Chapitre 14 Permis de tuer
36 heures plus tôt en Gironde :
« Lisbeth patientait en tenue d'apparat sous un immense chêne. Les aboiements persistants du peloton canin sur sa gauche devenaient irritants. La patience n'était pas son fort, mais elle n'en ferait rien paraître. Un soldat devait honorer six qualités, la loyauté, la solidarité, la discipline, l'adaptation, l'endurance, la volonté. La légionnaire se satisfaisait des trois derniers. La loyauté avait plusieurs facettes. Beaucoup l'ignoraient, mais pour elle, rien n'était plus important que la famille !
Elle entendit la voix d'un maître-chien patrouillant avec son animal en liberté. Elle aperçut le berger allemand attrapant une balle au vol. Le chien détourna le regard pour la dévisager. Il lâcha la balle pour grogner en se mettant en position d'attaque.
— Erk, aux pieds, hurla son maître.
L'animal plia les pattes avant pour grogner de plus belle.
— Ne bougez pas madame, j'ignore ce qu'il a !
Lisbeth reconnut les signes d'agressivités, grognement, poil hérissé, oreilles en arrière et babines remontées. La crainte de l'animal allait provoquer une attaque. Il courut dans sa direction pour bondir.
— Erk, couchez, hurla vainement son maître.
La légionnaire empoigna violemment la gorge de l'animal qui se débattit en hurlant à la mort. Le caporal se figea pour les observer bras ballants. Il n'arrivait pas à croire la situation inconcevable auquel il assistait, elle bloquait son chien sans porter une tenue de protection.
Elle jeta violemment l'animal contre un arbre. Le berger allemand eut le souffle coupé sous l'impact. À peine retombait-il au sol, qu'il revenait vers son agresseur. La légionnaire s'agenouilla pour fixer l'animal qui stoppa pour l'observer avec une inquiétude croissante. Il prit la fuite.
— Erk, reviens, aux pieds. Que lui avez-vous fait ?
— Juste rappeler qui est le maître.
Il courut en direction de son chien qui venait de disparaître de leur champ de vision.
Elle regagna son arbre pour patienter. Une minute plus tard, elle avait déjà oublié le passage avec le chien. Il n'existait aucune différence entre l'animal et l'homme, l'un avait les crocs, l'autre les armes.
Le major Mac Pherson lui avait ordonné de se rendre pour neuf heures du matin au Camp de Souge dans la ville de Martignas en Jalle en Gironde. À son arrivée, l'officier de permanence l'avait immédiatement amené au lieu de rendez-vous. Le ronflement d'une jeep lui fit détourner le regard vers un chemin de terre. Un véhicule tout terrain noir affichant DFH sur le capot, les portières, stoppa à ses pieds. Un sous-officier descendit pour la saluer.
— Major Lucarne du DFH, bonjour Sergent d'Angelo.
— Mes respects, major, répondit-elle à son salut.
— Montez, ordonna-t-il en indiquant la portière entrouverte.
Elle s'exécuta en prenant place dans le véhicule peu confortable, il prit place à ses côtés. Lisbeth aperçut à l'arrière plusieurs caisses de cinquante centimètres de large sur soixante-dix de long. Un blason représentant une armure rouge avec deux armes lourdes entrecroisées était collé dessus.
— Silo 3, s'exclama-t-il au chauffeur.
— Excusez-moi, major, à quel contingent appartenez-vous, demanda-t-elle ?
— Au DFH.
— Quelle est cette unité ?
— Une souche secondaire de l'OSRLG, armée de terre.
Comprenant qu'elle n'obtiendrait aucune réponse, elle détourna le regard pour observer la foret.
La jeep pénétra dans un hangar, puis obliqua vers le parking. Alors qu'elle pensait que le véhicule allait se garer, la paroi coulissa pour donner accès à un tunnel descendant à trente-cinq degrés.
Le véhicule stoppa prés d'un poids lourd ou était peint un immense « T » en rouge sang sur la remorque. Juste dessous étaient écrit « Des Vignes A.T ». Une sueur froide s'écoula sur la nuque du légionnaire, le Général Des Vignes était l'officier à ne jamais croiser. Mauvaise réputation, non fréquentable, orgueilleux, colérique, soupçonné d'un nombre incalculable de meurtres, intouchable... tout cela le résumait assez bien ! Était-il responsable de son envoi en Gironde ? Elle espérait se tromper ! Ce n'était pas dans les habitudes de Mac Pherson de critiquer, sauf lorsqu'il s'agissait du Général Des Vignes ! De son avis, le général était l'exemple parfait à ne pas suivre. L'armée, tant qu'elle suivait ses doctrines, il resterait loyal. La nation, pourquoi, rien n'avait plus d'importance que Des Vignes ! Des Vignes était la nation, l'icône de la France. Il avait succédé au général Lamp, mort dans un accident malencontreux.
Quand le véhicule stoppa devant un semi-remorque entièrement recouvert de plastique, elle regrettait déjà d'être présente. L'absence de lumière ne lui permettait pas de savoir si elle se trouvait dans une immense grotte ou un complexe de grande taille.
— Tenez, s'exclama le major Lucarne en lui tendant un masque à oxygène portatif.
Elle s'abstint d'en demander la raison. Ils quittèrent tous deux le véhicule pour approcher d'un dôme en verre d'environ vingt mètres de diamètre. Le major posa son pouce sur un détecteur mural, la porte coulissa pour les laisser entrer. Ils se retrouvèrent dans un sas ou ils purent retirer leur masque.
— Écartez les bras, s'exclama le sous-officier en la fouillant pour lui retirer son portable qu'il mit dans sa poche. Vous pourrez le récupérer en partant.
— Vous ne m'accompagnez pas ?
— Le général déteste toute présence futile. »
La rencontre avec le général resterait un souvenir inoubliable pour la légionnaire. Certes, il avait une éloquence, un discours réaliste, une oraison surprenante, une logique imparable, mais à aucun moment elle n'aurait pu le contredire. Il semblait connaître tout sur tout. Il détenait les secrets dérangeants de plusieurs pays d'Europe. Il parlait, mais sans pour ôtant citer des noms, des lieux, des organisations. Le seul avertissement concernait la marque automobile Conventia. Pour le général, Ventia-Corp servait de leurre afin de cacher autre chose. Quoi, il n'en savait rien. Mais c'était suffisamment important pour envoyer un espion. « Les meilleurs ne s'entouraient que des meilleurs », lui avait-il confié avant de la renvoyer au major. Mais, c'était la dernière phrase qui la marquerait à tout jamais, « certaines communautés vivent en reclus, en autarcie, dans l'ombre. Cela ne doit pas changer. Quand cette mission arrivera à terme. Je vous ouvrirais leurs portes. »
Elle avait l'autorisation de tuer. Rien ne devait entraver sa mission. Quand il lui avait montré la première équipe de servo-soldats, cela lui avait confirmé que personne n'était de taille à le contrer.
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