Chapitre 11
6 avril – 22:39
Le petit groupe suivait Mingyu dans le couloir, qui indiquait à chaque duo leur chambre, toutes placées côte-à-côte et face à face. En rentrant dans celle qu'il partageait avec Chan, Jeongin découvrit le fameux dortoir où dormaient son père, ses deux oncles et grands oncles à une époque, et dans lequel il ne dormait que très rarement avant de déménager : c'était une chambre de taille raisonnable pour deux personnes, avec deux lits simples séparés d'une table de nuit, un bureau, une chaise et une penderie. En soi, le strict minimum.
« La salle de bain commune et les toilettes se trouvent au fond du couloir, expliqua l'exorciste. Il y a aussi une partie de la famille de mon petit frère, les cousins de Jeongin, qui dorment à cet étage, mais ils se lèvent relativement tôt donc vous n'avez rien à craindre si vous ne voulez pas croiser d'inconnus demain matin. Vu toute l'énergie que vous avez dépensée, vous pouvez vous lever tard, ce n'est pas un problème. Le déjeuner est à midi trente, le dîner est à vingt heures tapantes, et le petit déjeuner à sept heures pour les courageux. Et ne faites pas trop de bruit, les murs ne sont pas très isolants.
— Encore merci pour votre accueil, monsieur Yang, fit Chan en s'inclinant légèrement, invitant les autres à en faire de même.
— Mais de rien, c'est normal, voyons ! Ma chambre se trouve près de l'escalier, si besoin, sinon, il y a soit mon bureau au même étage, soit mon autre bureau au rez-de-chaussée. Passez une bonne nuit ! »
Et sur ces mots, chacun rentra dans sa chambre et en referma la porte.
Jeongin se jeta face contre le matelas du lit de gauche qu'il prit pour acquis, bien moins confortable que son ancien lit lorsqu'il habitait encore à Busan. Mais bon, il n'allait pas se plaindre, son oncle déjà été assez clément de les héberger sans les faire payer.
« Je vais prendre une douche, déclara Chan en prenant une pile de vêtements propres et une serviette posées soigneusement sur son lit.
Complètement lessivé, il réagit à peine à l'annonce du brun et lui fit signe de partir en ajoutant :
— Dac, vas-y, je me repose un peu !
— Bois de l'eau, c'est important, surtout après la journée qu'on a passée. Je fais vite. »
Le rose entendit la porte se refermer, puis se mit en position assise pour chercher des yeux l'eau en question. Et en effet, sur la table de nuit, deux bouteilles d'eau étaient posées de part et d'autre. Son oncle avait vraiment pensé à tout.
Il prit la bouteille la plus proche de son lit et en vida le quart d'une traite. Rien qu'avec de l'eau, il se sentit presque revigoré. Il sortit son cellulaire de sa poche, qu'il n'avait pas consulté depuis son dernier appel avec Mingyu lorsqu'il était encore à Séoul, et alluma l'écran : sept appels manqués de sa mère et vingt-quatre messages, quatre appels manqués de son père et quatorze messages, plusieurs autres notifications futiles, presque vingt-trois heures et une batterie à quarante-sept pourcents.
Mingyu avait prévenu ses parents une fois qu'ils étaient arrivés au temple, mais bon, ce n'est pas ça qui allait alléger sa future punition. Jeongin coula un regard vers la porte comme pour s'assurer que personne ne viendrait le déranger, et souffla un bon coup, avant d'appeler sa mère.
La tonalité ne sonna même pas deux fois qu'elle décrocha de suite :
« Jeongin ? Bon dieu, Jeongin, j'ai eu si peur !
— Jeongin, c'est toi ? Résonna la voix de son père également.
— Hey ! Trouva-t-il uniquement à dire.
Le ton de la voix de ses parents trahissait leur peur de l'avoir perdu. Des banalités furent échangées pendant peut-être dix minutes. Mais à présent l'inquiétude passée, place à la colère :
— Je croyais que tu en avais fini avec cette histoire d'exorcisme, Jeongin !
— Mes amis et moi étions en danger, je n'avais pas le choix ! Répéta-t-il pour la énième fois en perdant patience.
— Tu aurais pu tout simplement nous le dire plutôt qu'aller risquer ta vie–
— Vous dire quoi ? Que j'avais remonté le temps par le biais de mes potes parce que l'un d'eux était en danger de mort ? Évidemment que je vous l'ai dit, mais vous ne m'avez pas cru ! Ah pardon, vous ne pouvez pas vous en souvenir parce que c'était censé se passer à la fin du mois !
— Dans tous les cas, tu n'avais pas à jouer avec ta vie pour eux !
— Parce que vous pensez vraiment que j'ai fait tout ça uniquement pour eux ? Si c'est le cas, c'est vraiment mal me connaître !
— Une fois rentré, je t'interdis de les revoir ! Il est hors de question que tu recommences l'exorcisme !
— Je suis presque adulte, bordel ! Je traîne avec qui je veux, et si je veux encore les sauver en risquant ma peau, c'est mon problème, pas le vôtre !
— Jeongin, tu ne nous parles pas sur ce ton !
— Vous savez quoi ? J'en ai rien à cirer, allez juste vous faire foutre ! »
Il raccrocha son téléphone et le jeta avec colère contre le haut de son lit, le faisant rebondir avant de tomber au sol. Il sentait son sang bouillonner. Ses parents ne cherchaient même pas à le comprendre ! Ce n'était plus un enfant, il savait très bien se débrouiller tout seul, merde !
La porte s'ouvrit lentement une minute plus tard, et Chan apparut, le visage un peu soucieux.
« Tout va bien ? Fit-il en refermant la porte derrière lui. Je t'ai entendu, hum... crier...
Jeongin passa sa main sur son visage pour essayer de se calmer, secouant la tête pour faire partir chaque bribe de cette conversation téléphonique houleuse. Il ne s'était même pas rendu compte que ses voisins avaient potentiellement entendu toute la dispute, mais là, il n'en avait que faire.
— Ouais, ouais... une petite discussion avec mes parents qui a un peu dégénéré, mais ça va.
Il évita soigneusement le regard du brun, cherchant plutôt à récupérer son téléphone parti en expédition sous son lit.
— Va prendre une douche, ça te calmera un peu. Et on en parlera après, si tu veux.
— ... ouais. »
Le rose soupira en se levant avec ses affaires et sortit sans demander son reste. Dans la salle de bain, il semblerait qu'il ne fut pas le seul occupant puisqu'il pouvait entendre Jisung fredonner une mélodie dans l'une des cabines. Il se dirigea vers la cabine la plus lointaine de la sienne, et entama sa séance douche très rapidement. L'eau chaude vint détendre ses muscles crispés, le calmant peu à peu.
Il fit le vide dans son esprit, ne pensant qu'à l'unique bonne nouvelle de la journée : il avait sauvé Minho de la mort. Et peut-être pouvait-il considérer sa colocation temporaire avec Chan comme une petite bonne nouvelle également.
Il sortit de la douche vingt minutes plus tard, se rendant compte qu'il se trouvait désormais seul dans la salle de bain commune. Il revint rapidement dans sa chambre, vêtu d'un de ses anciens tee-shirts et d'un jogging qui trainaient sans doute dans ses affaires encore au temple.
« Ça va mieux ? Demanda Chan lorsqu'il referma la porte.
— Beaucoup mieux. Merci...
La voix de Jeongin s'était tût lorsqu'il avait tourné le regard vers son aîné pour la première fois depuis son échange mouvementé avec ses parents. Ce dernier portait un débardeur noir et un short, laissant bien en évidence ses bras bien musclés aux courbes apparentes.
— Tu veux en parler ?
Il sursauta presque en entendant la voix de Chan, et décida de s'allonger dans sa couette pour dissimuler ses rougeurs. Triturant ses doigts sous la couverture, il trouva le courage de marmonner :
— Mes parents ne veulent pas comprendre que j'ai fait tout ça pour vous, mais aussi pour moi.
Chan s'allongea dans son lit également, remontant la couette sur lui. On aurait pu le confondre avec un ourson en peluche géant tant il était adorable.
— Ils s'inquiètent juste pour toi, tu sais, répondit-il en haussant les épaules. C'est ça, les parents.
D'un accord commun, ils éteignirent les deux lampes qui éclairaient la pièce. Non seulement Jeongin cachera sans mal ses difficultés à lui en parler, mais en plus, il pourra plus facilement tomber dans les bras de Morphée.
— Je sais. Mais ils me reprochent sans cesse que je suis un enfant parce que j'ai replongé dans l'exorcisme... Même Tonton n'arrête pas de me le dire...
— Parce que tu étais censé avoir renoncé à ta première vocation, c'est ça ?
— Oui.
Un léger silence vint embaumer leur cœur. Seul le bruit régulier de la mer à quelques kilomètres du temple se faisait entendre de l'autre côté de l'unique fenêtre.
— Je pense au contraire que c'est ce qui fait de toi un adulte.
Le rose se repositionna plus confortablement pour faire face à Chan, bien qu'il ne le vît pas dans la pénombre.
— De quoi ? Replonger dans l'exorcisme ?
— Oui. Parce que tu as pratiqué, mais sous un regard nouveau. Tu as subi l'échec de ton examen, et aussi les nombreuses années de non-pratique pour avoir décidé de faire une croix dessus. Mais ce n'est pas pour autant que tu en as abusé, bien au contraire. Tu as dit avoir ignoré tous les signes liés à ça pendant des années alors que c'était sous ton nez depuis, et pourtant, ça ne t'a pas empêché d'aider Felix ou Seungmin quand ils étaient en pleine vision de temps en temps. Je le sais parce qu'on a dû établir de nombreuses théories avant qu'on ne t'en parle, et une de nos théories te concernait. Pour moi, c'est une preuve claire que tu es bien plus mature et adulte qu'il n'y parait. Désolé d'avoir dit le contraire hier, j'étais seulement un peu énervé, mais je ne peux pas nier le fait que tu es clairement plus mature que tu ne le laisses paraître.
— Oh...
Le silence de la nuit retomba. Et heureusement qu'il faisait noir, car Jeongin avait inconsciemment et silencieusement laissé des larmes couler en entendant les paroles du brun. Sa lèvre inférieure restait coincée sous ses dents pour empêcher tout sanglot de sortir. Il inspira fortement, et il ne sut comment, sa voix sonna extrêmement normale tellement il sut la contrôler :
— Merci. Ça fait vraiment du bien à entendre.
— Je sais plutôt que tu avais besoin de l'entendre.
De nouvelles larmes coulèrent le long de ses joues. Il se mordit encore plus l'intérieur de la joue, se contentant de hocher la tête, oubliant même que son aîné ne voyait rien de ses gestes.
— ... merci Chan...
— Je t'en prie. Bonne nuit, Jeonginnie.
— B-bonne nuit. »
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