Nda : je dédie ce texte à Salsepareille !

L'automne transformait la forêt en un décor naturel absolument magnifique.
Les feuilles étaient déjà presque toutes tombées, tapissant le sol de couleurs brunes, rouges et ocres.
Les arbres, certains nus, d'autres couverts de mousse vert vif, se dressaient fièrement, comme des épées pointées vers le ciel.

Ces feuilles mortes sont peut être magnifiques, mais elles m'empêchent de repérer les chanterelles, pensa l'homme qui déambulait dans ces bois.

Il connaissait ces bois par coeur, les arpentait, panier à la main, au moins dix fois chaque année, et revenait chez lui avec parfois des Pieds-de-mouton, parfois des Vesses-de-loup assez jeunes pour être mangées, et chaque année, c'était les chanterelles qui lui causaient le plus de problèmes.

Après, chercher des champignons bruns, alors que les feuilles mortes recouvrent tout l'espace, c'était une tâche ardue.

Mais les chanterelles étaient délicieuses, et très nombreuses, donc elle valaient bien une virée plus longue dans la forêt.

Et puis, l'homme aimait bien ces moments en tête à tête avec la nature, loin de sa famille, juste lui et son panier à champignon.

Sa botte s'enfonça dans une flaque de boue vicieusement camouflée par des feuilles mortes.
Réprimant un soupir, il enleva péniblement sa jambe puis se dit que si après avoir ratissé cette partie du bois, les chanterelles restaient introuvable, il rentrerait bredouille.

Enfin, il avait déjà de quoi faire le repas de ce soir, mais  ces champignons là sauraient remplir entièrement son panier...

Après quelque temps d'errance, il tomba nez à nez avec une chanterelle.
Enfin.

S'accroupissant, il jeta un coup d'oeil expert sur le périmètre autour de lui.
Il en voyait au moins une vingtaine à portée de main.

C'était une des caractéristiques des chanterelles : comme elles étaient toujours en groupe d'au moins quarante spécimens, il suffisait d'en trouver une pour remplir son panier.
Toute la difficulté résidait dans le repérage du premier champignon.

Se mettant dans une position confortable, déposant son panier (en prenant soin de ne pas en écraser au passage), il commença son travail laborieux.

Il fallait d'abord cueillir le champignon, en prenant soin de ne pas abîmer le mycélium, puis vérifier s'il s'agissait bien d'une chanterelle et pas d'un spécimen qui au mieux, vous donnait une diarrhée monstrueuse, ou au pire, vous tuait, puis enlever la terre et les bouts de feuilles collées au pied et mettre le champignon dans le panier.

Cela faisait longtemps, il ne savait pas combien de temps exactement, que l'homme était presque immobile, concentré sur ses champignons, consciencieux, silencieux, en harmonie avec l'environnement autour.

C'était peut être grâce à cette immobilité, ce calme et ce silence que quand il leva la tête pour il ne savait qu'elle raison, il vit une biche devant lui.

Elle ne l'avait probablement pas encore vu (sinon elle serait déjà partie en vitesse), et se contentait de se tenir là, observant les alentours. Elle se tenait de profil, il pouvait voir parfaitement son corps brun, ses muscles tendus, ses pattes fines et puissantes, un oeil marron rempli de sentiments, même s'il ne savait pas s'ils étaient réels ou si lui les imaginait.

Il était figé, interdit de stupeur face à cette rencontre insolite et exeptionnelle, il n'avait jamais de sa vie été si proche d'un animal sauvage, et n'osait pas bouger.

Elle était à, quoi, maximum cinq mètres ? Il était fasciné par cet animal majestueux.

Puis, elle tourna la tête vers lui, le vit, et partit tout aussi rapidement qu'elle était arrivée.

Il fallu un petit temps pour qu'il se ressaisisse et retourne à la cueillette de ses champignons.

Après quelques minutes, il se rendit compte d'une horreur  : la biche, toute belle, majestueuse qu'elle était, avait écrasé une vingtaine de chanterelles !