Chapitre 18
Plus les semaines passaient et plus les tensions se renforçaient entre mes deux amis, à mon plus grand regret. Quand ils se croisaient, Téahna évitait le regard d'Ethan, et lorsqu'elle ne pouvait s'empêcher de le regarder, c'était avec reproche mêlé de tristesse. Ou bien, c'était un regard pas très sympathique, mais qui, selon elle, voulait dire « Réfléchis au pourquoi ! Je ne t'aiderai pas. » Quant à Ethan, il ne comprenait vraiment pas, et ne cessait de se demander à quoi cela rimait. De mon côté j'essayais de passer de l'une, que je tentais de convaincre de parler à l'autre, que j'essayais de rassurer en disant que ça allait aller mieux d'ici peu, quand la grosse tempête serait passée.
Entre temps, j'avais eu plusieurs fois la visite d'Elyss, que je ne tentais même plus d'envoyer paître par lassitude, le laissant me raccompagner chez moi la plupart du temps. Au moins, il me laissait tranquille les deux ou trois autres jours suivant, ce qui me laissait un répit toujours bienvenu. Il m'avait aussi emmenée sur la petite terrasse cachée une ou deux fois, et, même si cela m'énervait de le dire, j'avais pu lâcher tout le reste de ma vie en prenant le soleil, qui ne réchauffait pourtant rien, et cela en ne pensant plus à rien d'autre.
Après encore une autre semaine, j'en eu marre, voir deux amis d'enfance autant en froid, même si ça n'était que dans un sens, commençait sérieusement à m'attrister et à me mettre en rogne, bien que je ne le montrais pas. Ce fut après une balade avec Iléa qui me dit qu'il fallait faire ce que je pensais mieux pour tout le monde, que je me décidai à agir enfin, même si cela trottait dans ma tête depuis un petit moment déjà. Seulement, lorsque je pensais à ce que j'allais dire, mon cœur se serra, mais il ne me fit pas aussi mal que je l'aurais pensé dans une telle situation.
Ce fut ainsi que je pris Ethan à part dans un couloir où personne ne passait et lui annonça en soufflant, le regardant droit dans ses yeux brun :
— Il est temps d'arrêter tout ça.
— De quoi ?
— Tout ça ... Tout ça, quoi. Nous, laisser Téah souffrir comme je le fais.
— Tu te trompes, Lana, c'est à moi qu'elle en ...
— C'est toi qui te trompe, j'y suis largement pour quelque chose. Ça fait mal de le dire, mais a-t-on vraiment avancés, tout les deux?
— Quelle question, bien sûr que oui !
— La réponse est non. Et tu le sais aussi bien que moi, ne cherche pas d'excuse.
Je pris mon souffle avant de continuer, baissant les yeux, ne voulant pas croiser son regard.
— Peux-tu affirmer sans sourciller que tu m'aimes autant que tu ne me le dit?
Je le voyais dans ma tête ouvrir la bouche pour la refermer ensuite. Il ne réussi même pas a répondre, et en un sens, c'était douloureux.
— Tu vois, tu ne peux pas répondre oui à cette question. Je pense que c'est parce que tu me considères comme une amie, une bonne amie, car nous sommes tous deux vampires, mais sans plus. Ça doit être la même chose pour moi. Et parce qu'on n'en a jamais vraiment côtoyé d'autres, on a tous deux pensé à quelque chose de plus fort que de l'amitié.
Lorsque je relevai les yeux, je le vis me regarder, bouche bée.
— Tu es devenue plutôt loquace. Pour toi ca ne vaut pas la peine de continuer ?
— Il ne s'est jamais vraiment passé quelque chose. Maintenant va rejoindre et parler à Téah. Elle m'attend dans la cour arrière, et ne s'attend pas à te voir. Profites-en, et excuse-toi.
Il me regarda, incrédule.
— M'excuser de quoi ?
— Vas-y, et ne discute pas. Tu comprendras quand tu lui parleras. Garde juste en tête qu'il y a une vraie raison à ce quelle t'en veuille à toi, mais aussi à moi, parce que, même si tu ne veux pas l'admettre, je suis autant fautive que toi.
Il bafouilla quelque chose pour tenter de refuser, mais le pousser en lui montrant les crocs fini par le convaincre. Il fila dans la direction que je lui avais indiquée.
Je restai immobile quelques minutes, mais me décidais ensuite à le suivre, bien que je sache que ça n'était pas poli de ma part, mais j'avais beau ne pas être une commère d'origine, la tentation était trop forte, et je comptais bien envoyer un caillou ou deux sur le crâne d'Ethan s'il racontait n'importe quoi.
Lorsqu'il rejoignit Téah, je me cachai, assise derrière un mur, assez près pour entendre ce qui se disait. Apparemment, Téah n'avait pas l'air enthousiaste de le voir, et lui lança froidement :
— Qu'est-ce que tu fais là ?
— Je suis venu m'excuser.
Un silence s'en suivit, il finit par ajouter :
— Lana vient de me plaquer.
— Quoi ?
Le ton de Téah n'était pas seulement colérique, mais aussi très étonné. Je n'entendis pas la réponse de Téah, si elle en avait donné une, mais à la place, ce fut une autre voix que j'entendis :
— Qu'est-ce que tu fais assise ici ?
Je sursautai en me tournant vers Elyss qui m'avait surprise tant j'étais concentrée sur mes deux amis.
— Va-t-en, ce n'est pas le moment !
Je pouvais affirmer après cette expérience qu'envoyer balader quelqu'un en chuchotant était quelque chose de plutôt compliqué. Evidemment, il ne m'écouta pas et s'assit à côté de moi.
— Que se passe-t-il ?
— Si au moins tu pouvais te taire, ça ne serait déjà pas trop mal.
Cette fois-ci, il ne répondit pas et se contenta de rester silencieux. Derrière le mur, Ethan tentait de s'expliquer, de manière maladroite, mais visiblement sincère.
— Je ne veux pas qu'on soit fâchés, tu le sais. Je n'ai jamais voulu t'offenser, alors aide-moi, dis-moi ce qui ne va pas une fois pour toutes, j'ai beau réfléchir, je ne vois pas.
— Tu ne comprends vraiment pas, ça me parait pourtant si évident. Pour toi quand est-ce que tout cela a commencé ?
Son ton était cassant, mais j'y décelais une note de déception. Après quelques secondes de silence, Ethan finit par répondre, hésitant.
— Lorsque j'ai demandé à sortir avec Lana ?
—Exact. Il n'y a rien qui te fait tilt ?
Sa voix s'était cassée sur la fin et je pouvais, sans même la voir, deviner son regard triste, fixé au sol. Ethan, lui, je ne sus trop comment il avait réagi, puisque je n'entendis plus aucun son venir de lui. Finalement, il balbutia, l'étonnement se sentant dans sa voix, avec de l'incrédulité.
— Ne me dis pas que tu étais... Téah, je...
Comme si elle était à bout, j'entendis cette dernière pester ces paroles avec une vigueur équivoque à sa frustration :
— Jalouse ? Oui, et ce n'est pas tout, je vais te la faire en entier, tant que j'y suis. J'en ai marre d'attendre que ça vienne de toi en vain, ce n'est pas un reproche que je te fais, juste j'aurais préféré la situation inverse, et c'est pour ça que j'aurais espéré jusqu'au bout.
Elle se tut trois secondes, et je l'entendis inspirer un bon coup pour ensuite dire à son ami tout ce qu'elle avait voulu lui dire, mais qu'elle n'avait jamais réussi à faire.
— Ethan, je t'aime, je t'ai toujours aimé, tu dois me considérer comme ta meilleure amie, mais moi, ce n'est plus une amie que je veux être à tes yeux, mais bien plus et toi, tu n'as pas l'air de le remarquer. Et puis, tu as porté ton attention sur Lana, pour lui dire ce que j'ai toujours eu envie d'entendre, et pour lui faire tout ce que j'ai envie que tu me fasses, et ...
Ethan lâcha soudain, sèchement, mais pas méchamment :
— Ca suffit, Téah.
Il laissa une pause, durant laquelle aucun des deux ne prit la parole, puis :
— Ca suffit... tu n'as pas à raconter tout ça, tu n'aurais pas dû et j'aurais dû m'en rendre compte. J'espère que tu me pardonneras de m'être montré si idiot. Je crois que je le savais, et depuis un moment déjà, mais ça devait me paraitre bizarre, après toutes ces années, et ce même sans que je ne m'en rende compte.
Je l'entendis soupirer, ou alors se préparait-il juste à ce qui allait suivre :
— Tu sais, je crois... je crois que moi aussi, ça me plairait d'avoir, disons, plus, avec toi. Qu'est-ce que tu en dis ?
Je n'y tins plus et regardai par-delà le mur, pour voir mon amie se jeter au cou de celui qui avait mis tant de temps avant d'en arriver à lui demander ce qu'elle souhaitait vraiment avoir. Ses larmes coulaient d'elles même, des larmes de joies, qui me firent sourire à mon tour, tandis que Téah s'exclamait :
— J'en dis qu'il était temps. Je veux que l'on soit ensemble aujourd'hui et tous les jours qui suivent !
Il lui rendit son étreinte, puis je la vis le regarder, les larmes aux yeux, mais un sourire éblouissant sur le visage, avant de rapprocher celui-ci de celui d'Ethan et de l'embrasser. Celui-ci le lui rendit tandis que moi, je repassai ma tête derrière mon mur. Elyss, dont j'avais déjà oublié la présence, parut un peu désorienté.
— Tu n'es plus avec ?
— A ton avis. Viens, on y va.
Je repartis en direction inverse, aussi discrètement que possible, prenant le chemin pour rentrer, Elyss sur mes talons.
— Comment ça va ?
— Je vais bien. A vrai dire, je vais mieux. Un poids s'est déchargé de mes épaules, et je sais que Téah et Ethan ne vont pas se quitter de sitôt. C'est ainsi que j'aime les voir.
— Et tes sentiments à toi, dans tout ça ?
— Ils vont bien aussi. Un peu secoués, mais ce n'était finalement qu'un très bon ami, doublé du fait que l'on soit vampire tous les deux.
Avec cette tête-là, neutre et pas agaçante le moins du monde, et ses yeux bleus plongé dans les miens, j'en vins à penser à la façon dont je le considérais. Ces dernières semaines, sans me sentir aussi proche qu'avec Ethan ou Téah, je m'étais bel et bien rapprochée de lui, et sa présence n'était plus si dérangeante. Je fini par lâcher dans un souffle.
— J'abandonne.
— A quel propos ?
— Tu as atteint le dix, content ?
Stupéfait, je le vis cligner des yeux plusieurs fois d'affilées, et je lançai avec un sourire amusé :
— Amis ?
Son visage s'illumina soudain et il me prit en enroulant un bras autour de moi avant de me frotter la tête de son poing, tandis que je râlais en tentant de m'extirper de sa prise.
— Amis ! Je ne te décevrais pas, je te le promets !
— Commence par me lâcher !
Il obéit et me laissa me libérer, puis je recoiffai du mieux possible mes longs cheveux bruns foncés. Je lui donnai en retour un coup sur l'épaule.
— Tu sais que tu m'énerves ?
— Sans blague ? Je ne compte plus les fois où tu me le dis.
— Idiot.
Je le poussai sur le côté en lui lançant un léger sourire taquin. D'accord, il était énervant, mais il me fallait avouer qu'en sa présence je me sentais bien et que j'étais plus expressive. Tout en continuant de marcher, il regardait autour de nous, puis il changea de conversation.
— Tu es vraiment obligée de passer par ici, pour rentrer chez toi ?
Je scrutai les petites ruelles désertes à mon tour.
— J'ai encore du mal avec trop de monde, la rue principale est trop fréquentée. Quoique, tu vas me dire, les bestioles qui trainent ici ne sont pas mieux.
— Quels genres ?
— Je parle de toi, crétin.
Il feignit l'indignation :
— Je ne suis ici que parce que tu y es !
— Mais je ne t'oblige à rien, pas la peine de te forcer à me suivre.
— Je n'ai pas besoin de me forcer, tu sais. J'aime bien ta compagnie, et puis, tu m'intrigues, tu sais, et j'ai mes raisons de venir te voir.
— C'est possible de savoir lesquelles ?
Il me fixa, puis détourna le regard et après un léger moment, il commença :
— Lana, tu sais, je... enfin...
Il n'y avait plus de trace d'amusement, ni dans sa voix, ni sur son visage, et je l'incitai à continuer :
—Oui ?
Finalement il me regarda de nouveau en lâchant :
— Non, rien, laisse tomber, contente toi de rester toi-même.
Sans lui répondre, je tournai légèrement le visage vers lui, il regardait devant lui et tournait machinalement lorsqu'il le fallait, force était de croire qu'à force de m'accompagner, il avait dû bien mémoriser le chemin. Lorsqu'il jeta un coup d'œil vers moi, je détournai le regard. Il s'en amusa.
— Eh bien, il est loin le temps où tu voulais m'attaquer.
— Ca va faire deux mois... La semaine prochaine.
— Depuis quand ? Notre rencontre ?
Je m'étais embêtée à compter, un soir où je n'avais rien à faire et Elyss en parut étonné, puis il dit :
— J'ai l'impression que c'était il y a bien plus longtemps, tu as tant changé, en bien, je veux dire.
— Et toi tu es toujours le même garçon énervant du début, tu n'as pas changé d'un poil.
— Mais c'est bien ou c'est mal, selon toi ?
Je haussai les épaules, n'en ayant aucune idée. Le reste du chemin se fit en silence, jusqu'à ce qu'Elyss remarque que nous étions presque arrivés. Effectivement, je voyais ma maison cent mètres à peine plus loin. Tandis qu'Elyss m'accompagnait jusque mon palier, je lui dis :
— Au fait, tu sais... je pense que je ne vais pas manger avec eux demain midi, j'imagine que ça ne te dérange pas si je viens avec toi pour le déjeuner ?
Son sourire réapparu aussitôt et il accepta :
— Bien sûr que tu ne me déranges pas. On se rejoindra devant le self ?
Je hochai la tête et tout en ouvrant la porte d'entrée, je le saluai, ce à quoi il répondit d'un geste de la main.
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Tout d'abord, merci pour les plus de 200 vues \0/.
Toujours beaucoup de dialogue mais il s'agit d'un chapitre que j'aime beaucoup :D.
J'espère que vous aurez apprécié ce chapitre autant que moi quand je l'ai écris :3.
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