Ame Nochi Kanjouron 雨のち感情論
- Bonsoir à tous ! J'espère que vous allez bien !
Quelques cris s'élevèrent dans le public.
- Je n'entends rien ! s'écria Kurona en levant et en pointant un instant ses bachi vers le public, il s'écria de nouveau : vous allez bien !
Davantage de cris mêlés à la batterie répondirent au joueur de taiko.
Kurona tourna la tête sur le côté. Sans lâcher ses bachi, il posa une main sur l'un des taiko et l'autre sur sa hanche et il regarda, d'un air faussement réprobateur, le batteur qui fanfaronnait, chemise ouverte. Deux minutes à peine et il se réinstalla à sa batterie, comme s'il n'avait rien fait mais fier de lui tout de même.
- Ça ira pour cette fois, le prévint Kurona en le désignant avec l'un de ses bachi.
- Wasabi et Kurona ! continua Yūko en les désignant de son éventail fermé. Bien, on se retrouve en leurs compagnies, en votre compagnie, pour passer une bonne soirée. Vous êtes d'accord ?
Cris et applaudissements accueillirent cette proposition avec enthousiasme pendant qu'Asa les encourageait avec les mains.
- Alors, on y va ! conclut Yūko en pointant le public avec son éventail qu'elle ouvrit une fois son bras tendu.
Faisant face au public, Asa vit Daisuke se reculer un peu vers lui alors que Yūko s'adressait aux spectateurs.
- Ça va ? Je ne t'ai pas fait mal ?
Daisuke y avait beaucoup réfléchi et la seule chose logique était qu'il lui avait donné des coups avec son shakuhachi.
Le bassiste répondit par l'affirmative. Mais il ne comprenait pas trop pourquoi Daisuke lui posait cette question.
- Bah, je t'ai donné plusieurs coups tout à l'heure pendant Senbonzakura.
Faisant toujours face au public, Asa se contenta de tourner la tête vers lui pour le regarder en silence, surpris.
- On s'est mis trop près l'un de l'autre, continua Daisuke bien que lui fut certain de s'être mis à sa place.
Le bassiste continuait de fixer son ami. Ils ne s'étaient pas placés trop près l'un de l'autre lorsqu'ils étaient à l'estrade. Ils avaient respecté la distance prévue pour que Daisuke puisse effectuer ses petits mouvements sur le côté. Ce dernier n'avait même pas frôler Asa avec son shakuhachi.
- Tu es sûr ?! persista ce dernier.
Asa se contenta de fermer les yeux tout en hochant la tête. Oui, il en était absolument certain. Chacun était parfaitement à sa place et Daisuke ne lui avait donné aucun coup, de quelque nature qu'il soit.
- Ah bon, conclut Daisuke, perplexe puis, en regagnant sa place, il marmonna pour lui-même : pourtant, je suis certain qu'il y avait quelqu'un juste à côté de moi. Trop près.
Mais du coup, ni l'un ni l'autre n'écoutait ce qui se passait sur scène et déjà la musique commençait. Un peu pris de court, les deux musiciens reprirent malgré tout assez rapidement leurs marques.
Elle avait écouté avec attention les paroles du Yūko avec toujours un léger bourdonnement dans les oreilles. Du coup, la chanteuse avait une voix un peu plus sourde, comme si elle était étouffée. À l'avenir, il ne faudrait plus qu'elle s'approche de ce truc, à savoir le gong. Ça faisait terriblement mal aux oreilles. Et pas seulement. Comment pouvait-on avoir inventé un truc pareil ? Du coup, elle s'était prudemment éloignée pour se rapprocher de la petite estrade centrale. En passant près de lui, elle détailla le guitariste. Pourquoi était-il tourné face à la batterie ? Peut-être qu'il surveillait son ami ? Oui ! Pour ne plus que celui-ci se serve de son instrument à torturer les oreilles ! Comme c'était gentil de sa part !
La chanteuse annonça la prochaine chanson : Ame Nochi Kanjouron. Et aussitôt la musique commença. Le koto d'abord et le shakuhachi ensuite. C'était agréable et doux. La lumière tamisée aussi, c'était bien. Mais pas tellement pratique, elle ne voyait pas bien. Et puis, d'un seul coup, tout s'éclaira et les musiciens prenaient vie.
Eh ! Mais ! Pourquoi le guitariste arrêtait-il de surveiller son ami ? Il allait encore taper sur son gros truc, là ! Et en plus, il s'en éloignait ! Elle suivit Machiya pour interpeler et lui demander de continuer de surveiller le batteur mais son regard s'arrêta un peu plus loin. Pas grand chose, en fait. Juste à côté du guitariste. Qu'est-ce qu'elle était grande, la joueuse de shamisen ! Elle n'avait pas fait attention jusque-là. Elle se décala un peu, le guitariste l'empêchant de bien voir, elle voyait juste la tête de la musicienne qui dépassait et...
Ahhh, et bien voilà le secret de la taille de la musicienne ! Elle étouffa un petit rire. Elle avait été bien stupide ! La joueuse était simplement montée sur deux marches. Elle devait certainement avoir une meilleure vue de là-haut ! Elle monterait bien dessus elle-aussi, pour frapper aussi dans ses mains. Mais il n'y avait pas suffisamment de place pour deux. elle avait déjà voulu faire ça tout à l'heure et... Et quoi ? Elle fronça les sourcils. Que s'était-il passé ? Quelque chose de désagréable, ça elle en était sûre. Mais quoi ? Bah ! Elle verrait ça plus tard ! Pour l'instant, les marches... Il y avait peut-être d'autres quelque part... Elle se tourna... Ah, forcément, le guitariste lui bouchait encore la vue ! Celui-là, il fallait vraiment qu'il soit partout. Il ferait mieux de retourner surveiller celui qui jouait de la batterie !
Elle se pencha un peu vers l'avant, vers le public pour essayer de voir et... c'était maintenant qu'il se poussait ! Et évidemment, il y en avait un autre dans son champ de vision. Mais maintenant, elle pouvait voir... son regard se posa sur Asa, quasiment à l'autre bout de la scène. Enfin, elle voyait sa tête au-dessus de celle de Daisuke. Donc, lui-aussi était plus grand que les autres. Donc, lui-aussi devait forcément être juché sur deux marches. Donc, elle allait voir s'il n'y avait pas un peu plus de place à ses côtés.
Accroupi au bord de l'estrade centrale, le fantôme. Il ne bougea pas lorsqu'elle se dirigea droit sur lui d'un pas décidé.
- Oh, pardon, laissa-t-elle échapper en s'arrêtant à deux ou trois centimètres du yōkai.
Elle fit le tour de la petite estrade centrale sans pour autant quitter Asa du regard. Il tourna la tête pour suivre ses mouvements, basculant vers l'arrière parce qu'il n'avait pas changé de position. Elle s'arrêta de l'autre côté et posa ses poings sur ses hanches. Visiblement, quelque chose la dérangeait. Le bassiste peut-être. Il était descendu de sa petite estrade un peu avant qu'elle ne le rejoigne. Cependant, elle aurait dû le voir. Il était en plein dans sa ligne de mire.
Un peu plus tard peut-être. Pour l'instant, il se ferait bien une petite sieste. Il s'allongea sur l'estrade sur laquelle il se trouvait au moment où la chanteuse gravit la deuxième marche. Zut ! Il avait pensé qu'elle resterait sur la première marche ! Oh, avec un peu de chance, elle n'avancerait pas davantage. Il se poussa quand même jusqu'au bord de l'estrade, on n'était jamais assez prudent !
Elle regardait toujours les deux marches qui se trouvaient devant elle. Bon bah, puisqu'il n'y avait plus perdu, elle avait la petite estrade pour elle toute seule. Elle regarda autour d'elle, histoire de s'assurer qu'il n'y avait personne autour d'elle. Tout à l'heure... lorsqu'elle avait voulu monter avec les autres sur l'estrade... Elle fronça de nouveau les sourcils, elle cherchait encore ce qui s'était passé. Non, vraiment, elle ne s'en souvenait pas.
Elle releva la tête pour... Ah, tiens, il était de nouveau là.
Asa s'était avancé, s'arrêtant juste à côté de la petite estrade. Elle l'observa un moment. Elle avait de beaux cheveux. Ils donnaient presque envi de passer la main dedans. Ils devaient certainement être tout doux.
Elle suivit le bassiste du regard lorsque celui-ci se recula de quelque pas.
Il avait bougé. Toujours allongé sur son estrade, il avait maintenant la tête penchée dans le vide. Il regardait les faits et gestes du fantôme. Elle était tournée vers l'arrière de la scène, apparemment en admiration sur ce qu'elle voyait. Il tourna la tête sur le côté. Les trois instruments du fond semblait donc accaparer toute l'attention du fantôme.
Le yōkai au masque se tourna sur le côté gauche avant de se lever. Il se plaça près du fantôme pour la regarder d'un peu plus près. Elle ne bougea pas. Son regard était toujours fixé devant elle. Que pouvait-elle regarder avec autant d'assiduité. Le koto ? Les wadaiko ? A bien y regarder, ni l'un ni l'autre. Elle fixait entre les deux instruments, le regard vide. Il pencha la tête sur le côté. Parviendrait-il à capter son attention ? Apparemment, non. C'était comme si son corps était là, mais pas son esprit. Il agita sa main devant son visage. Toujours aucune réaction. Allons bon ! Voilà un fantôme privé de son esprit !
Il se plaça devant elle, pencha la tête d'un côté puis, de l'autre. Les bras ballants, lui-aussi, il se demandait ce qu'il allait bien pouvoir faire de ce fantôme sans âme.
Il laissa son attention être attirée un mouvement derrière le fantôme. Asa venait de monter sur la petite estrade de droite. Le silence se fit et seules les notes graves de l'instrument résonnèrent dans la salle rapidement rejoint par les coups sourds des wadaiko. Il entendit la chanteuse vocaliser et quelque chose le frôler.
- Koto ! lança la chanteuse.
C'était comme si elle se réveillait. Du koto. C'était agréable comme instrument. Elle le chercha du regard. Ah, il était là devant elle. Mais ?! Elle entendait bien les notes du koto mais... il n'y avait personne, à aucun des deux instruments.
- Et guitare ! continua Yūko en désignant Machiya qui avait rejoint Kiyoshi sur l'estrade centrale.
Elle tourna la tête, toujours à la recherche du joueur de koto. Elle regarda une seconde, ce masque devant elle. Il regardait... Elle tourna la tête. Ah bah le voilà, le koto ! Monsieur se promenais tout seul maintenant ! Elle fronça les sourcils. Il y avait quelque chose qui n'allait pas. Quelqu'un tenait un koto à bout de bras ? Mais c'était un géant, le gars, ou quoi !
Elle s'approcha. Non, l'homme n'avait pas l'air plus grand que n'importe qui. C'était juste qu'il était monté sur deux marches. Mais c'était quoi, cette manie de monter sur tout ce qui trainait ?
Mais alors, du coup, ce que le musicien avait dans les mains. Ça ne pouvait pas être un koto ! Pourtant, ça ressemblait bien à un koto.
Un koto !? Vraiment ?!
Mais non, ce n'est pas un koto ça ! C'était bien plus grand que ça, un koto. Ça c'est un mini koto, un koto portable. Un koto de poche ! Mais certainement pas un koto !
Yūko repris sa vocalise au moment où Kiyoshi et Machiya descendirent de l'estrade centrale.
Le fantôme suivit du regard le joueur de koto qui retournait à ses instruments. Elle le suivit, intriguée par le « petit » instrument qu'il posa derrière les grands. Elle s'en approcha, se pencha au-dessus de celui-ci alors que Kiyoshi pinçait déjà les cordes du koto « classique ». Elle était fascinée. L'objet ressemblait effectivement à un koto mais un bien plus petit. Elle approcha la main, hésita un instant puis, son doigt frôla l'une des cordes. Son cœur battait vite. Avait-elle vraiment le droit d'y toucher ? Elle se tourna. Derrière elle, Kiyoshi n'avait même pas remarqué sa présence. Elle sourit. Tout allait bien alors s'il ne pouvait pas la voir. Elle se tourna de nouveau vers le petit koto et fit glisser son doigt, d'un bout à l'autre de l'instrument.
Il n'avait pas bougé de place. Il s'était contenté de suivre les mouvements de chacun. Mais c'était surtout ceux du fantôme qui l'intéressait. Lorsqu'elle s'était tournée vers Kiyoshi, il avait vu une lueur d'espièglerie dans son regard. Maintenant, ça risquait de devenir intéressant. Il posa un instant les yeux sur une petite forme jaune et verte posée sur une tablette haute devant les wadaiko. Oui, ça allait vraiment être intéressant.
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