En entendant le mot vision, le sang de Chan ne fit qu'un tour, et il ouvrit la porte à la volée, ignorant toute sa politesse. La porte se referma derrière lui en grinçant légèrement, mais ce n'était rien comparé au spectacle qui lui faisait face.

Lorsqu'il était rentré, Minho était seul au beau milieu des latrines, complètement figé, le regard plongé dans le miroir. Une expression d'effroi teintait son visage, mais ce n'était rien comparé à la suite. Car la seconde d'après, il se mit à hurler et à se débattre contre le vide, se tenant la tête tel un fou. Chan tenta de le prendre par les épaules, mais le grisé tomba au sol, respirant fortement en tremblant incessamment. Il ne cessait de gémir des « Non ! » et des « Pitié, laissez-moi ! », tout ça sous son regard impuissant.

« Minho ! Je suis là, regarde-moi ! Minho ! »

Rien à faire, ce dernier ne cessait de hurler en se tortillant sur lui-même, vivant une horreur que Chan ne pouvait même pas imaginer. Le brun sortit difficilement son téléphone, appelant le premier numéro dans ses contacts, qui fut tout naturellement l'un des deux numéros qu'il avait rentré quelques minutes plus tôt. Mais à cet instant, son geste était machinal, et il aurait appelé sa mère que son cerveau n'aurait même pas capté l'identité de son interlocuteur. L'appel décrocha de l'autre côté du fil, et une voix chantante résonna de l'autre côté du combiné :

« Euh... allô ?

Son souffle se coupa face à la voix inconnue, ne reconnaissant aucune de celle de ses amis. Mais là maintenant, il n'en tint pas rigueur, il en était tout bonnement incapable, et s'écria d'une traite :

— J'espère que tu es un des amis de Minho, parce que je t'en supplie, j'ai besoin d'aide ! Il est en pleine vision et... c'est pas comme les visions de Felix ! Je sais pas ce qu'il lui arrive ! Il fixait le miroir quand je suis rentré dans les toilettes, et il–

Même lui ne se rendait plus compte de ce qu'il baragouinait, son cerveau ne comprenant pas que son interlocuteur ne pourrait potentiellement rien comprendre. Pourtant, ce fut tout le contraire.

— Où êtes-vous actuellement ? Coupa la voix d'une voix devenue soudain plus froide.

— À son université ! Je vais le ramener dans une salle ! Appelle Jisung ou Changbin pour te guider ! Et aussi ton autre ami !

Et soudain, Chan n'entendit plus rien dans les toilettes. Seule une respiration un tant soit peu calme, mais c'est tout. Il baissa les yeux vers Minho, et un frisson parcourut son échine : Lee Minho s'était tu. Il était devenu soudainement calme, beaucoup trop calme.

— Minho ? Appela le brun sans jamais lâcher son portable.

Ce dernier ne répondit rien. Il se contentait simplement de fixer le vide, sans sourciller, sans aucune expression faciale.

— Il se passe quoi de votre côté ?

Chan sursauta en entendant une autre voix à l'autre bout du fil, avec celle de son premier interlocuteur en fond. Il déglutit et déclara sur un ton empli d'inquiétude :

— Il... Minho s'est calmé, je crois. Mais il ne parle pas, il ne bouge pas non plus.

Après un long silence, la première voix, qui semblait avoir repris son téléphone, lui dit :

— Hyunjin a dit qu'il faut que vous le ligotiez. Avec n'importe quoi, mais il doit rester attaché jusqu'à ce qu'on arrive !

— D'accord, on va faire ça !

— On fait vite ! »

L'appel se coupa brutalement. Chan renfonça son téléphone dans sa poche et se tourna vers Minho. Il abandonna l'idée de le secouer à nouveau, et le porta non sans difficulté pour le traîner hors des toilettes. C'est qu'il faisait quand même son poids, le danseur.

Un coup d'œil sur sa montre indiqua qu'il était aux alentours de dix-neuf heures ; à cette heure-ci, l'université était quasiment vide. Et s'il comptait réunir ses amis et les amis de Minho, ils ne tiendraient clairement pas dans leur petit studio d'enregistrement.

Par chance, il vit Jisung et Felix au loin, tenant chacun une canette à la main. Leur expression enjouée passa bien vite à la panique en voyant les deux aînés, bras dessus bras dessous.

« Aidez-moi à le ramener dans un amphi ! Ordonna Chan en flanchant presque. Felix, va dire à Changbin d'aller chercher les amis de Minho à l'entrée et de les ramener ici ! Et si tu trouves des cordes ou quoi que ce soit pour l'attacher, ramène-les-moi ! »

Le regard qu'arborait Minho était suffisant pour leur faire comprendre que quelque chose n'allait pas. Sans dire un mot, Jisung donna sa canette à Felix et saisit l'autre bras du danseur, le trainant avec Chan jusqu'à un petit amphithéâtre voisin du studio d'enregistrement. Ils ouvrirent péniblement la porte et s'engouffrèrent dans la pièce, tenant leur ami à bout de bras, qui ne fit aucun effort pour les aider.

Le petit australien, lui, revint une minute après, débarrassé de ses boissons, et tenant de nombreuses cordes dans ses mains, qu'il lâcha au sol.

« J'ai piqué ça dans une salle pas loin. Des trucs de théâtres, je pense.

— Ça fera l'affaire, déclara Chan en posant Minho sur la chaise du bureau qu'il avait tiré. Aidez-moi à l'attacher, il ne doit surtout pas bouger !

— Pourquoi on doit l'attacher ? S'exclama le grand blond qui s'exécuta quand même. Il ne bouge même plus !

— On m'a dit de l'attacher, donc on va le faire, Jisung ! Ne discute pas ! »

L'aîné s'attela à la tâche, serrant la corde le plus possible contre Minho qui ne broncha aucunement. Jisung se chargea de lier ses chevilles aux pieds de la chaise, et Felix conclut qu'il allait s'occuper de ses poignets.

Mais lorsque le petit blond s'approcha de Minho, ce dernier leva lentement la tête, le fixant incessamment du regard. Ce qui ne passa pas inaperçu aux yeux de Chan, bien évidemment.

« Pourquoi il a bougé quand tu t'es approché ? Fit-il, sans rien comprendre.

— J-je sais pas, mais ça me fait peur, Chan... Marmonna le blond en reculant d'un pas.

— Il ne te fera rien, attache-le simplement », assura son presque jumeau en se relevant.

Chan vit le plus jeune hésiter, mais il finit par s'approcher à nouveau, passant derrière le grisé pour lui lier les poignets. Il le fit rapidement, bien qu'avec soin, car le regard perçant de Minho pesait sur lui.

Soudain, ce dernier attrapa la cravate de Felix de ses deux mains, désormais attachées dans son dos, rapprochant le petit blond contre son visage, et susurra d'une voix qu'on ne lui connaissait pas :

« Ça ne te dirait pas de me rejoindre, Felix ?

Tous avaient bien entendu ses paroles. Et il arbora alors un sourire cruel, sadique et méchant, son regard luisant d'une sombre folie diabolique.

Lee Felix tomba à la renverse en tremblant, s'écartant au loin de Minho, qu'il ne reconnaissait plus. Pire encore, le regard du plus jeune était rempli de peur, que Chan ne comprit pas sur le coup. Du moins, jusqu'à ce qu'il bredouille d'une voix emplie d'horreur :

— Ji', Chan, Minho m'a foutu en pleine vision ! »

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