14. Tu peux toujours courir (*)
私が盲目になるまで
« 𝐔𝐍𝐓𝐈𝐋 𝐈 𝐆𝐎 𝐁𝐋𝐈𝐍𝐃 𝐜𝐡𝐚𝐩𝐢𝐭𝐫𝐞 𝐪𝐮𝐚𝐭𝐨𝐫𝐳𝐞 ༄
rebell yell billy idol
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J'ouvris les yeux. Le sol était glacial, le plafond sombre. Mes paupières pesaient comme des enclumes, je me rendormis.
J'ouvris les yeux. Il faisait vraiment froid. Un frisson parcourut tout mon flan écrasé contre le sol. Ma tête et mon corps entier tournaient, tanguaient dans l'espace ; je n'arrivais plus à savoir où et dans quelle position j'étais. J'étais en chute libre, en apesanteur.
Je fermai les yeux, trop fatiguée pour me maintenir éveillée. Je m'étais endormie d'un coup, dans une position inconfortable. Et, surtout, mes poignets étaient ligotés derrière mon dos.
Ligotée ?
Ah, oui, c'est vrai. On m'avait kidnappée. Enfin, ça va.
Non, ça n'allait pas, pas du tout. Premièrement parce que l'homme pour qui j'avais commencé à développer des sentiments n'était autre que mon ravisseur, et deuxièmement, car je n'avais aucune foutue idée de ce que j'étais censée faire dans ce cas de figure. Crier à l'aide ? On allait juste me foutre encore plus de sédatifs. Tenter de m'échapper ? Idem, et puis à présent, j'étais surveillée.
De plus, je n'avais toujours pas les idées claires et ma tête tanguait de plus belle. Je jetai un coup d'œil à So, bras et jambes croisés, le dos balancé au fond de son dossier, et les pieds posés sur la face supérieure du bureau. Il était plongé dans un sommeil agité. Et moi, je ne bénéficiais que d'un coin de la pièce, à même le sol, sans couverture ni rien. D'ailleurs, je n'avais aucun souvenir de comment j'ai pu me rendormir si vite.
Ah, mais quelle idiote. Il dormait. C'était le moment parfait pour tenter une évasion.
Je réfléchis à un plan d'action, tout en surveillant les yeux clos de mon gardien. Il faisait presque nuit. Je ne pouvais définitivement pas sauter par la fenêtre, d'abord car je n'avais actuellement pas l'usage de mes mains, et ensuite parce que désescalader une façade de bâtiment semblait bien plus compliqué que dans les films. Il ne me restait qu'à me tourner vers ma deuxième issue : la porte.
Il fallait juste espérer qu'il n'y ait personne derrière celle-ci.
Je me levai sans un bruit et me dirigeai à pas de chat vers la porte, puis y collai mon oreille. Pas un bruit. Ensuite, je glissai un œil à travers la serrure : la lumière était éteinte, il ne devait donc y avoir personne. Je me tournai et tentai d'actionner la poignée au ralenti avec mes mains liées, le cœur battant. Arrivée en bas, je la tirai contre moi avec toutes les précautions du monde. Enfin, je jetai un dernier regard à So, puis m'extirpai de cette pièce de malheur.
Une fois l'interrupteur enclenché, l'endroit où j'avais atterri ressemblait à un petit hall d'étage, avec son comptoir miteux et son horloge cassée. Je devinai, à côté de quelques chaises, l'ancienne présence d'un canapé, sous lequel s'était amoncelé un paquet de poussière et où le sol n'était pas décoloré. Il devait y avoir une table ronde juste à côté, peut-être une plante verte décorative et un distributeur d'eau. Je remarquai également une armoire encore indemne quoique couverte de crasse.
La suite de mon plan consistait à trouver de quoi me défaire du gros scotch sur mes poignets, qui m'empêchait de me mouvoir correctement et pouvait s'avérer dangereux si je me retrouvais à courir. Je regardai une nouvelle fois autour de moi. Il devait bien y avoir des ciseaux dans cette armoire, non ?
Je m'en approchai pour l'inspecter, et à mon plus grand malheur, elle était fermée à clé par un gros cadenas. Heureusement, le crochetage, ça me connaissait. Mon père avait fait l'erreur de m'en apprendre les bases, puis d'enfermer mon téléphone dans un placard cadenassé le soir quand j'étais au collège. Je le suspectais de faire exprès pour tester mes compétences.
Je tirai chaque tiroir du comptoir —ce qui me prit pas mal de temps, puisque je devais le faire de dos, et trouvai au fond de l'un d'eux deux trombones tordus. Parfait. Je m'attelai à les transformer l'un en tige terminée par un petit crochet, et à plier l'autre, mais l'opération me prit plus de temps que prévu puisque j'avais les mains moites d'angoisse et que je n'étais pas dans une position très convenable.
Réussir à crocheter un cadenas de dos et les poings collés, voilà un défi que je m'engageais à relever. Si je m'en sortais vivante, je pourrai me vanter de mes exploits auprès de mon paternel. Une vague d'émotion me prit soudainement à sa pensée. Oui, il fallait que je m'en sorte.
Je trifouillai le mécanisme avec mes deux bâtons. J'avais déjà réussi à le faire les yeux fermés, alors il n'y avait pas de raison que je n'y arrive pas ainsi. En vérité, le plus long était l'étape de préparation. J'avais de la chance, puisque le verrou se trouvait à autour de mes mains, et que je n'avais pas la souplesse nécessaire pour les lever plus haut. Il suffisait de maintenir une pression avec l'une des tiges, et de gratter avec l'autre : un jeu d'enfant, en théorie.
Après quelques secondes, minutes, ou heures d'intense galère, je n'en savais rien puisque j'avais perdu la notion du temps, je réussis à ouvrir ce fichu cadenas. J'évitai au dernier moment de le faire tomber, me rappelant que je n'étais pas censée faire de bruit, et le rangeai dans une poche de mon jeans. Puis, j'ouvris soigneusement les battants de l'armoire.
Quelle déception ce fut, il n'y avait quasi rien que des feuilles, des toiles d'araignée, des insectes morts et encore de la poussière. Je ne pouvais pas fouiller dedans sans mes bras.
Je me résignai à y plonger la tête, malgré la saleté. Effort vain, puisque je n'arrivais pas à les décaler d'un millimètre. Je soufflai de frustration, et toussai à cause de la poussière. Un éclair de génie me vint. Je soufflai de plus belle comme sur les bougies d'un gâteau d'anniversaire et quelques dossiers voletèrent, dévoilant un cutter. C'était mon jour de chance ! Enfin, non, pas vraiment pour le coup.
J'attrapai son manche entre mes dents, puis le fis chuter doucement sur le comptoir. Je me tournai et pus l'agripper avec mes mains pour jouer de la lame et enfin charcuter ce bout de plastique collant. Ce fut bien sûr, non sans me l'enfoncer dans la main. Je me retins de pousser un cri de douleur et terminai mon entreprise.
Alors que je pouvais enfin crier victoire tout en léchant ma plaie, la porte que j'avais soigneusement fermée pour étouffer le bruit s'ouvrit d'un coup.
Non, sérieusement ? Après tous ces efforts ?
Shinso en sortit en soupirant. Je m'armai de mon cutter encore tâché de sang et me mis en position de combat, fébrile, mais il ne semblait pas intimidé le moins du monde. Évidemment, vu l'état dans lequel j'étais et ma petite taille. Quoiqu'il ne fallait pas me sous estimer puisque je connaissais quelques techniques de corps à corps et les points vitaux où planter mon arme improvisée.
— Lâche ce jouet Anzai et retourne dans la pièce, ordonna-t-il sur un ton lasse.
— Tu peux toujours courir, répliquai-je déterminée.
— Non sérieusement, tu ne veux pas te retrouver contre les mecs d'en bas. Tu veux pas juste te tenir tranquille et éviter de créer des problèmes ?
Alors ça c'était la meilleure, il me demandait de rester tranquille alors qu'il m'avait kidnappée ! Je lançai :
— Pourquoi tu fais tout ça ? Quel est votre but ?
— Je ne sais pas, répondit-il en haussant les épaules.
— Arrête de te foutre de moi, il y a bien une raison pour que tu perdes plusieurs mois de ta vie à m'approcher ! Qu'est-ce que vous vouliez ; moi, ou n'importe quelle fille ? C'est une demande de rançon ? Non parce que j'ai pas d'argent et où est-ce que vous me-
— Attends, tu crois vraiment que je vais te le dire ?
Je bouillonnais intérieurement. C'est officiel, je le déteste.
Je jetai un rapide coup d'œil derrière moi, je voyais à travers le verre de la porte la cage d'escalier. Il ne me restait plus qu'à me jeter au hasard dedans et dévaler les marches en priant pour qu'il ne m'arrive rien de trop grave avec les "mecs d'en bas".
Alors que je me lançai dans mon plan, la voix de So m'arrêta.
— Anzai... ?
Il y avait quelque chose de plaintif dans son regard et sa voix, comme s'il me suppliait de ne pas partir.
— Si tu penses que je vais t'é... commençai-je avant de perdre le contrôle total de mon corps.
Je ne pouvais plus bouger d'un poil. Il m'avait eue, ce connard, il avait utilisé son alter encore une fois. Je criais des injures intérieurement, mais mes lèvres ne bougeaient pas d'un pouce.
— Retourne à ta place et rendors toi.
Shinso Hitoshi, un jour, je me vengerai.
☽︎☾︎
— Mais puisque je vous dis que c'est un enlèvement !! hurlait Neru Ueno dans le commissariat.
L'adolescente fulminait de rage, sur le siège où on l'avait conviée à s'asseoir. Face à elle, le policier notait derrière son ordinateur quelconque information. Il y avait étalé sur son bureau un petit pot de fleurs, du gel antibactérien, une myriade de post-it et le document qu'on avait fait remplir à la jeune fille, témoin de l'agression de Masahiro Anzai.
Sur le mur dans son dos, une carte de Musutafu et plus précisément la banlieue de Senshima, ainsi que des casiers qui débordaient de dossiers.
— Vous pourrez signaler toute disparition après vingt-quatre heures, répéta-t-il pour la énième fois bien qu'elle semblait ne rien vouloir entendre. À l'heure qu'il est votre amie doit rentrer des cours, ne vous inquiétez pas. Elle doit passer du temps dans un club ou avec des camarades.
— Mais faites votre travail bordel de merde, elle ne répond plus aux messages et son père vient de se faire tirer dessus avec une arme à feu !
Si ça ne tenait qu'à lui, le vieux policier aurait fichu à la porte cette furie, mais il était censé la questionner à propos de ce qu'elle avait vu.
Neru serrait les poings de frustration. Elle avait toujours détesté la police et leur incapacité. À l'heure qu'il est, il pouvait être arrivé mille et unes choses à Yoko. Son mauvais pressentiment ne l'avait pas lâchée, mais comme d'habitude, les adultes refusaient de l'écouter.
Elle jura intérieurement contre le policier et contre elle-même. Si seulement elle avait empêché son amie de parler à ce garçon, si seulement elle avait découvert le fameux carnet plus tôt. Rien de tout cela ne serait arrivé. Malheureusement, elle n'avait plus le carnet en sa possession, et de toute façon, ça n'aurait pas suffi pour inculper Shinso.
Et puis, Neru était certaine que l'agression de Masahiro n'était pas une coïncidence. Si elle n'était pas là, il aurait pu...
Enfin bref, il devait y avoir un lien, mais quoi, pourquoi ?
Quelqu'un toqua plusieurs fois à la porte. Nahoshi en surgit, son téléphone à la main.
— La classe de 2-1 dont fait partie Yoko Anzai a terminé les cours à quatorze heures, les voisins l'ont vue rentrer à quatorze heure trente, puis repartir vers quinze heures vingt. Le signal de son téléphone s'est coupé peu de temps après vers le quartier de Mizumi où elle ne s'est jamais rendue auparavant.
Le policier soupira une fois de plus.
— On est très occupés, vous savez ? Ça ne reste pas suffisant pour signaler une disparition, mais si vous me laissez tranquille je peux vous envoyer la chercher avec la patrouille de nuit dans quelques heures.
— Merci beaucoup monsieur, le remercia Nahoshi en s'inclinant.
Il leur somma de rentrer chez eux après avoir donné leurs coordonnées, et ils se retrouvèrent à l'entrée du commissariat.
— Putain, je déteste les flics ! Ils ne sont pas foutus de servir à quelque chose ! s'énerva Neru en shootant dans un caillou.
— Ils ne font que leur travail... C'est l'organisation qui est mauvaise.
— Et cette organisation, en étant policiers, ils l'approuvent.
— Je ne pense pas que tous l'approuvent à 100%, ils veulent juste se rendre utiles pour les citoyens. Il n'y a pas que des mauvais flics.
— Mais il y en a assez pour que ça soit inquiétant.
Il posa une main sur son épaule pour la rassurer. Lui aussi, était inquiet. Et Katsunaga devait l'être encore plus.
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