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Adèle

Il était de retour.

Elle le savait.

Elle pouvait percevoir un léger chuchotement emplir l'air et venir jusqu'à elle. Elle s'approchait lentement, doucement, subrepticement de peur de ne le faire fuir.

Elle ne voulait pas qu'il parte. Cette fois, il fallait qu'elle l'atteigne. Ses pas étaient lents et calculés alors qu'elle avançait à travers le couloir de sa demeure dans l'espoir de le retrouver enfin. Sa voix se faisait de plus en plus distincte. Elle arrivait presque à discerner son mince souffle s'échapper de ses lèvres. Ce souffle se transforma alors en mots.

Il lui disait de venir à lui. Alors qu'elle franchissait enfin le seuil de la pièce, elle aperçut à nouveau la lumière.

Il était là.

Elle le savait. Elle le sentait. Mais pas moyen de le voir...

Elle s'approcha et tout redevint noir.

***

Les rayons du soleil étaient filtrés par les fins rideaux blancs de la chambre d'Adèle. Cela montrait qu'il était temps pour elle de se lever. Elle s'exécuta sans broncher, poursuivant la continuité de la vie droite et stricte qu'elle avait jusqu'à présent toujours menée.

Il était rentré cette nuit-là aussi, et comme d'habitude, il avait disparu avant qu'elle puisse ne serait-ce que l'apercevoir. Adèle marcha jusqu'à la fenêtre et ouvrit les rideaux, le temps était brumeux. Elle fit son lit et quelque chose retint son attention. Sa photo. Sur sa table de nuit. Elle s'assit sur le lit et quelques minutes passèrent sans qu'elle ne s'en rende compte, plongée dans la contemplation de son image figée dans le temps, immortalisée par un appareil photo.

Adèle aussi était présente sur la photo, dans sa robe de mariée qu'elle détestait, trouvant le décolleté trop vulgaire. La tenue avait appartenu à sa mère, il avait insisté pour qu'elle la porte et se maquille. Elle avait exécré mettre ce rouge à lèvre flamboyant et coiffer ses cheveux de rallonges, mais elle aurait fait n'importe quoi pour lui.

Elle regarda la photo jusqu'à ce qu'une larme ne vienne troubler sa vue. Elle l'essuya avec toute l'indifférence dont elle était capable face à sa tristesse et se leva pour poursuivre la routine matinale qu'elle entretenait depuis les premières années de son existence.

Adèle se rendit dans la cuisine pour préparer le petit-déjeuner. Les pancakes crépitaient dans la poêle, ils étaient presque prêts. Une fois bien dorés, elle les disposa dans une assiette en ajoutant une noix de beurre ainsi que quelques fruits. Sa fille était assise à table, dans la salle à manger.

— Bien dormi, mon cœur ? lui demanda-t-elle en déposant l'assiette juste devant elle.

Elle s'installa en face d'elle et lui sourit. Il ne se passa rien, comme d'habitude. Sa fille restait assise sur sa chaise bleue d'un designer minimaliste, le bas du visage enfoui dans un haut col roulé.

Adèle ne voyait que des yeux d'un bleu d'une teinte si profonde et claire qu'ils semblaient être la porte d'une âme aussi pure qu'un glacier. Elle avait ses yeux. Linéa ne toucha pas à son assiette, elle ne lui avait pas même accordé un regard.

— Ne t'inquiète pas. Papa va revenir bientôt, lui dit Adèle d'une voix qui se voulait rassurante.

Mais cela n'eut aucun effet. Elles restèrent dans la même position, se renvoyant leur regard presque identique d'un bleu perçant avant qu'Adèle ne sorte pour aller au travail.

Elle s'y rendit à pied, comme d'habitude. Le chemin sembla long, mais cela faisait longtemps que les rues et les trottoirs paraissaient infinis à Adèle. Depuis le départ d'Aaron. Avant, ils faisaient la route ensemble tous les matins. Il travaillait dans une autre ville et avait une voiture. Il l'accompagnait souvent par galanterie avant de ne devoir faire la route seul en sens inverse.

Adèle ne savait pas si il travaillait toujours au même endroit. Elle ne savait pas non plus où il était. Mais la femme savait qu'il voulait revenir. Elle essayait de l'aider, sauf que dès qu'elle s'approchait, il s'enfuyait. Comme si sa présence le faisait changer d'avis. Mais un jour Adèle savait qu'ils seraient de nouveau réunis.

Et ce jour était proche.

Bientôt, ils formeraient à nouveau une famille.

— Madame ! Tout va bien ?

Une voix arracha Adèle à ses pensées. Elle regarda autour d'elle et remarqua qu'elle se trouvait devant la porte d'entrée de son lieu de travail. Cela devait faire un certain temps qu'elle attendait devant.

Aaron lui avait toujours fait perdre la tête.

— Oui, merci, répondit Adèle avec un faible sourire censé clore l'échange.

— Ça m'arrive souvent d'être distraite, je me perds tout le temps dans mes pensées ! dit la femme en face d'elle en tentant de faire la conversation.

Pendant qu'elle parlait, sa main halée traversa ses cheveux noirs bouclés rassemblés en un chignon. Elle ne savait plus quoi dire et hésitait à en rajouter. Son doigt entortilla une mèche de jais dans un tic nerveux.

— Je suis nouvelle ici et je ne sais pas vraiment où me rendre pour mon premier jour... Alors, je me suis dite qu'en restant devant, je trouverais peut-être une gentille personne pour me faire visiter les lieux. Et je suis tombée sur vous ! Enfin, j'ai essayé de vous interpeller plusieurs fois, mais pas moyen de retenir votre attention. C'était comme... une transe !

Adèle lui lança un regard noir en faisant apparaître des orages dans ses yeux de la couleur du ciel. Mais la femme enchaîna.

— Au début, je n'ai pas osé vous déranger. Mais après, vous êtes restée sans bouger pendant dix minutes et c'était à peine si vous respiriez ! Alors je me suis permis de vous ramener sur Terre et de m'en remettre à vous pour m'aider, termina-t-elle avec le sourire des gens qui jouent leur dernière carte en faisant appel à la pitié.

Elle ne devait pas avoir beaucoup de ressources si elle craquait déjà. Mais Adèle n'aurait pas pu refuser sans faire preuve d'impolitesse. Une main se tendit vers elle, mais elle ne la saisit pas.

— Je m'appelle Marie.

— Venez, soupira-t-elle à contrecœur.

Une bourrasque souleva le bas de la longue veste bleue d'Adèle alors qu'elle pivota pour rentrer dans l'établissement. Marie ouvrit de grands yeux, comme pour retenir le moindre détail capable d'être intercepté par ses yeux. Il n'y avait pourtant rien d'autre qu'un cadre comportant le diplôme du directeur dans ce long couloir terne et épuré. Adèle vit la jeune femme pousser un léger soupir en remarquant la multitude de portes.

— Le bureau du directeur est au troisième.

— Merci beaucoup ! Et... où sont les toilettes ? demanda Marie alors qu'Adèle avait déjà tourné les talons.

— Au fond à gauche.

— Merci infiniment ! Bonne journ...

Adèle n'entendit pas la fin de sa phrase, elle n'avait aucune envie de l'écouter. Les toilettes de cet étage étaient en réalité hors service depuis trois mois. Donc pour toujours, vu la façon dont le changement avançait dans l'entreprise et vu l'inquiétude du patron sur le bien-être de ses employés. Il suffisait d'aller au même endroit un étage au-dessus. Marie finirait bien par trouver.

Cette Marie insupportait Adèle. Elle n'aimait pas les gens intrusifs et trouvait qu'elle manquait grandement de sérieux pour son premier jour de travail.

Ses jambes se tournèrent résolument vers son bureau afin de se changer les idées dans son travail. Un immense dossier de factures qu'elle avait préparé la veille l'attendait sur son bureau et elle s'attela aussitôt à la tâche.

Le répit dura moins d'un quart d'heure car une main fit pivoter la poignée de la porte. Marie ne tarda pas à apparaître dans l'embrasure. Un grand sourire illuminait son visage en lui donnant un air benêt et ses yeux s'écarquillèrent en l'apercevant.

— Ça alors ! Comme on se retrouve! Vous êtes donc Adèle. Je crois que vous avez omis de me donner votre nom tout à l'heure alors je ne m'attendais pas à partager un bureau avec vous. Mais c'est une exce...

— Je n'ai rien omis du tout. Votre bureau est là, dit-elle en désignant l'autre table qui se trouvait dans la petite pièce sans fenêtre, en face d'elle.

Pourquoi diable fallait-il que l'agencement de la salle encourage le contact visuel entre les collègues? Adèle trouvait cela stupide et entravant à la concentration. Elle n'avait aucune envie de passer ses journées avec elle.

Son inquiétude la poussa à jeter un coup d'œil à Marie qui déballait ses affaires. Elle sortait divers cadres et effets personnels dont Adèle se fichait éperdument à l'exception de l'un d'eux qui retint son attention. La jeune femme déposait une petite radio vintage sans fil aux couleurs pastel sur le bord de son bureau.

— Je ne travaille efficacement que dans le silence le plus complet.

Marie la regarda, décontenancée.

— D'accord. Je ne veux surtout pas perturber vos habitudes de travail et encore moins vous gêner. Mais avouez quand même qu'un peu de musique ressource et détend. Ne serait-ce qu'à la pause de midi, dit la jeune femme avec un grand sourire avant de continuer. Enfin, ça dépend quel type de musique, bien sûr ! Je déteste le métal et le rap ! Et qu'est-ce que la musique classique peut-être redondante ! Mais la pop, il n'y a rien de mieux ! Vous aimez Michael Jackson ? Moi, j'adore Michael Jackson ! En particulier «The Way You Make Me Feel», je ne peux pas m'empêcher de danser chaque fois que je l'entends !

L'enthousiasme de Marie ne cessait pas de grandir : quand on parle de musique, on ne l'arrête plus. Cependant, Adèle n'aimait pas la musique et voulait juste que Marie se taise par n'importe quel moyen. Cette dernière sembla remarquer le léger malaise.

— Vous n'aimez pas Michael Jackson, c'est ça ?

— J'aime le silence.

Et Adèle reporta son attention sur son travail. Elle espérait avoir fait passer le message. La mère était une femme solitaire et sérieuse. Le comportement de Marie qui voulait absolument faire amie-amie avec elle, l'énervait.

L'ambiance resta tendue, mais le travail ne manquait pas et la pause déjeuner arriva bien vite.

Marie ressortit la petite radio -qu'elle avait rangée dans son sac suite au coup de pression d'Adèle - et l'alluma tout en prenant le sandwich qu'elle s'était préparé le matin. Une chanson pop commerciale retentissait au plus grand désespoir d'Adèle pendant que sa nouvelle collègue souriait à son écoute. Elle se mit même à danser et à chanter le refrain malgré les bouchées de sandwich qui obstruaient sa bouche en l'empêchant d'articuler.

So don't go breaking my heart. I won't go breaking your heart. Don't go breaking my heart. Nobody...

C'en fut trop pour Adèle qui ne supportait pas d'entendre la voix de sa collègue chanter faux en alternant les graves et les aigus en fonction des parties d'Elton John et de Kiki Dee. Elle se leva de sa chaise pour aller manger dans un endroit calme. Elle s'apprêtait à quitter la pièce quand Marie l'interpella.

— Vous ne restez pas ?

— Non.

— Ho... Vous allez manger toute seule ? Je vous accompagne, si vous voulez !

— Ça ira.

Marie s'apprêtait à insister, mais Adèle s'empressa de refermer la porte sans lui en laisser le temps. Elle détestait quitter son travail, mais elle voulait encore moins avoir cette insupportable collègue dans les pattes. La comptable pressa le pas dans le couloir, faisant claquer les talons de ses escarpins bleus sur le carrelage.

La rue était plutôt calme malgré les quelques voitures qui fonçaient à du cent à l'heure. C'était le problème des rues calmes. Vu qu'il n'y a personne, les gens se permettent d'accélérer comme des fous furieux. Ça aussi, ça énervait Adèle qui avait reçu une éducation très stricte où le respect occupait une grande place. Alors, elle profita d'un moment de calme pour apprécier la brise fraîche caresser son visage dans la seule sonorité que la femme appréciait : celle de la nature.

Elle se dépêcha ensuite de rentrer chez elle pour ne pas arriver en retard à la fin de la pause.

Linéa était toujours assise à la même place, son col roulé blanc couvrant toujours le bas de son visage. Ses yeux bleus perçants fixaient Adèle alors que celle-ci s'installait en face d'elle pour manger la salade que la comptable avait emportée avec elle.

— Tu n'es pas en cours ?

Pas de réponse. Cela faisait des mois que sa fille ne lui adressait plus la parole. Depuis le départ de son père.

— Je comprends que tu sois bouleversée, ma chérie, mais tu dois retourner à l'école. C'est très important, l'éducation.

Comme d'habitude, le silence emplissait la pièce. L'atmosphère était pesante depuis le départ d'Aaron. Adèle attendait son retour avec impatience chaque jour, refusant de perdre espoir. Il n'y avait plus eu de discussion dans la maison depuis, seuls les monologues d'une femme attendant son mari et tentant de rassurer sa fille.

Adèle décida de changer de tactique.

— Papa ne va pas être fier de toi quand il rentrera. Il ne veut pas apprendre que sa fille a complètement abandonné. Le décrochage scolaire, c'est fait pour les faibles, les fainéants qui ne veulent pas ouvrir leurs cours. Tu vaux mieux que ça. Ton père et moi ne t'avons pas élevée ainsi !

Linéa garda le silence, toujours aussi droite sur sa chaise, ne bougeant pas d'un poil. Elle était semblable à une poupée de porcelaine avec son teint laiteux et ses cheveux mi-longs coiffés en deux nattes marron foncé. Mais cela ne suffisait plus pour attendrir Adèle, bien que cela marchait au début. La femme était au bord de la crise de nerf. Plus rien n'allait dans sa vie, et sa fille, qui constituait sa plus grande fierté, semblait se surpasser pour la décevoir.

— Tu n'as plus d'excuses ! Je t'ai laissé assez de temps ! Papa va revenir bientôt, je te dis ! Pourquoi tu ne me fais pas confiance ? Pourquoi ?! Comment oses-tu me rejeter la faute ? S'il ne revient pas, c'est peut-être justement pour ça. À cause de toi. Alors arrête de me regarder comme ça et bouge-toi ! Bouge-toi, punaise ! Change ton comportement !

Mais Linéa continuait de la fixer, imperturbable. L'idée qu'Aaron ne revienne pas, qu'elle qu'en soit la raison, suffit à mettre Adèle hors d'elle. Elle s'était piégée à son propre jeu, et ce qui ne devait être qu'un coup de pression, devint une véritable accusation.

Elle était en colère. Et Linéa était la seule personne présente. Ainsi, sa mère rejeta vraiment la faute sur elle, la victime copia le crime du coupable.

Adèle était une personne raisonnable et sensée. Elle soignait son langage, sa tenue, ne perdait jamais contenance et était d'un sérieux irréprochable. Mais là, le point sensible venait d'être atteint et elle perdit le contrôle.

Avant même qu'elle ne se rende compte de ce qu'elle faisait, sa main s'était élevée et avait frappé Linéa sur la joue avec une force hors norme. L'instinct primaire et l'énergie du désespoir. L'adolescente tomba à la renverse, son col descendit à cause de la chute. Adèle se jeta au sol pour le remonter et la prendre dans ses bras.

— Pardon, ma chérie. Pardon. Pardon. Pardon. Je suis désolée. Tellement désolée.

Elle fut incapable d'en rajouter et éclata en sanglots, croulant sous le poids de la culpabilité que suscita l'acte qu'elle venait de commettre. Depuis quelque temps, la mère ne se reconnaissait plus. Pendant des années, elle s'était efforcée de ne pas laisser paraître ses émotions, surtout devant sa fille. Aujourd'hui, elle n'y arrivait pas. L'émotion était trop forte.

Elle resta ainsi quelques instants avant de remettre Linéa ( qui était toujours plongée dans son mutisme) sur sa chaise en l'enlaçant. Adèle montrait rarement de geste de tendresse en dehors des surnoms affectueux. Mais elle aimait sa fille et avait besoin de le lui montrer après l'incident qui venait de se produire.

Linéa l'inquiétait. Elle ne mangeait plus, ne parlait plus, ne bougeait plus, figée sur sa chaise toute la journée. Adèle avait l'intime conviction qu'elle attendait juste le retour de son père, tout comme elle.

Ce jour-là, le chemin du travail semblait définitivement interminable. Le temps filait à toute vitesse et la femme craignait de ne pas y arriver à temps. Adèle avait toujours été très ponctuelle, ne comprenant pas comment les gens faisaient pour être en retard, elle en avait la phobie. Aaron aussi détestait ne pas être à l'heure. C'est pourquoi il l'accompagnait toujours avec une heure d'avance, ce qui lui permettait de finir plus tôt et d'être à la maison pour Linéa.

Elle n'avait pas perdu cette habitude de partir tôt, mais elle préférait désormais éviter de passer trop de temps chez elle, c'était devenu macabre. Elle faisait beaucoup d'heures supplémentaires ; se concentrer sur son travail lui permettait de ne pas penser au reste. Une fois la porte de son bureau franchie, elle se sentait plongée dans une oasis de calme, il n'y avait plus qu'elle et la comptabilité. Le reste ne comptait plus. Avant l'arrivée de Marie. Marie venait d'ébranler le seul appui solide sur lequel Adèle pouvait encore se reposer.

Quand elle regagna la pièce en souhaitant se réveiller d'un mauvais rêve et retrouver son bureau vide et tranquille, elle retrouva Marie qui lui offrit un sourire aussi radieux que méprisable auquel Adèle ne répondit évidemment pas.

Elle était pile à l'heure, c'était déjà ça. Elle s'empressa de regagner son bureau alors que Marie éteignait seulement la radio pastel qui diffusait des pubs au grand soulagement d'Adèle.

Le reste de l'après-midi fut calme, en dehors des bavardages incessants de Marie qui lui parlait de musique pop, de mode, ou de la série romantique qu'elle regardait. Tout ce que la mère de Linéa détestait. Ce n'étaient que des illusions destinées à rendre la vie douce. Mais la vie n'a jamais été douce et ne le sera jamais, elle était bien placée pour en témoigner. Adèle avait appris à vivre très tôt sans toutes ces idioties : la mode ne servait qu'à faire tourner l'économie, les séries à abrutir les gens en leur faisant croire ainsi qu'espérer tout et n'importe quoi. Et la pop... La pop était à ses yeux une déferlante d'imbécilités rythmées ayant pour but de tenir les gens éveillés au cours des soirées ennuyeuses. D'ailleurs, elle avait remarqué - dans le peu de films qu'elle avait vu pour faire plaisir à Linéa - qu'on mettait justement de la musique dans les moments ennuyeux pour ne pas que le téléspectateur ne décroche.

Elle remerciait son père de l'éducation stricte qu'il lui avait inculquée. Sans lui, elle serait comme tous ces gens qui cherchent désespérément un moyen de rendre leur vie moins fade sans comprendre que la vie est destinée à rester fade. Adèle était néanmoins déçue de ne pas avoir compris plus tôt que la vie n'avait rien de beau ni de joyeux, capable d'offrir uniquement de la cruauté.

Dans sa jeunesse, elle avait éprouvé le besoin de participer à cette quête du bonheur comme tous les autres ados avant de rentrer dans le monde des adultes. Elle avait désobéi à son père et était sortie à la découverte des plaisirs du monde. Adèle avait rencontré un garçon et était tombée enceinte. Elle ne savait pas comment cela fonctionnait, elle était jeune et c'était un sujet tabou que son père n'avait jamais abordé avec elle. Au début, elle pensait être malade. Les vomissements ne lui semblaient pas si étranges, vu sa santé fragile, et son père l'avait emmené chez le médecin. Cela avait été la honte de sa vie. Son père l'avait battue pour la première et unique fois devant le médecin, fou de rage que sa fille, si sage, avec une éducation stricte, qui ne lui avait jamais, au grand jamais causé de problèmes, commette un tel acte.

Adèle ne s'en était jamais vraiment remise, et après le sermon de son père, elle avait coupé cours à sa recherche de distractions, comprenant bien qu'elle allait devoir assumer sa bêtise pour le reste de ses jours. Son père disait que c'était une punition divine pour sa débauche, sa désobéissance et sa soumission à la tentation. Il lui avait aussi dit qu'elle avait intérêt à se remettre sur le droit chemin.

Heureusement, elle avait retrouvé le garçon et il avait accepté d'assumer ses responsabilités vis-à-vis de l'enfant. Ce garçon, c'était Aaron. Il l'avait demandé en mariage quelques jours plus tard, sans la connaître plus que ça.

Adèle avait tout sacrifié pour Linéa, mais à ce jour, elle était sa plus grande fierté. Avant le départ d'Aaron. Avant que tout ne change. Avant qu'elle ne rentre chez elle chaque soir avec la boule au ventre en espérant découvrir Aaron dans le salon.

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