Il est sept heures quand je me rends compte que mon alarme n'a pas sonné. Super.
Je me lève en quatrième vitesse, brosse mes dents et enfile les premières fringues qui me tombent sous la main.
Je prends mon scoot et démarre. Une demi-heure de trajet que je vais essayer de réduire un peu. Ça bouchonne. J'ai la haine.
Finalement j'arrive devant la grille du lycée après avoir garer mon scoot à la rache. J'espère que les flics ne passeront pas aujourd'hui.
Je cours jusqu'à la salle de mon premier cours et arrive in extremis. Je m'assois à côté de Yasmine et Lisa, mon trinôme du TP de chimie. Le prof distribue ce qu'on doit faire pendant la séance. Je relis les consignes trois fois. Ça me soule. J'ai vraiment envie de tout sauf de faire de la physique-chimie à huit heures du matin. Yasmine prend les rennes du TP, ce qui m'arrange. Elle me donne les étapes à suivre et je m'applique à faire du mieux que je peux.
Quand la sonnerie retentit, je me sens libéré d'un poids. Enfin, le premier de la journée seulement. Le contrôle de maths qui m'attend après l'heure d'anglais promet d'être une sacrée galère.
Je sors du lycée et vais vers Kylian. Il me fait un clin d'œil et ouvre sa sacoche.

-Comme d'hab ?
-Comme d'hab.

Je lui sors un billet et il me tend un sachet de beuh. Je me mets à côté de lui et sors mes feuilles. Je roule le tout rapidement et tire une longue taff.

-Le contrôle passera mieux.
-Le contrôle passera pas. Je me souviens de rien.
-J'ai préparé des antisèches. T'en veux ?
-Tu deal vraiment de tout.
-Je te ferai un prix d'ami pour ça.

Je rigole. En regardant mon portable, je me rends compte qu'il ne me reste plus beaucoup de temps pour finir mon join. Je termine et range tout le reste dans mon sac.
J'arrive en cours d'anglais et retrouve ma place. Je croise le regard d'Anna, ma voisine et lui sourit. Ses grands yeux bleus... ça fait des années que je les admire. Je suis fou amoureux d'elle.
On était ensemble en quatrième. J'étais un petit con et elle était l'intello. Mais elle me plaisait. En fait, c'est d'abord ses yeux que j'ai vu. Puis, elle m'a fascinée. Et maintenant qu'elle m'adresse la parole, je sais que ce n'est pas que physique. Si j'étais moins con, je travaillerais en cours, j'arrêterais de fumer du cannabis et je lui demanderais d'être ma copine. Mais je suis un con. Alors, je la regarde être beaucoup trop bien pour moi sans rien faire.
Je comprends rien. Il faut dire que j'ai plus trop les idées claires. Elle essaie de m'aider mais je préfère la matter que de prêter attention à ce qu'elle me dit. Je suis un minable.
Quand le cour se finît, je me dis qu'une fois de plus, j'ai gâché une opportunité avec la fille que j'aime en secret depuis des années. Je soupire en rangeant mes affaires et je me dirige vers la salle de maths.
Je m'installe à côté de June qui me lance un regard de détresse. En voilà une qui angoisse. J'aimerais m'en faire autant mais je crois que je me suis fait à l'idée d'être un tocard. La prof distribue les sujets et je tente tant bien que mal de me concentrer.
Il commence à y avoir de l'agitation dans les couloirs. J'entends des cris. La prof regarde ce qu'il se passe.

-Putain...

Puis les cris font place à des coups de feux. On va crever. Merde. Mais qui est assez fou pour venir attaquer ce lycée ?

-Gardez votre calme, ordonne la prof.
-Moi, je me casse ! Chacun pour soi !, crie Kylian en courant vers la porte.
-Arrête !, tente la prof.

Il n'est pas le seul à sortir. Je le suis. Mais nous finissons tous par nous éparpiller. J'entends des pas rapides derrière moi. Je cours le plus vite que je peux.
Un coup de feu. Je m'écroule au sol. Ma jambe.

-Putain !

Je touche ma jambe ensanglantée. Encore un coup de feu. Mon dos. Merde, il m'a visé. Il m'a eu. Merde, merde, merde ! Je veux pas crever ! Je me retrouve allongé sur le ventre, haletant. Je lutte pour ne pas fermer les yeux. Je n'ai même pas vu qui m'a fait ça.
J'entends des bruits sourds, la lumière devient plus vive, puis c'est le noir.
J'ouvre les yeux, tout est blanc.

-C'est le paradis..., je murmure.

Je tourne la tête, des machines. Ce n'est pas le paradis, c'est l'hôpital. J'ai de la chance, je m'en suis sorti. Ce batard n'aura pas réussi à me tuer. Enfin du moins, pas tout de suite.