, encore méfiante face aux réactions de mes dons. Mais je n'avais pas besoin de m'inquiéter. La pierre ne bouge pas. J'eus beau me concentrer, mes dons furent impuissant. Elle ne bougea pas. Pas du moindre millimètre. Et je réessayai pourtant à plusieurs reprises, incrédule. Ce n'était qu'une fichue roche. Aucun marqué n'y avait laissé son énergie et même si cela avait été le cas, comment aurait-elle pu résister à mes propres dons ? Elle aurait dû bouger. Elle aurait dû se déplacer. Je me voûtais un peu en avant alors que deux sentiments opposés venaient s'imbriquer en moi. L'inquiétude et la curiosité. Si je n'étais pas capable de la faire bouger, cela signifiait forcément que quelqu'un ou quelque chose l'avait touché. Quelqu'un qui était peut-être plus puissant que moi.
- Je m'en charge, souffla Devon en s'étirant négligemment, un sourire aux lèvres. Écarte-toi bébé, laisse faire les pros.
Je le fusillai du regard alors qu'il éclatait de rire, toujours très satisfait de lui-même. Mais, obéissante, je me reculai d'un pas alors qu'il se transformait déjà. Ses vêtements craquèrent, le bruit résonnant dans le silence qui régnait en maître dans la cité. L'animal prit la place de l'homme. Majestueux. Immense. J'étais toujours fascinée de voir leurs transformations. C'était assez impressionnant, je devais l'admettre. Les yeux ambres de Devon se posèrent sur moi, esquissant ce qui semblait être un clin d'œil mais il était difficile de l'estimer quand ce qui me faisait face n'était autre qu'un énorme loup au pelage brun.
Kenan passa sa main sur ma taille et d'un geste exaspéré, indiqua à son loup de se mettre au travail. Devon grogna vaguement en signe de protestation mais aussitôt appuya son corps sur la pierre. Ses pattes s'enfoncèrent dans la terre, prenant appuie. Il jappa. Gronda. S'égosilla. Mais elle ne bouge pas plus que lors de ma tentative. Devon s'acharna évidemment, pas du genre à renoncer. Il tenta toute les méthodes, balançant tour à tour son corps et ses griffes sans que la roche ne lui cède la moindre trace de victoire. Kenan dû finalement intervenir alors qu'il s'épuisait vainement à la tâche et risquait de se blesser à s'acharner ainsi.
- S'il vous n'avez ni l'un ni l'autre pu la faire bouger, alors personne ne doit y parvenir.
Je me tournai vers Andréa qui s'avançait nonchalamment et, sans m'adresser le moindre regard, vint se glisser prêt de nous, examinant la roche à son tour. Il plissa les yeux un instant, cherchant à estimer le poids et probablement la force nécessaire à la bouger. Il en vint à la même conclusion : ce n'était pas naturelle. Devon aurait du pouvoir la déplacer, tout comme moi. Mon don de la terre n'était pas celui que j'avais pratiqué le plus, mais je le maîtrisai tout autant que Devon était suffisamment puissant pour que cette chose se déplace.
- Elle n'a peut-être pas été déplacée, rajouta-t-il en s'accroupissant pour passer ses doigts sur les rainures que Devon avait laissé avec ses griffes. Quelqu'un a tenter de le faire avant nous, mais cela ne signifie pas qu'il y est parvenu. Il peut-être impossible de le faire.
- Mais ce que nous cherchons est probablement là, rétorquai-je.
- Parce que nous cherchons quelque chose de particulier ? Souffla-t-il froidement en se redressant. Qu'est-ce que tu nous caches, encore ?
Je tiquai. Je ne cachai rien. Mais pourtant il avait raison. Mes paroles semblaient lourdes de sens, même pour moi. Je cherchai donc quelque chose ? Mais quoi ? Je ne le savais pas moi-même. Je secouai donc la tête négativement, calmement malgré la colère de mon lié qui ne s'adoucit évidemment pas pour autant.
- Je ne vous ai rien caché, répondis-je donc doucement sans brusquerie ni animosité. Et je ne sais pas ce que je cherche, mais je sais que je ne suis pas venu pour rien et que cette roche est la réponse à cette question.
- Tu perçois quelque chose ? Me questionna Mikaël en coupant Andréa dans son élan de débuter une dispute.
- Je n'en suis pas certaine, avouai-je en mordant ma lèvre, nerveusement. C'est infime, mais c'est comme si... non. Il y a quelque chose en dessous. J'en suis certaine.
- Alors on va trouver le moyen de dégager cette chose. Si on ne peut pas la pousser. On va la détruire.
- Att...
Avant que je n'ai le temps de l'en empêcher, Kenan levait déjà sa main droite. Andréa gronda et eut à peine le temps de se déporter que ses mains s'illuminaient déjà, de longues flammes rougeoyantes tournoyant autour de son avant-bras. Il m'écarta d'un geste ample, de sa main libre, et je le laissai faire dans un soupir. C'était une mauvaise idée. Mais Kenan n'en ferait qu'a sa tête, alors je n'avais plus qu'a simplement veiller que tout ce passe bien.
Ses flammes se propagèrent de plus en plus, s'enroulant autour de son bras avant de s'élancer violemment. J'empoignai vivement le bras de Maël pour le faire reculer, trop proche de cette roche qui n'allait pas se laisser faire. C'était certain. Mais il retira ma main de son poignet, ses yeux saphir devenue bien plus terne. Une fine pellicule d'eau recouvrait sa peau, le protégeant des flammes de son frère.
- Pas la peine de t'en faire pour moi, affirma-t-il. Soucie-toi plutôt de ton petit-ami.
- Je me soucie aussi de toi, rétorquai-je en fronçant les sourcils.
- Pas la peine, répéta-t-il en se détournant. Je vais bien.
Sa froideur me déstabilisait. Il s'était comporté très normalement durant tout ce temps et d'un coup il semblait sortir de ses gonds. Et ce n'était pas le moment. Mais tellement pas. J'avais envie de hurler. De le dire qu'ils se comportaient tous comme des gamins. Et moi aussi. J'inspirai lourdement en reposant mes yeux sur Kenan dont l'idée semblait être de faire fondre la roche. Je ne savais même pas si c'était réellement possible. Mais dans tout les cas, c'était inefficace. Et surtout c'était dangereux. Les flammes qui frappaient la pierre se propageait bien au-delà de celle-ci venant s'éparpiller sur l'herbe sèche.
Vivement, je me tournai vers Cyriel, toujours en retrait mais le visage plus marqué. Il n'aimait pas ça non plus. Pas parce qu'il était inquiet pour nous, mais parce qu'il était inquiet pour tout ce qui nous entouraient. Les rares arbres. L'immense plaine. La faune. La flore. Kenan allait tout détruire. La chaleur étouffant aidait les flammes à prendre en puissant, se répandent tout autour de nous en détruisant chaque chose qu'elles touchaient. Il hocha sobrement la tête, basculant sa tête en arrière en fermant les yeux. Le ciel se couvrait déjà, annonçant une averse prochaine. Mais si on voulait mettre un terme à l'incendie, il fallait arrêter son initiateur.
- Kenan ! Aboyai-je durement. Arrête !
- Je vais y arriver, gronda-t-il.
Durement, je m'avançai vers lui et balançai mon pied dans son genou, il chancela et je venais attraper ses mains pour le forcer à cesser son comportement puéril. Je grimaçai alors qu'il eut à peine le temps de faire totalement disparaître son don quand mes mains encerclèrent les siennes. Ses yeux s'écarquillèrent en redevenant couleur émeraude en comprenant ce que je venais de faire. Brusquement, il me força à retourner mes paumes dans sa direction et il me fusilla du regard malgré que les marques de brûlure se résorbait déjà.
- Ne me regarde pas comme ça, soufflai-je un peu froidement. Si tu m'avais écoutée, je n'aurai pas eu à agir ainsi. Regarde les dégâts que tu as causé !
- Il y avait peut-être d'autres moyens de m'arrêter que de prendre un telle risque ? Es-tu aussi stupide où tu as prend ton pied à te mettre en danger ? Si c'est que ça, au lit je pe...
- La ferme, coupai-je en haussant la voix, ma mâchoire crispé. Le prochain qui me fait la moindre réflexion là-dessus, il dégage et rentre à Dacer. Je suis claire ?
Je regardai Kenan dans un premier temps, mais me tournait ensuite vers Maël qui se contenta, pour sa part, de hocher la tête. C'était quoi leurs problèmes à soudainement vouloir placer ça dans chaque conversation ? Je fermai les yeux et inspirai. Mes doigts me démangeaient terriblement et je ne savais pas si c'était à cause de l'utilisation de mes dons ou parce que j'avais mortellement envie de coller mon poing dans la figure de ce stupide démon. Je rouvrais les yeux et m'avançai, bousculant mon épaule contre la sienne alors qu'il tentait déjà de venir poser sa main sur mon épaule comme si cela allait tout arranger.
Décidée à régler ce problème plus tard, je retournai à la seule chose qui devait accaparer mon attention actuellement. Cette foutue pierre. Qu'est-ce qui la rendait différente ? Il y avait forcément un détail, une trace, quelque chose qui me permettrait de déceler une faiblesse. Si elle avait été placée ici, délibérément, c'était qu'elle pouvait être déplacé à nouveau. Quelqu'un l'avait fait. J'en étais de plus en plus intiment convaincu. Et cette personne devait forcément avoir laissé un moyen pour accéder à ce qu'elle cachait, sinon il aurait simplement détruit ce qui se trouvait en-dessous. Il avait visiblement la puissance nécessaire pour mettre à mal ma toute nouvelle confiance face à mes dons, alors il n'aurait eu aucun soucis à détruire quoi que ce soit. Alors comment avait-il pu procéder ? Mon esprit bouillonnait, tentant de trouver toute les possibilités mais je n'étais capable que d'éliminer des hypothèses, sans trouver la bonne.
Ma main glissa à nouveau sur la surface rugueuse. Elle était brûlante. Les flammes de Kenan n'avaient donc pas été si inefficace, néanmoins elles n'avaient aucunement altérés la roche en elle-même. Mais au moins cela signifiait qu'elle était réelle, que ce n'était pas juste une illusion. J'éliminai donc une de mes trop nombreuses tentatives de comprendre comment tout ceci était possible. Mais brusquement, je tiquai. Une illusion. Cela n'en était pas une. Du moins, pas totalement. Je pris une longue bouffée d'air, cherchant à calmer mes pensées qui s'éparpillaient encore un peu trop et doucement, je glissai mes doigts dans la roche. Oui. Dans. J'avais raison. Ce n'était qu'un tour, qu'un simple jeu sur notre esprit.
Mais mon contentement fut de courte durer, avant même que je n'ai le temps de réagir et de retirer ma main j'étais attirer. Une force invisible me poussait en avant. Mes pieds tentèrent de se planter dans le sol, cherchant un appuie pour me reculer. Mais je n'y parvenais pas. Mes pieds glissaient. Mon cœur battait la chamade mais je concevrais mon calme. Il faut que tu trouve une solution. Vite. La main de Kenan voulut attraper mon poignet mais elle se referma dans le vide. Mes yeux rencontrais les siens, terrorisés. Et impuissant. Ce fut ma dernière image. Le noir se fit autour de moi, me plongeant dans un sommeil que je craignais ne jamais quitter. Encore une fois, j'avais été imprudente. Extrêmement imprudente. Et si je ne me réveillai jamais... ?
♦
- Keylinda ! Magne-toi on va être en retard !
Je grognai lourdement, la voix rauque de Devon me tirant de mon sommeil. Je pestai du bout des lèvres, totalement engourdi. Qu'est-ce qu'il c'était passé déjà ? Pourquoi je me sentais aussi vaseuse ? Je passai ma main dans mes cheveux, un mal de crâne si violent que je me demandais sincèrement si un troupeau de vache n'avait pas décidé d'élire domicile dans mon crâne pour une séance matinale de gymnastique. Puis j'ouvrai les yeux brusquement. Mon corps se relevant de lui-même, mon cœur battant à toute allure dans ma poitrine. Le Pérou. La roche. Cette sensation d'être absorbée dans le néant.
Mes sens en alerte je fus surprise de ne rien ressentir. Rien du tout. C'était vide. Anormalement vide. Pas la moindre pensée. Pas la moindre sensation étrange. Mon cœur se serra avec force lorsque mes yeux tombèrent sur mes mains. Pas de tatouage noir. Pas de marque blanche. Juste ma peau. Mâte. Comme à l'époque. Je restai une longue minute à fixer ma main si... banal. Ma gorge se nouait alors que l'incompréhension me gagnait.
- Keylinda !
La voix de Devon me ramena à la réalité et sans même prendre la peine d'analyser la pièce où je me trouvai, je me ruais vers la porte en bois où il tambourinait. Je l'ouvris à la volé, le cœur sur le point d'exploser tant la peur me tétanisait. Qu'est-ce que tout cela signifiait ? Mon cœur ne se calma pas devant le visage mâte et si habituelle de Devon. Non. Il redoubla dans ses battements fou. Devon se tenait bel et bien devant moi, arborant toujours son sourire et ses yeux pétillant d'espièglerie. Mais ce qui me chamboulait était que je ne parvenais pas à lire ses pensées. Rien. Le néant. Le silence le plus total que j'ai connu depuis que j'avais découvert cette capacité que j'avais tant détesté.
- Je n'y arrive plus, murmurai-je de façon à peine audible en le fixant.
- De quoi tu parles ? Siffla-t-il en perdant un peu son sourire, ses sourcils se fronçant avec inquiétude. Tu vas bien ? Tu sembles pâles.
- Je n'arrive plus à lire tes pensées, répétai-je en articulant difficilement.
Devon fronça un peu plus les sourcils et vint poser sa main sur mon front, cherchant visiblement à vérifier ma température. Je chassai sa main un peu durement, totalement chamboulée. Qu'est-ce qui c'était passé ? Pourquoi j'avais perdu mes dons ? Tous ? Je fermai les yeux et inspirai longuement, cherchant à faire réagir le moindre objet, la terre, les animaux, peu m'importait. Mais rien. Rien. Rien. Rien. Le mot passait en boucle dans mon esprit alors qu'un autre voulait s'immiscer : tu es devenu normal. Non. Tu es juste devenue une humaine. Une banale humaine. Une nausée violente me fit trembler et je portai une main à mes lèvres en faisant reculer Devon d'un pas, blêmissant sans doute à l'idée que je puisse lui vomir dessus.
Malgré tout, il vint passer un bras protecteur autour de mes épaules et me fit me redresser. Son regard soucieux m'apaisa légèrement, mais je ne comprenais pas son calme. Il s'était contenté de vérifier ma température comme s'il n'avait même pas remarqué la disparition des marques qui couvraient habituellement mon corps. Totalement perdu, je relevai mes yeux vers lui, désireuse de la moindre explication. Que c'était-il passé après que je sois tombée dans les pommes ? Où étions-nous ? Je ne reconnaissais pas l'allée de pavée brune qui s'étendait sous mes yeux, encore moins le quartier animé d'une ville dont le brouhaha parvenait à mes tympans sans que je n'ai besoin de capacité surhumaine.
- Que s'est il passé ? Nous ne sommes plus au Pérou ?
- Au Pérou ? Répéta Devon incrédule en me faisant un peu plus perdre mes moyens. Keylinda, nous ne sommes jamais allé au Pérou. Nous sommes en France, à Montpellier.
- Jamais aller au Pérou ? Répétai-je en me mordant la lèvre. Tu te fiche de moi Devon ? Si c'est le cas, je ne trouve vraiment pas sa drôle ! Où son Kenan et Maël ? Et les autres ?
- Kenan ? Siffla Devon en s'écartant. La vache, je sais pas si tu as reçu un coup sur la tête ou si tu as trop picolée hier, mais tu déraille complètement. Je pensais que tu pouvais pas sentir ce type ?
- De quoi tu parles ? Murmurai-je en venant saisir mon médaillon, tentant de me rassurer dans ce geste famillier. Tu sais bien ce qui se passe entre nous... n-nous sortons ensemble, enfin je crois.
- Mais qu'est-ce que tu raconte ? Grimaça Devon dans un mouvement de recul, presque de dégoût. Surtout ne dis pas ce genre de truc à Maël, il risque de péter un plomb.
- Maël ? Où est-il ? Insistai-je, persuadée que Devon se fichait de moi et que Maël répondrait plus sérieusement à toutes mes questions.
- Aucune idée, affirma Devon dont les yeux se faisaient de plus en plus soucieux, aggravant les tremblements qui commençaient à saisir mon corps entier. Il a dû partir à la fac. Écoute Keyli, je pense sincèrement que tu devrais aller te recoucher, tu es clairement pas dans ton assiette.
Je hochai la tête, incapable de faire quoi que ce soit d'autre. Devon empoigna mes épaules et me poussa devant lui, me reconduisant jusqu'à la pièce que j'avais quitté si précipitamment. Mes yeux fouillaient l'endroit en quête d'un moindre signe rassurant. Mais le sentiment qui commençait à m'empoigner fut juste plus déstabilisant encore. Je n'avais jamais mis les pieds dans cette maison. Jamais. Et pourtant il m'était familier. Plus encore. Je savais que c'était le mien. Celui que j'aurai rêvée d'avoir. La pièce à vivre était grande, la cuisine ouverte verte et blanche donnait sur un petit salon claire et lumineux. De nombreuses plantes trônaient de si de là et la grande verrière donnait sur un petit jardin arboré. La chambre était plutôt petite, mais une porte me laissait deviner un dressing qui compensait le manque de place pour un placard. Le lit double était largement défait, comme si deux personnes y avaient dormis le matin même. Et j'étais probablement l'une de ces personnes.
Je ne comprenais pas. Je ne comprenais absolument pas. Je ne comprenais rien. Je lançai un regard désemparé à Devon et il me força simplement à m'allonger dans le lit, caressant doucement mes cheveux dans un geste rassurant. Il s'installa à côté de moi, préférant rester assis sur le bord du lit en voyant mon état pitoyable. J'étais si crispée que je doutai de parvenir à me calmer. Qu'est-ce qu'il se passait ? Devon ne se serait pas moqué de moi en percevant ma panique et la sincérité que je lisais dans ses yeux soucieux ne laissait pas de doute. Nous n'étions jamais aller au Pérou pour lui. Et je crois qu'il ne pensait vraiment pas que je sortais avec Kenan. Mon cœur s'emballa à nouveau, je me tournai sur le côté, remontant mes jambes contre ma poitrine. Qu'est-ce qu'il se passait ? Je me sentais tellement faible. Tellement impuissante. Je ne pouvais rien faire. Je n'étais qu'une humaine. Qu'une putain d'humaine.
- Je vais appeler Maël pour le prévenir que tu ne te sens pas bien, me souffla Devon dans un soupir inquiet. En attendant, essaye de dormir un peu.
Je hochai à nouveau la tête, incapable de parler. Ma gorge semblait broyée. Je ne comprenais pas. Mon passé semblait avoir voler en éclat comme s'il n'avait jamais existé. Et un autre venait doucement prendre sa place. Des images d'un passé qui n'était pas le mien me sautait aux yeux. Des souvenirs. Des souvenirs que je ne connaissais pas. Des souvenirs que je n'avais jamais vécu. Mes parents. Heureux. N'ayant jamais été séparé. Moi. Heureuse aussi. Je grandissais comme une enfant normal. Normal. Le mot m'écorchait, me brûlait de l'intérieur. Moi qui avait tout voulut être normal, j'étais désormais totalement désemparée quand je l'étais visiblement devenue.
Je fus incapable de dormir comme Devon me l'avait conseillé. Je ne pouvais pas. Je devais comprendre. Et me lamenter ne servirait à rien. Malgré mes épaules tremblotantes et la sensation de n'être qu'un moustique fragile que la moindre tapette à mouche écraserait, je m'asseyais sur le lit. Attendant l'arrivé de Maël. Lui, il pourrait m'expliquer. Du moins, c'était ce que j'espérais de tout cœur. De toute manière, qu'est-ce que j'aurai pu faire d'autre ? Sans don. Sans capacité. Je n'avais pas la moindre chance. Pendant une longue je voulu me bercer du doux espoir que ce n'était qu'une nouvelle illusion que je pouvais briser. Mais je du me rendre compte que je ne pouvais pas. Définitivement, j'étais redevenu humaine. Et je crois, que tout le monde l'était. Maël franchit le pas de la porte de la chambre, haletant alors qu'il semblait visiblement paniqué. Mais ce n'était pas ce qui m'assena un nouveau coup dans l'estomac. Non. Ce n'était pas ça du tout. Il n'avait pas d'ailes.
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