Hier, j'ai vu une drôle de créature dans l'eau. Je sautais de rocher en rocher à la recherche de crabes, quand j'ai vu un sac en plastique flotter à la surface. Je n'aime pas la pollution, alors j'ai voulu le ramasser. Il faut garder la mer propre. Mais papa m'a interdit d'y toucher. Il dit que c'était une méduse. Apparemment, c'est un animal vivant.

Elle est très belle. Sous son chapeau en forme de boîte, elle a des longs filaments qui traînent dans l'eau, ondulant dans les vagues. En plus, elle est bleue, ma couleur préférée. Papa dit qu'il n'en avait jamais vu de comme ça. Il pense que c'est sans doute la tempête d'il y a quelques jours qui l'a ramenée ici, dans le port. Je l'ai observée un petit moment, puis nous sommes repartis pêcher.

Je suis retourné voir la méduse. Elle s'était un peu déplacée et j'ai du la chercher, mais j'ai fini par la trouver. Papa est venu me chercher et m'a grondé, il dit qu'à cinq ans, je ne dois pas partir sans prévenir. En plus, il dit que cette méduse est peut-être dangereuse. Mais je sais qu'elle est gentille. La preuve, c'est que juste avant que papa n'arrive, je l'ai vue faire un câlin à un poisson qui avait l'air mal en point pour le réconforter. Et ça, c'est gentil.

Maman m'a dit que méduse se disait Jellyfish en anglais. J'aime bien ce mot. Ça me fait penser à de la gelée, et j'aime bien la gelée. C'est tout doux, et c'est délicieux sur les tartines, surtout celle à la fraise. Du coup, j'ai décidé d'appeler ma méduse Jelly. Je voulais aller lui dire son nouveau prénom, mais papa m'a interdit de sortir. Ce n'est pas grave, j'irais ce soir, quand il ira pêcher des crevettes.

Il fait sombre maintenant, c'est la nuit. Je pars pêcher les crevettes avec papa, comme prévu. Il est sur les rochers avec une lampe. Je m'ennuyais, alors il m'a prêté une lampe pour que je pêche aussi. J'ai calée la lampe allumée entre deux pierres et je suis parti chercher Jelly.

Dans le noir, j'ai eu du mal à la voir. Elle s'était de nouveau un peu éloignée, vers les quais. J'ai discuté avec elle. Je crois que son prénom lui plait. Elle est vraiment très jolie. Je suis sur qu'elle est toute douce, comme le dit son prénom. Je veux la toucher.

Du coup, je me suis allongé à plat ventre sur le ponton et j'ai tapoté sa tête. Je ne m'étais pas trompé, elle est toute moelleuse ! Elle s'est un peu éloignée du bord, alors je me suis penché en avant. Mais j'ai glissé, et ma main a plongée dans le vide. Et moi aussi.

J'ai poussé un cri en touchant la mer. Elle était froide, très froide. L'eau est rentrée dans ma bouche et j'ai bu la tasse. C'était salé, comme à la plage. Il fait tout sombre autour de moi, et mes vêtements sont lourds. Je ne distingue plus rien, si ce n'est les bulles d'air que j'ai crées et la forme vague de Jelly devant moi.

J'ai peur. De près, la mer est noire et glaciale. Heureusement, Jelly est là. Mais elle s'éloigne encore. Je ne veux pas qu'elle parte. Sa présence me rassure. Je lui ai fais un câlin, comme elle avais fais avec le poisson.

Ça fait mal. Jelly n'est pas douce. Je ne comprends pas. J'ai de plus en plus de mal à bouger. J'ai mal, de plus en plus. Je n'arrive plus à serrer Jelly dans mes bras. Je...

Je crois que je coule.