Chapitre 42
« Non ! », hurle quelqu'un, et brusquement, Freyja sent son corps poussé en avant brutalement. Elle ne tombe pas, ne chute pas. Quelque part derrière elle retentit un bruit sonore et des bruits gutturaux semblent sortir de nulle part. Son cœur battant la chamade tente encore de comprendre ce qui vient de lui arriver. Elle reste figée sur place, les yeux exorbités. Lentement, elle finit par tourner la tête vers Faolàn. Ce dernier est livide et ses mains qu'il semble avoir défait de ses liens serre les barreaux en bois de la cage qui l'enferme. Il fixe un point derrière Freyja et doucement, la jeune femme sous le choc décide de regarder à son tour.
A côté d'elle, il n'y a plus personne. Plus de maître. Plus d' Allande. Plus de Vera. Un frisson parcours le corps de Freyja. Où étaient-ils ? Que venait-il de lui arriver ? Pourquoi... Pourquoi était-elle en vie ? Le frisson devient un tremblement incontrôlable. Un bruit étouffé et hystérique échappe à ses lèvres. Le monde se perd dans un brouillard de pensées, les doigts de la jeune femme bougent anxieusement, elle tourne la tête de gauche à droite, de droite à gauche, elle a chaud, elle a mal, elle a mal, elle a peur, le temps semble accélérer. J'ai failli crever, j'ai failli crever, où ils sont, où ils sont, ça ne disparaît pas un humain, j'ai peur, je ne veux pas mourir, j'ai peur – toutes les émotions qu'elle avait refoulées lui coupent la respiration, lui font tourner la tête et papillonner les yeux. Freyja déglutit tandis que ses mains moites bougent plus rapidement.
Un craquement.
Tout d'un coup, elle sent quelqu'un tirer sur ses liens, elle sent ses mains libres et des bras l'encercler. Elle est incapable de se défendre et secoue seulement la tête, le corps secoué de sanglots dont elle n'avait jusqu'alors pas conscience.
« Freyja. Freyja, calme-toi, c'est moi, c'est moi. Ça va aller, gamine, calme-toi. »
Dans ses pensées hystériques, Freyja reconnaît Faolàn et cesse de se débattre pendant qu'elle tente de comprendre comment il peut être là alors qu'il était dans une cage, alors que-
« Faolàn. », murmure-t-elle d'une voix rauque et anxieuse, « Que... Comment... »
Elle lève ses yeux vers son visage baigné de sueur. Son corps tremble contre le sien et il est adossé contre ses jambes, incapable de tenir debout. Freyja lève une main hésitante et la pose contre la joue de Faolàn. Il l'observe sans un mot puis dans un geste de désespoir presse sa main sur la sienne. Il ferme les yeux et tourne la tête pour effleurer la paume de la jeune femme de ses lèvres tremblantes.
« Tu es en vie. Tu es en vie. », souffle-t-il d'une voix étouffée et Freyja hoche lentement la tête. Elle se passe sa langue sur les lèvres, incertaine de ce qu'elle doit dire. Elle caresse la joue pâle de Faolàn de son pouce.
« Comment ? », croasse-t-elle et le corps du jeune homme est parcouru d'un frisson encore plus violent tandis qu'il inspire bruyamment. Il baisse les yeux et se passe une main sur le visage, sans rien dire. Freyja attend quelques instants puis d'un geste lent, relève son visage. Faolàn évite obstinément son regard. Elle fronce les sourcils lorsqu'elle aperçoit le visage blanc strié de rougeur et une larme rouler des yeux bleus du jeune homme.
« Fao ? », murmure Freyja, « Pourquoi tu pleures ? »
Il secoue la tête, incapable de formuler un mot.
« Fao, s'il-t-e-plaît. »
Freyja tente de s'approcher un peu plus de lui. Il déglutit.
« Ton bras saigne encore. », souffle-t-il d'une voix brisée et Freyja baisse les yeux un court instant. Sans réfléchir, elle arrache un bout de tunique et entoure son bras blessé avec. L'entaille est moins profonde qu'elle semble l'être. Rassemblant ses forces, Freyja entoure le corps tremblant de Faolàn d'un bras. Elle pose sa joue contre la sienne et ferme les yeux.
« Dis-moi. », murmure-t-elle et Faolàn laisse tomber sa tête dans sa nuque tandis que les larmes dévalent sur ses joues. Il lève les yeux au ciel.
« Pranan. », dit-il et sa voix se brise, « Pranan t'as... sauvé. »
Le corps de Freyja se tend et elle fronce les sourcils.
« Pranan ? », demande-t-elle d'une voix incertaine, « Mais... Je ne le vois pas ? Où est-il ? »
Faolàn redescend ses yeux vers son visage. Il secoue la tête, ouvre la bouche, la referme, hésite.
« En bas. », souffle-t-il, « Pranan est en bas de la falaise. »
Freyja sent son cœur manquer un battement tandis que ses pensées ne parviennent pas assimiler ce que Faolàn vient de lui dire. Elle recule d'un pas.
« En... En bas ? », bégaie-t-elle paniquée, « Pourquoi en bas ? »
Faolàn secoue la tête et se passe une main sur le visage.
« Au... Au moment où tu allais tomber... Il est sorti de nulle part. Il t'a poussé en avant et a sauté en tirant le maître, Allande et Vera avec lui. Les deux gardes ont tenté de le retenir, mais il est arrivé avec tellement d'élan que... Ils sont tous... en bas. »
Freyja recule encore d'un pas et Faolàn tombe en arrière. Freyja secoue à nouveau la tête.
Pranan ne pouvait pas être en bas d'une falaise.
Son frère venait de lui sauver la vie. Quelqu'un qui sauve une vie ne pouvait tout de même pas être au bas des rochers, juste après. Freyja, les yeux exorbités, presque en transe, avance vers le bord. Derrière elle, Faolàn se redresse.
« Freyja ! », hurle-t-il paniqué, « Freyja, qu'est-ce que tu fais ! »
Elle n'allait tout de même pas sauter ? Elle ne pouvait pas l'abandonner, elle ne pouvait pas sauter une seconde fois, finir morte elle aussi ! Rassemblant ses forces, il tente à nouveau de se pousser sur ses bras pour l'atteindre. Son corps ne cesse de tomber. Son cœur bat la chamade.
« Freyja, s'il-te-plaît, recule ! Ne fais pas ça ! Je t'en prie ! Freyja... » Il sent sa voix perdre sa force, il la sent trembler, s'étouffer dans sa gorge. « Freyja, je t'en supplie. »
Freyja se tourne vers lui et lui offre un sourire fantomatique tandis qu'une légère brise lui secoue les boucles et le fait paniquer. Ne tombe pas, ne saute pas, Freyja, s'il-te-plaît... La jeune femme rajuste sa tunique et redresse son bandage provisoire avant de poser ses grands yeux bruns sur lui. Faolàn sent ses mains moites trembler.
« Ne t'inquiète pas. », souffle-t-elle, « Je ne vais pas sauter. Je veux juste voir. Je veux voir mon frère. »
Faolàn secoue la tête.
« Freyja, ne regarde p-»
Elle tourne la tête et regarde vers le bas. Ses yeux cherchent la vallée. La force quitte brusquement le corps de Freyja et elle tombe à genou, une main pressée sur sa bouche lorsqu'elle trouve finalement. En bas de la falaise sont allongées six silhouettes. Elles ne bougent pas. Elles ne font pas de bruits. Une larme roule sur la joue de Freyja, encore une, encore une. Elle enlève sa main de la bouche et se penche en avant, les mains sur le rebord.
« Pranan ! », hurle-t-elle, la voix secouée de douleur, « Pranan ! Réponds-moi ! Pranan ! »
Faolàn serre les dents et avance, serrant Freyja dans ses bras.
« Freyja ! Arrête ! Ça ne sert à rien ! »
Aveuglée par les émotions, Freyja se débat, les larmes lui barrant la vue.
« Lâche-moi ! Lâche-moi ! Il n'est pas mort ! Je dois sauver mon frère ! Il n'est pas mort ! », s'égosille-t-elle et arrive à se débarrasser de Faolàn qui titube en arrière et chute sur le dos. Sans un regard en arrière, Freyja emprunte le chemin qui mène en bas, ignorant la souffrance de son corps malmené. Elle avance le plus vite possible, jusqu'à arriver au niveau des corps. Frénétiquement, elle avance en tremblant jusqu'à Pranan. Elle se laisse tomber à côté de lui et tapote son visage.
« Pranan. », murmure-t-elle, « Pranan, Pranan réveille-toi ! Réveille-toi ! »
Freyja se met à trembler lorsque son frère ne répond pas mais continue de fixer le ciel de ses yeux vides. Elle le prend aux épaules et tente de le secouer mais il est lourd, si lourd et ses yeux sont si vides et son corps tellement inerte et... Elle le laisse retomber au sol. La tête de Pranan retombe dans une position inconfortable et sans un bruit. Il ne réagit pas. Elle non plus. Freyja caresse les cheveux de son frère, ignorant les cadavres autour d'elle, les yeux écarquillés, les larmes dévalant ses joues.
Bientôt, le soleil se couvre et des gouttes de pluie s'ajoutent aux larmes salées.
Freyja reste inerte. Assise. Transie de froid. Elle ne sent pas son corps basculer en avant : elle se presse contre Pranan, l'entoure de ses bras tremblant.
« Je vais te réchauffer. », murmure-t-elle, « Je ne vais pas te laisser mourir toi aussi. »
Elle continue de lui caresser les cheveux tandis que sa tête tourne et que la pluie la glace jusqu'aux os.
Elle caresse ses mains froides avec ses mains gelées.
Elle entoure ses jambes en cassées de ses jambes blessées.
« Il faut rester réveiller, Pran. », souffle Freyja dans le vide, une petite fille perdue au milieu de la mort, une petite fille qui n'arrive pas tout à fait à saisir ce qui lui arrive et pourquoi. Elle hésite un moment.
« Tu veux que je... », ses dents qui claquent l'empêchent de parler, « Tu veux que je te chante une chanson ? » Pranan ne répond pas et elle frotte un peu plus ses mains. « Tu préfères une histoire ? »
La pluie qui s'abat sur la terre silencieusement lui répond.
« Il était une fois », murmure Freyja, « Une petite fille qui... qui avait deux... Deux frères. » La jeune femme hoquette et se presse un peu plus contre son frère, incapable de continuer son histoire, incapable de dire un mot de plus. Elle ferme les yeux et se laisse secouer les sanglots, jusqu'à ce que la pluie cesse et que des points noirs se mettent à danser devant ses yeux, ses yeux qui ont trop vu et trop souffert.
« Peut-être que tu aurais dû me laisser mourir. », souffle Freyja contre Pranan, avant de perdre connaissance.
Bonjour, bonsoir, les cocos!
Je ne sais pas quoi dire. Pranan. Non. Ah. Ce chapitre a été extrêmement dur à écrire. J'espère que les émotions sont passées chez vous aussi.
J'ai hésité avec cette évolution - Pranan a pris un rôle plus important que prévu et j'adore ce personnage, c'est pour ça que je veux lui donner avec cette fin cette grandeur héroïque qu'on ne retrouve pas beaucoup dans cette histoire.
Enfin voilà.
On continue l'aventure.
Des bisous,
Blondie♥ (tristesse)
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