Chapitre III : 5. Comme à la maison
De l'enfance de Veyn et de Rune, à l'entrée à l'académie des gardiens.
Depuis la série d'enlèvements quarante et un an plus tôt, Kadann devint gardien et épousa Isolde, une gardienne, avec laquelle il eut deux enfants nés à quelques minutes de différence en plein hiver. D'abord Rune vint au monde, ensuite Veyn. Les lendemains s'annonçaient très difficiles, mais ce matin, ils étaient tous réunis à la maison pour le premier repas de la journée. Les enfants étaient à une nuit de leurs onzièmes anniversaires.
Kadann mangeait des fruits, des raisins et une pomme, et du fromage dans une assiette en fer, en expliquant à ses enfants ce qui allait se passer à mesure qu'ils grandissaient.
- Votre noblesse, qui vous vient de votre grand-père, n'aura pas d'importance. Lorsque vous aurez onze anniversaires, d'abord vous suivrez une formation intellectuelle et spirituelle pendant un an auprès des prêtresses. Ensuite, vous serez envoyés à l'académie d'où les vétérans vous apprendront les bases du maniement des armes et où vous suivrez un entraînement physique pendant une seconde année. Votre troisième année d'entraînement consistera à parfaire vos aptitudes guerrières. Là, seulement, vous passerez un examen pour vérifier vos compétences et si vous réussissez, vous deviendrez des apprentis.
- Lorsque vous aurez au minimum seize ans et que vous aurez validé votre examen, vous deviendrez des gardiens, résuma Isolde.
C'était là le destin que les parents réservaient à leurs enfants, Rune et Veyn.
La première flamboyait d'impatience à l'instar de sa chevelure auburn, elle rêvait de devenir le parangon de Ménéliel et de guider les gardiens contre les maudits. Les deux jades qui luisaient dans ses orbites racontaient ô combien elle était déterminée et admirative de ses parents.
Le second était aventureux et casse-cou, et à force de se mettre en danger, il avait perdu deux dents, une canine et une incisive et ses genoux et ses coudes étaient couverts de cicatrices. Lui, ne l'avouait pas par crainte de finir écarteler par les instruments de torture des inquisiteurs, mais il rêvait de sortir des murs et de maîtriser la magie. Beaucoup plus distrait par ses pensées et idéaliste, son sourire benêt renforçait son air simplet. S'il était effectivement trop gentil d'après sa mère, Veyn n'en était pas moins astucieux et doté d'un fort caractère malgré les apparences.
Isolde piqua un quartier de pomme à son époux et croqua un morceau dans la chair puis, elle enfila ses bottes en cuir et les sangla.
- Aujourd'hui, c'est votre dernière journée de libre, avant de vous engager. Alors, profitez-en.
La femme fit tinter les pièces dans une petite bourse, la glissa sur la table vers Rune et expliqua avec un sourire chaleureux.
- Il y a vingt cornélius de fer dedans, c'est pour vous. Vous voulez des bonbons, des vêtements, autre chose ? Dépensez sans compter mes enfants.
Rune poussa une mèche de cheveux dérangeante derrière son oreille et attacha solidement la bourse à sa ceinture avec une ficelle.
Veyn râlait.
- Pourquoi c'est toi qui prends les pièces ? Pourquoi ce n'est pas moi ? Tu vas tout dépenser en oreilles de gobgob caramélisées !
- Déjà, c'est trop savoureux les oreilles de gobgob, et en plus moi quand j'avais ton âge, je ne gérais pas les pièces, rétorqua narquoisement Rune, en provoquant son frère.
- Quand tu avais mon âge, c'était il y a dix minutes, pesta-t-il.
Kadann se leva pour intervenir, mais Isolde prit la parole avant qu'il en eût le temps.
- Va enfiler ton armure, je m'occupe d'eux.
Ce dernier quitta la pièce en laissant son assiette et les couverts sur la table, alla dans sa chambre et enfila un gambison bleu, une cotte de mailles et le tabard rouge sur lequel était cousu un soleil jaune. Il attacha son fourreau en cuir à sa ceinture et y rangea son épée longue. A son dos, il portait une arbalète qui tenait avec une lanière qui passait par son épaule gauche et quelques carreaux dans un carquois.
Quant à Isolde, elle avait repris la bourse à Rune et avait séparé la monnaie en dix cornélius de fer pour Veyn et dix autres pour Rune, répartis équitablement. Cela éviterait aux enfants de se chamailler plus longtemps.
Comme ils avaient mangé tous ensemble, ils sortirent tous ensemble de la maison et Kadann verrouilla la porte d'entrée.
- Et ne montrez pas trop vos cornélius, soyez discrets, vous savez bien que les cornélius se font rares et que certains sont prêts à, on-ne-sait quelles atrocités, pour quelques pièces, avertissa-t-il ses enfants de la cupidité de l'homme.
- Je promets !
- Moi aussi !
Répondirent Veyn et Rune. Ensuite, les parents marchèrent vers l'est jusqu'aux murailles et ils accomplirent leur mission sans rentrer avant le coucher du soleil.
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