Chapitre 18 Faust999
Un homme commun, solitaire, pianotait sur plusieurs claviers en observant des vidéos. Un souvenir refit surface.
« Marcel s'assit à une table. Il approcha la paille des lèvres, mais repoussa la boisson trop froide en esquissant un rictus. Une gothique aux lèvres noires le regarda avec dédain en regagnant la sortie. Deux étudiantes riaient en observant. Il n'était certes pas un "tombeur", mais pas non plus le plus moche ! Il détourna le regard pour apercevoir un jeune homme en bomber venant d'un air décidé dans sa direction.
— Toi le vilain, tu dégages.
Habitué de ce genre de situation, il n'offrit aucune résistance. Il commença à se lever quand un grincement de chaise sur le côté l'avertit d'une présence, une jeune femme venait de s'asseoir. Il évita son regard en se concentrant sur sa boisson. Son agresseur disparut de son champ de vision. Il attendit ses vaines plaintes avant que l'on ne l'expulse au-dehors. La voix douce de la dame le mit à l'aise.
— Marcel, nous avons besoin de tes services.
— Mais, de quoi parlez-vous ?
Deux hommes, l'un en costume, l'autre en blouson moto la rejoignirent pour l'entourer sur le canapé.
— Marcel, je te présente Gecko, Louis-Philippe. Moi, je suis Enéa ! Nous avons une proposition à te faire ?
— Je ne comprends pas, annonça-t-il en se levant.
Le motard fit coulisser la chaise sous ses jambes pour le forcer à se rasseoir.
— Salut, Marcel.
— Que me voulez-vous, demanda-t-il en les dévisageant ?
La charmante Enea reprit la parole en l'empoignant délicatement.
— Nous formons un groupe, et nous avons besoin d'un hacker performant, toi !
— Mais...
— Nous pouvons assurer la protection dont tu sembles avoir besoin.
Il hésita longuement en observant ses doigts, puis releva la tête.
— Je... Dites-moi tout. Attendez, comment s'appelle votre groupe.
— Les 4 fantastiques !
— Sérieux !
— Va savoir. »
Rejoindre une communauté avait été assez complexe pour Marcel. D'un tempérament solitaire contraint par la vie, il avait toujours évolué depuis son ordinateur. Autant il était une célébrité au sein du réseau internet, autant ses propres voisins ignoraient son existence. Il évoluait, dirigeait d'une main ferme la matrice, espace virtuel en trois dimensions offrant une immersion totale dans le réseau sous le pseudo de Faust999.
Certains l'imaginaient comme une essence divine au sein de la matrice.
Certains hackers affirmaient que leur nature était indépendante du milieu dans lequel ils travaillaient. Que Faust999 n'était pas une personne, mais une intelligence informatique !
Certains répétaient sans cesse la doctrine de Faust999, pour suivre, regardez-moi, suivez-moi, marchez avec moi, voyez à travers moi, devenez moi... Trop tard, reset !
Marcel prenait plaisir au travail pour lequel on l'avait embauché. Camoufler les incessantes hausses de la consommation énergétique n'était pas simple. Certains hackers possédaient des outils permettant de vérifier avec très grande précision la consommation électrique en temps réel d'une machine. En observant des motifs spécifiques dans les graphiques de consommation, on pouvait en déduire que tel ou tel périphérique avait été allumé, découvrir quel programme avait été lancé. Marcel avait créé son cheval de Troie, une sécurité imparable protégeant l'intégralité des fondations du portail Neréide. Il ne croisait que très rarement ses acolytes, mais ce n'était pas pénalisant.
Il avait une préférence pour Gecko. Il n'était pas gay, loin de là, mais il ne le regardait pas comme les autres. Gecko avait une prestance, un tempérament, une allure incroyable. Marcel n'avait pas encore déterminé quel secret dissimulait gecko, mais il le découvrirait. Le trio ressemblait à une série télévisée, un blockbuster, l'esthétisme, le charme, l'assurance, tout leur réussissait. Quand il énumérait le trio, il s'oubliait pour faire référence à Gecko, Enea, Louis Philippe. Il n'avait aucune jalousie à leur encontre, c'était sa décision de se mettre à l'écart ! Le seul en qui il pourrait éventuellement éprouver de la jalousie serait Jonas ! Il était le seul à prendre ses propres décisions, sans intervention ou recommandation extérieure. Il imposait ses choix, prenait des décisions irrévocables.
Trois nouvelles intrusions venaient d'être enraillées par le Firewall. Marcel reconnaissait la signature du Flash-back Apocalypse. Tel un malware, il avait la capacité de s'introduire dans un ordinateur par Internet pour remplacer son Bios en étant donc intégré directement à la carte mère. Le nettoyage du disque dur serait vain, son remplacement par un disque neuf, futile, le PC resterait vérolé. Marcel changeait d'adresse IP toutes les dix secondes à l'aide d'un VPN. Mais le Flash-back Apocalypse parvenait toujours à retrouver sa trace. À deux occasions, le malware avait failli percer les défenses. Il avait une hypothèse folle du hacker, trop saugrenu, mais pourtant... un psaume lui revint en mémoire, « Jadis, l'archange Lucifer se rebella et devint Satan, "l'adversaire" de Dieu. Depuis lors, cet être maléfique s'acharne à détruire la création divine autant qu'il le peut. Il veut que vous preniez ses mensonges pour des réalités. Serez-vous victime de ses plans maléfiques destinés à vous détruire. » Bien évidemment, ce ne pouvait être Satan, mais une personne utilisant son identité. Il se souvint d'une remarque dans un site, « chacun devrait méditer sur les désirs humains et notre volonté à faire des compromis afin d'engranger de l'argent ». L'argent était devenu le problème majeur de notre époque, nombreux seraient prêts à vendre leur âme au diable afin de gagner plus d'argent.
Marcel n'avait exécuté que trois visites dans le darkweb, serait-ce la troisième de trop ! Le Dark Web était un terme générique désignant une collection de sites sur réseau crypté avec adresses IP masqués, conférant ainsi aux utilisateurs une solide protection de leur anonymat. Non indexés par les moteurs de recherche traditionnels, on ne pouvait y accéder uniquement qu'avec des navigateurs d'anonymat spéciaux.
Une sonnerie le prévint d'une tentative de connexion avec le logiciel du portail Neréide. Elles étaient de plus en plus fréquentes. Il quitta le clavier pour se connecter en trois dimensions. Il fit basculer dans les airs plusieurs fichiers, dossiers pour débusquer l'adresse IP. Il remonta à un VPN en Allemagne. Un réseau privé virtuel, VPN en anglais, était un système permettant de créer un lien direct entre des ordinateurs distants, qui isole leurs échanges du reste du trafic se déroulant sur des réseaux de télécommunication publics.
— Tu crois pouvoir m'échapper, on va voir ça, marmonna Marcel.
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