Sincèrement, je n'avais aucune idée de pourquoi j'avais entrepris de suivre le loup crème, j'avais certes donné des raisons à Anna, et j'avais certainement dû être assez convaincante, parce que jamais je n'aurais pensé qu'elle accepterait ma décision. Cependant, au-delà du fait qu'effectivement je ne voulais pas repartir sans Elyss, c'était la raison de ce refus, que je ne comprenais pas moi-même. Il m'avait sortie de ces horribles grottes et avait été décidé à repartir nous faire gagner du temps, j'aurais pu faire ce qu'il nous avait dit, mais dans mon esprit, j'avais juste voulu qu'il rentre avec nous, et qu'il ne reparte pas.

A présent, Anna et moi courûmes côté à côté, précédées par Iléa qui nous guida, jusqu'à ce qu'elle ne s'arrête net en relevant la tête et en tendant l'oreille. J'essayai moi aussi d'écouter ce qui se passait autour, sans rien percevoir de prime abord, mais après quelques secondes j'entendis effectivement des bruits de branches qui se cassent et de grognements. Nous échangeâmes un regard avec Iléa et Anna, et cette dernière souffla :

— Bien, on va le chercher et on revient, j'espère juste que ça ne va pas mal terminer, Lana, si je te dis de partir, tu pars !

— Si Elyss est avec moi, sinon je ne vais nulle part !

— Je veux bien tenter de le ramener avec nous mais s'il ne veut vraiment pas, on ne s'inquiète pas trop, je pense sincèrement qu'il ne t'a pas sortie de là pour que tu y retournes.

Sur ces mots, elle dégaina une épée, plus courte que son habituelle, du fourreau accroché à sa hanche gauche, elle était sûrement elle aussi en argent, puisque sa lame en avait la couleur. De mon côté je retirai le cran de sécurité de mon pistolet et en serra la crosse pour ne pas le perdre dans un mauvais mouvement.

— Iléa, allons-y.

La louve rousse hocha la tête et reparti. Il ne fallut pas trente secondes pour déboucher sur un espace de la forêt un peu plus dégagé, mais toujours parsemé de racines, de branches mortes, et même de neige qui n'avait pas encore fondue. Elyss se tenait, tête légèrement basse mais queue fouettant l'air, face à trois loups, et je reconnu sans problème Aya et un autre gris clair qui avait déjà été posté devant ma cellule, ainsi qu'un autre, d'un pelage situe entre le gris et le brun légèrement orangé, que je n'avais jamais vu sous forme de loup mais que je devinai être Enéo, de par sa posture droite et son regard dur.

Iléa bondit alors et se tint à côté de son frère, montrant les dents aux trois loups, qui, eux, avaient remarqué ma présence et parurent étonnés. Elyss prit le temps de fixer sa sœur, les yeux ronds, avant de risquer un regard vers nous, grognant en m'apercevant avant de remettre les trois autres dans son champ de vision.

"Qu'est-ce que tu fais là ? Tu devrais déjà être loin !"

— On est venu te chercher, je ne veux pas partir sans toi, tu n'as aucune chance seul face à eux !

Aya lança un aboiement étrange mêlé d'un grondement et tenta d'avancer d'un pas, Iléa claqua des dents dans sa direction et la louve noir reposa sa patte où elle était, les yeux lançant des éclairs.

"Tu crois vraiment que ça va s'arranger avec toi dans les parages ? Tu aurais laissé Iléa y aller seule, je n'aurais encore rien dit, mais toi ..."

— Vas-y, dit que ça ne te fait pas plaisir de me voir.

"Dans n'importe quelle autre circonstance, ça me fera toujours plaisir de te voir, mais là, excuse-moi mais non."

En face, Enéo commença visiblement à s'impatienter, sans toutefois remuer d'une patte, et Aya avait une lueur dans les yeux qui ne me disait rien qui vaille. J'avais l'impression que le bêta négociait avec Iléa, ils restaient silencieux et se regardaient dans les yeux. Anna posa sa main sur mon épaule et me regarda durement:

— On y va, fait leur confiance.

— Non !

— Je ne te demande pas ton avis, on s'en va, point barre !

La voix d'Elyss raisonna dans ma tête :

"On vous rejoins dans peu de temps, promis."

Je sentis Anna me prendre par le bras en m'entraîner plus loin, puis tout se passa comme si le temps avait ralenti. J'avais jeté un dernier coup d'œil à Elyss, mais je vis aussi la louve noire qui avait bondit entre Iléa et son frère, qui avaient tous deux tenté de l'arrêter. Aya les avait esquivés et s'était précipitée vers nous, vers Anna plus précisément, toujours son horrible expression dans son regard. Mon mentor avait lâché mon bras et mis son épée en défense pour arrêter la louve qui s'en ficha royalement. Elle ouvrit la gueule et la referma sur la gorge d'Anna tandis que celle-ci, dans un même mouvement, arriva à taillader le poitrail d'Aya. Des deux côtés, le sang gicla, rouge vif.

Sous mes yeux, mon mentor s'écroula au sol, la main appuyée sur sa gorge, tentant tant bien que mal de respirer, ses pupilles dilatées, et une expression effrayante sur son visage. De sa gorge continuait à couler un flot de sang qui vint rougir l'herbe, la terre et la neige autour d'elle.

Choquée, je n'arrivai pas à sortir un traître mot de ma bouche, et dans un semblant de réactivité, j'enlevai mon gilet pour le presser contre sa gorge, et mon habit passa d'un rouge bien plus foncé qu'il ne l'était déjà en l'espace de quelques secondes. Cela ne changea absolument rien et je me sentis tout à fait inutile.

Toujours sous le choc, je me tournai vers Elyss, quémandant son aide d'un regard suppliant, les larmes prêtes à tomber mais coincées aux coins de mes yeux. Le loup crème était perché toutes dents découvertes sur Aya qu'il clouait au sol, et le sang de cette dernière, bien qu'il coulait bien moins rapidement que celui d'Anna, maculait les pattes blanches d'Elyss tout en poissant sa propre fourrure. A côté, Enéo et l'autre loup gris parurent eux-aussi sous le choc quant à ce qu'avait fait leur camarade, ils ne bougeaient pas, tout aussi pétrifiés que je pouvais l'être. Iléa, elle, s'approcha doucement et vint approcher sa truffe de la blessure d'Anna, puis elle posa ses yeux sur moi, le regard triste au possible, oreilles basses, elle secoua doucement la tête.

Plus aucun son ne retentit dans la forêt, les quelques oiseaux encore présents dans l''hiver de la forêt s'étaient tus, et même le vent avait cessé de souffler.

Je sentis quelque chose me frôler le bras et mon regard se posa sur mon mentor qui essaya de dire quelque chose entre deux tentatives de respiration sans qu'aucun son ne sorte de sa bouche. Cette vision s'encra dans ma mémoire, et je sus que, sans aucun doute, il resterait longtemps gravé en une vision d'horreur dans ma tête. Anna finit par sourire doucement puis ses yeux devinrent vitreux et toute vie quitta son corps.

Figée, je pus voir Iléa refermer ses yeux de doux coups de museau. Puis tout ce qui arriva ensuite, j'eus l'impression de le vivre de façon distante, c'était bel et bien là, je le voyais, mais je n'avais plus l'impression de le vivre.

Elyss s'approcha, posa sa truffe une demi-seconde sur le front d'Anna puis il la prit par le col de sa veste et la hissa sur le dos d'Iléa, la calant de sorte à ce qu'elle ne tombe pas. Puis il m'ordonna doucement mais avec autorité :

"Grimpe sur mon dos. Je ne veux pas de protestations."

Je me crispai, puis lui obéit, tremblante, les yeux à moitié dans le vague.

"On s'en va."

Cette décision ne parut pas plaire à Aya, qui maintenant à nouveau sur ses pattes, le poitrail toujours sanguinolent, se ramassa rapidement sur elle afin de sauter à nouveau sur l'un d'entre nous, mais Enéo lança un grondement sonore en venant se placer devant elle, dents découvertes, menaçant. La louve noire se recroquevilla, oreilles baissées, queue entre les pattes, nous fixant toujours d'un air mauvais.

Je ne vis pas ce qui se passa ensuite, j'entendis Elyss me prévenir de m'accrocher, ce que je fis sans broncher, et il démarra en trombe, Iléa sur ses talons Nous filâmes ainsi à travers la forêt, sans même être poursuivis, Elyss redressant parfois le corps sans vie d'Anna lorsqu'il menaçait de tomber du dos d'Iléa. En pleine course, celle-ci leva la tête et hurla, un hurlement poignant, captivant.

Triste.

Après un temps infiniment long, Elyss ralentit.

— Vous êtes tous re...

La voix de Téah s'interrompit soudain. En levant la tête et tirant mon regard du sol, je vis Ethan qui avait enfoui la tête de Téah contre lui.

— Que s'est-il passé ?

La parole me revint doucement et je balbutiai sans trop savoir que dire :

— Ma faute... Aya... Une folle... Sauté à la gorge... Je...

Enfin les larmes qui n'avaient pas voulu avant ce moment commencèrent à couler, et je sentis Téah qui vint me prendre dans ses bras je me pressai contre elle pour pleurer toutes les larmes de mon corps en l'espace de cinq minutes.

Entre temps, Iléa et Elyss avaient trouvé le moyen de se métamorphoser et de se changer. Ce dernier lança d'une voix sévère :

— Partons avant qu'ils ne changent d'avis et ne viennent nous rechercher.

Ethan demanda :

— Cachez-la quelque part, je vais prévenir les personnes concernées pour qu'on vienne la chercher au plus vite.

Téah m'accompagna à l'arrière de la petite voiture d'Anna, puis Iléa, Ethan et Elyss nous rejoignîmes, ce dernier venant me rejoindre à l'arrière.

Tandis qu'Ethan démarrait la voiture, je soufflai à demi-voix :

— C'est de ma faute, je n'aurais pas dû y retourner ... Et en même temps, je ne veux pas regretter d'être venue te chercher...

Elyss répliqua sèchement :

— Ca n'est en rien ta faute, j'aurais dû t'écouter et venir avec vous, tu n'aurais pas eu cette idée de revenir. J'aurais dû savoir que tu le ferais quand même, toi et ton esprit de contradiction.

Iléa s'énerva :

— Ça n'est la faute de personne ici présent, d'accord ? On fait tous des erreurs. Non, la vraie fautive, c'est Aya ! Je ne l'ai jamais sentie, cette fille, et je comprends mieux pourquoi, elle a toujours été mauvaise !

— On discutera de ça plus tard, le plus important pour l'instant, c'est de ramener Lana chez elle.

Ethan avait été clair et plus personne ne pipa mot. Il s'engagea sur la route qui traversait la forêt, laquelle je n'avais vu qu'une fois. Une unique fois que je ne pourrais jamais oublier.

Ce fut avec les larmes coulant sur mes joues, mais ne ressentant en réalité plus rien hormis une douleur qui me serrait le cœur et parut éternelle que je retournais chez moi. En compagnie de tous mes amis ... Ou presque ...

Fin du Tome 1

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Voila la fin du tome 1 >w<

Merci a ceux qui auront suivi jusqu'ici, et bienvenue a ceux qui n'ont découvert mon livre qu'il y a peu de temps.

Merci a ceux qui m'ont soutenues. Merci, tout simplement.

Si un tome 2 interesse, n'hesitez pas, plus que jamais, a le faire savoir. Il est écrit, terminé, relu, manque plus qu'a savoir si je ne poste pas dans le vent. Aussi, vos avis sont important, un petit commentaire, un petit vote fait toujours plaisir! :3 Et n'hesitez pas non plus a me suivre pour être au courant de la création du tome suivant (même si je ferais certainement une partie pour prévenir).

Encore merci, a bientôt pour le Tome 2 si l'avenir le veux (la semaine prochaine, quoi XD).