1-La fête de départ
Un mois plus tôt.
J'AI MIS UNE ROBE POUR FAIRE PLAISIR À MA MÈRE. Après tout, c'est ma dernière soirée ici et je lui dois bien ça. Elle m'a soutenue quand papa a voulu m'empêcher de partir. Elle l'a sûrement fait pour se débarrasser de moi. Moi qui fais tache dans son petit monde parfait. Peu importe la raison, le résultat reste le même. Demain à la même heure, je serai loin d'ici. À l'Académie, au Territoire Sud... et cela grâce à ma mère. Je peux donc supporter ses caprices...
Une dernière fois.
J'avance vers ma commode, pour observer mon reflet. Dans le miroir, je vois une peau brune, de grands yeux marron et cette robe ridicule. Rouge et en dentelle, elle retombe sur mes genoux. Mon visage est entouré d'un halo de cheveux frisés qui descendent sur mes épaules. Je prends entre mes mains un collier peuplé de diamants pour l'attacher autour de mon cou. C'est ma mère qui me force à le porter. Avec ça, elle veut montrer qu'elle est puissante, qu'elle a de l'argent. Sa fille qui part pour le Sud se doit de faire un départ digne de son rang.
Mon rang, être la fille du Leader. Ici, je n'existe que pour porter ce rôle, mais demain tout sera différent. Demain, je serai comme tout le monde. Pour la dernière fois ce soir, je vais jouer mon rôle et être la petite fille parfaite.
Je me tourne vers les sandales à talons noirs qui reposent sur mon lit. Encore une idée de ma mère. Ils doivent faire au moins vingt centimètres, ces talons. Bon, peut-être pas autant, mais c'est hors de question que je les porte pour autant. La robe ça passe, le collier de diamants aussi, par contre les talons, ça, pas question. J'ouvre mon armoire pour ressortir une paire de baskets blanches. Je les enfile quand le bracelet argenté, accroché autour de mon poignet, s'illumine en rose. C'est Akan, j'ai reconnu sa couleur. À chaque appel, une lumière apparaît selon la personne. Le rose, c'est pour Akan, c'est sa couleur préférée.
J'appuie sur le bouton d'appel. Un écran hologramme bleu apparaît au-dessus de mon poignet, illuminant faiblement une partie de ma chambre. Des mots apparaissent sur mon écran. «Tu es où? Ne me laisse pas tout seul avec ces snobs». J'esquisse un sourire en lisant le message de mon ami. Il est déjà là. Ces mots sont écrits en majuscules. Il doit s'impatienter. Mes doigts glissent sur mon bracelet pour composer mon message. «J'arrive». Envoyer.
J'attache mes lacets et une seconde plus tard, le bracelet s'illumine de nouveau en rouge cette fois. La couleur de ma mère. J'ai choisi cette couleur pour elle, car lorsqu'elle m'appelle, elle est toujours en colère. J'ouvre le message. Un message vocal cette fois. «Descends tes fesses immédiatement, jeune fille.» Sa voix est aiguë et m'irrite les oreilles.
Je roule des yeux. C'était son idée d'organiser tout ça. Moi je ne voulais pas de fête de départ. Une petite soirée tranquille autour d'une pizza avec Akan m'aurait suffit, mais en tant que fille du Leader, mon départ doit être célébré en grand. Je sors de ma chambre et prends une grande respiration.
Que le spectacle commence.
J'avance dans le couloir et m'arrête devant les escaliers doubles qui font face au vestibule. J'emprunte la volée de droite pour descendre. Arrivée au pied des escaliers, je vois déjà une grande foule dans le salon. Tous ont un verre à la main. Je reconnais à peine les visages. Une énorme banderole est accrochée au-dessus de la porte d'entrée. En lettres majuscules et gras sont écrits les mots «Bon départ à Jameela» en dessous en minuscules sont écrits : « et les autres». Je pousse un long soupire. Une autre idée de ma mère. Je la vois de loin, au milieu de la foule. Elle porte une longue robe dorée qui balaie le sol.
Elle aime exposer sa fortune. C'est quelque chose qui me rend vraiment mal à l'aise. Je vais essayer de l'éviter ce soir, me contenter de sourire et faire semblant que je passe un bon moment. J'ai l'habitude depuis le temps. La seule chose qui me motive à continuer de jouer cette mascarade est le fait de savoir que demain je serai loin. Je n'aurais plus à porter ce masque.
Demain, je serai libre.
-Enfin, tu es là! s'exclame une voix en me tirant vers elle.
C'est Akan. Un petit maigrichon à la peau brune qui porte un pantalon rose, une chemise blanche avec un veston rose. Ses cheveux crépus sont colorés en rose. Il a la classe comme toujours.
-Jolie tenue, commenté-je.
Il fait un tour sur lui-même et fait mine de serrer sa cravate. Je remarque que ses ongles sont peints en rose aussi.
-Ce n'est pas tous les jours qu'une soirée est organisée en mon honneur, chérie.
Il marque une pause et regarde la banderole, à l'entrée.
-Enfin plus pour toi que moi, mais bon.
Akan fait partie des «autres» écrits sur la banderole.
-Je suis désolée, une idée de ma mère, soufflé-je.
Il m'examine de la tête aux pieds, me prenant la main pour m'obliger à faire un tour sur moi-même. Je ne peux pas m'empêcher de sourire.
-Sérieux, Jam, tu es trop canon. J'adore, les cheveux, la robe et les...
Il jette un coup d'œil à mes pieds et constate que je porte des baskets blanches.
-Ta mère va te tuer, lâche-t-il en plaquant sa main sur sa bouche.
J'esquisse un sourire.
-Non, il y a trop de monde, elle ne va pas risquer sa réputation.
Tout d'un coup, je sens des mains qui se posent autour de ma taille. Je sursaute et je me retourne. Wassa. Évidemment.
-Salut, princesse. Tu es magnifique ce soir.
Argh, encore ce surnom débile.
-Laisse-moi tranquille, dis-je en dégageant ses mains.
-Quoi? s'étonne-t-il. Je n'ai pas le droit de complimenter ma copine?
Je roule des yeux. Il sait très bien qu'on ne sort plus ensemble. J'ai rompu avec lui, il y a quelques mois, quand j'ai appris qu'il se servait de moi, pour obtenir le poste de Second du Leader à son père.
Il tourne la tête vers Akan et le dévisage.
-Akan, toujours aussi... coloré, commente-t-il.
-Toujours, chérie, lance Akan en claquant ses doigts. Et toi tu es toujours aussi...
Mon ami le toise à son tour de la tête aux pieds. Son regard s'attarde sur le piercing qui se trouve sur son sourcil droit, de ses doigts peuplés de bagues et de ses souliers noirs en cuir brillant.
-Toi, lâche-t-il.
Wassa sourit comme s'il faisait une grimace.
-Si par toi, tu veux dire parfait, alors on est bien d'accord, rétorque Wassa.
Mon ami roule des yeux et déclare:
-Je crois que c'est le moment où je m'éclipse vers le buffet.
Il tourne le dos pour partir vers la salle à manger. J'essaie d'attraper son bras pour le retenir, mais il est déjà loin.
Oh le traître!
-Enfin seuls, dire que je vais être obligé de supporter sa présence à l'Académie en plus de celle des Unions.
Je me retourne vers Wassa. Je dois avouer qu'il n'est plutôt pas mal ce soir avec son complet bleu et son nœud papillon. Je tourne la tête et vois quelques filles de notre âge qui le dévisagent en gloussant. Elles rêvent toutes de lui mettre le grappin dessus. Juste à voir comme elles le suivent partout à l'école. Il est grand et possède de larges épaules. Il est surtout le fils du Second du Leader. Le deuxième homme le plus puissant du Territoire Nord.
-Pourquoi tu n'irais pas draguer celles-là? lui-proposé-je en pointant les filles dans le salon. Je suis sûre que c'est ce qu'elles attendent.
-Peut-être, mais moi je ne regarde que toi.
Je fais une grimace, j'ai envie de vomir. Ce petit jeu ne marche plus avec moi.
-On dirait que tu ne réalises pas la chance que tu as, reprend-il.
Nous y voilà.
-Oui, j'ai beaucoup de chance qu'un prétentieux arrogant, qui croit être meilleur que tout le monde s'intéresse à moi, dis-je sur un ton ironique.
-Écoute, je me suis déjà excusé plusieurs fois pour ce qui s'était passé entre nous, c'était qu'un malentendu. Puis c'est faux, je ne crois pas être meilleur que tout le monde...
Il tourne la tête vers le petit miroir accrochée devant l'entrée pour observer son reflet. Il se fait un clin d'œil et ajoute:
-Je sais que je suis meilleur que tout le monde.
Je grimace encore une fois. Dire que je vais partir à l'Académie avec lui demain. Au moins il y aura aussi Akan avec nous.
Akan le traître.
Je le cherche du regard. Je n'arrive pas à le voir d'ici. Une autre main sur ma taille me fait sursauter.
-Wassa, si tu n'enlèves pas ta main tout de suite...
Je n'ai pas le temps de finir ma phrase que ma mère arrive devant nous. Elle est vraiment splendide dans sa robe dorée et je sais qu'elle le sait.
-Bonsoir Wassa, tu passes une agréable soirée? demande-t-elle.
-Oui merci, Première Dame, cette soirée est magnifique.
Ma mère sourit, mais son sourire est trop forcé. On voit toutes ses dents.
-Tu peux me laisser une minute avec Jameela.
Ce n'était pas vraiment une question, mais plutôt un ordre.
-Bien sûr, Première Dame, lâche Wassa en faisant une petite révérence.
Je grimace. J'ai l'habitude depuis le temps, mais ça me met toujours mal à l'aise quand les gens s'adressent à mes parents en leur faisant une révérence. Dès que le grand brun s'éloigne, le sourire de ma mère disparaît.
-Je peux savoir où sont passés les souliers que je t'avais choisis? demande-t-elle d'un ton dur.
-J'ai préféré mettre mes baskets, elles sont plus confortables, dis-je en haussant les épaules.
Elle fronce les sourcils, mais ne rajoute rien. J'avais raison. Il y a trop de monde autour de nous pour qu'elle fasse une scène. Elle doit faire bonne figure. Elle doit être parfaite.
-Bien, les membres de l'Élite sont là, tu vas les saluer et les remercier d'être venus à ta soirée.
-Tu veux dire ta soirée, corrigé-je tout bas.
Mais elle m'a entendu. Merde. Elle fronce les sourcils, une seconde fois.
-C'est juste que je me demande pourquoi je dois aller leur parler. Akan et Wassa partent aussi demain à l'Académie et ils ne font pas ça eux.
-Ils ne sont pas les enfants du Leader, eux, toi oui, grince-t-elle entre ses dents.
-C'est bon, j'y vais, me résigné-je.
Je me dirige vers le grand salon, là où les personnes portent de grandes tenues de soirées. Tout le monde a sorti ses plus beaux habits, ce soir. Après tout, on ne vient pas vêtu n'importe comment lorsqu'on est invité au Manoir du Leader. La seule chose qu'ils ont sensiblement en commun est la couleur de leur peau. Une variation de teint compris entre un brun léger et un noir foncé. Il n'y a pas une grande diversité de teintes, aucun mélange malgré l'Alliance. C'est la deuxième raison pour laquelle j'ai hâte de partir pour l'Académie demain. Je veux me mélanger aux Unions, je veux les rencontrer, enfin. Mon désir de partir est surtout lié à mon envie de me faire traiter comme une fille normale. Sans étiquette, sans mon rang de fille du Leader.
Le salon est éclairé par un magnifique lustre en cristal suspendu au plafond. Le plancher, en bois, brille tellement qu'il serait possible d'y manger par-dessus. Tout est si chic et élégant... et ça me rend mal à l'aise quand je sais d'où provient l'argent qui a permis de construire tout ça. Quand je me confie à papa, il me répond que ça n'a pas toujours été comme cela, qu'avant la Guerre des Races, les Afro-Dex pouvaient à peine se nourrir. C'est comme ça qu'on s'appelle maintenant, les Afro-descendant du Monde d'Avant.
Je passe une bonne vingtaine de minutes à serrer les mains des membres de l'Élite et de leur famille. L'Élite est formée par dix membres, hommes et femmes confondus, qui représentent le gouvernement des Afro-Dex. Ils me souhaitent tous bonnes chances pour demain. Ils me disent de faire attention et d'être prudente. Certains d'entre eux me prennent même dans leur bras. Non, mais c'est bon sérieux. Ce n'est pas comme si je partais en guerre. Je vais juste à l'Académie et elle ne se trouve pas à l'autre bout du monde non plus, juste de l'autre côté du pont.
J'avance devant la famille du dernier membre. Le père de Wassa. Le Second de mon père. Il se tient au côté de sa femme et de son fils. En me voyant arriver, Wassa s'avance vers moi, mais son père le retient par l'épaule.
-Maître Kros.
Il m'attrape la main. C'est un grand homme, aussi costaud que mon père. Il ressemble à son fils, en plus imposant.
-J'espère que ton séjour à l'Académie va bien se passer, commence-t-il. J'espère que tu ne rencontreras aucun problème.
-Je ne vois pas pourquoi j'en rencontrerais, sifflé-je en m'efforçant de sourire.
J'essaie de retirer ma main de la sienne, mais il me la serre un peu trop fort.
-Vous êtes bien naïve, mon enfant.
Naïve? Je ne comprends pas pourquoi il dit ça. Je me contente de sourire. J'ai l'habitude de faire semblant.
-N'oublie pas, même si tu vas fréquenter ces gens, qu'ils ne sont pas comme toi, car nous valons mieux qu'eux. Les Unions ne sont que de la vermine. Ce n'est pas parce qu'on se met à les fréquenter qu'on doit forcément devenir de la vermine nous-mêmes. N'est-ce pas?
Au ton de sa voix, ça ne ressemble pas à une question, mais à une affirmation. Aussi arrogant que son fils, je vois. Maintenant je sais d'où Wassa tient tout son mépris pour les Autres. Je hoche la tête en m'efforçant de garder le sourire.
-Heureusement, mon fils sera là pour veiller sur toi, ajoute Maître Kros en donnant une grosse tape sur le dos de Wassa.
Je m'apprête à répliquer que je n'ai besoin de personne pour veiller sur moi, mais je me rends compte que si je fais ça, il va surement répliquer quelque chose d'autre. Et cela risquerait de prolonger encore plus notre conversation. Je me contente de sourire. Je suis devenue douée pour faire semblant.
-Veuillez m'excuser, dis-je en réussissant à dégager ma main de la sienne. Je vais aller prendre quelque chose au buffet.
Je salue Wassa d'un signe de tête et embrasse sa mère, une dame au long cou vêtu d'une longue robe noire.
Je rebrousse chemin et prends la direction de la salle à manger en poussant la porte qui la sépare du salon. Tout de suite, mes yeux se posent sur l'immense table remplie de nourriture. Une odeur de viande grillée traverse mes narines et je sens mon ventre gargouiller. Je dois l'avouer les cuisiniers ont frappé fort cette fois. Ils ont préparé un vrai festin ce soir puisque la table comporte plusieurs plats. Il y a du poulet rôti, des côtelettes de porc, des pâtes, des gâteaux fourrés au chocolat, des petits sandwichs de tout genre.
Avant c'était maman qui cuisinait, mais depuis qu'elle est devenue la Première Dame, elle n'a plus de temps pour ça. Exhiber son argent aux yeux du monde lui demande beaucoup d'énergie. Je me souviens d'une époque où elle n'en n'avait rien à faire des apparences. Une époque où elle se contentait d'être ma mère. Désormais, son rôle de Première Dame est tout ce qui l'intéresse.
Autour de la table, il y a plusieurs personnes avec une assiette dans les mains. J'y trouve Akan qui se tient près d'un plateau de sandwich.
-C'est gentil de m'avoir laissé avec toute cette bande de snobs, dis-je en arrivant près de lui.
Il se tourne vers moi avec une assiette à la main . La bouche pleine de nourriture, il prend un moment pour avaler avant de répondre.
-Ce n'est pas tous les jours que je peux manger les plats des meilleurs cuisiniers du Territoire, répond-il en croquant dans une côte de porc. Et puis, je n'avais pas envie de me trouver mêler dans vos petits délires de bourges.
-Hey ne me traite pas de bourge, m'offusqué-je.
Je déteste quand il emploie ce mot pour me décrire.
-C'est ce que tu es, Jam, mais je t'aime pareil.
-Dis celui qui porte un ensemble complet.
-Oui, ben, je te signale que ce costume, je l'ai loué et si je le tache, ça va me coûter trois-cents Hitchie.
Je m'apprête à répondre, mais deux filles s'approchent de nous. La première est beaucoup plus âgée, alors que la deuxième semble avoir mon âge.
-Jameela, tu es très jolie dans cette robe, me complimente la plus vieille.
-Oui, vraiment très jolie, répète la plus jeune.
-Merci, réponds-je en souriant. Vous êtes très jolie vous aussi.
Je m'attends à ce qu'elles partent, mais elles restent plantées là devant nous.
-Je peux vous aider?
-En fait oui, puisque tu le proposes, tu peux faire quelque chose pour nous, s'empresse de dire la plus vieille.
Elle passe ses bras autour de mes épaules.
-J'ai entendu dire que l'Élite cherchait une nouvelle secrétaire de liaison.
Je ne sais même pas ce qu'est une secrétaire de liaison.
-Euh, je ne sais pas, peut-être, bredouillé-je.
-Oui, tu sais, j'ai assez d'expérience pour remplir ce rôle.
-Eh bien, c'est à eux qu'il faut dire ça.
-Mais t'as vu tous les membres sont occupés ce soir. Je me suis dit que tu pourrais glisser un mot à ton père puisque c'est le Leader de l'Élite.
Et merde, ça recommence.
-Écoutez, madame...
Je ne connais même pas son nom.
-Madame Tinda, je suis la mère de Malia.
Elle pointe la plus jeune fille. Maintenant sa face me dit quelque chose. Je crois qu'elle est dans ma classe à l'école.
-Vous êtes dans la même classe. Ça veut dire que vous êtes pratiquement amies, non? continue Tinda.
Pas du tout.
-Euh...
-Donc je me suis dit puisque vous êtes amies, tu pourrais faire ça pour la mère de ta copine.
Ce n'est pas ma copine.
-Je...
-Elle va le faire, ajoute Akan en venant s'interposer entre nous. Merci bonne soirée. Au revoir.
Madame Tinda et Malia me regardent une dernière fois et sourient à pleines dents avant de retourner vers le salon.
-Ça va? me demande mon ami quand elles sont enfin loin.
-Je ne sais pas pourquoi je suis surprise à chaque fois. Je devrais être habituée à ce que les gens s'intéressent à moi à cause de papa.
-Jam, tu sais que ce n'est pas mon cas.
-Oui et tu es bien le seul. Au moins, à l'Académie, personne ne saura qui je suis. Ce sera différent. Je ne serai plus le centre de l'attention. Je pourrai enfin être comme tout le monde.
Akan et moi sommes amis depuis nos cinq ans. Il était le seul à vouloir traîner avec moi, avant l'élection de papa. Quand il est devenu le Leader, il y a six ans, les gens ont commencé à s'intéresser à moi, plus qu'à l'habitude. Depuis mes dix ans, j'ai eu le droit à des «Salut, Jameela, comment ça va et au fait tu ne pourrais pas demander un truc à ton père pour moi», ou à des «Hey Jameela belle journée non, je fais un barbecue ce soir, tu devrais dire à ton père de passer chez moi». J'ai vraiment hâte de me casser de cet endroit.
-Tiens mange, dit-il en me proposant un bout de sandwich au poulet.
Je le prends et croque dedans. Heureusement que mon meilleur ami vient avec moi à l'Académie sinon, je ne sais pas si je serai aussi excité d'y aller.
-Ah merde, ta mère arrive derrière toi, me souffle Akan à oreille.
Je fais volte-face.
-Première Dame, dit Akan en faisant une révérence à ma mère.
-Oui, oui, bonsoir Adan.
-C'est Akan, avec un k, corrige mon ami.
Maman fronce les sourcils en le fixant. Elle est devenue experte dans ça.
-Adan c'est... c'est bien aussi, se presse d'ajouter mon ami avant d'enfiler une autre bouchée de sandwich dans sa bouche.
Je pince les lèvres. Ma mère est la seule personne qui arrive à déstabiliser Akan. Il y a six ans, elle se serait souvenue de son nom. Il a passé presque toute son enfance à dormir à la maison. Mais depuis que papa est devenu Leader, elle n'a plus de temps à perdre à se souvenir des noms de mes amis, enfin de mon seul véritable ami.
-Est-ce que tu as vu ton père? m'interroge-t-elle.
Maintenant qu'elle le fait remarquer, c'est vrai que je n'ai pas vu papa de toute la soirée. J'étais trop occupée à parler avec les membres de l'Élite.
-Non, pas depuis ce soir.
-Les membres de son gouvernement d'Élite sont là et il ne prend même pas une minute de son temps pour les voir. Mais qu'est-ce que vont penser les gens?
-Pour sa défense, il les voit tous les jours au bureau donc...
Encore un froncement de sourcils.
-Il est peut-être dehors, proposé-je. Tu as regardé?
-Oui, bien sûr Jameela, comme si j'allais sortir me balader dans la rue avec des souliers à trois mille Hitchie.
Je baisse les yeux sur ses pieds. Elle porte des souliers à talons de couleurs dorés qui s'assortissent parfaitement avec sa robe. Je tourne la tête vers Akan pour avoir un peu de soutien, mais sa tête est rivée au sol, sûrement trop intimidé par ma mère. C'est la Première Dame.
-Je vais aller voir dehors, marmonné-je.
-Merci, en tout cas si tu le trouves, sois gentille avec lui. Il n'est toujours pas d'accord avec le fait que tu partes demain.
-Quoi? m'étonné-je. On en est encore là? Je pensais qu'on avait déjà réglé tout ça.
-Tu connais ton père, souffle-t-elle.
Elle s'enfonce ensuite dans la cuisine pour aller rejoindre d'autres personnes importantes j'imagine. Je ne connais pas plus de la moitié des gens.
-Je reviens, dis-je à mon ami.
Il ne me répond pas et enfile une autre bouchée de sandwich.
Je traverse le salon en faisant de mon mieux pour ne pas trop croiser les gens qui veulent me parler. Le truc c'est de ne pas avoir de contact visuel avec eux et de faire semblant d'être pressé. J'ai appris à jouer ce rôle, à faire semblant, à la seconde où papa est devenu le Leader de L'Élite. Il m'a condamnée à cette prison remplie d'or et d'argent, mais demain je serai libre. Demain, j'aurai une chance d'être comme tout le monde. Demain je ne serai plus seulement LA FILLE DU LEADER.
Salut alors voici le premier chapitre. Comment trouvez-vous Jameela? L'univers? J'attends de vos nouvelles. Merci aux lecteurs.😘
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