Deux jours après ça, je suis allé avec Shouyou en ville. Il m'avait un peu forcé à venir, me disant que ça me changerait les idées de tout ce qu'il m'arrivait.

Enfin, 'se changer les idées', c'est ce qu'il avait dit, mais alors qu'on était dans un bar, ce sur quoi il m'avait bassiné, c'était bien Kuroo, et personne d'autre.

— Écoute, Kenma, je sais que tu ne veux plus entendre parler de lui, avait-il commencé en faisant tourner sa paille dans son coca – oui, je me souviens de ce qu'il avait bu ce jour là, mais c'était surtout parcequ'il avait vingt-deux ans comme moi et que dans un bar, il refusait de boire de l'alcool, Mais franchement, essaye de voir les choses de son point de vue.

Ça m'avait un peu titillé, et je m'étais contenté d'hausser un sourcil en mâchouillant mon cure-dents.

— Comment ça ?

— Tu ne penses pas que ça doit être vraiment dur pour lui aussi ?

Ça se voyait qu'il paraissait hésitant, et c'était logique, vu la pente dangereusement glissante qu'il approchait. Le moindre pas de travers et ça allait partir en catastrophe, seulement, ça ne l'avait pas empêché de continuer.

— Depuis sept ans, il doit avoir la tentative de suicide du garçon qu'il aime sur sa conscience, juste parce qu'un soir il était bourré et les choses avaient mal tournées. Et là, comme tu sais tout aussi bien que moi qu'il a vu ton deuxième live, tu te doutes bien qu'il te connait assez pour se douter qu'il a une deuxième tentative sur les épaules. Tu ne t'en rends pas compte de ça ? Il avait tellement peur pour ta vie que durant sept ans, il n'a ni osé te voir pour s'excuser, ni pour essayer de s'expliquer. Je pense que tu peux comprendre, qu'au bout d'un moment, on craque. Et si tu continues, il risque de finir dans un état pire qu'il l'est déjà. Après tout, il t'aime depuis qu'il a dix-sept ans. Et je te ferais remarquer que lui maintenant, en a vingt-quatre.

Il m'avait foutu assez mal là, je dois l'admettre, et j'étais resté à fixer mon verre d'alcool sans rien dire, les sourcils froncés, réfléchissant un peu à ce qu'il venait de dire et la façon dont c'était dit qui m'avait comme poussé à regretter ce que j'avais, à culpabiliser, alors qu'au fond, tout était sa faute, et il avait beau s'excuser, un acte comme celui-ci, je ne le pardonnais pas.

— Tu veux essayer de me faire regretter de ne pas avoir pardonné celui qui m'a brisé le cœur et ruiné ma vie ? avais-je déclaré aigrement avant d'avaler cul sec mon martini.

— Hein ?

— Dis moi, Shouyou, avais-je continué en le pointant du doigt, insistant bien sur son prénom, Comment tu réagirais si Kageyama te trompait ? Même à cause d'un verre d'alcool en trop. Tu penses que tu le pardonnerais ?

— Il ne ferait jamais ça, avait-il déglutit, l'air assez angoissé.

— Imagine. Imagine juste que ce soir, tu rentres chez toi, et que tu le trouves dans ton lit avec un autre mec, complètement bourré, mais avec un autre mec. Tu réagirais comment ?

— Je ... les larmes aux yeux rien qu'à l'idée que (son bientôt fiancé et futur mari mais je ne vais pas en rajouter) Kageyama puisse faire ça il avait pincé ses lèvres et baissé la tête, Je pense que je le virerai de la maison. Et quand je me serais à peu près calmé, je le laisserai s'expliquer, pour voir si son histoire tiens la route, où s'il ne m'aime plus.

— Et ?

Là, il avait relevé la tête vers moi, un sourire attristé sur le visage, la vision embuée de larmes – ça me faisait mal de me dire que je l'avais autant affecté rien qu'avec la possibilité de cette situation, et il avait simplement bredouillé :

— Je le pardonnerais sans plus y penser. Après tout, je l'aime plus que tout au monde, et s'il m'aime aussi, une erreur, je m'en fiche complètement. Ça restera qu'un caillou sur lequel on a trébuché durant notre route ensemble.

Ça, je peux vous dire que même maintenant, ça me fait mal au cœur. Parcequ'alors que lui resterait fidèle à Tobio le plus longtemps possible tant qu'il était sûr que eux deux, ça tenait la route, moi, sept ans après, malgré le nombre incalculable de fois où Kuroo m'avait fait comprendre que ce n'était pas voulu et qu'il n'a jamais cessé de m'aimer, je m'étais refusé l'idée de lui pardonner. Parceque c'est qui je suis.

Enfin là, j'étais resté le regard fixé dans le fond de mon verre vide.

— Kenma.

J'avais relevé la tête à l'entente de mon prénom et je l'avais regardé dans les yeux.

— Toi aussi, au fond, tu aimes toujours Kuroo. Pas vrai ?

Je peux vous dire que le coup de poing que j'ai eu l'impression de recevoir en plein cœur ce soir là, je ne suis pas prêt de l'oublier. Parcequ'au fond, oui, je le savais que Kuroo était celui que j'aimais depuis le début. Il était mon premier amour, et je commençais à douter sérieusement d'en avoir un autre si ça continuait comme ça. Seulement, mes sentiments étaient restés cachés au plus profond de moi-même, et j'avais réussi à les enfouir pour qu'ils ne deviennent plus qu'une simple pensée dérangeante par instants. Mais entendre quelqu'un me dire à haute voix, de but en blanc, que j'étais toujours amoureux de ce connard, ça m'en a foutu un coup.

Et je crois que par la même occasion, ça en a profité pour libérer réellement mes sentiments, quelque chose que je ne voulais vraiment pas, parceque malgré toutes ses belles paroles, redonner ma confiance à Kuroo et lui pardonner, je n'en étais pas capable. Après tout, il m'avait quand même trompé.

Enfin après ça Shouyou m'a quitté, me disant qu'il allait rentrer. Je pense qu'il avait envie de revoir Kageyama au plus vite après la discussion qu'on avait eu.

D'ailleurs, ça n'a pas vraiment de rapport, mais je crois que là, maintenant, il est en train de pleurer. Je ne sais pas vraiment quoi faire pour le réconforter, après tout, je n'ai jamais été doué à ce genre de choses, et puis, même si je n'aime pas le savoir en pleurs, c'est normal de pleurer aujourd'hui, non ? Vu ce qu'il se passe.

Bon, vu que je n'aurais pas de réponses, ça ne sert à rien de m'inquiéter devant la caméra, et je vais juste continuer rapidement la suite de mon récit.

Quasiment immédiatement après qu'il soit parti, un mec avait prit sa place et m'avait sourit gentiment.

— C'était ton ami ?

— Oui.

J'avais beau être complètement sous l'influence de l'alcool, je répondais toujours aussi sèchement.

— C'est quoi ton prénom mon joli ?

— Kenma.

Il avait poussé un verre d'alcool et en avait pris un pour lui.

— Et bien Kenma, tu es vraiment mignon.

Et même là, je n'ai qu'un souvenir vraiment trop vague de ce qu'il s'est passé après ça. C'est toujours tout flou dans ma mémoire.

Ce que je peux dire clairement aujourd'hui par contre, ce que cette nuit là, j'ai dû simuler un orgasme vu sa piètre performance au lit (c'est dur de l'admettre pour moi, mais Kuroo reste imbattable dans ce domaine), mais quand je me suis réveillé le lendemain dans mon lit, nu à côté de lui, je n'avais aucun souvenir de ce qu'il s'était passé.

~bon bah j'ai rien à dire sur ce chap ahah on se voit dans deux jours~