Chapitre 7
Je déteste le vide.
Attention ! Je n'avais absolument pas le vertige, et je ne craignais pas le vide non plus. Seulement, j'étais une humaine, un animal terrestre. Si l'Homme avait été destiné au ciel, on lui aurait fourni des fichues ailes !
Dès que Lysandre avait décollé du sol, je l'avais serré contre moi avec une force que je ne me connaissais pas. Cela n'avait pas dû le déranger. Lysandre avait d'ailleurs resserré sa prise sans pour autant me faire le moindre mal. Juste comme pour me rassurer.
— Nous sommes bientôt arrivés, garde les yeux fermés.
Comme si t'avais besoin de me le rappeler.
Depuis maintenant plusieurs minutes, une lumière aveuglante nous accompagnait dans notre trajet, ne donnant aucun signe de vouloir disparaitre. Une clarté capable de passer au travers du foulard autour de mes yeux, m'obligeant à les fermer pour ne pas être aveuglée.
En tout cas, une chose était certaine. Bien que Lysandre volait encore, nous ne nous trouvions plus sur Terre. Il n'y existait aucun éclat aussi intense dans le monde. Rien d'équivalant. Quoiqu'une lumière dans la figure restait une lumière aussi intense que n'importe laquelle au final.
— Gaddiel, interpella une voix semblant se positionner devant nous.
Qui était Gaddiel ?
Il était plutôt difficile de se repérer à l'aveugle. Néanmoins, je parvins à sentir la présence de la personne à cause de laquelle Lysandre venait de se stopper sur place. Nous stagnions dans les airs, et cette simple idée me força à enserrer mon emprise sur cet ange qui me gardait tout contre lui.
Pourquoi s'arrête-t-il maintenant ? On pourrait tomber !
Le foulard toujours sur les yeux, je me demandais si conserver cet état d'aveuglement n'était pas pire encore que de se confronter à l'effroi de me trouver loin du sol. Mais la réponse fut évidente : non.
Ma mâchoire se serra tellement que des crampes prochaines seraient à prévoir.
— Haziel, que fais-tu ici ? demanda Lysandre.
— Je te retourne la question. Que fais-tu ici ? Et avec une humaine vivante qui plus est.
Lysandre reprit sa route, ignorant totalement ce « Haziel » si j'interprétais correctement la situation. Quelques secondes plus tard, la lumière devint moins intense. Lysandre sembla même se poser. Enfin un moment de répit en perspective.
— Lysandre, dis-moi qu'on est arrivé, le suppliais-je.
Mes mains autour de ses épaules tremblaient. Mais ça ne signifiait en aucun cas que j'avais la frousse ! J'étais forte, l'une des pécheresses les plus douées au monde ! Alors, il aurait été insensé de croire ou même de penser que je pouvais avoir peur de quelque chose.
Entendant un souffle moqueur près de mon oreille, je voulus frapper Lysandre à l'aveugle. La pensée du vide nous entourant peut-être encore retint la manifestation de ma colère.
— Je n'ai rien oublié de ta plus grande terreur, Vi, me susurra Lysandre au creux de l'oreille.
Et sans crier gare, Lysandre me lâcha, m'arrachant ainsi un cri d'horreur. Mais lorsque le sol se fit sentir sous mes pieds, je retirais furieusement le bandeau autour de mes yeux pour le lui balancer à la figure. Lysandre rattrapa ce dernier, trop peu compact pour pouvoir lui faire le moindre mal. L'emplumé ! Il se moquait et riait à s'en décrocher la mâchoire ! Mes poings lui martelèrent le bras de misérables coups.
— Espèce d'enfoiré d'ange à la con ! Je te déteste ! Ce n'était pas drôle !
Pleurant de rire, Lysandre se saisit de mes mains. Pensait-il vraiment pouvoir arrêter la grande Triple V dans sa colère noire ? Il n'eut suffi que d'un regard. Ses yeux capturèrent les miens, les agrippant avec force, les pénétrant sans pitié pour s'y harponner. Lysandre venait de calmer ma rage sans aucun effort.
Un sourire ravageur aux lèvres, il scrutait mes réactions, percevant sans peine l'effet qu'il provoquait sur moi. En moi. Mon souffle en fut coupé.
Lysandre était bel homme, on ne pouvait prétendre le contraire. Son charme n'était pas à prouver, n'importe qui pouvait en être témoin.
Les anges étaient diablement attirants. Bien plus que n'importe quel démon ayant croisé ma route. Certes, je me basais sur mon expérience avec le seul ange de ma vie. Néanmoins, ce devait être la même sensation avec tous. Je ne pouvais pas me sentir ainsi avec Lysandre seulement. Cela paraissait insensé.
L'espace d'un instant, une chose bien étrange embauma pourtant mon cœur, brûlant ma peau. Ce n'avait rien de réel, ou de physique.
C'est insensé comme sensation.
La colère m'avait envahi, mais ces yeux, dans leur intensité, la firent s'évaporer sans aucun effort.
— Arrête, lui intimais-je en détournant le regard alors que je prenais conscience du danger de m'y noyer.
Il avait cessé de rire, pourtant un sourire éblouissait son visage. Comment faisait-il pour se sentir satisfait en une telle situation ? Cherchait-il vraiment à me séduire ?
Tu lui as poignardé le cœur, on ne peut difficilement faire plus clair comme message, me convainquais-je sans trop de difficulté. Si en amour, on donnait son cœur à l'autre, il était plus rare qu'on le brise si ce n'était pas dans l'ambition de détruire toute relation derrière. D'autant plus que je n'avais fait que jouer la comédie tout ce temps. Et il le savait parfaitement ! Pourquoi persisterait-il ?
— Je suis désolé, mais c'était trop tentant, finit-il par s'excuser.
— Je croyais que les anges étaient insensibles à la tentation.
— Les temps changent, Vi. Les humains ne sont pas les seuls à évoluer.
Il apparaissait presque vexé pour mon affirmation. Cette réaction m'amusa un peu, je voulais bien l'avouer. L'ange capricieux et enfantin ne changerait pas certains aspects de sa personnalité.
Sans prévenir, Lysandre me souleva pour m'installer sur son avant-bras.
— Qu'est-ce que tu fais ? Je sais marcher toute seule.
— Ici ?
Pourquoi cette question ?
Je m'accordais le risque de tourner mon attention ailleurs que sur l'ange. Ce que je découvris me terrifia tant que je m'accrochais de nouveau à ses solides épaules. Ou plutôt, bien au contraire de me terrifier – je n'avais peur de rien – le paysage m'impressionna.
Entourés par des nuages aux teintes diverses, mais toujours de tons pâles, Lysandre et moi nous trouvions dans un paysage céleste, composé seulement de nuages et de vide. Il y avait aussi quelques chemins, mais ceux-ci restaient des parterres de nuages. Esthétique, mais bien peu pratique. Et surtout très dangereux !
Au loin, on pouvait tout de même apercevoir un château des plus somptueux aux couleurs dorées et blanches, dont les reflets bleutés dérivaient en une impression de glace.
Un regard derrière nous, j'aperçus une immense arche de plusieurs mètres de haut, composée d'une matière solide et éclatante. Elle était traversée par une sorte de fluide ou d'aura opaque. Comme un voile en mouvement.
— Tu veux déjà retourner sur Terre ? se moqua Lysandre.
— Cette arche mène à la Terre ?
Il confirma l'hypothèse de la tête. Où avions-nous atterri ?
— Nous sommes au Paradis ?
— Non, bien sûr que non.
Si ma supposition ne parut pas lui plaire, elle était pourtant légitime. Mon humanité et le fait que la mort n'ait jamais arraché mon corps des bras de la vie, les seules représentations que je connaissais du Paradis étaient ça : un paysage de nuage et chaleur, mais dont les bébés tout nus avec des petites ailes avaient été échangés contre un homme plus grand que moi, aux muscles de guerrier et aux ailes immenses, lourdes et imposantes.
— Alors où nous as-tu emmenés ?
— Dans un endroit où tu ne devrais pas être, humaine, nous interrompit sèchement un intrus fraichement débarqué.
Je me tournais à nouveau vers l'arche d'où un homme apparu. Ses courts cheveux blonds possédaient la même couleur que ses yeux perçants.
L'homme était magnifique et malgré sa fine taille, il donnait l'impression d'être au moins aussi solide que Lysandre. La courte toge dérobée à une ancienne mode romaine ne cachait rien du corps sculpté sans aucun défaut. L'auréole turquoise au-dessus de sa tête me fit alors comprendre que sa beauté était banale. Il s'agissait d'un ange.
De nombreuses créatures possédaient cet atout de beauté, leur apparence changeant avec le temps si les préférences majoritaires humaines se modifiaient. Une arme redoutable pour tromper l'Homme. Les anges n'y échappaient pas. Grâce à cette beauté, il nous était plus facile de tomber dans le piège. Ajouté à cela la confiance naturelle que le cœur des humains leur portait, et l'ange devenait un ennemi redoutable qu'il incombait au Vatican de savoir combattre pour ne pas être corrompus dans leur foi. Ou quelque chose dans ce goût-là.
La foi, ce n'était pas pour moi. Dès lors que l'on connaissait la vérité, la croyance se supprimait d'elle-même.
— Haziel, cesse donc d'être aussi agaçant.
— Cesse d'être rebelle alors, Gaddiel, rétorqua ce dernier.
Les deux hommes se défièrent du regard avant d'éclater de rire. Lysandre me déposa « sur terre », m'abandonnant de nouveau au milieu de ces nuages, avant de prendre Haziel dans ses bras en lui servant une tape amicale.
— Cela faisait un moment qu'on ne t'avait pas revu dans les parages, s'indignait Haziel sans pour autant se détacher de son sourire.
— J'étais un peu occupé.
Il me jeta aussitôt un regard en coin, appuyant clairement le message que j'étais la cause de son absence.
Mais mon attention ne se portait plus sur les deux anges, encore moins sur leur discussion. J'étais déjà bien occupée avec le sol. Celui-ci bougeait. Il était vaporeux et je ne voyais même pas mes pieds, cachés par cette sorte de brume.
Je ne fis aucun mouvement. Et si ce parterre possédait des trous ? Et si je tombais dans le vide ?
Oh mon Dieu, mais qu'avais-je fait pour mériter tout ça ?
Et alors que l'un des deux anges s'approchait de moi, je lui sautais dans les bras pour ne plus toucher ce semblant de sol vaporeux et inexistant. Tout comme un homme se noyant s'accrocherait à la moindre brindille, une humaine à deux doigts de tomber dans le vide s'agripperait à toute créature ailée passant dans les parages. Manque de chance, ce fut Haziel qui s'était approché de moi. Et à présent, je le gardais prisonnier. Il n'était pas question que je quitte ce nouveau perchoir.
— Humaine, lâche-moi, s'énerva l'ange.
— La ferme, espèce d'ange prétentieux ! Mon nom n'est pas « humaine » alors cesse de me casser les oreilles avec ton arrogance !
Je ne savais même pas ce que je disais. J'enserrais ma prise, le corps tremblant alors que je m'efforçais à ne pas regarder en bas.
— Tu trembles ?
— Je ne tremble pas ! Et je n'ai pas peur ! C'est juste que... Mes jambes sont fatiguées, voilà !
Une excuse pitoyable, j'en avais bien conscience. Mais on s'en fichait royalement !
Lorsque le bras de Haziel s'enroula autour de ma taille, je ne pus empêcher un sursaut me surprendre. Il soupira avant de se tourner vers Lysandre.
— Gaddiel, tu pourrais choisir des humaines un peu moins faiblarde.
— Tu ne devrais pas dire ce genre de..., commença à conseiller Lysandre.
Mais alors que Lysandre grimaçait légèrement, mettant en garde son ami, j'étais déjà descendue des bras de cet ange. Avec une facilité enfantine et surprenant, je parvins à faire le faire basculer. Son dos percuta les nuages solides.
Il n'eut pas le temps de reprendre son équilibre que je lui sautais déjà dessus pour m'installer confortablement sur lui. Il ne me fallut que quelques secondes avant de prendre ma lame rangée dans le dos et d'attaquer l'ange vulnérable et sonné sous moi. Ne jamais insulter, énerver ou sous-estimer une pécheresse.
Au moment d'achever mon œuvre, dictée par un instinct créé au sein du Vatican et de l'Ordre de la Pécheresse, une main bien plus rapide que la mienne vint se saisir de mon poignet. Lysandre venait de stopper mon attaque.
Levant mes yeux vers lui, je le découvris avec un visage à la fois neutre et sévère.
— Vi, c'est bon, m'ordonna-t-il calmement.
Mais je n'étais pas du même avis. Cet ange m'avait insulté !
— Tu es sûre de vouloir l'attaquer ici ? Je te rappelle que le sol n'est...
Il n'eut pas besoin de finir sa phrase pour que je me rappelle du danger imminent. Lâchant ma petite épée, je me levais précipitamment. Lysandre avait déjà écarté les bras en prévision de l'inévitable. Il m'accueillit avec une joie certaine, me soulevant dans une étreinte bien plus rassurante que celle d'Haziel.
— Je veux rentrer, Lysandre.
— Fais-moi confiance, Vi. Tu n'as rien à craindre ici.
— Tu veux dire au milieu des nuages qui cachent le vide ?
— Non, Vi. Tu n'as rien à craindre tant que tu es dans mes bras, à me confier ton existence pour en assurer la sécurité.
Des mots doux et mielleux... Quel genre de femme pouvait y succomber ?
— Mon arme, réclamais-je en pointant ma dague.
Lysandre s'exécuta, ramassant l'arme pour la ranger avec la plus grande des précautions dans mon dos.
— Contente ?
— Si j'avais su où tu m'emmenais, je ne t'aurais jamais appelé. T'es pire qu'un démon.
Il ne s'en vexa pas. Bien au contraire ! Pourtant, Lysandre était au courant. Je n'aimais pas les hauteurs ! J'acceptais l'avion seulement lorsque je n'avais pas le choix. Et avec des comprimés en prime. Ce gars s'en était bien rendu compte en trois ans de cohabitation !
— Peut-être que tu auras moins envie de fuir mes bras à cette hauteur.
— Je te déteste.
— Nous savons tous les deux que c'est faux.
— Va te faire voir chez les grecs, emplumé.
Il soupira un rire du nez, appréciant de se faire insulter apparemment.
— Gaddiel, tu as amené une chasseresse ici ? s'emportait l'autre ange humilié et particulièrement mécontent.
— Une pécheresse, Haziel. Elle est une pécheresse. Et c'est pour la protéger que je l'ai amenée ici.
— Qu'elle revienne lorsqu'elle sera morte !
— Attention à ce que tu dis Haziel. Tu es mon ami, mais je ne te laisserai pas l'insulter davantage.
Ces mots chassèrent tensions et effrois, les remplaçant par un apaisement bien mystérieux. Mon corps se détendit presque aussitôt. Mes mains eurent comme un mouvement de caresse sur ses épaules...
— Vi ? m'interpela tendrement Lysandre.
Tournant mon visage vers lui pour voir ce qu'il me voulait, Lysandre passa sa main derrière ma tête pour me rapprocher de lui. Il pressa délicatement ses lèvres sur les miennes. Ce fut si précieux... Si mes yeux commencèrent à se fermer pour tenter d'apprécier ce moment délicieux, ma raison me rappela à l'ordre. Ce qu'il se passait n'était pas normal.
Plaquant mes mains contre les épaules de Lysandre, je tentais de me dégager.
Finissant par libérer mes lèvres prisonnières de son souffle, il me lança un regard voulant délivrer un message. Mais lequel ? Je n'y comprenais plus rien. Me laissant reprendre mon souffle, Lysandre poussa sur le côté mes cheveux, révélant ma nuque à Haziel.
— Gaddiel, est-ce que c'est ce que je pense ?
Lysandre confirma le questionnement silencieux de la tête.
— Je dois voir l'Archange Michel de toute urgence.
Haziel grimaça en secouant de la tête.
— Michel, ainsi que plusieurs autres anges, sont partis sur Terre. Tu es absent depuis longtemps, il est normal que tu ne le saches pas.
Lysandre pesta en silence.
— Tu n'as qu'à aller voir Zaphkiel. Pour ce genre de problème, je pense qu'il est mieux placé que Michel, tu ne crois pas ?
— Sans doute as-tu raison.
<><><>
Ce qui, de loin, avait semblé être un joli château semblable à celui de Blanche-Neige lorsque son prince l'emmenait après un baiser putride, se trouva être bien plus grand et somptueux que prévu. L'intérieur ne décevait aucune attente, les surpassant sans la moindre difficulté. Un palais digne de la Reine des Glaces en personne. Pourtant, la chaleur qui régnait en ces lieux ressortait tellement agréable qu'elle nous ramenait à la réalité. Elle était d'une douceur accueillante et printanière. Rien d'aussi agressif qu'un soleil ou de semblable à une saison estivale.
Plusieurs personnes souriantes marchaient dans les lieux. L'endroit vivant me donna l'impression d'entrer dans les locaux d'une entreprise dynamique et aux employés épanouis. On pouvait apercevoir les chemins accessibles par l'escalier qui s'enroulait autour de la tour centrale du château, montant bien plus haut que mes yeux pouvaient voir et donnant accès à diverses entrées.
— Les portes donnent accès à d'autres lieux de l'Au-Delà, m'expliqua Lysandre pour tenter de rassasier ma curiosité.
L'ange me déposa au sol et je marchais gaiement devant lui, les bras écartés en grand alors que je me laissais aller librement à l'observation des lieux. J'avais l'impression d'être telles Alice entrant au Pays des merveilles. Excepté que j'étais Virginia entrant au Pays de l'Au-delà.
Les regards se tournèrent de mon côté, des murmures se faisaient entendre. Lysandre m'attrapa par la main et les personnes alentours reprirent leur vie comme si de rien était.
— Lysandre ?
— Tu es vivante, ils se posent des questions. Mais ne t'en fait pas, tu es en sécurité ici.
— Pas ici, intervint Haziel. Tant qu'elle sera vivante, ce lieu sera dangereux pour elle.
Je me tournais vers l'autre ange, le regard trahissant une multitude de questions. Et comme à son habitude, il se mit à soupirer. Ce n'était pourtant pas ma faute si je ne connaissais rien ici ! Avant aujourd'hui, je n'avais encore jamais entendu parler de cet endroit.
— Les personnes que tu vois ici ne sont pas tous des anges. Certains sont des agents, d'autres des fossoyeurs. Il y a aussi des faucheuses et des secrétaires.
Je ne comprenais rien. Qui étaient les « agents » ? Et les « fossoyeurs » ? Je n'ignorais pas la nature des faucheuses, mais pour les secrétaires... Trois mots communs sur Terre mais qui semblaient impliquer des responsabilités très différentes dans le coin.
— Si tu restes près de moi, tout ira bien, me rappela Lysandre sans pour autant me détailler la situation.
— Gaddiel, intervint Haziel d'un ton sévère. Tu es inconscient de l'avoir amené ici. En tout cas Virginia, si tu t'égares, sache que les seules personnes auxquelles tu pourras te fier seront les anges. Nous sommes reconnaissables avec nos auréoles, même si la plupart ne la montrent pas ici. Donc la seule façon pour toi de nous différencier des autres est notre tenue. Nous avons chacun un uniforme pour nous différencier des autres. Les anges portes des toges, comme moi. La couleur diffère selon l'ordre hiérarchique auquel nous appartenons.
— Ok, donc tout ce que j'ai à faire c'est de ne pas lâcher la main de Lysandre, comprenais-je en venant glisser mes doigts dans ceux de mon ancienne proie.
— Qu'est-ce... ? s'étonna Haziel. Est-ce que tu as compris ce que j'ai dit ?
— Non.
Le désespoir se devinait dans le regard d'Haziel. Bien sûr, ses paroles n'avaient rien d'incompréhensible. Ça ne m'empêcha pas de préférer rester près de Lysandre en cet instant. Ou Gaddiel, comme semblait vouloir s'entêter de l'appeler Haziel.
En lui, j'avais nettement plus confiance qu'envers les autres dans les parages. Leurs règles et les créatures y vivant m'étaient inconnues. La sûreté se trouvait près de mon ange.
— Et est-ce que tu m'as écouté au moins ? commençait-il à perdre patience.
Je lui fis mon plus beau sourire, ce qui fit rire discrètement Lysandre, l'homme semblant déjà être habitué à ma personnalité.
— Non, pas du tout, lui avouais- je sans honte.
La paupière d'Haziel commençait à sautiller, ce dernier s'évertuant à des efforts sur sa respiration. Lysandre m'entraîna avec lui jusqu'au pied de la tour centrale, appuyant sur un bouton. Des portes s'ouvrirent après quelques secondes pour laisser sortirent quelques personnes aux tenues variées. Lysandre fut forcé de me trainer à l'intérieur, mon attention facilement distraite des priorités. Étions-nous dans un ascenseur ?
Mais je n'eus pas le temps de me poser davantage de question. Les portes se rouvraient et Lysandre me souleva du sol, empruntant un chemin. L'ascenseur se referma derrière nous et je m'aperçus avec effrois que le « chemin » était élevé à plusieurs mètres de hauteur du sol. Au moins plus d'une centaine d'étages. Et le pire était que le chemin était étroit et sans barrière !
Mes bras s'enroulèrent aussitôt autour de Lysandre, le monde commençait à vaciller autour de moi.
— Si tu as peur, tu peux me le dire.
— Tais-toi et avance, ange de mes deux.
Il s'exécuta, ne perdant pas plus de temps. Nous arrivions bientôt au bout, c'est-à-dire un immense balcon sans barrière sur lequel se dressait une nouvelle arche. Le passage était gardé par deux hommes en armure. Les auréoles et les ailes rétractées dans leur dos me prouvèrent qu'il s'agissait d'anges. Chacun tenait une lance dans la main.
— Gaddiel, quelle joie de te revoir, salua l'un des anges.
— Le plaisir est retourné. Je dois aller voir Zaphkiel.
— Nous t'ouvrons un passage direct, accepta l'autre ange avec le sourire.
— Merci.
Les deux anges posèrent leurs yeux sur moi, leur sourire chaleureux toujours sur les lèvres.
— Une humaine vivante ? Tu as prévenu son ange gardien de son arrivée ? demanda l'un des anges.
— Non.
Alors les anges parurent surpris.
— Gaddiel, tu connais la règle. Si un humain en vie doit entrer au Paradis, ou dans n'importe quel lieu de l'Au-delà, son ange gardien ou sa créature gardienne doit être prévenue.
Je me tournais vers Lysandre, surprise.
— J'ai un ange gardien ?
— Comme tous les êtres vivants, expliqua l'un des anges.
Le deuxième être ailé s'approcha de moi, posant sa paume contre mon front.
Une douce chaleur s'en dégagea, devenant rapidement pesante et brûlante. Elle se répandit dans mon corps avant de remonter et de s'accumuler vers mon front. La vague ardente sortit comme une explosion de ma tête, propulsant l'ange à plusieurs mètres de moi, contre son ami.
Ma tête bourdonnait et de nouveau le monde tourna.
— Qu'est-ce qu'il vient de se passer ? paniquait l'un des deux protecteurs de l'arche. Elle n'a pas de créature gardienne ?
Lysandre ne semblait pas comprendre non plus. Pas plus que moi d'ailleurs.
Me laissant poser pied à terre, il me saisit par les épaules pour m'empêcher de tomber alors qu'il remarquait mon léger déséquilibre.
— Vi, qu'est-ce que tu as ?
— Je ne sais pas... Je crois que je vais m'évanouir.
La sensation était réelle, mêlée à une migraine naissante qui se cessait de presser mon crâne. Et soudain, ma tête parut se briser, ou peut-être bien exploser. Tout devint noir. Mon esprit sombrait dans le néant.
Je perdais connaissance.
Date dernière mise à jour : 11/07/2024
Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro