9_ La clé qui cache le nom
Elle avait relevé la tête et ses yeux brillaient d'un savant mélange d'excitation et de curiosité. Il était peut-être encore assez tôt pour trouver Lydia afin qu'elle lui permette l'accès au registre gardé comme le Saint-Graal dans un tiroir de l'accueil dont peu avaient la clé. Le patron redoutait particulièrement qu'il soit consulté par les filles au risque qu'elles ne découvrent d'éventuelles sorties nocturnes à un membre de leur cercle familial ou amical. Malheureusement pour Lucie, Lydia était déjà à son poste depuis une dizaine de minutes aux moins. La scène lui allait bien, même cette scène miteuse arrivait à mettre en valeur la magnifique femme qu'elle était. Lucie décrocha son regard de cette femme pour se mettre à son tour au travail, elle ignorait le déchirement que provoquait à Lydia la pratique de cette activité.
Lucie elle se fit plus discrète se soir là. Cantonnée aux abords du bar elle réalisa tout de même une bonne soirée qui pourrait avoir le bénéfice de rattraper les nuits manquées. Elle parvint à satisfaire les désirs de quatre clients, une soirée à cent euros n'était pas chose courante ici, elle se promit de prendre garde au patron qui pourrait tenter de garder le salaire d'une voir deux prestations. Dès l'heure de fermeture du bar Lucie se hâta de rejoindre le vestiaire pour enfiler un pull un peu plus chaud qu'elle avait emporté avec elle mais aussi dans l'espoir d'y croiser Lydia qui était bien souvent la première partie.
La pièce froide était jonchée de manteaux plus ou moins colorés qui semblaient tout mettre en œuvre pour tenter de réconforter les âmes, les corps et les cœurs souillés qui n'allaient pas tarder à revenir. Lydia pénétra d'ailleurs rapidement dans la pièce et fut surprise par le regard pétillant que Lucie gardait rivé sur elle, assise sur une chaise en plastique verte abandonnée dans un coin.
- Toi tu as quelque chose à me demander, devina Lydia d'une voix malicieuse, phrase à laquelle Lucie répondit avec un hochement de tête digne d'une petite fille impatiente. Et bien quoi, parle donc !
Sous l'effet de l'impatience, son accent du sud se fit encore plus chantant. Elle avait rarement vu sa jeune protégée aussi heureuse et était à la fois impatiente et inquiète de savoir ce qu'elle manigançait.
- Tu te souviens de l'homme dont je t'ai parlé l'autre jour au café ?
- Celui qui t'as frappé ?
- Non, ne t'inquiète pas, je lis déjà l'inquiétude dans ton regard, l'autre, celui qui est entré chez moi pendant mon sommeil.
- Je ne vois pas en quoi cette déclaration est censé me calmer, un homme inconnu qui pénètre chez quelqu'un qui dort n'a rien de rassurant. Qui a-t-il avec cet homme ?
- Il est possible qui soit venu hier soir pour essayer de me voir.
- Tu es sûre qu'il ne s'agissait pas d'un habitant de l'immeuble un peu saoul qui tentait de retrouver son appartement ?
- Non, il m'a prise dans ses bras.
Un petit cri de surprise s'échappa de la bouche de Lydia, cette déclaration n'avait en effet rien de rassurant.
- Et bien, as-tu un nom ou autre chose pour espérer le retrouver et le confondre ? Ce n'est pas vraiment toléré par la loi de pénétrer de la sorte chez un ou une inconnue.
- Non, justement, c'est pour cela que j'ai besoin de ton aide. Son nom est contenu dans le registre mais je ne peux pas y accéder mais peut-être que ton ancienneté ici pourrait te permettre à m'aider à pouvoir le consulter.
- Tu rêves petite. Qu'on soit ici depuis vingt ans ou deux mois le patron s'en fout. Tout ce qui compte c'est le physique. Si t'es bonne ou bien roulée là t'as moyen d'avoir accès à ce genre de privilèges, mais seulement en échange de quelques services, si tu vois ce que je veux dire
Lucie voyait parfaitement de quoi parlait Lydia, et il lui était hors de question de se laisser tenter par ce genre de pièges car le faire une fois signifiait le faire souvent.
- Mais je peux tenter quelque chose, ajouta Lydia désormais presque aussi déterminée que Lucie à trouver l'identité de cet homme.
Lucie passa la première dans le bureau du patron et sans un mot sur la demande qu'allait faire Lydia quelques secondes plus tard, elle récupéra tout son argent et sortit. Lydia eu un échange étouffé avec le patron durant quelques secondes avant que celui-ci ne se lève et ne ferme la porte. Lucie savait parfaitement ce que cela signifiait mais avait du mal à croire que Lydia accepte de se livrer à de tels agissements pour l'aider. Elle resta néanmoins devant la porte en attendant que Lydia n'en sorte. Elle pensa qu'à cette heure là peu de gens viendraient chercher leur salaire mais quelques minutes plus tard une fille la rejoignit. Lucie connaissait cette femme qui avait un statut particulier dans le bar. C'était l'hôtesse d'accueil, elle n'avait aucune relation avec les clients, et c'était la seule à partager le privilège du registre avec le patron. Au lieu d'attendre comme d'habitude droite dans ses talons et muette de mépris à l'égard des autres travailleuse, ce soir là elle se trémoussait et lui adressa même la parole.
- Tu attends pour récupérer ton argent, lui demanda-elle après avoir désigné Lucie bien cachée dans son sweat Mickey enfilé par-dessus sa robe.
- Oui, comme tous les soirs, répliqua-t-elle en enfonçant un peu plus ses cent euros dans la poche de son pull.
Elle ne cessa pas pour autant de se dandiner et continua d'une voix un peu hésitante pourtant pleine de dégoût pour celle qui réalisait l'exploit d'offrir son corps aux inconnus qui le désiraient plusieurs fois par nuits.
- Tu pourrais me rendre un service ? Il faudrait donner cette clé à Gérard, dit elle en désignant la porte close, je ne peux pas attendre plus longtemps, on m'attend et à ce que je vois il semble occupé.
- Oui bien sûr, répondit Lucie surprise que ça aille si vite car cette clé était sans doute celle qui fermait le tiroir de l'accueil.
La jeune femme lui tendit la clé et partit précipitamment. Lucie attendit, soulagée mais honteuse du supplicie qu'elle faisait vivre à son amie.
L'oiseau de nuit mène son enquête et plus personne ne pourra l'en empêcher.
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