Chào các bạn! Vì nhiều lý do từ nay Truyen2U chính thức đổi tên là Truyen247.Pro. Mong các bạn tiếp tục ủng hộ truy cập tên miền mới này nhé! Mãi yêu... ♥

Chapitre 9 - Romy


Le capitaine Kali se met à tourner à pas lents et réguliers autour de moi, à l'image d'un requin qui encercle proie avant de la dévorer vivante. Dans cette ambiance plus lourde qu'avant un orage, les talons de ses bottes en cuir frappent le bois juste assez fort pour que je puisse les entendre, comme une horloge qui compterait les secondes avant ma fin.

— Eh bien, on dirait que tes bras de champinain ne supportent même pas le poids d'un seau. Qu'est-ce que je dois faire de toi ? Établir les voiles ? Non, ça te demandera trop d'efforts, de tirer sur un tissu en groupe tout en évitant de tomber. Travailler avec Enrick ? Ah, non, tu n'arriveras pas à couper des légumes. Oh, je sais ! Aider Rosalia à soigner nos blessés ? Mais non, tu ne parviendras pas à compresser une blessure plus d'une minute !

J'ai l'impression que la mer elle-même s'est tue quand le capitaine Kali a commencé à abattre sa foudre sur moi, moi qui ai toujours le visage baissé sur le bois. Je n'ose pas relever la tête. Je ne l'ai presque pas entendu s'énerver jusque-là, et en deux jours, j'ai l'impression de déjà le pousser à bout. Mon ventre se tord. Qu'est-ce qu'il va me faire ? Il pourrait me tuer, personne ne viendrait me sauver. J'aurais juste disparu à tout jamais pour mes parents, et fin de l'histoire.

Il m'attrape par le bras et me tire avec force pour me mettre debout. Face à lui et son imposant manteau en cuir, je me sens minuscule, encore plus en étant aussi proche de lui, à seulement quelques centimètres de son torse qui bouillonne sans doute de haine. Nous nous fixons, et tandis que ses mèches noires bataillent avec les vents, ses yeux bleus ténébreux me percent à nouveau avec un dédain qu'il ne dissimule pas, comme le jour de notre rencontre.

Il prend une inspiration, mais au moment où il est sur le point de parler, des notes douces et glissantes résonnent dans l'air. Une seconde après, une énorme bête mauve s'expulse hors de l'eau. Ses nageoires, tout en chair, se terminent par de longs filaments semblables aux partitions que les musiciens utilisent pour écrire leurs mélodies. Mais surtout, ses grands yeux noirs me fixent. Nous fixent.

Je repense alors aux mots de Maybelle.

Je veux écrire...

Non.

Je veux que mes parents soient fiers de moi.

Alors que je contemple les dernières éclaboussures que provoque le saut de cette Grande Partition, la voix monotone du capitaine fait courir un frisson le long de mon dos :

— Nous disions : tu ne sers à rien. Et tu es louche avec ton histoire de famille. Sans parler de ton envie d'écrire, mais sans magie... selon toi, bien sûr. Je ne sais pas ce que tu caches, je ne sais pas ce que tu fiches réellement ici, mais je le découvrirai.

Le capitaine et moi nous regardons. J'ai envie de hurler que je ne mens pas, que je ne cache rien – enfin, rien qui ne le mette en danger – mais ma gorge est asséchée par la peur. Ses yeux sans chaleur me glacent sur place. J'ai envie de m'écarter, il m'effraie, il est sombre, trop sombre pour être innocent, mais l'autorité qui est fixée dans son regard m'empêche de bouger.

— Je ne te fais pas confiance, Sena Slepar. À la moindre action suspecte, je te débarque au milieu de nulle part. Non, je te balance à la flotte pour m'assurer que tu ne parleras plus. Quoiqu'une balle dans le crâne serait plus efficace... mais ai-je envie de gâcher des munitions pour quelqu'un comme toi, si faible qu'on pourrait te tordre le cou comme un poulet ? Je ne crois pas.

Des nausées acides remontent. Ce type me terrorise. Les larmes menacent de couler sur mes joues et d'étaler ma peur à la vue de tous, mais je m'efforce de tenir le coup. Si je pleure, ce fou furieux pourrait croire qu'il s'agit d'un aveu !

— J'espère que c'est compris ?

— O-Oui, capitaine !

Ma voix hésitante et brisée a tenté d'exclamer un semblant de détresse, sans doute, mais cela n'a fait que durcir le regard déjà de marbre du capitaine. Il s'écarte à pas lents, puis se retourne enfin et se dirige vers l'écoutille. Quand je ne l'ai plus dans mon champ de vision, j'ai l'impression que mon corps expulse un venin qui me paralysait de la tête aux pieds.

Les voix reviennent avec timidité, craintives de raviver la terreur qu'a su instaurer le capitaine Kali en quelques phrases, sans avoir fait couler la moindre goutte de sang.

Pour ma part, je n'ai toujours pas ramassé mon seau ni mon bâton ni mon torchon. Si la peur ne m'empêche plus de respirer, les mots du capitaine continuent de faire une ronde dans mon esprit.

Qu'est-ce que j'ai fait de si suspect pour qu'il se mette en rogne ainsi ? Il a l'air plutôt calme, pas du genre à se donner en spectacle... alors j'ai la désagréable impression que quelque chose chez moi le dérange... quelque chose qui le dérange tellement qu'il est prêt à tuer sans aucune hésitation. Et c'est ce qui me fait peur.

Est-ce que je dois lui parler pour essayer d'arranger les choses ? Être honnête ? En supposant qu'il me croit – et il semble se méfier de moi comme un livre de la pluie – il pourrait me ramener à mes parents en échange d'une récompense. Je suis limitée à trois cents talëons pour faire pencher la balance de mon côté, pas ma famille.

Ces pensées tonitruantes me donnent des sueurs froides.

— Sena ? Tu vas bien ?

Maybelle pose une main hésitante sur mon épaule.

Évidemment, que je ne vais pas bien.

— Oui. Je vais terminer de mouiller le pont et m'enfermer dans ma cabine. C'est mieux comme ça.

Elle tente de me parler, de me rassurer, mais je réponds par quelques sourires grimaçants en me dépêchant de terminer ma tâche. J'ai l'impression que tout le monde me regarde et chuchote dans son coin, et je déteste ça. Mes mains sont encore plus maladroites, mais doigts relâchent involontairement le bois, et des coups de chaud me font frissonner. Les vents censés me rafraîchir me donnent tantôt encore plus chaud, tantôt froid. Mes yeux brûlent et ma vue se brouille parfois, mais je resserre mes mâchoires déjà douloureuses pour tenter de me ressaisir. Mon corps est totalement désorienté, et mes pensées aussi.

Quand enfin je termine de laver, je fuis dans l'obscurité de l'entrepont et je cours presque jusqu'à ma cabine pour réduire mes chances de croiser le capitaine. Lorsqu'enfin je ferme à clef derrière moi, je pose mes lunettes sur mon bureau et me laisse tomber sur mon lit. Je rampe jusqu'à mon oreiller dans lequel j'enfonce ma tête, et je me recroqueville autour de lui.

Alors que les larmes coulent sur mes joues, je tente d'étouffer la peine qui essaie d'enfoncer les portes de ma voix : je ne me sens pas chez moi, et j'ai l'impression que tout ce que je fais est un prétexte de s'en prendre à moi.

Qu'est-ce que je fiche sur ce navire ? Quelle idée j'ai eue, bon sang ? Aller sur un navire pirate pour écrire quelque chose de réaliste et poignant, et donc clouer le bec à mes parents ? C'est bon, j'en ai eu assez en quelques jours.

Je pourrais peut-être même rentrer chez moi et abandonner l'écriture...

Cette pensée intensifie le flux de larmes acides qui creusent mes joues.


Un bruissement de feuilles, et ma mère soupire :

— Romy, pourquoi tu nous mens encore ? Nous savons très bien reconnaître de la littérature magique et tes histoires. Tu ne comprends pas que ça ne sert à rien ? Ce n'est pas parce qu'un de tes bouquins a été publié que c'est une réussite. De nos jours, ils acceptent tout et rien. C'était juste un coup de chance.

Alors que je commence à ouvrir la bouche, ma mère, les bras croisés dans son dos, m'interrompt :

— Tu as fait des ventes, et alors ? Ce n'est pas gage de qualité. Toi-même tu me racontais il y a quelques années que tu ne comprenais pas l'engouement pour une romance, tu te souviens ? Tu la trouvais malsaine et mal écrite... et pourtant.

— Écrire des histoires ne t'apportera rien, renchérit mon père. Il faut que tu suives une formation magique rigoureuse pour t'en sortir, tu n'as pas le choix.

— Alors tu vas arrêter de perdre ton temps avec ces histoires. Tu peux écrire tes romans comme un loisir, mais tu as intérêt à être irréprochable dans tes notes de magie littéraire. C'est clair ?

J'ai tellement envie de rétorquer que l'écriture fait partie de moi, qu'elle est ma première et ma dernière pensée chaque jour, qu'elle est mon refuge, ma bulle de secours et d'apaisement, celle qui me fait voyager d'un bout à l'autre de mon imagination, celle, enfin, qui me fait vivre tant d'émotions à partir de quelques mots encrés sur du papier : la joie, la peur, la tristesse, la colère, et tant d'autres... l'écriture est la genèse de tout ce qui me fait vibrer, la catharsis de tout ce que je peux ressentir... ce n'est pas un simple loisir. C'est une part de moi que l'on ne peut m'arracher sans briser mon âme au passage.


Je renifle et frotte mes yeux endoloris par les larmes, puis je me redresse. J'ai déjà tellement accompli pour l'écriture. Je ne peux pas lâcher maintenant. Je n'y arriverais pas, de toute façon.

Je me tourne vers la porte.

En tout cas, les soupçons du capitaine Kali m'inquiètent : j'ignore ce qu'il croit exactement à mon propos et pourquoi, mais il ne faut pas que ça empire. Je dois peut-être moi-même rétablir la vérité, qui sait ?

Et me jeter dans la gueule du loup en toquant à la porte de sa cabine ?

Est-ce que ça peut seulement être pire que maintenant ?

'o' Capitaine Kali toujours pas sympathique, pas vrai ?

On passe de son point de vue au prochain chapitre !

Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro