Chapitre 50
Bonsoir les amis ! ^-^
Voici la suite de Vermilion ! Je vous conseille fortement de mettre la musique en boucle pendant votre lecture, c'est la musique que j'ai écoutée en écrivant. Elle est parfaite pour le chapitre !
Bonne lecture ~ ♥
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Quand je me réveillais, avant, c'était le soleil que je sentais sur ma peau.
Les rayons chauds, ou le vent froid de l'hiver. En tout cas, le noir de la pièce, qui tombait sur mes paupières, le bruit sourd du silence, de mes oreilles qui bourdonnaient, de mes baillements, de mes étirements. J'entendais surtout madame, en bas, crier mon nom, ou bien, plus tard, Jungkook bouger dans le lit.
Aujourd'hui, il ne bougeait pas.
Pourtant, j'entendais tout. Absolument tout.
Son coeur, d'abord. Il battait avec lenteur, endormi autant que lui, alors, doucement, il faisait vivre mon vampire sans le réveiller. Je pouvais, si je me concentrais, sentir les frissons sur sa peau. Le chatouillement de ses mèches sur son nez. Ses inspirations, ses expirations, qui ne pouvaient être entendues par un humain sans capacité.
J'étais dos à lui, mais j'entendais tout.
Mais, surtout, je pouvais ressentir le sang qui ruisselait dans ses veines. Qui alimentait son coeur, pour repartir de plus belle. Je pouvais en déceler les tours dans ses canaux organiques, la vitesse de son mouvement, sa tiédeur, ou brûlure, presque son parfum.
J'entrouvris les yeux, enfin, et tombai sur le plus beau visage qu'il m'ait été donné de voir.
Si jusque-là j'avais cru l'aimer, aujourd'hui, l'aimer est bien futile face à ce que je comprenais ressentir depuis le début. Mes livres, ma faible connaissance de l'amour m'a fait croire qu'aimer était le mot juste. Parce que j'avais eu besoin de mettre un mot sur les choses. Je crois que c'est notre problème à nous, humains.
Ce besoin récurrent de catégoriser, de se catégoriser.
Je glissai une main dans ses cheveux, et ma peau picota quand je frôlai celle de sa tempe. Sa bouche entrouverte me ravit à la simple idée qu'il respirait. Rien d'autre ne me comblait davantage que de le voir en vie.
Mon pouce survola l'os de sa pommette.
Jungkook, pour moi, n'était ni humain, ni vampire. Peut-être que, dans le fond, tout au fond, il n'était ni homme ni femme. Ces mots-là venaient des livres. Les livres venaient des humains. L'invention ne m'intéressait plus, ce matin. Hier encore j'aimais dire c'est l'homme que j'aime.
C'est l'homme que j'aime. Tant de construction sociale en si peu de mots.
Jungkook n'est pas l'homme que j'aime.
Il est la raison pour laquelle je me battrai corps et âme afin de le voir sourire. Quitte à y laisser mon humanité. Mon vampirisme. Ma raison. Ma vie. Tant de futiles idées comparé à ce qu'il représentait à mes yeux.
Je n'avais qu'une dévotion, et elle était pour lui. Qu'une seule abnégation. Le voir en vie.
Non pas que la mort me fasse si peur. Elle ne me semblait soudainement qu'une étape logique. Mais je ne sais pas en quoi elle consistait exactement. Si ce sont nos âmes qui cohabitent, alors je pousserais la vie au plus loin pour continuer de profiter de nos corps. Je n'étais pas prêt à ce que nos enveloppes disparaissent. Pourtant, la mort me semblait douce, aussi.
Mais l'heure n'avait pas sonné.
Je délaissai son visage pour lever la main vers le ciel en me tournant sur le dos. Je l'observai, curieux, car elle me paraissait bien différente. J'en voyais plus de pores, de mouvements à la seconde, d'images, de qualité, de profondeur.
Une autre apparut dans mon champ de vision et cinq doigts se croisèrent avec les miens. Je soupirai.
"Bonjour." Murmura la voix qui faisait plus fortement battre mon cœur.
Je le regardai. Il avait les yeux à demi ouverts, qui ne me lâchaient plus. J'entendis son coeur s'éveiller à mesure que ses paupières me laissaient voir ses pupilles.
Noires. Mes préférées.
"Bonjour." Répondis-je dans un souffle.
Nos mains, toujours jointes, tombèrent sans brusquerie contre mon torse.
"Ça fait mal." Chuchotai-je.
Il sourit doucement.
"Tu me comprends, maintenant."
Je hochai la tête.
Chérir si fort. Ça fait mal.
Parce qu'il m'était impossible de lui garantir une véritable sécurité en ce moment. Mon coeur en hurlait déjà. Mon amour ne s'est pas décuplé depuis la morsure, il a seulement pris possession intégrale de mon existence.
Je comprenais son besoin de m'enfermer, de m'enchaîner, de me cacher.
C'était pour ça. Ses mots.
L'amour n'est qu'une connerie inutile.
Ca l'était, dans la mesure où j'arrivais à en faire abstraction, avant. Maintenant, je ne pouvais plus.
Une larme roula sur ma joue. Jungkook la récupéra du pouce.
"On s'y habitue, au bout d'un moment. Mais ça fera toujours mal.
-Toujours... ?
-Sauf si l'avenir s'ouvre sur la paix."
Je pressai davantage sa main dans la mienne.
Mes sanglots me brûlaient la gorge, mais je restai calme. Jungkook m'observait pleurer silencieusement, et je fus heureux de voir qu'il comprenait. Qu'il savait exactement ce que je ressentais. Je pouvais le voir, dans ses yeux.
"Est-ce que je t'ai d-déjà dit que tu es la raison pour laquelle mon existence me semble avoir du sens ?"
Il sourit.
"Je suis là, Tae.
-J'ai peur. Ça fera tellement mal, tellement, tellement mal si tu disparais.
-Je t'ai dit que j'ai décidé de me battre. Je suis fort.
-L'es-tu plus que Jin ?
-Je pense qu'il y a une chance, mais il faudra beaucoup pour la réaliser."
Je l'interrogeai du regard. Il caressa longuement mes cheveux.
"Du soutien. Des alliés. De l'entraînement. De la dévotion pour la paix."
Je baissai les yeux. Il s'approcha et posa une main sur ma nuque.
"Tu es beau, Taehyung."
L'emploi de mon nom entier me fit redresser le regard. Nos lèvres entrèrent en contact. Il les scella. Je gémis de plaisir. Son pouce imita mon geste de plus tôt et flatta ma joue, tandis qu'avec douceur, il repoussa les couvertures pour grimper sur moi, et me surplomber.
Mais son regard se figea.
Je fronçai les sourcils.
"Jungkook ?"
Il se redressa lentement, très lentement, jusqu'à s'asseoir sur mon bassin.
Quand je compris, je secouai immédiatement la tête et levai mes bras vers lui, mais il les attrapa au vol et les tint d'une seule main, vers le ciel, pour découvrir mon torse nu.
"...Qu'est-ce que-"
Ses yeux qui, petit-à-petit, s'écarquillèrent, parcoururent tout. Mes morsures, mes griffures, mes entailles, mes bleus.
"Attends, n-ne te blâme pas, Jungkook, écoute-m-
-Oh mon Dieu."
Lentement, il me lâcha, et se leva du lit. Je m'assis sur ce dernier et me couvris de la couverture, tandis qu'il reculait avec lenteur en fixant mon corps couvert des draps. Son dos s'échoua contre le mur opposé.
"Jungkook, écoute-moi ! Je savais à quoi m'attendre, tu as dit-
-Il faut que je meurs."
Mon coeur cessa de battre.
Ses yeux étaient véritablement horrifiés. Je ne l'avais jamais vu ainsi, pas même pour la trahison de Jin. Je me levai pour l'approcher ; erreur. Laisser tomber la couverture derrière moi révéla mon corps nu, donc mes jambes qu'il n'avait pas vu. Je m'exposai à la lumière comme un imbécile, et Jungkook eut une vue sans pareille sur les dégâts.
Puis, rompant définitivement le dernier fil que je croyais tenir avant la tempête, elle éclata.
Jungkook planta ses dents dans son poignet et s'infligea une morsure de douleur.
"Jungkook !!!"
Il hurla malgré sa bouche étouffée contre sa peau et mes larmes dévalèrent avec violence. Je courus jusqu'à lui et attrapai son bras. Il avait les yeux clos avec force, et continuait de crier d'agonie sans cesser son auto-punition.
"Arrête ! Arrête !!!"
Je tirai sur son bras, rien à faire. Il tomba au sol, sur les genoux.
"Si tu n'arrêtes pas je- je me la ferais aussi !"
Je le menaçai en levant mon poignet devant mes lèvres. Il rouvrit les yeux et se figea. Il sembla cesser de boire, mais n'ôta pas ses canines de sa peau.
"Je le ferai." Répétai-je sombrement malgré ma voix tremblante.
Mon souffle se coupa lorsque je vis deux larmes jumelles rouler sur ses pommettes. Il laissa mollement son bras retomber, puis... Puis il pleura. Vraiment. Il pleura en reniflant, en gémissant un peu, en sursautant lorsqu'un gros sanglot explosa. Ce n'était pas comme un enfant qui pleure. Ce n'était pas silencieux non plus. C'était affreusement intime. Le genre d'état que l'on s'autorise en tête à tête avec nous-même, quand l'on est à bout, mais qu'il y a quelqu'un dans une autre pièce qui peut nous entendre.
Je me mis à genoux devant lui, tandis que ses yeux continuaient de fixer mon corps. Il pleurait avec une étrange douceur, mais aucune régularité. Ses yeux grands ouverts devinrent rouges, gonflés, tandis que son propre sang s'échappait en un petit filet au coin de ses lèvres.
"Jungkook... Je suis désolé, je n'aurais pas dû, pour les yeux blancs, je n'aurais p-pas dû... Je ne pensais pas que ça te ferait si mal, pardonne-moi..."
Je me collai contre lui. Il ne me rendit pas mon étreinte, toujours légèrement secoué. Un gémissement passa la barrière de ses lèvres et je crus mourir de douleur.
"Je l'ai voulu. Jungkook, je l'ai voulu.
-Je me s-souviens de tout. Tout me r-revient, tu as eu peur.
-Non. J'étais surpris, chamboulé, mais je n'ai pas eu peur. Je savais que tu ne me ferais pas de mal.
-Regarde-toi... Sanglota-t-il.
-Je n'ai pas eu mal. Enfin, pas à la fin. Je m-me suis laissé aller et c'était bon. Même les entailles. C'était vraiment bon. Je me sentais possédé. J'aimais ça, je te le promets."
J'embrassai son oreille.
"J'étais au paradis, Kook. Si c'était à refaire, je le referais sans hésiter. Dix fois, cent fois. J'ai tout aimé."
Mais je m'en voulais. J'avais la soudaine impression d'avoir été égoïste. Il m'avait mis en garde plusieurs fois, il avait eu peur de me faire du mal. Et même si je le convainquais que j'avais aimé, Jungkook ne devait pas supporter la vision de mon corps.
Je reculai doucement. Il ne pleurait plus, mais ses joues étaient mouillées, et son regard vide me transperçait.
J'attrapai son poignet et mon coeur se serra. Il venait de s'infliger une morsure de douleur. Probablement la même que Yoongi. Il venait de se punir en ravivant son traumatisme.
C'était à ce point-là qu'il s'en voulait. Alors je m'en voulais d'avoir insisté.
Une idée germa dans mon esprit. Jungkook se laissa faire comme une poupée quand je redressai son bras jusqu'à mes lèvres. Mes dents poussèrent si vite que j'en fus surpris.
Il gémit quand je remplaçai ses canines par les miennes.
Ses pleurs revinrent un peu, mais il ne m'empêcha pas. Je clos les paupières et me concentrai sur tout ce que je ressentais pour lui. Était-ce comme ça que ça fonctionnait ? Je laissai mon coeur s'emballer de l'amour inconditionnel que je lui portais.
Il gémit plus fort.
Sa tête se posa contre le mur.
Même si le sang était délicieux, revigorant, je tentai de garder mon calme et de ne boire que peu ; mon but n'était pas de me nourrir.
Mais Seigneur, ce que c'était bon.
"Tae..." Murmura-t-il.
Un spasme sembla le secouer et je continuai, car je me considérais sur le bon chemin. Jungkook jeta davantage la tête en arrière, son torse se souleva plus fort, et il soupira de plaisir. Ses larmes séchaient petit-à-petit, tandis que seul le bien-être semblait opérer.
"Ça suffit... Arrête..."
Je pris une dernière gorgée et il gémit bruyamment, ce qui m'envoya un courant d'électricité jusque dans l'estomac. Je léchai la morsure et levai les yeux vers lui. Il respirait assez vite, et il avait une érection. Moi aussi.
Mais ses yeux emplis de douleur me firent le tirer à moi. Je me levai et le forçai doucement à me suivre.
"Viens."
Il renifla et s'essuya les yeux. Je le tirai jusque dans la salle de bain. Une fois à l'intérieur, je fermai la porte.
"Enlève ton bas." Lui fis-je, la voix basse.
Il semblait ailleurs. Ses iris ne faisaient que passer et repasser sur mes blessures. Je le tirai sous la chaude douche avec moi. Immédiatement, il me plaqua au mur et son front se posa contre mon épaule, tandis que l'eau battait sur nos peaux.
Je caressai ses cheveux et embrassai sa joue visible à plusieurs reprises.
Et malgré toute ma réflexion précédente sur l'amour, idée futile, ça me vint naturellement :
"Je t'aime tellement."
Mais je compris aujourd'hui que les mots n'étaient parfois pas suffisants. Le fait qu'il se soit infligé une morsure de douleur venait de me terrifier. Je voulais juste le garder près de moi.
Je passai mes bras autour de son cou. Il se laissa entraîner, nos corps se fondirent, et nos érections encore semi-présentes se frôlèrent.
Mes lèvres caressèrent son oreille.
Je voulais lui transmettre ce sentiment. Lui montrer que je n'avais pas peur, ni mal. Je le sentis glisser son nez contre une entaille de mon cou. Je clos les paupières.
"Je p-peux... ?" Bégayai-je.
Je n'avais rien d'autre sous la main. Jungkook renifla, signe qu'il pleurait encore, mais cette fois non audiblement.
En guise de réponse, il entama le mouvement. Je collai mon front contre le sien et suivis ses hanches. Nos intimités se rencontrèrent avec douceur. Il soupira, je gémis. L'arête de nos deux nez faisaient connaissance à chaque ondulation. Il plongea ses mains sur mes fesses pour me guider, les miennes se perdirent dans ses cheveux. Son visage se cachait contre mon cou de nouveau.
Je ne l'avais jamais connu si doux.
Ses mains tentèrent une approche sur mon corps mais il se ravisa, alors je les saisis au vol et les posai sur mes hanches, là où il y avait des cicatrices. Il se crispa.
"Je les aime, moi." Chuchotai-je contre lui.
Il renifla de nouveau, puis les toucha du bout des doigts.
"Pas moi. Je n'aime pas." Murmura-t-il, la voix brisée.
Le plaisir inonda mes reins sans volupté ni sans intensité réelle. C'était lent. Ca envahissait mon corps par étapes. Rien ne fut désordonné, ni incontrôlé, même si la passion ne s'était pas évaporée depuis hier soir, elle n'était pas le sujet de l'échange actuel.
Le rassurer. C'était ce que j'essayais de faire.
"Tae... Gémit-il quand je collai plus franchement nos bas de corps.
-Mmh..."
Nos lèvres se cherchèrent, s'attrapèrent, tandis que mes feulements devinrent des poussées de voix plus vives, plus obscènes. Jungkook eut la respiration plus courte après avoir constaté mon état. Je caressai son visage à l'aveugle, car mon front était collé contre son épaule.
Il jouit en premier, en silence, seul son souffle s'était coupé.
Et ce fut le seul à le faire.
Car lorsqu'il descendit la main vers mes reins pour me faire venir, je secouai la tête et l'attrapai derrière moi pour la ramener par devant. Il n'insista pas.
Je ne sais comment, mais nous finîmes assis sur le sol de la douche, douche que j'avais baissée de sorte à ce que le jet d'eau ne devienne qu'une caresse chaude sur nos peaux. J'avais le dos contre la paroi murale, les genoux remontés vers moi mais les jambes écartées, de sorte à ce que mon vampire puisse se positionner entre. C'était venu naturellement. De côté, il s'était fondu contre mon corps. Sa tempe était posée contre ma clavicule. Ma joue contre ses cheveux, je dessinais des cercles sur son épaule. Il n'avait pas les yeux clos. Il fixait un point invisible devant lui.
Je me demandais soudain si cette réaction était seulement dûe à mon corps meurtri par ses soins, ou si... Si la révélation de cette transformation ne l'avait pas chamboulé, bouleversé, fatigué.
Moi-même je me sentais drôlement épuisé. Et le temps, le temps était tellement étrange.
A chaque seconde, mon nez se retroussait de surprise, car lorsque je me concentrais, je percevais presque le temps.
Je le percevais parce qu'il n'existait pas.
Jungkook contre moi, tous deux nus sous une douche d'un hôtel, ce fut le moment où je compris que le temps était lui aussi une invention.
Il n'y avait aucun sens à ce que mon horloge interne ne ralentisse si celle des autres ne le faisait pas. Dès lors, je comprenais que si le temps existait, il ne serait pas possible que celui des autres ne le fasse pas en même temps, auquel cas le temps n'avait aucune explication crédible.
S'il n'est pas distordable, brisé, discontinu, comment ai-je pu ralentir le mien ?
Plus le Lien se développait et plus j'avais l'impression de vivre dans une illusion.
Tout ce que l'on m'a appris dans les livres est dérisoire. Ce ne sont que des explications dont nous avions besoin pour nous rassurer. Le temps, l'instant, l'espace, l'air, l'amour. Rien de tout cela ne pouvait, en fait, avoir une définition claire. C'était trop complexe et surtout volage. En constante évolution et contradiction avec les siècles passés.
L'amour fut une alliance de deux maisons, aujourd'hui une alliance de deux cœurs. L'amour avait une définition arrêtée, à l'époque. Comme la Terre plate. C'étaient des croyances incassables, impossibles à remettre en question car c'était le maximum de connaissances que nous avions en ces temps.
Peut-être que pour les siècles à venir, la vision actuelle de l'amour sera aussi perçue comme obsolète.
J'avais lu une citation, un jour, qui disait...
Ce que je sais, c'est que je ne sais rien.
Les humains ont interprété cette citation de bien des manières. Moi, je rejoignais celle qui disait que c'est parce que rien ne peut avoir de définition fixe, puisque nous sommes en constante quête du savoir, en constante évolution.
On ne peut pas savoir puisque le savoir n'a jamais eu de fin. Tout ce que nous pouvons savoir, c'est qu'on ne saura jamais. Y a-t-il même une fin à l'univers ? Est-ce qu'il y a une vérité ? Et si nous étions seulement un organisme dans un autre ?
Et si Dieu n'existait pas ? Et s'il existait ? Nous ne le saurons jamais réellement. Notre vision arrêtée de la religion sera peut-être différente dans cent ans. Elle connaît déjà des évolutions.
Mais ce qui était beau, c'était d'avoir son savoir sans empiéter sur celui des autres.
Aimer Dieu et ne pas empiéter sur celui qui ne le croyait pas. Aimer l'amour sans empiéter sur celui qui ne voulait pas aimer, pour qui l'amour est futile. Penser que l'espace est infini ou penser qu'il a une fin, que nous sommes trop petits pour l'atteindre.
Si notre vérité nous rend heureux, puisqu'on ne saura jamais si la vérité existe, pourquoi ne pas seulement laisser à chacun sa vérité sans l'imposer ? Ne serait-ce pas un avant-goût de paix ?
"A quoi tu penses ?"
Je secouai la tête, puis embrassai ses cheveux.
"Des choses étranges.
-Moi aussi."
Je pris sa main dans la mienne, mon pouce en caressa le dos.
"J'ai peur, je ressens tant de choses... Je ressentirais presque que la Terre tourne."
Jungkook cligna lentement des yeux.
"Je pensais à cela il y a une seconde." Chuchota-t-il.
Je le regardai.
"Tu pensais à ce genre de chose, hier ?
-Pas autant qu'aujourd'hui." Répondit-il.
Exactement comme moi.
"C'est le Lien... ?
-Je crois."
Nos doigts se croisèrent.
"J'ai lu un livre, une fois. Il y avait un terme. Marque, quelque chose comme ça, je n'ai plus le mot... Mais un humain aspirait la peau d'un autre pour montrer qu'il était sien."
Il sourit doucement.
"Un suçon ?
-C'est ça, oui ! Et... Et je pensais à..."
Il clôt les paupières. Je déglutis.
"Je pensais à ce que tu m'as fait. Ce n'est qu'une forme de marque. Tu as fait ça parce que je suis à toi.
-Un suçon ne fait pas mal.
-Dans l'histoire que j'ai lue, ça disait que ça piquait un peu. Comme les entailles."
Il serra les dents. Comme il restait silencieux, je repris, la voix douce :
"J'aime la douleur.
-Tae...
-J'ai aimé ça. Quand je me suis abandonné, j'ai cru que chaque griffe me rendait vivant."
Il joua avec mes doigts.
"J'ai des souvenirs de tes yeux effrayés.
-Curieux, surpris. Pas effrayés.
-Comment j'ai pu faire ça... Comment j'ai pu..."
Il caressa mon poignet sur lequel figurait une morsure.
"Je t'ai forcé à boire ton sang, aussi. Pas vrai ?"
Sa voix était brisée.
"Jungkook, ce n'était que l'expression continue de possessivité. C'était le Lien. Quand je t'ai mordu, tu t'es calmé. Même avant. En fait, quand j'y pense... Tu t'es calmé à partir du moment où la morsure approchait."
Mon regard s'illumina pendant mes propres paroles.
"J'y ai pensé, à un moment... Mais oui... Je me disais- Je me disais qu'il manquait quelque chose. Que ce n'était pas balancé."
Je me redressai un peu, le forçant à se rasseoir plus droit. Il planta ses yeux dubitatifs dans les miens.
"Jungkook, c'était ça !"
J'attrapai ses joues, le prenant par surprise. Il fronça les sourcils.
"Le Lien, le Lien nous a poussés à ce que je te morde !"
Je hochai la tête en parlant, le sourire éclatant.
"Le Lien voulait que l'on en arrive à cette forme. A cette étape. Tu m'as forcé à boire mon sang... Tu voulais me faire comprendre que je devais boire. Mais le Lien n'est pas mauvais, il ne voulait pas nous forcer à le faire. Il nous l'a fait comprendre, mais je t'ai mordu seulement quand tu m'as dit de le faire et que j-je me suis enfin décidé aussi !"
Son regard se perdit sur mon cou.
"Je sais pas, Tae...
-Mais si ! Même si j'ai tort, je sais que tout ça a un lien. Il fallait que je te morde. Le Lien a accéléré le processus.
-Le Lien ne peut pas faire ça. Ce n'est pas cohérent, je t'ai mordu pour la première fois il y a quelques mois à peine, le Lien aurait encore attendu. Pourquoi serait-il pressé de ralentir ton horloge interne ?
-Parce qu'il nous veut ensemble !
-Je sais pas. C'est comme si le Lien était au courant pour la future guerre, ce qui est impossible. Il connaît nos sentiments, il nous connaît, mais il n'est pas quelqu'un non plus. Il n'a pas de capacité de réflexion sur les bêtises de notre monde. Il ne s'adaptera jamais en fonction d'un événement extérieur, tu comprends ?"
Mes épaules tombèrent lentement en réalisant qu'il avait probablement raison.
"Mais alors... Si c'est quelqu'un plutôt que quelque chose qui nous a fait comprendre qu'on devait accélérer le processus, qui ça peut être ?"
Immédiatement, nos regards se croisèrent.
...C'est impossible, pas vrai ?
"Eux... ?
-Non, non Tae." Répondit Jungkook, mais avec une certaine confusion.
Je me pinçai les lèvres.
"Ils ne m'auraient pas rendu si violent...
-C'est le Lien qui t'a rendu violent, pas eux. Peut-être que c'était le seul moyen de faire avancer les choses, après tout... ?
-Je sais pas. Putain, j'en sais rien."
Et là encore, je me demandais s'il existait une vérité.
Jungkook et moi sortîmes, pour nous sécher, et sans penser qu'il allait mieux, je me fis la réflexion qu'il avait quand même l'air plus calme. Il ne pleurait plus. Son visage était éteint, mais pas dévasté. Cependant, il pensait à toute vitesse.
J'enfilai ma seule tenue de rechange, un jean clair, un t-shirt et un pull en fine laine beige, tandis que Jungkook faisait de même. Il s'habilla tout en noir, de son pantalon plus large que le mien à son sweatshirt sombre. Je le détaillai un peu trop longuement quand il enfila ses vêtements, et ses yeux finirent par me croiser. Je ne détournai pas le regard.
Alors il s'approcha.
Ses pupilles dérivèrent vers ma gorge griffée et la culpabilité inonda ses yeux, alors je lui sautai au cou et l'embrassai comme si je ne l'avais pas vu depuis des jours. Il me réceptionna de ses mains sur ma taille en soupirant de surprise, puis me rendit mon baiser.
L'instant suivant, je plongeai mon nez dans son cou. Il entoura mon corps de ses bras et me serra assez puissamment. Je sus que c'était parce qu'il s'en voulait encore.
"Alors... Tu n'as pas aimé, cette nuit ?" Demandai-je, près de son oreille.
L'étau de ses bras s'intensifia.
"J'ai aimé.
-Oh... Vraiment ?"
Il soupira.
"Et c'est bien le problème. J'ai adoré, putain, j'ai jamais ressenti autant de plaisir..."
Mon ventre se tordit. Il disait cela avec un énième ton coupable.
"Mais je ne veux plus.
-Quoi... ?"
Il recula. Son regard dur de sérieux m'inquiéta.
"Je ne veux plus avoir ces yeux-là. Je ne veux plus atteindre ce niveau de puissance. Plus jamais.
-Les yeux blancs... ?
-Je n'invoquerai plus jamais cette transformation. Et n'essaie pas de m'en convaincre, une deuxième fois."
J'écarquillai les yeux et il me lâcha.
"Mais... Mais et- et pour Jin-
-On fera avec le doré. Je suis fort."
Je déglutis.
"Mais et si ça s-suffit pas-
-Alors je mourrai."
Je secouai la tête.
"Tu ne penses pas ce que tu dis.
-Je le pense. Vraiment. Rien n'y changera. Tu n'auras plus jamais peur de moi."
Il attrapa les clés de l'hôtel, et son sac.
"Je n'ai pas peur de toi, Jungkook..."
Il ne répondit pas. Je soupirai.
Ça allait lui passer, j'en étais sûr.
Je jetai un dernier coup d'oeil dans l'hôtel et me figeai.
"Oh, Jungkook... Le- Le lit-"
Il se retourna. Avec toute cette situation, je n'en avais même pas revu les draps.
Comment dire.
Ils étaient jonchés d'énormes, d'immenses tâches de sang. Les coussins, la couverture, et il y avait même des gouttes de sang séché sur le sol.
Oh.
"C-Comment-
-Elle ne nous verra plus jamais, de toute façon."
Je hochai timidement la tête, inquiet pour la femme de ménage. Mais nous n'avions pas de quoi changer le tissu taché. Jungkook ouvrit la porte et m'attendit.
Je regardai une dernière fois la chambre qui avait vu, en peu de temps, bien des choses, puis j'attrapai mon sac, et rejoignis mon vampire.
**
"On va prendre quelque chose à manger."
Je ralentis en même temps que lui et réajustai mon sac en l'observant s'approcher d'un stand ambulant. Je le suivis, et l'odeur de nourriture envahit mes narines.
"Qu'est-ce que tu veux ?
-Juste une brochette, ça suffira-
-Mettez-en trois, s'il vous plaît. Et un peu de ça.
-Mais-
-Tu as besoin de manger après tout le sang que tu as perdu."
Le fait qu'il le murmure, l'air sombre, pour ne pas que le vendeur nous entende, me fit réaliser à quel point la situation était différente. Non pas qu'il était redevenu froid : il me parlait, me répondait.
Mais il était sérieux, très sérieux, ce qui marquait une grande différence entre avant-hier, quand il l'avait dit à voix haute face à la vendeuse de muffins, et cet instant, où tout était différent.
Et mes mains se pressèrent sur les lanières de mon sac à l'idée que nous approchions de notre grande mission, si je pouvais l'appeler ainsi.
Jungkook se mettait déjà sur ses gardes.
"Tiens."
Il me fourra trois brochettes au poulet dans les mains dont une qui semblait être de la pomme de terre.
"Ca f-fait beaucoup..."
Il ne répondit rien et paya. Nous marchâmes de nouveau dans la rue.
Une fois au bord de la ville, là où la verdure commençait à se faire plus fréquente, je tendis du poulet à Jungkook.
"Tiens."
Il secoua la tête.
"Tu dois manger."
Je levai les yeux au ciel.
"Jungkook mon estomac va exploser !
-Mange."
Il me poussa doucement devant lui quand nous traversâmes un dernier passage piéton. Je voyais, au loin, d'énormes forêts. Était-ce là que nous allions ?
"Pourquoi tu ne manges rien ? Je- J'ai bu ton sang aussi, hier, et tout-à-l'heure...
-Je n'ai pas faim."
Je le regardai en mâchant. Il fixait droit devant lui.
"Tu avais aimé, en plus." Murmurai-je.
Il me lança un coup d'oeil cette fois plus froid. Je souris doucement.
Tiens ?
On traversa une grande plaine d'herbes pour rejoindre l'entrée d'une petite forêt qui, je le supposais, déboucherait sur bien plus de nature par la suite. Jungkook m'avait dit que c'était dans ce genre d'endroits qu'il fallait aller.
Les bruits de la ville s'éloignèrent. Bientôt, nous n'entendîmes qu'oiseaux, criquets et vent dans les feuilles. C'était agréable. Je mordis dans ma dernière brochette malgré mon ventre plein.
Puis je l'observai de nouveau.
Je voulais le faire sourire.
"En tout cas cette brochette n'est pas aussi bonne que ton sang..."
Sa mâchoire se contracta. Je m'empêchai de glousser.
"Et cette brochette, en plus, ne gémit pas-"
Mon dos, ou plutôt mon sac, rencontra le premier arbre de la forêt. Je lâchai ma nourriture sur la surprise mais, sans me lâcher des yeux, Jungkook la rattrapa. Il la remit lentement dans ma main, tandis que ses pupilles noires jonglaient entre les miennes.
Son visage s'approcha du mien. Autant dire que j'avais perdu mon sourire.
"Tu disais ?"
Il entrouvrit les lèvres et ses canines se révélèrent. Mon estomac se tordit d'envie. Il s'approcha de ma gorge et soupira contre elle, comme s'il me sentait. Je retins ma propre respiration et accrochai son épaule de ma main libre en tournant la tête, de sorte à lui laisser tout le loisir de me mordre.
Mon coeur explosa de joie quand je crus le sentir sourire rapidement contre ma peau.
Il ne fit rien, et recula pour me regarder de nouveau.
Son expression joueuse fit naître un minuscule rictus sur mon visage.
"N'oublie pas que le vampire du Lien, c'est moi. Autrement dit..."
Il s'approcha de mon visage jusqu'à ce que nos nez ne se frôlent.
"...J'ai bien plus besoin de sang que toi. Alors tu devrais faire attention à tes mots."
Il embrassa furtivement mes lèvres.
"Humain."
Puis, sans me lâcher des yeux, il mordit dans la brochette que je tenais, avant de se reculer et de reprendre sa marche.
Il me fallut de longues secondes de réalisation avant de me décoller de l'arbre et de le suivre timidement. Mon sourire, cependant, ne me quittait pas.
Malgré sa peine, je crois qu'il avait tenté de me faire sourire, lui aussi, en comprenant que j'essayais de le distraire. Je le regardai du coin de l'oeil, et vis un léger rictus sur ses lèvres roses, ce qui confirma ma pensée.
Apaisé, et amusé, je glissai ma main libre dans la sienne. Il serra nos doigts ensemble sans hésiter, tandis que le seul bruit ambiant autour de nous était nos pieds s'enfonçant dans l'herbe, les feuilles mortes et les bouts de branches brisés.
Mon visage se tourna une dernière fois vers la ville, maintenant lointaine.
Je voulus dire quelque chose, mais mon téléphone vibra contre ma poche. Surpris, je le sortis, sous les yeux curieux de mon vampire.
"Tu as un message ?
-Je- Je crois."
Je lâchai sa main pour me concentrer sur l'écran. Je cliquai sur l'icône des messages.
Ma bouche s'entrouvrit et, petit-à-petit, mes pas s'arrêtèrent.
De : numéro inconnu
Salut Taehyung, c'est Namjoon. A partir de maintenant, nous pourrons communiquer par téléphone, mais je n'aurai jamais beaucoup de temps.
Est-ce que tout va bien ?
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J'ai beaucoup aimé ce chapitre, je crois qu'il fait partie de mes préférés ^-^
Qu'en avez-vous pensé les amis ?
Un énorme merci pour le million qui approche, wahou je ne sais même pas comment vous remercier, à part une potentielle double update... Je verrai, mais si vous avez des idées n'hésitez pas ;)
Je vous dis à dimanche prochain pour la suite, prenez grand soin de vous, et à demain soir pour Océan ! ♥♥♥
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